Nos étapes : Aumont

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Nos étapes : Aumont
"Quand nous aurons joué nos derniers
personnages, quand nous aurons posé la cape
et le manteau, quand nous aurons jeté le masque
et le couteau, veuillez vous rappeler nos longs
pèlerinages..."(Charles Péguy)
Poussière, boue, soleil, pluie…c’est le Chemin de Saint Jacques !!!
Des milliers de pèlerins et plus d’un millier d’années.
Pèlerin, qui t’appelle ? Quelle force cachée te mène ? Tu vois tout, tu profites
de chaque instant, tu sens ton corps qui répond ou qui se plaigne…
La voix qui nous appelle, nous l’entendons au plus profond de nous-mêmes,
on ne sait pas trop comment l’expliquer.
Elle est là, seul Celui d’en haut le sait.
Il n’y a pas un chemin mais des chemins de Compostelle. La Via Podiensis
au départ du Puy-en-Velay, c’est la route la plus connue des quatre grandes
routes historiques, décrite déjà dès le XIIe siècle pour rejoindre le sanctuaire
espagnol de Saint-Jacques de Compostelle. Ici, de toute la chrétienté, les
pèlerins venaient y vénérer les reliques de l'apôtre du Christ martyrisé en 44
en Palestine, et dont le corps était miraculeusement parvenu sur cette terre
de Galice.
Nos étapes : Aumont-AubracConques
Nous avons commencé le chemin à partir du lieu où les pèlerins de l’an
dernier s’étaient arrêtés : Aumont-Aubrac. L'atmosphère est ici lumineuse et
l'on prend plaisir à cheminer dans un décor de bois de pins, de genêts, de
fougères, de ruisseaux turbulents, de pelouses aromatiques et colorées.
Les étapes de cette année nous ont fait traverser la dernière partie du massif
granitique de la Margeride en passant par les hauts plateaux de l’Aubrac à
travers les petits villages de la vallée du Lot : Nasbinals, Saint Chély
d’Aubrac, Saint-Côme-d’Olt, Estaing, Espeyrac. Pour arriver, après 6 jours
de marche, quelques ampoules, fous rires et paysages à couper le souffle, à
Conques, classé d’ailleurs « plus beaux villages de France", avec sa
magnifique cathédrale.
.
Chaque jacquet part avec ses propres motivations, ses pierres, ses questions.
C’est comme ça que notre groupe composé de 30 pèlerins (11 adultes et 17
élèves) s’est mis en route. Trouver son propre chemin est la première
étape. Avec un groupe de trente personnes, cela demande aussi de lire le
chemin AVEC les autres, pour apprendre à écouter et se laisser façonner,
par la rencontre de son prochain. On est tous en marche et il faut apprendre
à voir que dans les différences, nos cœurs peuvent se rejoindre par le désir
commun de paix, de bonheur, de découverte…et bien sûr d’aventure !
Les yeux, bien ouverts à contempler les paysages, ou plantés par terre pour
éviter les vols planés dans la boue, se rappellent de temps en temps de
suivre les signes blancs et rouges qui marquent le chemin.
« Tous les matins nous prenons le chemin, tous les matins nous allons plus
loin. Jour après jour, St Jacques nous appelle, c’est la voix de Compostelle.
Ultreïa ! Ultreïa ! Et suseia! Chemin de terre et chemin de Foi, Voie millénaire
de l’Europe, La voie lactée de Charlemagne, c’est le chemin de tous mes
jacquets. Ultreïa et suseia, l’amour est là, la paix et la lumière, l’amour, la joie,
la vie, la tolèrance… » chantons nous tous les matins et pendant la journée.
Le chemin nous fait cadeau aussi de très belles rencontres. Micheline, à la
retraite, marche pour une amie malade jusqu'à Lourdes, Fatima et puis
Compostelle ; Marcus et Andrea, couple de Suisses allemands avec qui on a
eu des beaux échanges, et des moments de simple bonheur en chantant
Ultreia. Michel qui tient un gîte « donativo » pour accueillir les pèlerins qui
veulent y rester autant qu’ils le souhaitent. Il fabrique des croix, il accueille,
il a un oratoire dans son gîte, et il nous raconte sa vie, la vie.
De temps en temps, la fatigue peut mettre à l’épreuve notre volonté, mais on
apprend à se soutenir et partager aussi les mauvais côtés du chemin. Sans
cesse il nous faut repartir, se convertir, être vrai, être prêt, et malgré les
chutes, on apprend que le chemin nous demande de le lire comme notre
propre vie. Les paysages de l’Aubrac soutiennent notre désir de vivre
pleinement sans laisser passer les belles choses autour de nous. Et peu à
peu les jeunes comme les adultes se laissent transporter dans ce chemin qui
nous interpelle par la boue, les pierres, la disparition d’un élève, (qui n’a pas
duré longtemps heureusement !), quelques entorses, la pluie mais aussi les
montagnes enneigées, les fleurs, les couleurs si variées et riches. Nous
sommes en train de parcourir une étape, celle de l’écoute du monde, de
nous-mêmes, des autres professeurs ou élèves. Quelle école de vie ce
Chemin !
Des temps forts, des pique-niques bien goûteux, des moments de prière dans
quelques églises comme celle de Saint Come d’Olt, ou dans un champ avec
les abeilles et les oiseaux, et le vent parmi les arbres qui accompagnent
notre « prise de contact ». Le soir, se retrouver devant un bon repas, tous
ensemble pour relire la journée et partager nos joies ; il faut quand même se
coucher tôt pour arriver à se réveiller et repartir. Comment ne pas parler des
petits déjeuners que nos gentils hôtes nous préparaient chaque matin : pain
frais en quantité, confitures, jus de fruits et café qui n’avait jamais eu autant
de goût que le matin avant de se remettre en marche. On fait aussi
l’expérience de la marche sous la pluie : quel bonheur les gouttes d’eau sur
le visage, et comprendre que cette douche n’est pas qu’extérieure !
Ainsi l’appel de la route qui est l’appel du Seigneur : Si quelqu'un veut venir
après moi, qu'il renonce à lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive.
(Matthieu 16, 24) nous interpelle à prendre la vie avec beaucoup de tendresse
envers nous-mêmes et nos difficultés d’amour envers les autres. Voilà le vrai
défi ; marcher au rythme des autres et voir comme en étant disponible pour
les autres et pour soi, on reçoit tellement plus que ce qu’on attendait. Le vrai
chemin est celui de l’âme. Merci à tous pour cette expérience.
Maria Sole, adjointe en pastorale scolaire
Mari
laisser au dernier jour. Pourquoi

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