CÉLÉBRATION DE LA CAPITULATION ALLEMANDE DE MAI 1945

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CÉLÉBRATION DE LA CAPITULATION ALLEMANDE DE MAI 1945
Doc. 1 CÉLÉBRATION DE LA CAPITULATION ALLEMANDE DE MAI 1945
SUR LA PLACE ROUGE (Peinture de Missin, 1949, 156 × 242 cm, Berlin,
Deutsche Historisches Museum)
Peint par Missin, en 1949, ce tableau représente l’hommage rendu à Staline par le peuple soviétique, lors de
la capitulation de l’armée allemande en mai 1945. Le défilé a lieu devant le mausolée de Lénine, sur la place
Rouge. Au balcon, on aperçoit Staline en compagnie d’un aréopage de militaires chamarrés et de dignitaires du
parti. La foule en liesse est composée d’hommes – très peu de soldats –, de femmes et d’enfants, généralement radieux,
aux tenues aussi printanières que les fleurs brandies au milieu des drapeaux et des portraits du « Petit père des
peuples ».
S’il est vrai que la scène se situe au mois de mai et peut expliquer la touche plutôt fleurie (y compris les robes
des participantes), on peut cependant s’interroger sur les épis de blé agités par la foule (ce n’est pas l’époque des
moissons), et plus généralement sur l’ambiance de prospérité qui semble régner sur la place Rouge.
Ce qui est représenté, c’est la réalité socialiste telle qu’on doit la montrer en 1949, en conformité avec les
directives officielles du « réalisme socialiste », défini par Andreï Jdanov, idéologue du stalinisme et fondateur du
Kominform. Cette doctrine esthétique, en vigueur en URSS entre 1930 et 1980, exige des artistes et des
intellectuels qu’ils représentent la réalité selon les idées marxistes. Ils doivent glorifier dans leurs œuvres la
Révolution, l’État, le Parti ou les travailleurs. Il leur est impérativement demandé de chanter les louanges de
Staline et de son régime. Cette véritable dictature intellectuelle s’accompagne d’un net renforcement du culte
de la personnalité. Elle a alors pour objectif d’asseoir l’autorité absolue de Staline dans le pays, et, relayée par le
Kominform, de contrer idéologiquement «les idées subversives de l’Occident qui affaiblissent l’esprit communiste»,
à commencer par l’Europe orientale.
Il est d’ailleurs intéressant de constater que le tableau, exposé à Berlin, est réalisé l’année où la zone d’occupation soviétique en Allemagne devient la R.D.A. Si l’on y retrouve les sujets classiques de la propagande officielle
(emblèmes et lieux symboliques du communisme, portraits de Staline…), il n’est cependant pas question de
représenter la guerre contre l’Allemagne, devenue pays frère, mais plutôt de souligner le message de paix délivré
au monde par l’URSS de Staline. En effet, à la fin des années 1940, alors que le monde se constitue en deux
blocs radicalement opposés, et après que les tensions aient tourné au bras de fer (blocus de Berlin, création de la
RFA et de la RDA), seul Staline, victorieux de tous les fascismes, peut incarner la paix. C’est le sens de cette allégorie où le défilé des soldats et des chars est alors remplacé par celui d’une foule joyeuse et pacifique.
© Nathan/Éduscope 2008 – Photocopie autorisée pour une classe seulement.