Une version régionale de La Religieuse, de Diderot? La sœur Minet

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Une version régionale de La Religieuse, de Diderot? La sœur Minet
Une version régionale de La Religieuse, de Diderot? La sœur Minet, de La
Ramée, à Jauchelette !
publiée le 10 septembre 2013
An V de la République (1796). Deux romans inédits de l’encyclopédiste Denis Diderot : Jacques le
fataliste et La Religieuse sont édités pour la première fois, à Paris, par un libraire chanceux du nom de
Buisson. L’homme a choisi son moment, l’engouement révolutionnaire, pour publier ces œuvres
posthumes auxquelles une partie du public parisien va donner une portée politique et sociale. Dans La
Religieuse, œuvre achevée vers 1780, Diderot raconte l’histoire d’une jeune femme entrée dans les
ordres contre son gré et confrontée notamment à l’homosexualité ainsi qu’à la tyrannie d’une
Supérieure. La République venant de supprimer les ordres religieux et de nationaliser leurs avoirs, le
roman contribuait à la justification morale de sa politique. La Religieuse connut un succès instantané!
Durant le dernier trimestre de l’année 1796, deux autres libraires parisiens - Gueffier, jeune, et
Knapen, fils - décidèrent de se lancer dans l’aventure et éditèrent à leur tour La Religieuse. Il s’agissait
de la première réédition d’un ouvrage qui allait en connaître des centaines!
Ces deux libraires avaient parcouru la presse républicaine et, en novembre 1796, y avaient découvert
dans Le Républicain du Nord, un rapport accablant relatif à une communauté religieuse cistercienne
établie dans la région de Jodoigne, dans le ressort du nouveau département de la Dyle! Le 9 novembre
1796, dans le cadre des formalités administratives liées à la suppression de l’abbaye de La Ramée, à
Jauchelette, les autorités républicaines jodoignoises avaient découvert une religieuse vivant, attachée
comme une bête, dans une des dépendances abbatiales! Tel que présenté, l’exemple était frappant et
laissait imaginer l’action tyrannique de la Supérieure! Nous passons les détails! L’affaire était belle et
de nature à illustrer les propos romancés de Diderot! Gueffier et Knapen l’avaient compris et décidé
d’insérer le rapport des autorités républicaines dans leur édition de La Religieuse!
Ils furent apparemment les seuls à le faire et la chose se comprend aisément. Il s’avéra, en effet, après
quelques semaines, et la presse républicaine dut le reconnaître, que les faits cités dans le rapport, aux
accents sensationnels, avaient été en partie dénaturés dans le but d’accabler l’abbesse de La Ramée!
La religieuse Marie-Dieudonnée Minet, née à Limal en 1751, était victime d’une grave aliénation
mentale depuis l’année 1788. A l’époque, on gérait difficilement ces situations, à l’intérieur des
communautés religieuses comme dans le monde en général! Après que les autorités eurent expulsés de
La Ramée les religieuses qui y vivaient encore en fin d’année 1796, l’abbesse décida de soustraire la
sœur Minet. Elle la fit alors secrètement transporter à Piétrain, dans une ferme de La Ramée
récemment confisquée par la République. La religieuse y était morte le jour même de son arrivée, en
frimaire de l’an V (décembre 1796)! Quelques mois plus tard, cette ferme fut vendue par la
République. Une de ses composantes a longtemps appartenu à la famille Depauw. La ferme existe
toujours aujourd’hui, non loin de l’église de Piétrain, mais abrite désormais trois logements. Un de
ceux-ci appartient à l’historien-journaliste Eric Meeuwissen! S’il rencontre un de ces soirs le fantôme
de la recluse, qu’il nous le fasse savoir ! Elle sera peut-être de sortie lors de la Marche des Chouans, le
15 septembre !
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