CORÉE - FRANCE - la bande dessinée en partage

Transcription

CORÉE - FRANCE - la bande dessinée en partage
CORÉE - FRANCE - la bande dessinée en partage
Extrait du ZigZag magazine
http://www.zigzag-francophonie.eu/COREE-FRANCE-la-bande-dessinee-en
CORÉE - FRANCE - la bande
dessinée en partage
- Articles sans restriction -
Date de mise en ligne : samedi 26 février 2011
ZigZag magazine
Copyright © ZigZag magazine
Page 1/4
CORÉE - FRANCE - la bande dessinée en partage
Le principal problème est que le texte initialement écrit en coréen était beaucoup plus court
en français. Votre langue demande plus de précisions, chaque bulle a été écrite, réécrite
encore et encore !
Il était une fois... une jeune dessinatrice coréenne qui travaillait pour une maison d'édition de son pays, Sai Comics.
Loin de l'univers des mangas, majoritaire, voir hégémonique, au pays du « matin calme », elle se consacrait à une
bande dessinée dite alternative. La jeune femme devait exercer ses talents de graphiste pour arrondir ses fins de
mois. Son métier n'était pas très populaire et les perspectives bouchées. Un jour, Sai Comics lui proposa de venir au
Festival International de la Bande Dessinée à Angoulême, dans le sud ouest de la France. N'écoutant que le désir
d'enrichir son expérience et de connaître autre chose de la France que la Tour Eiffel, elle fit ce voyage, les yeux et le
coeur grands ouverts ! C'était il y a quatre ans. Yoon-sun Park est toujours à Angoulême... Que les sceptiques qui
liront ces lignes et s'étonneront qu'elles commencent par « il était une fois » imaginent un instant ce que peut
représenter pour une jeune femme habitant Séoul, l'installation dans une petite ville de province française. On parle
de choc des cultures pour bien moins que cela ! Mais Yoon-sun Park se sent comme un poisson dans l'eau, ici. Un
poisson qui commence sa quatrième année en résidence artistique à la Maison des Auteurs et vient de publier son
premier album de bande dessinée « fait en France », Sous l'eau l'obscurité * !
Yoon-sun Park, à la fenêtre de la Maison des Auteurs - Angoulême Ph : ZigZagthèque
« En Corée, soit je travaillais sur commande et ne pouvais développer aucune expression personnelle, soit je
dessinais selon mes envies pour le milieu de la bande dessinée alternative mais je n'avais pas lecteurs »...
résume-t-elle la situation. « Le passage de la culture du manga qui est basée sur un grand nombre de pages et peu
de texte à une culture franco-belge où la présence du texte est primordiale est une vraie révolution. Mais pour un
Coréen, partir loin pour étudier est une chose normale alors je suis partie... » Un départ qui lui a permis d'échapper
quelque peu à une société qu'elle juge trop hiérarchisée et qui ne fait pas beaucoup de place aux femmes, aux
artistes et aux célibataires. Yoon-sun Park cumulait... cumulait l'ensemble ! « L'éloignement m'a libéré de contraintes
et aussi a libéré mon regard. Par exemple je travaille maintenant sur un album humoristique. Je ne m'étais jamais
permis l'humour en Corée ». Un humour d'autant plus risqué qu'il se moquera de la société coréenne. « Une société
de compétition, une jungle d'où mon personnage tentera d'échapper en devenant un chien... un chien policier... qui
ne rêve que de manger et dormir tout en étant fonctionnaire ! » Une idée de scénario que Yoon-sun Park a amené
dans ses valises mais qu'elle a située à Angoulême en fréquentant un café au coin de sa rue. Preuve que la Corée
et la France se distinguent par bien des points mais que finalement l'humour peut rapprocher !
Copyright © ZigZag magazine
Page 2/4
CORÉE - FRANCE - la bande dessinée en partage
Sous l'eau, l'obscurité
Au delà des questions qu'elle se pose sur la compréhension de l'humour, toujours fortement marqué par les
différences culturelles ou géographiques, Yoon-sun Park doit aussi résoudre les problèmes liés à la traduction des
dialogues. Bien que son expression française soit tout à fait convenable, elle n'est pas suffisante pour ciseler
parfaitement le dialogue de Sous l'eau, l'obscurité dont l'action se passe en Corée. « Tout a été écrit par moi en
Coréen, et traduit, avec l'aide des amis de la résidence. Le principal problème est que le texte initialement écrit, en
coréen donc, était beaucoup plus court en français. Votre langue demande plus de précisions, de concisions...
chaque bulle a été écrite, réécrite encore et encore ! » Et puis, il faut se méfier des incompréhensions dues aux
différences culturelles. « En Corée, on est habitué à trouver un supermarché et une église dans le même immeuble ;
on doit dessiner les entrées de maisons équipées d'étagères à chaussures... »
Sous l'eau, l'obscurité
Quand on demande à Yoon-sun Park si elle voit son avenir à Séoul ou sous le ciel charentais, elle ne semble pas
hésiter. La Corée lui semble bien loin... « Pour consacrer ma vie à la bande dessinée, je dois rester en France. Je vis
pour la bande dessinée pas pour mon pays. Beaucoup de Coréens viennent apprendre ici puis repartent exercer au
pays, s'attendant à être employés dans de bonnes conditions grâce à leur diplôme acquis en France, en Europe ou
aux Etats-Unis. Je ne suis pas dans cette optique. » Dans un sourire un peu gêné la jeune femme conclut : « Et puis
je ne veux pas me retrouver dans un contexte où personne ne lit mon travail ! »
Il était une fois... une jeune dessinatrice coréenne qui décida de s'installer en France. Elle dut s'habituer à deux
bizarreries d'ici : « En France, je trouve qu'on aime classer, trier, séparer... par exemple le sucré et le salé. En Corée
tout est mis sur la table, mélangé, ici on distingue, on choisit les vins avec précision, on ne mange pas salé après
Copyright © ZigZag magazine
Page 3/4
CORÉE - FRANCE - la bande dessinée en partage
avoir mangé sucré... c'est très codifié. » Quant à la seconde bizarrerie, elle n'étonne pas que les jeunes femme
coréenne : « Quand je vais dans une administration, poser une question, j'ai autant de réponses différentes que
d'interlocuteurs ! En Corée, il y a une marche à suivre... » Finalement cette bizarrerie correspond sans doute mieux
à l'esprit créatif de Yoon-sun Park et facilite sa présence ici. XiÈä ! *
* Bienvenue !
Post-scriptum :
Sous l'eau, l'obscurité
Le pari de réaliser un album culturellement métissé est assumé par la maison d'édition Sarbacane que Yoon-sun Park juge « équilibrée »... c'est
à dire « pas trop commerciale et pas trop expérimentale ».
http://www.editions-sarbacane.com/
Copyright © ZigZag magazine
Page 4/4

Documents pareils