Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien

Transcription

Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
Claude CONSTANTIN,
Daniel MORDANT
Gérard Bailloud
et le Néolithique
du Bassin parisien
Le Néolithique du Bassin parisien : c’est évidemment pour cette période et dans cette région que l’apport de Gérard Bailloud est le plus important et, l’on
peut dire, fondamental. Nous nous proposons ici de
rappeler son travail dans ce domaine dont, créant luimême groupe culturel après groupe culturel, il bâtit la
chronologie, de suivre la progression de sa pensée en
en soulignant les étapes principales, de mentionner ses
hypothèses de travail face aux insuffisances des
données ou aux incertitudes concernant les héritages
et les influences, de montrer comment il fit ensuite
déboucher ces hypothèses sur des acquis définitifs
nouveaux.
Il est clair qu’il ne saurait être question ici de rendre
compte d’une façon exhaustive d’une œuvre dont le
caractère systématique ne négligeait aucun détail. Nous
nous en tiendrons aux hypothèses et acquis principaux.
La recherche néolithique en France
avant les années cinquante
Le retard français
L’auteur du Manuel d’archéologie préhistorique,
Joseph Déchelette, devenu pendant la Première Guerre
mondiale capitaine d’une compagnie du 104e régiment
d’Infanterie territoriale, est tué à Vingré, dans l’Aisne,
le 3 octobre 1914. C’est sans doute une perte irréparable pour l’Archéologie française.
Ce sont désormais les meilleurs préhistoriens des
pays voisins, principalement l’Espagne et l’Angleterre,
qui vont, de fait, être les artisans principaux des études
concernant le Néolithique mais aussi les âges des
métaux sur le sol français. Un certain nombre de citations nous semblent ici indispensables si l’on veut
mesurer la regrettable situation de la recherche française jusque dans les années cinquante.
Bulletin de la Société préhistorique française
Il faut commencer par mentionner Raymond Vaufrey,
le rédacteur en chef de L’Anthropologie, qui, à la
lumière d’intenses et répétés contacts avec les chercheurs étrangers, proposait inlassablement de remédier
aux retards de la recherche archéologique française :
créations de chaires, recrutement de chercheurs professionnels, protection des sites, etc.
En 1946, il rapporte une conversation entre préhistoriens tenue en 1932 au 1er Congrès international des
Sciences préhistoriques et protohistoriques, à Londres :
« Dans l’état actuel des choses, les études sur le Néolithique et les âges des métaux deviendront impossibles
en Europe occidentale, parce que dans l’endroit où se
trouvent les questions à résoudre, faute des travaux
indispensables et de synthèse critique, il y a un blanc,
la France. » (Vaufrey, 1946).
En 1956, il peut encore écrire : « Au début de la
deuxième moitié du vingtième siècle il n’y a point en
France de savant qui fasse autorité en matière de Néolithique et de Préhistoire métallique par ses fouilles
passées, sa connaissance des matériaux français ainsi
que de la littérature des pays limitrophes. » (Vaufrey,
1956). Heureusement R. Vaufrey se tient au courant
des publications et, dans une note du même article, il
signale la parution d’un travail « qui sera utile à tout
le monde, français et étrangers » : l’ouvrage de
G. Bailloud et P. Mieg de Boofzheim en soulignant
encore que l’auteur principal (G. Bailloud) ne bénéficie
pas d’un poste de chercheur.
En 1952, le secrétaire général de la Société préhistorique française (Guy Gaudron, 1952) peut écrire :
« Le dernier travail sur les dieux tricéphales de l’époque
de La Tène est celui d’un américain, l’âge du Bronze
est étudié par Miss Sandars, l’époque des Champs
d’Urnes est du domaine d’un spécialiste allemand
Kimmig ».
En 1960, un important chercheur anglais écrit encore
« much French thinking about megaliths and Prehistory
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Claude CONSTANTIN, Daniel MORDANT
has not advanced since Mortillet’s time » (Daniel,
1960).
Parmi les chercheurs étrangers qui ont contribué,
jusque dans les années cinquante, à l’étude du
­Néolithique français, on citera les principaux dans une
liste loin d’être complète : P. Bosch-Gimperra, J. de
C. Serra-Rafols, S. Piggott, G. Childe, W. Kimmig,
G. Daniel, N. K. Sandars, J. Hawkes…
En France n’ont lieu que quelques fouilles d’ampleur très limitée et sont publiées quelques découvertes
que leurs auteurs ne savent placer correctement dans
un système chronologique cohérent, lequel fait complètement défaut. Les ensembles culturels néolithiques
identifiés sur le territoire se limitent à quelques sites
rattachés à la céramique rubanée par des chercheurs
allemands, suisses ou anglais, à la céramique du type
des « vases du camp de Chassey » dont l’importance
est reconnue par Déchelette et élargie géographiquement par des chercheurs anglais, au SOM défini en
1926 par Bosch-Gimperra et Serra-Rafols, à la civilisation de Peu-Richard décrite par Hawkes en 1938, au
Campaniforme décrit en 1928 par Del Castillo et à la
culture de la « ceramica impressa » définie en 1946 par
Bernabo-Brea aux Arene Candide.
La question campignienne
En 1950, Louis-René Nougier publie Les civilisations campigniennes en Europe occidentale (Nougier,
1950). Au début de la deuxième moitié du siècle, les
études néolithiques commencent mal mais, dans le vide
et le manque de cadre de cette époque, on peut
comprendre que cet ouvrage suscite intérêt et
espoirs.
C’est un travail ambitieux qui propose un schéma
unitaire de toute l’évolution néolithique puis chalcolithique. Nous en donnons ici brièvement les grandes
lignes : « Les civilisations campigniennes sont les
civilisations du pic, du tranchet et de la hache taillée
en silex ». Cette industrie est antérieure au polissage
du silex et constitue la caractéristique fondamentale de
ces civilisations. La succession chronologique est la
suivante :
- Précampignien : formé en Russie méridionale et
apparenté au Mésolithique maglemosien. Cette étape
voit l’industrie à pic et tranchet se greffer sur un
outillage mésolithique. Des stations-ateliers sont
l’œuvre de chasseurs sédentaires ;
- Campignien classique : industrie à pic et tranchet ne
connaissant pas le polissage, fabriquée par des
éleveurs et des cultivateurs vivant dans des villages
et dont la céramique est mal connue et se conserve
mal. On distingue des « faciès » d’habitation, d’exploitation (stations-ateliers), forestier (utilisant des
outils en grès) ;
- Néolithique de tradition campignienne : le Campignien est réceptif aux influences résultant des envahisseurs méditerranéens porteurs des haches en
roches dures (Cortaillod ou « Chasséen non décoré »)
et qui vont achever sa néolithisation en précipitant
Bulletin de la Société préhistorique française
la grande révolution néolithique. Les exploitations
minières de silex apparaissent, de même que le
commerce du silex. Le polissage est adopté progressivement. Il y a fusion entre le fonds campignien et
les nouvelles traditions méditerranéennes (postérieures au Cardial qui, lui, n’a aucun contact avec
les Campigniens). Il y a expansion démographique
et occupation de terres libres ;
- Chalcolithique de tradition campignienne : connaît
les premiers objets en métal acquis par troc ou
commerce. Les habitations sont circulaires et demienterrées. Le commerce du silex connaît son apogée
(le Grand Pressigny). Les céramiques les plus
diverses sont adoptées : Chasséen décoré, Horgen,
Peu-Richard. Il existe un « faciès » funéraire à sépultures mégalithiques (civilisation de Seine-OiseMarne). Le peuplement se renforce et s’étend.
Gérard Bailloud entre dans le Néolithique
Animé, comme on l’a vu précédemment (J. Courtin,
R. Joussaume et J. Chavaillon, ce volume), d’un goût
prononcé pour l’Ethnologie, l’Histoire, la Préhistoire
africaine et aussi l’Art rupestre qu’il continua à explorer
au Tchad et en Éthiopie, Gérard Bailloud se tourne
principalement vers le Néolithique français. Écoutonsle (Bailloud, 1970a) : « ce n’est que vers 1948-49 que
se précisa ma vocation de néolithicien, à la suite de
ma participation à plusieurs fouilles consacrées à des
périodes récentes de la Préhistoire : station littorale
d’Auvernier en Suisse et grotte de Saint-Romain en
Côte-d’Or avec A. Leroi-Gourhan, habitat danubien
d’Armeau dans l’Yonne avec B. Champault. Ces fouilles
m’ont à la fois donné un goût profond pour l’étude de
la céramique et montré à quel point, à cette époque,
celle-ci était négligée et retardataire dans la recherche
préhistorique française – y compris dans les études
concernant le Néolithique ».
À ces raisons, on peut sans doute ajouter que ce qui
se passe dans le sud de la France autour de Jean Arnal
a pu consolider raisonnablement les espoirs de
progresser et constituer un encouragement ; en effet,
les préoccupations méthodologiques de Jean Arnal –
désir de structurer le Néolithique français, intérêt
accordé à la céramique et aux stratigraphies – ne
peuvent être que partagées (Arnal et Bénazet, 1951 ;
Arnal, 1953 et 1955). En 1950, Jean Arnal a déjà publié
plus de 30 articles. Toujours bon observateur, Raymond
Vaufrey (1953) ne s’y trompe pas : « Pour le Néolithique, il y a des signes d’une renaissance provinciale
des études dont le docteur Arnal a été l’initiateur ». À
cette renaissance ajoutons encore le rôle de Raymond
Riquet (Riquet, 1953) qui dresse un premier bilan du
Néolithique du Centre-Ouest (Bassin de la Charente et
de la Vienne).
Avant de rentrer au CNRS en 1956, Gérard Bailloud
occupe pendant 14 ans un emploi à la photothèque du
musée de l’Homme. Voici comment il décrit une de ces
activités dans cette institution (Bailloud, 1970a) :
« Durant ce temps je n’ai cessé d’accroître mes connaissances en Préhistoire en lisant tout ce qui concernait
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Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
cette discipline dans les importantes collections
d’ouvrages et de périodiques de la bibliothèque du
musée de l’Homme ». Pour qui a connu Gérard Bailloud
et a pu mesurer l’usage strict qu’il faisait des mots dans
ses propos, à la fois si denses et éliminant soigneusement toute locution inutile, il faut le prendre à la lettre :
il a tout lu. Il connaît toutes les découvertes faites sur
le sol français, qu’il va pouvoir rassembler et classer ;
il connaît toute la littérature étrangère des pays limitrophes (en témoignent les comptes rendus de lecture
qu’il faisait dans L’Anthropologie) qui va lui permettre
d’établir les liens qui existent entre le Néolithique
français et celui des pays voisins. Il est prêt.
L’émergence du sauvetage bénévole
Le développement des travaux d’infrastructure et
d’habitation provoque dans les années cinquante et
soixante un accroissement important des exploitations
de graviers dans les zones alluviales des vallées du
Bassin parisien. Un certain nombre de pionniers du
sauvetage, la plupart bénévoles, vont dans ces années
assurer autant de surveillance et de fouilles qu’ils le
peuvent. Dans la vallée de l’Yonne et de la Seine,
Bernard Champault est à l’œuvre dès 1946, Pierre
Parruzot dès 1955, Henri Carré en 1958, Claude et
Daniel Mordant en 1964 (fig. 1) ; dans la vallée de
l’Oise, Jean-Claude Blanchet fait de même à partir de
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1967, ainsi que Michel Boureux dès 1966 dans la
vallée de l’Aisne. Ils ne sont pas les seuls et cette
énumération est bien sûr très incomplète. Écoutons
Gérard Bailloud (1970b) rendre compte de leur travail :
« Un seul élément positif, dans un tel contexte, permet
d’éviter que les choses ne tournent au désastre : le
dévouement de petits groupes d’amateurs, demeurant
sur place ou y possédant des racines encore fraîches,
qui en surveillant inlassablement les carrières en
exploitation, en s’enquérant des projets d’extension de
celles-ci, et en assurant dans des circonstances généralement difficiles la part essentielle des fouilles de
sauvetage nécessitées par les circonstances, sauvent
une partie au moins de ce que sans eux serait irrémédiablement perdu. »
Bientôt ces chercheurs bénévoles vont s’organiser
en associations régionales comme le Cercle archéologique de Bray-sur-Seine ou le Centre de recherche
archéologique de la Moyenne vallée de l’Oise.
Une double dynamique est dès lors enclenchée. À
l’aide des premières publications de Gérard Bailloud,
les chercheurs locaux peuvent mieux comprendre ce
qu’apportent leurs découvertes, en les situant dans un
cadre culturel qui commence à se construire. Leur
intérêt en est dynamisé. D’autre part, et en retour, leurs
découvertes permettent à Gérard Bailloud de compléter
son bilan des cultures connues et de saisir des
nouveautés culturelles qui ne tiennent parfois qu’à
quelques tessons. Ajoutons à l’intérêt qu’il porte à ce
qui se passe sur le terrain, une volontaire et infatigable
activité de recherche des collections privées et
d’examen de tout le matériel inédit qui existe dans les
musées, dont il va tirer tout le profit possible.
L’œuvre de Gérard Bailloud
en Bassin parisien
Pour plus de clarté nous donnerons ici, et en plus
de la bibliographie figurant à la fin de cette contribution, les références de l’ensemble des ouvrages et
articles spécifiques de Gérard Bailloud concernant le
Bassin parisien. Ces contributions sont d’ampleur
diverse tant sur le plan chronologique (limitées par
exemple au Néolithique ancien) que régional (limitées
par exemple à la Picardie).
BAILLOUD G., MIEG DE BOOFZHEIM P. (1955) – Les civilisations
néolithiques de la France dans leur contexte européen, Paris, Picard,
244 p.
ARNAL J., BAILLOUD G., RIQUET R. (1960) – Les styles céramiques
du Néolithique français, Préhistoire, 14, 211 p.
BAILLOUD G. (1961) – Les civilisations énéolithiques de la France, in
Actes du colloque L’Europe à la fin de l’âge de Pierre, Prague-LibliceBrno, 5-12 oct. 1959, Prague Éditions de l’Académie tchécoslovaque
des sciences, p. 493-508.
BAILLOUD G. (1964) – Le Néolithique dans le Bassin parisien, Paris,
CNRS Éditions (Gallia Préhistoire, Supplément 2), 344 p.
Fig. 1 – La sépulture collective I de Marolles-sur-Seine en 1965 (fouille
et cliché Cl. et D. Mordant).
Fig. 1 – Collective burial I, Marolles-sur-Seine, in 1965 (excavation and
photo Cl. and D. Mordant).
Bulletin de la Société préhistorique française
BAILLOUD G. (1971) – Le Néolithique danubien et le Chasséen dans
le Nord et le Centre de la France, in Les débuts du Néolithique de
l’Orient à l’Europe du Nord, Cologne, vol. 6 (Fundamenta, série A,
vol. 3, t. 6), p. 201-245.
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Claude CONSTANTIN, Daniel MORDANT
BAILLOUD G. (1974) – Le Néolithique dans le Bassin parisien, mise
à jour 1972, Paris, CNRS Éditions (Gallia Préhistoire, Supplément
2), p. 388-429.
BAILLOUD G. (1976a) – Le Néolithique en Picardie, Revue archéologique de l’Oise, 7, p. 10-28.
BAILLOUD G. (1976b) – Les civilisations néolithiques du Bassin
parisien et du Nord de la France, La Préhistoire française, Paris,
CNRS, t. 2, p. 375-386.
BAILLOUD G. (1976c) – Les civilisations néolithiques de la Champagne, La Préhistoire française, Paris, CNRS, t. 2, p. 415-421.
BAILLOUD G. (1982) – Vue d’ensemble sur le Néolithique de la Picardie, Revue archéologique de Picardie, 4, p. 5-35.
BAILLOUD G. (1983) – Progrès récents dans la connaissance du Néolithique ancien dans le Bassin parisien, in Actes du colloque de Gand
(1982), Dissertationes Archaeologicae Gandenses, 21, p. 9-16.
BAILLOUD G. (1985) – Le Néolithique et le Chalcolithique en France,
in J. Lichardus, M. Lichardus-Itten, G. Bailloud, J. Cauvin, La Protohistoire de l’Europe, Paris, PUF (Nouvelle Clio, 1 bis), p. 516568.
BAILLOUD G. (1997) – Introduction, in Cl. Constantin, D. Mordant,
D. Simonin dir., La culture de Cerny, Nouvelle économie, nouvelle
société au Néolithique, Actes du colloque international de Nemours,
mai 1994, Nemours, APRAIF (Mémoires du musée de Préhistoire
d’Île de France, 6), p. 19-22.
NB : ces références sont utilisées dans le texte qui suit avec la seule
mention de l’année entre parenthèses.
Avant d’aborder, période par période, le travail de
Gérard Bailloud, il nous faut remarquer son approche
d’emblée posée en terme de « groupes culturels » (ou
cultures). Pour chaque ensemble, il examine systématiquement les données spécifiques à ce groupe concernant l’implantation dans le paysage, l’habitat, les
industries lithiques et osseuses, la parure, les sépultures
et particulièrement la céramique dont il souligne le
grand rôle de « technique-témoin » pour toute classification culturelle. Suivent ensuite les hypothèses et une
discussion sur les origines, les influences, les héritages.
On doit encore souligner combien aucun des détails
qui peut apporter quelque chose n’est négligé pour
caractériser de la façon la plus complète possible
chaque groupe culturel : méthode de taille, description
de tous les types d’outils, détails sur les pratiques
funéraires, etc. Rien n’est négligé, ni oublié dans ses
tableaux systématiques.
Enfin, s’il fallait classer par importance les contributions de la liste ci-dessus, on pourrait dire qu’après
les deux contributions générales au niveau national que
sont Bailloud et Mieg de Boofzheim, 1955 et Arnal,
Bailloud, Riquet, 1960, Le Néolithique dans le Bassin
parisien (1964) est, pour cette région, l’ouvrage fondamental et fondateur (fig. 2).
Le règlement de la question campignienne
Dans Bailloud et Mieg de Boofzheim (1955), le
Campignien est discuté sans conclusion claire hormis
celle-ci : « Ces traditions campigniennes sont essentiellement d’ordre lithique. »
Bulletin de la Société préhistorique française
Dans Bailloud (1964), 3 pages sur 394, soit la moitié
du court chapitre d’introduction, sont consacrées au
Campignien, avec cette note « On ne trouvera pas [ici]
de paragraphe consacré au Campignien ou à des civilisations campigniennes ». Les critiques adressées à la
construction de L.-R. Nougier sont les suivantes :
- la plupart des matériaux utilisés proviennent de
récoltes de sites de surface non stratifiés et leur
classement typologique est effectué sans se soucier
de leur homogénéité culturelle ;
- les habitats du Campignien classique sont en grande
partie des ateliers de taille. Ils ne sont pas datables,
car non fouillés ou insuffisamment publiés ;
- la conception même du Campignien classique, utilisant couramment la hache mais ignorant le polissage,
est un mythe sans aucun fondement. La hache taillée
n’est pas un outil en soi mais est destinée à être
polie ;
- il n’existe pas de civilisation campignienne à
économie néolithique. On ne trouve pas un seul outil
en os, un seul objet de parure, une seule sépulture
au milieu des milliers de pièces en silex du Campignien classique ;
- le Néolithique à céramique rubanée suit stratigraphiquement un Mésolithique microlithique de type
sauveterrien ou tardenoisien, et il n’existe pas de
stratigraphie convaincante qui montrerait l’existence
d’industries à pic et tranchet d’âge mésolithique ;
- si l’outillage à pic ou à tranchet peut avoir son
origine dans le Mésolithique forestier de l’Europe
du Nord, le problème qui reste à résoudre est celui
des chaînons manquants entre ce Mésolithique et les
industries de groupes néolithiques qui ont un caractère campignien (le Chasséen).
Fig. 2 – Le Néolithique dans le Bassin parisien, seconde édition (réimpression, 1979), avec couverture illustrée représentant un « bas-relief
sculpté dans la craie sur une paroi de l’hypogée à Razet-Coizard (Marne) ».
Fig. 2 – Le Néolithique dans le Bassin parisien [The Neolithic in the
Paris Basin], second edition (reprint 1979), with illustrated cover depicting a « bas-relief carved in the chalk of a wall of the hypogeum at RazetCoizard (Marne) ».
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Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
Dès 1956, Claude Burnez (Burnez, 1956) a, lui
aussi, argumenté à l’encontre de L.-R. Nougier, à
partir des interprétations de ce dernier d’un ensemble
qu’il connaît lui-même très bien : le Peu-Richard. Il
critique les lacunes bibliographiques de l’auteur, son
ignorance d’importantes collections de musées et
indique que le Peu-Richard n’est ni chalcolithique
(absence de métal) ni campignien par son industrie
lithique. Il ajoute que, dans la plupart des pays d’Europe, les haches polies en roche dure ont été utilisées
avant les haches en silex et non pas après, et ne cache
pas son manque d’enthousiasme : « Les incessantes
confusions du professeur L.-R. Nougier décourageront
certainement la plupart des efforts de compréhension
de ceux qui accordent quelque crédit à la pensée
universitaire. »
À partir du milieu des années soixante, il ne sera
plus question des civilisations campigniennes, sauf
comme qualificatif adéquat, quoique de moins en
moins utilisé, des industries lithiques à partir du Néolithique moyen.
Le Rubané récent dans le Bassin parisien
(RRBP)
Dans les paragraphes suivants les appels bibliographiques renverront à la liste des treize articles ou
ouvrages donnée plus haut et, pour chaque ensemble
culturel, l’exposé respectera l’ordre des rubriques
utilisé par Gérard Bailloud : nombre de sites, habitat,
sépultures, industrie lithique, etc.
Reprenant la liste des sites déjà signalés par différents auteurs, Gérard Bailloud (1964) cite six chercheurs étrangers pour un seul français, ce qui reflète
bien la situation de la recherche française avant son
propre travail. Quarante sites sont attribués au Rubané
(1964) puis vingt-trois nouveaux (1974) dont un certain
nombre est à classer ultérieurement dans le groupe de
Villeneuve-Saint-Germain (VSG), encore méconnu.
L’habitat occupe les sols légers et la basse terrasse
non inondable située sur les substrats de sables et
graviers dans les vallées et, parfois, des bords des
plateaux limoneux. Hormis les fossés qui les longent,
les plans des bâtiments sur poteaux sont encore
méconnus en 1964, mais connus en 1972. Ils sont
clairement rubanés, identiques à ceux de la vallée du
Rhin. De longueurs variables, ils sont rectangulaires
et parfois légèrement trapézoïdaux. Leur orientation
est standardisée (O-NO/S-SE) et ils sont regroupés en
petits villages. Il existe des enceintes à fossés (1982).
Les inhumations, surtout en position repliée, le corps
couché sur le côté gauche, peuvent être ocrées. Elles
sont isolées ou regroupées en petits cimetières. Leur
mobilier est variable en quantité et en nature, parfois
absent. La parure y est assez courante et, vu son abondance dans quelques tombes de femmes, on peut se
poser la question de savoir si ces dernières occupent
un rang social hors du commun (1974).
Bulletin de la Société préhistorique française
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L’industrie lithique est principalement sur lame. La
technique du microburin est utilisée pour fragmenter
les lames. L’outillage est globalement semblable à celui
du Rubané du Rhin. Les armatures de flèches sont pour
la plupart perçantes et de rares armatures tranchantes
témoignent d’un début de différenciation locale en
Bassin parisien (1964). La technique du microburin et
certaines armatures de flèches perçantes à retouches
plates inverses sont également communes au Tardenoisien. Il peut y avoir contemporanéité partielle entre
Rubané et Tardenoisien mais, pour les armatures, on
ne peut savoir qui a emprunté à qui, bien que l’emprunt
par les Rubanés au Tardenoisien soit plus vraisemblable puisque ce phénomène ne concerne que l’ouest
du Rhin (1971). Les herminettes en roche tenace sont
rares, témoignant de l’éloignement des sources de
matières premières. Meules et polissoirs à rainures en
grès sont communs.
Il y a deux catégories de vases montés tous deux au
colombin : des grand vases (céramique grossière),
comportant éventuellement un décor plastique, et une
céramique fine décorée. Les préhensions sont à symétrie ternaire.
Contrairement à ce que l’on trouve dans le Rubané
rhénan, les décors de la céramique fine ne sont jamais
curvilignes et ne comportent pas de rubans remplis
d’impressions (1971). Les chevrons sont souvent
réalisés par incision. Les décors au peigne utilisé
souvent en technique pivotante sont nombreux et organisés en T (une bande sous le bord et des bandes
verticales). Pour l’origine du peigne, il faut penser
plutôt au Rubané du Rhin qu’à la région méditerranéenne qu’un hiatus géographique sépare du Bassin
parisien (1974, 1985) – cependant, bien que mal assuré,
on ne peut rejeter la possibilité d’un contact (vase de
Lazicourt ; Bailloud, 1983) – le décor en T peut résulter
de la réduction des décors au ruban sous le bord et au
décor secondaire (bandes verticales) des décors rubanés
rhénans plus complexes (1983).
La documentation céramique des villages à longue
occupation permet d’entrevoir une évolution typologique des décors, de même que sont probables des
différences régionales entre les vallées de l’Aisne et
de l’Yonne correspondant à des faciès géographiques
(1974).
La parure est abondante dans les tombes et constituée de perles discoïdes ou carrées, de perles tubulaires,
de pendentifs et d’anneaux réalisés, pour ces trois
derniers, en coquille de spondyle.
Les anneaux en schiste sont attribués au Rubané
(avant l’identification du groupe de VSG), mais Gérard
Bailloud penche déjà pour une signification tardive
(1964).
Il s’agit d’une société d’agriculteurs-éleveurs dans
laquelle la chasse joue un rôle secondaire. Des échanges
à grande distance portent sur les spondyles et les roches
dures pour herminettes.
La société semble peu différenciée socialement, au
vu des faibles différences dans le contenu des tombes,
et ne semble pas connaître de conflit (1964).
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Claude CONSTANTIN, Daniel MORDANT
On ne peut envisager un passage progressif entre
cultures indigènes mésolithiques et Rubané (du Bassin
parisien), mais on doit constater un net saut évolutif
(1971). Seul l’emploi de la technique du microburin
peut faire penser à un contact (1971) et, s’il y a acculturation de populations indigènes, il ne s’agit que d’un
phénomène secondaire (1976a) ; cette acculturation ou
fusion aura lieu au Néolithique moyen (1971).
Le Rubané du Bassin parisien se rattache totalement
au Rubané du Rhin et d’Europe centrale par son architecture, son rite funéraire, son industrie lithique, sa
parure… (1964, 1971, 1974). Il arrive comme un bloc
dont tous les éléments sont intrusifs. Il s’agit d’une
colonisation, d’une immigration d’origine rhénane
(1964, 1976).
Le Rubané du Bassin parisien se rattache à la phase
récente du Rubané rhénan, plus précisément au groupe
de Plaidt du Rhin moyen, et aucunement au Rubané
de Belgique (1964). Il pénètre en Bassin parisien par
la Moselle (1971). Le rôle de l’Alsace ne peut être
rejeté (1971) et doit même être envisagé, quoique de
moindre importance que celui de la Moselle (1982).
Le Rubané atteint la Champagne avant l’apparition
du RRBP. Il a son origine en Alsace, dans le Haut-Rhin
(1985). Il y a évolution sur place des Rubanés de
Champagne aux Rubanés du Bassin parisien sans qu’il
soit nécessaire d’envisager une succession d’arrivées
orientales (1983).
qui ne permet donc pas de rejeter une autre interprétation : le caractère rubané d’un type céramique à
fonction particulière –.
Le groupe de Villeneuve-Saint-Germain
On peut considérer que la première reconnaissance
de l’existence de cette culture est effectuée par Gérard
Bailloud par la création du groupe de Marcilly (1971 ;
fig. 3) – le matériel ramassé en surface sur le territoire
de deux villages voisins du bassin de la Loire moyenne
comprend un matériel lithique de tradition rubanée,
des anneaux en schiste (dont Gérard Bailloud avait déjà
souligné le caractère tardif vis-à-vis du Rubané en
1964), des vases comportant des décors en arêtes de
poisson, des décors modelés, des boutons au repoussé
(1971).
En 1976, Gérard Bailloud (1976a) rapproche ce
matériel de rares objets de plusieurs sites du Bassin
parisien et, en réaffirmant son caractère danubien, il le
place postérieurement à la phase de colonisation
rubanée.
Entre 1970 et 1972, Claude et Daniel Mordant
(Mordant et Mordant, 1977) découvrent, dans la bassevallée de l’Yonne, le site de Misy-sur-Yonne au matériel similaire, avec décors au peigne, qu’ils attribuent
à un groupe post-rubané.
La céramique du Limbourg
En 1974, à partir de découvertes effectuées dans la
vallée de l’Aisne, et principalement à Cuiry-les-Chaudardes, Bohumil Soudsky crée la culture de l’Aisne et
la culture de Beaurieux. Elles sont définies essentiellement par des tessons à décor tout à fait non rubanés,
découverts dans des fosses rubanées, et interprétées
comme les étapes terminales du Rubané du Bassin
parisien, marquées déjà par des influences de la culture
de Roessen.
Gérard Bailloud prend acte de cette construction en
remarquant cependant qu’il n’est peut-être pas nécessaire de créer deux entités distinctes, Aisne et Beaurieux
(1976a et b). En 1978, l’un d’entre nous (Constantin,
1978) identifie les vases de ces deux cultures comme
appartenant à la céramique du Limbourg, déjà bien
connue en Allemagne et aux Pays-Bas, où des vases
Limbourg, particuliers par leurs décors, leurs formes,
leur technique de fabrication, apparaissent régulièrement en contexte rubané. Ce qui conduit à l’abandon
des cultures de l’Aisne et de Beaurieux.
Gérard Bailloud approuve cette position. Il remarque
que formes et décors évoquent la vannerie et que la
répartition nord-sud de la céramique du Limbourg, sur
la frange la plus occidentale du monde rubané, permet
d’envisager l’existence d’un groupe humain autonome
et non danubien (1982), en voie de néolithisation ou
déjà néolithisé (1983), position sur laquelle il devient
plus circonspect en indiquant que la présence d’une
culture indigène non danubienne, encore en voie de
néolithisation, reste des plus conjecturales (1985) – ce
Bulletin de la Société préhistorique française
Fig. 3 – « Néolithique de tradition danubienne du bassin de la Loire, Les
Marais, Marcilly, Loir-et-Cher » (Bailloud, 1971).
Fig. 3 – « Néolithique de tradition danubienne du bassin de la Loire
[Danubian tradition Neolithic in the Loire Basin], Les Marais, Marcilly,
Loir-et-Cher » (Bailloud, 1971).
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
En 1980, à la lumière des fouilles effectuées à Villeneuve-Saint-Germain (Aisne) et en Hainaut belge où
un important matériel du groupe de Blicquy constitue
une référence, l’un d’entre nous (Constantin et
Demoule, 1982 ; Constantin, 1983) crée le groupe de
VSG. Le site éponyme a le mérite de livrer des bâtiments de type rubané, ce qui fournit un argument
supplémentaire pour affirmer le caractère danubien de
ce groupe qui comporte alors 27 sites.
Gérard Bailloud indique que les traditions décoratives de ce groupe proviennent à la fois du Rubané et
de la céramique du Limbourg (1982, 1985).
L’imbrication des sites VSG et rubanés dans les
mêmes aires lui font considérer le diachronisme
comme vraisemblable (1982, 1983), le VSG étant au
moins en partie postérieur au Rubané (1985). Il considère ce groupe comme danubien par son ascendance
rubanée, visible dans l’implantation des sites, l’habitat, le rite funéraire, le matériel lithique, la céramique (1983).
Au vu de l’absence d’influence du Rubané de
Belgique (Omalien), il faut placer l’origine du Villeneuve-Saint-Germain-Blicquy dans le Bassin parisien
(1982). Le décor plastique en cordons, qui a des similitudes dans le groupe d’Augy-Sainte-Pallaye, est nettement plus abondant dans l’aire sud du VSG, et on ne
peut éliminer une influence méditerranéenne (1983).
L’affinement des données chronologiques est un préalable indispensable pour mesurer, en dehors de la part
rubanée, la présence de composantes indigènes ou
méridionales (1985).
511
Fig. 4 – Céramique décorée du groupe d’Augy-Sainte-Pallaye (Bailloud,
1964, fig. 29).
Fig. 4 – Decorated pottery of the Augy-Sainte-Pallaye group (Bailloud,
1964, fig. 29).
Le groupe d’Augy-Sainte-Pallaye
La culture de Cerny
Gérard Bailloud remarque l’originalité du matériel
des deux sites éponymes dès 1958 (Bailloud, 1958) et
crée le groupe en 1964, à partir de cinq sites de la
région Seine-et-Marne-Yonne-Aube.
Les sites sont installés en fond de vallée ; les habitations danubiennes sur poteaux sont trapézoïdales. Il
existe des foyers à galets brûlés. Le matériel lithique
comporte des tranchets et des armatures de flèches
tranchantes. Les caractéristiques principales de la céramique (fig. 4) sont : bords aplatis renforcés par un
cordon horizontal, mamelons dépassant le bord,
cordons lisses horizontaux, verticaux et obliques attachés aux anses, boutons au repoussé. Il s’agit d’un
groupe du Néolithique moyen, de tradition danubienne
et pouvant avoir subi une influence chasséenne. Il est
difficile de préciser sa position chronologique exacte
(1964). Ce groupe est ensuite étendu à la Bourgogne.
Certains caractères de la céramique sont communs avec
ceux du groupe de Cerny, notamment les boutons au
repoussé. Il s’agit d’un groupe danubien qui s’est
différencié sur place et est probablement antérieur au
groupe de Cerny (1976a) ; l’industrie lithique est de
type campignien et peut refléter l’absorption progressive de populations mésolithiques indigènes (1976b).
On ne peut exclure la présence d’une composante
méridionale : les cordons rappellent l’épicardial du
bassin inférieur du Rhône (1985).
Le groupe est créé à partir du matériel de huit sites
qui occupent souvent des plateaux, ce qui est une
nouveauté par rapport aux périodes précédentes. L’industrie lithique, très majoritairement sur éclats,
comporte des pics, des tranchets qui remplacent les
herminettes et des armatures à flèches uniquement
tranchantes. La céramique, très caractéristique,
comporte de nombreuses écuelles hémisphériques et
des plats à pain. Le décor, peu structuré, occupe une
grande partie de la surface des vases (fig. 5). Il est
réalisé à l’aide de peignes, de poinçons de formes
variables et par la technique du bouton au repoussé.
Par sa poterie, ce groupe peut être considéré comme
un descendant du Rubané. Il est, en Bassin parisien,
stratigraphiquement antérieur au Chasséen et entretient
des contacts avec le Mésolithique forestier de l’Europe
du Nord campignienne, avec le Roessen, par l’emploi
des poinçons pour décorer la céramique, et avec le
Chasséen, par les boutons au repoussé et les plats à
pain (1964).
En 1971, le groupe auquel se rattachent désormais
vingt-cinq sites devient la culture de Cerny qui s’étend
au nord de la France, à la Loire moyenne, à la Bretagne
et présente des similitudes avec un site de l’île anglonormande de Jersey. Étant donné leur abondance dans
la culture de Cerny et dans d’autres groupes du nord
de la France (groupes d’Augy-Sainte-Pallaye et de
Bulletin de la Société préhistorique française
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
512
Claude CONSTANTIN, Daniel MORDANT
Fig. 6 – Manuscrit de l’introduction de Gérard Bailloud au Colloque de
Nemours sur le Cerny (mai 1994), publiée dans les actes en 1997.
Fig. 6 – Manuscript of Gérard Bailloud’s introduction to the Nemours
symposium on the Cerny culture (May 1994), published in the Acts,
1997.
Fig. 5 – Céramique décorée du groupe de Cerny (Bailloud, 1964, fig.
16).
Fig. 5 – Decorated pottery of the Cerny group (Bailloud, 1964, fig.
16).
Menneville), il n’est pas certain que les boutons au
repoussé soient un héritage chasséen. On peut émettre
les hypothèses suivantes sur la formation du Cerny :
ou bien il s’agit d’un emprunt de la céramique rubanée
par des indigènes campigniens, ou bien il s’agit de
descendants des Rubanés ayant opéré une reconversion
complète de leur outillage lithique pour l’adapter à la
mise en culture d’environnements plus variés et moins
propices.
Il s’agit probablement d’un processus d’assimilation
et de métissage entre indigènes et danubiens, d’un
double processus d’adaptation au milieu local des
immigrants rubanés et d’acculturation de populations
indigènes non encore néolithisées (1971, 1974).
Certains habitats sont entourés d’un fossé. Les
premières tombes connues sont des inhumations surtout
en position allongée. Au vu de la céramique, cette
culture peut être fractionnée en groupes à valeur régionale ou chronologique (1974).
Les premières exploitations minières du silex apparaissent (1982). Le porc et la faune sauvage jouent un
rôle plus important que dans les périodes antérieures
(1985).
La dernière intervention de Gérard Bailloud (1997)
sur le Cerny a été faite en 1994 lors du congrès consacré
à cette culture (fig. 6). De nombreuses découvertes
effectuées depuis dix ans apportent d’importantes
nouveautés. L’existence de groupes régionaux ou chronologiques se confirme. La totalité du territoire est
occupée. Les connaissances sur les sépultures ont
Bulletin de la Société préhistorique française
beaucoup progressé : les inhumations allongées se
trouvent dans des tombes individuelles, des sépultures
sous dalles, des coffres et dans des nécropoles monumentales à longs enclos funéraires qui participent d’un
phénomène pan-culturel à l’échelle européenne ; l’existence de différences sociales n’est pas encore assurée
malgré la richesse de quelques tombes.
La présence de nombreuses armatures de flèches
dans les tombes et certaines enceintes traduit peut-être
l’existence de problèmes de sécurité.
La céramique de la culture de Cerny s’enracine dans
celle du groupe de VSG.
Sur la formation de la culture de Cerny, Gérard
Bailloud s’en tient à celle-ci de ses hypothèses précédentes : cette culture correspond à une nouvelle adaptation de la population néolithique à l’exploitation de
milieux diversifiés plutôt qu’à une origine mésolithique
(1997). Les points communs avec la culture de
Chambon sont soulignés ; enfin, il fait part de ses
doutes sur l’attribution au Cerny de la maison danubienne de Marolles-sur-Seine, hypothèse qu’il avait
formulé précédemment (1971, 1974), mais à laquelle
des observations stratigraphiques effectuées dans les
fosses qui la longent sont peu favorables (1997).
À cette date, les structures d’habitat de la culture de
Cerny restaient encore méconnues.
Les éléments roessen
dont le type de Menneville
Dès 1959, Gérard Bailloud (1959) reconnaît l’existence d’éléments roesseniens en Bassin parisien.
Il s’agit du type de Menneville (1964) dont la céramique est décorée de boutons au repoussé et de rubans
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
513
Le Chasséen et le Michelsberg
Suivant une démarche maintes fois rappelée, Gérard
Bailloud a abordé la question des groupes culturels
propres à la France, puis au Bassin parisien, en envisageant la question d’abord d’un point de vue général,
dans l’ouvrage de 1955, dont le titre porte bien la
mention « … dans leur contexte européen », pour
ensuite revenir sur le sujet dans un cadre particulier,
celui de sa thèse centrée sur le Bassin parisien et parue
en 1964. Ainsi, dans les Civilisations occidentales non
mégalithiques (Bailloud, Mieg de Boofzheim, 1955,
p. 86), distinguées des Civilisations danubiennes d’une
part, et de celles de la Méditerranée occidentale d’autre
part, les auteurs regroupent, selon « une conception qui
ne s’est faite jour que depuis peu parmi les préhistoriens », divers stations suisses du type de Cortaillod,
de l’est et du midi de la France du type de Chassey et
des stations du nord-ouest de l’Italie du type de La
Lagozza. Ils proposent donc la création du groupe de
Cortaillod-Chassey-Lagozza (fig. 8), largement représenté sur le territoire national, tout en s’interrogeant
Fig. 7– Céramique décorée du type de Menneville (Bailloud, 1964, fig. 26).
Fig. 7– Decorated pottery of the Menneville type (Bailloud, 1964, fig. 26).
quadrillés (fig. 7) qui sont rapprochés du groupe alsacien d’Entzheim. Cette présence d’origine alsacienne
fut confirmée en 1978 par la fouille du site de Berryau-Bac (Aisne) qui livra des bâtiments et un fossé
recoupant lui-même des fosses de la culture de
Cerny.
De même, il signale la présence d’autres éléments
roesseniens, épars dans l’est du Bassin parisien (1964,
1974), et de tessons post-roesseniens, mêlés à du matériel chasséen dans l’Oise (1982).
Globalement, G. Bailloud considère qu’on doit
envisager la migration en Bassin parisien de populations roesseniennes et post-roesseniennes peu
nombreuses et d’origine rhénane, au moment du
passage de la culture de Cerny au Chasséen septentrional (1982).
La culture de Chambon
Gérard Bailloud (1971) définit cette civilisation
autonome à partir de deux sites du bassin de la Loire
moyenne. On connaît alors des tombes en cistes et
quelques vases dont certains portent des cordons partant
de la base des anses, dont il faut peut-être chercher
l’origine dans le domaine cardial. On perçoit dans cette
civilisation l’ultime écho du Néolithique danubien mêlé
à des éléments autres (1971). Les affinités avec le
groupe de Montbollo sont précisées en même temps
que des points communs avec le groupe d’AugySainte-Pallaye et la culture de Cerny (1985).
Bulletin de la Société préhistorique française
Fig. 8 – « Groupe de Cortaillod-Chassey-Lagozza : extension géographique et structure » (Bailloud et Mieg de Boofzheim, 1955, pl. XLVI).
Fig. 8 – « The Cortaillod-Chassey-Lagozza group: geographical spread
and structure » (Bailloud & Mieg de Boofzheim, 1955, pl. XLVI).
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
514
sur sa structure exacte : la prudence les guidant, ils
examinent dans un premier temps les différents faciès
en tant que groupes géographiques pour ensuite
esquisser de possibles relations chronologiques. Sont
successivement analysés le faciès de Cortaillod, de La
Lagozza puis de Chassey, auxquels sont adjoints deux
autres faciès qualifiés de locaux, le faciès salinois,
centré sur le Jura et le Doubs, et le Chasséen du Bassin
parisien, d’emblée distingué du faciès de Chassey,
notamment par son industrie lithique de tradition
campignienne. Viennent ensuite le Néolithique de
l’ouest, issu principalement de sépultures et couvrant
une longue période chronologique, le groupe de Windmill-Hill d’Angleterre, le groupe de Michelsberg qui
comprend « un nombre important de stations, tant
terrestres que lacustres, réparties entre le nord de la
Suisse et la Belgique » (op. cit., p. 120), et enfin le
groupe de Horgen centré sur le plateau suisse, superposé en stratigraphie au Cortaillod et au Michelsberg.
Précisons que toutes ces entités culturelles font l’objet
d’une analyse systématique, selon la déclinaison
suivante : industrie lithique ; céramique ; os et corne ;
bois, tissus et vanneries (selon les cas) ; parures ; habitats ; genre de vie ; sépultures ; origine et extension
géographique ; relation chronologique. Pour terminer,
sont envisagés le Chalcolithique et la diffusion des
mégalithes, avec, dans la zone centrale qui nous intéresse ici, le groupe Seine-Oise-Marne (Bosch-Gimperra,
Serra-Rafols, 1926) qui occupe le centre du Bassin
parisien et que nous analyserons plus loin, et des entités
périphériques individualisées en Loire moyenne et dans
la région Vienne-Charente.
Ainsi se définit le cadre qui présidait à l’insertion
du Néolithique dans le Bassin parisien « au début de
la période III (vers 2000) » (ibid., p. 219, pl. XV[C]IV),
c’est à dire, selon la chronologie actuelle, à l’extrême
fin du 4e millénaire avant notre ère. Les principales
entités y sont présentes et identifiées avec justesse,
Chasséen septentrional, Michelsberg pour l’essentiel.
Le Chasséen dans le Bassin parisien
L’auteur rappelle dans un bref historique (1964) que
le concept d’une civilisation chasséenne émerge
progressivement dans la littérature britannique à partir
de 1932 ; les fouilles de J. Arnal à la grotte de La
Madeleine, à partir de 1950, sont ensuite le point de
départ de divers travaux qui mettent l’accent sur la
place de cette civilisation dans le Néolithique du territoire national. Le caractère expansionniste du Chasséen
illustré par sa céramique, et souligné par de nombreux
auteurs, n’est toutefois pas admis par tous : certains
chercheurs dénient l’appellation du Chasséen pour les
groupes septentrionaux, vu la non-conformité de leur
industrie lithique, mais ne proposent pas de solution.
Là encore, la prudence, mais aussi la perspicacité de
G. Bailloud ont permis de sortir de cette impasse en
adoptant, comme il le souligne (1964, p. 76), la nomenclature binominale « capable de rendre compte à la fois
de la diversité des faciès régionaux (exprimés en particulier par l’industrie lithique, fortement conditionnée
Bulletin de la Société préhistorique française
Claude CONSTANTIN, Daniel MORDANT
par le milieu) et de l’unité de l’ensemble chasséen, qui
se manifeste dans l’homogénéité de la tradition céramique ». La présentation des données est conçue,
comme pour les périodes précédentes, en deux volets.
Le premier, synthétique et thématique, avec les habitats, sépultures, matériel archéologique… se termine
par une discussion précise sur l’origine et la datation
du Chasséen septentrional, sur laquelle nous allons
revenir ; le second constitue l’inventaire des sites, avec
description des matériaux, lieu de conservation et
bibliographie. Là encore, on constate une proportion
notable (plus du tiers) de découvertes inédites, conservées dans les collections des musées, grands ou petits,
ou bien chez les chercheurs eux-mêmes, ce qui illustre,
comme nous l’avons déjà souligné, la détermination
de l’auteur de ne laisser passer aucune information,
même d’apparence mineure, et donc de conduire un
travail sur la base d’une analyse exhaustive des témoins
existants. Cette position systématique, tant vis-à-vis
d’ensembles conséquents comme ceux du Chasséen
septentrional ou d’apparence plus restreinte comme
ceux du Cerny, on l’a vu, est une posture de recherche
qui est propre à Gérard Bailloud. C’est grâce à elle et
à la quasi-infaillibilité de son diagnostic, surtout à
propos de la céramique, que l’apport de ses travaux est
aussi fondamental.
Le cas du Chasséen septentrional illustre bien cette
situation. On constate, en effet, que les matériaux
assemblés sur les sites les mieux documentés, FortHarrouard (Eure-et-Loir), Jonquières et Catenoy (Oise)
mais aussi Nermont (Yonne) constituent un ensemble
relativement homogène dont l’existence s’est trouvée
confortée quelque sept années plus tard, au moment de
la rédaction de la Mise à jour 1972.
Chasséen et Michelsberg
Si la fouille récente sur le site de plateau de
Jonquières (Blanchet et Petit, 1972) offre bien un
complément d’importance, en terme de structuration
de l’habitat (murets, foyers, etc.), mais aussi de documentation des industries (lithique, os, céramique
décorée), celle de Noyen-sur-Seine, enceinte fossoyée
de vallée (Mordant et Mordant, 1972), livre un
ensemble plus atypique avec des caractères certes
chasséens mais aussi – et ils sont clairement repris par
G. Bailloud – Michelsberg, qu’il s’agisse de la présence
des retranchements, à l’époque rapprochés des sites de
cette culture, Urmitz et Mayen, ou encore de certaines
productions céramiques, louches ou vases tulipiformes
dont certains à petit col évasé bien individualisé, caractéristiques du site. L’interprétation retenue est celle de
connexions avec le Michelsberg, plutôt que d’évoquer
une influence de cette dernière culture. Cette découverte ne remet pas en cause le schéma culturel proposé
par G. Bailloud qui avait déjà gardé ses distances avec
le Michelsberg à propos des disques en terre cuite
(1959) que d’aucuns mettaient en équation avec cette
civilisation (1964, p. 105) : il considérait, à juste titre,
que cet objet faisait partie intégrante du patrimoine
culturel de plusieurs groupes régionaux (fig. 9). À cette
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
Fig. 9 – Répartition des disques en terre cuite dits « plats-à-pain »
(Bailloud, 1971, fig. 33).
Fig. 9 – Distribution of earthenware discs « plats-à-pain » – « bread
plates » (Bailloud, 1971, fig. 33).
date d’ailleurs, il restait sur la position de la nécessité
de la recherche d’autres indices pour aborder cette
question – « et ceux-ci sont on ne peut plus fuyants »
(1964, p. 105).
Il revient d’ailleurs sur ce sujet, d’abord dans sa
contribution à La Préhistoire française en 1976 (1976b)
puis, en 1982, à l’occasion d’un nouvel article intitulé
« Vue d’ensemble sur le Néolithique en Picardie »,
constituant la mise à jour d’une étude donnée à la
Revue archéologique de l’Oise en 1976. Il y développe,
comme on l’a vu plus haut, le Néolithique ancien à
céramique rubanée, sur la base des travaux de l’URA
12 dans la vallée de l’Aisne, évoque la céramique du
Limbourg et ses problèmes, les cultures de tradition
danubienne postérieures au Rubané, VSG, Cerny,
Roessen final et Épiroessen du type de Menneville,
pour enfin consacrer près de huit pages au Chasséen
et Michelsberg. Il étoffe sa présentation du Chasséen
septentrional et considère d’emblée que ces deux
cultures possèdent suffisamment de caractères divergents et que leurs sites ne se mêlent pas : « une véritable frontière culturelle nord-sud sépare à ce moment
la Picardie en deux, traversant l’Aisne entre Compiègne
et Soissons, et isolant une province chasséenne à
l’ouest d’une province Michelsberg à l’est » (1982,
p. 20). Ce constat repose sur les découvertes d’enceintes fossoyées en prospection aérienne par
­M. Boureux, à partir de 1976. Les travaux ultérieurs
ont très largement confirmé cette vision des choses
avec le développement de programmes de fouilles
consacrés aux enceintes fossoyées. Ces travaux de
terrain de grande ampleur ont notamment livré des
corpus de mobilier qui étoffent la connaissance du
Chasséen septentrional et permettent de jeter les bases
d’une chronologie interne (Blanchet et Martinez,
1986) ; ils apportent également la preuve d’une ample
occupation Michelsberg, notamment dans la vallée de
l’Aisne et de la Vesle (Dubouloz et al., 1997).
Concernant Noyen, G. Bailloud souligna, dans les
études de 1976 et 1982 évoquées plus haut, et à la suite
des auteurs dans leur première publication de 1972
(Mordant et Mordant, 1972), la dualité d’influences
Bulletin de la Société préhistorique française
515
chasséenne et Michelsberg. Il ne fit cependant pas
écho – sauf une brève mention dans La Protohistoire
de l’Europe (1985, p. 552) – à la proposition d’un
groupe de Noyen avancée en 1980 au Colloque de Sens
(Mordant, 1980) et qui fut développée par la suite à la
Table ronde de Beffia (Jura) en 1983 (Mordant, 1986).
Un groupe de Noyen, parallèle au Chasséen septentrional ancien et au Néolithique moyen bourguignon
ancien, fortement marqué par le Michelsberg également
ancien (issu de l’Aisne ou de la Champagne ?), est
distingué d’un groupe de Gravon-Balloy où s’exprime
une composante sud-orientale (plus évoluée ?), le faciès
Balloy, Gros Bois (Mordant, 1967) représentant une
étape récente de ces relations via la Bourgogne et la
vallée de l’Yonne.
Dans la Mise à jour 1972, le constat avait été fait
d’un Chasséen septentrional non monolithique, avec
des ensembles périphériques ouverts vers l’est « où les
connexions avec la Bourgogne et le bassin du Rhin
s’affirment », illustrés par exemple par Noyen et Balloy,
Gros Bois, « mais aussi dans le Calvados où le rituel
funéraire est celui du Néolithique atlantique… » (1964,
p. 416). Pour finir, et ce dès cette date, G. Bailloud
considère que « Le remplacement du Rubané par le
Chasséen septentrional… paraît donc indiquer l’arrivée dans le Bassin parisien d’un nouveau stock
humain d’origine méridionale, et qui doit, pour l’essentiel, aborder la contrée par la Bourgogne. » (op.
cit., p. 106). Et d’ajouter que ces raisons « incitent à
conserver, pour désigner le groupe que nous étudions,
le terme de Chasséen, malgré les critiques dont cette
position a fait l’objet » (ibid., p. 107). Position judicieusement tenue et intuition parfaitement fondée : il
fallut toutefois attendre les découvertes et les analyses
les plus récentes pour enfin conforter cette filière chasséenne bourguignonne (Thevenot, 2005 ; Augereau et
Chambon, à paraître), via ensuite la vallée de l’Yonne
jusque dans la vallée de la Seine.
La civilisation de Seine-Oise-Marne
et la fin du Néolithique
« Défini et précisé par des préhistoriens étrangers,
le concept de civilisation de Seine-Oise-Marne sera
long à s’imposer parmi les préhistoriens français » :
ainsi s’exprime G. Bailloud dans la présentation de cette
culture dans sa thèse (1964, p. 140). Remarquons d’emblée que cette culture propre au Bassin parisien est la
première à avoir été définie, par les auteurs espagnols
Bosch-Gimperra et Serra-Rafols à partir de 1925 dans
les colonnes de la Revue anthropologique (BoschGimperra et Serra-Rafols, 1925-1927), reprise, par
Nougier dans sa thèse sur les civilisations campigniennes en Europe occidentale (Nougier, 1950), puis,
enfin, précisée, par Childe et Sandars (Childe et Sandars,
1950). Dans cette lignée, G Bailloud, à partir de 1954,
contribua à clarifier le contenu de cette culture en
fondant sa connaissance, comme les deux auteurs
britanniques, sur l’étude des sépultures collectives et de
leur mobilier, tout en restant lucide quant aux données
issues de l’habitat (« Les habitats Seine-Oise-Marne
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
516
Fig. 10 – Plan d’ensemble de la nécropole de Razet, à Coizard (Marne),
reconstitué d’après les documents inédits de Favret et Prieur (Bailloud,
1964, fig. 35).
Fig. 10 – General plan of the Razet cemetery, Coizard (Marne), recreated after Favret and Prieur’s unpublished documents (Bailloud, 1964,
fig. 35).
sont certainement extrêmement nombreux ; ce chapitre
[Les habitats] sera néanmoins fort bref, en l’absence
quasi-complète d’habitats ayant fait l’objet d’exploration méthodique. ») (1964, p. 141). Il note ainsi une
prédilection sans exclusive pour les fonds de vallées et
l’abandon des habitats en éperon. Néanmoins, l’abondance de la documentation rassemblée de façon exhaustive et commentée de façon détaillée fait du chapitre La
civilisation de Seine-Oise-Marne la contribution la plus
fournie de sa thèse avec quelque 202 pages (la moitié
de l’ouvrage), dont 112 d’inventaire des sites (habitats
et sépultures), avec mention complète des sources et
analyse critique de celles-ci. L’exploitation de données
inédites lui permet notamment de présenter le « Plan
d’ensemble de la nécropole de Razet, à Coizard (Marne),
reconstitué d’après les documents inédits de Favret et
Prieur » (fig. 10), et de dresser un inventaire avec les
caractéristiques sommaires des 37 hypogées, d’après le
travail inédit de ces auteurs (op. cit., p. 258-263). Précisons également que G. Bailloud avait participé à la
fouille modèle et à la publication novatrice de l’hypogée
des Mournouards II (Leroi-Gourhan et al., 1962) – voir
Ph. Chambon et A. Blin, ce volume –. Ainsi est constituée une somme documentaire des plus conséquentes
sur cette culture, principalement issue des contextes
sépulcraux. Un ample développement de 37 pages est
d’ailleurs consacré aux architectures. Les mobiliers sont
également repris en détail : industrie du silex avec peu
de produits en roches dures, distincte du Campignien
(haches polies, outillage sur éclat, poignards sur lames,
Bulletin de la Société préhistorique française
Claude CONSTANTIN, Daniel MORDANT
flèches tranchantes ou perçantes…) ; industrie de l’os
et du bois de cervidé particulièrement bien représentée
(ciseaux, manches, gaines de haches… ; céramique
« d’une pauvreté extraordinaire » et enfin une parure très
abondante et variée, avec de « bons fossiles directeurs
de Seine-Oise-Marne […] haches-amulettes perforées
au talon, pendentifs arciformes en schiste, pendentifs
en forme de quille en corne et des parures biforées en
nacre ou en os » (op. cit., p. 205). De nombreuses
importations comme celle des poignards en silex de
type pressignien sont mentionnées. Dans ses analyses,
G. Bailloud concilie à la fois l’approche des contextes
dans un cadre européen affirmé, maîtrisant toute la
littérature sur le sujet – qu’elle soit anglo-saxonne,
germanique ou d’origine méditerranéenne – et, ce qui
est rare chez un même chercheur, une connaissance
approfondie et une mémoire sans faille des séries de
mobilier et des sites d’où elles sont issues. Il est ainsi
à même d’approfondir telle ou telle hypothèse, par
exemple sur les origines des hypogées ou des allées
couvertes, et, en même temps de réfuter fermement telle
ou telle allégation avancée trop rapidement par des
chercheurs par trop éloignés du terrain. En effet,
G. Bailloud, comme nous l’avons déjà dit, est au plus
près de son terrain de recherche et des chercheurs euxmêmes, ce qui, pour ceux qui l’on connu, pourrait
passer pour un double paradoxe : Gérard, en effet, était
atteint d’une infirmité à un genou, conséquence d’une
fracture mal traitée par la médecine dans son jeune âge,
et il ne conduisait pas, voilà en ce qui concerne sa
mobilité ; pour le contact humain, on rappellera sa
réserve, voire sa timidité, et son économie verbale
poussée parfois à l’extrême ! Et pourtant, il a tout vu et
a rencontré tous les chercheurs, des plus titrés aux plus
modestes. Telle était sa force principale.
Le chapitre intitulé Origine et datation [de la civilisation SOM] (op. cit., p. 218-229) débute par une
analyse des données stratigraphiques, dont celles de sa
fouille de Videlles –voir L. Salanova, Cl. Mordant et
J. Gomez de Soto, ce volume –, l’origine et la datation
de la culture, abondamment et confusément abordées
dans la littérature de l’époque, sont reprises après
l’analyse détaillée et critique des différents constituants. Cette synthèse argumentée et construite identifie
quatre sources principales : 1, des éléments de tradition
locale, principalement lithiques (retouchoirs, pics,
flèches tranchantes, haches en silex) ; 2, des éléments
d’origine occidentale (poignards pressigniens et scies
à encoches), et ultimement méditerranéenne (tombes
collectives, haches-amulettes perforées) ; 3, des
éléments méridionaux (sculptures des tombes, trépanation) ; 4, des éléments orientaux (céramique, manches
divers, gaines, haches de combat en bois de cerf,
flèches perçantes…). Il évacue, à bon escient, l’hypothèse persistante « d’une population mésolithique
relique néolithisée sur place très tardivement », et croit
« plus simple de voir dans les populations chasséennes,
solidement implantées dans le Bassin parisien depuis
des siècles, le substrat réel du groupe de SOM », qui
« apparaît comme la modification brusque, par un
apport de population provenant du Rhin supérieur,
d’un substrat local ». Enfin, cette culture est considérée
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
comme « sœur à ses origines de la civilisation de
Horgen » (op. cit., p. 228). Il perçoit également que
c’est à une phase récente du SOM qu’appartiennent les
exportations pressigniennes, ce qui préfigure leur datation au Néolithique final par N. Mallet (Mallet, 1992).
La conception relativement monolithique de la culture
de Seine-Oise-Marne est quelque peu atténuée en 1982
dans La vue d’ensemble sur le Néolithique de Picardie,
avec la présentation du groupe du Gord (p. 32-33,
fig. 19), postérieur, « dont les inventaires de mobilier
[grands vases galbés à languettes…] ne se retrouvent
pas dans les sépultures collectives du Bassin parisien,
laissant supposer que celles-ci ont généralement cessé
de fonctionner ». Et de terminer : « Nous croyons toutefois peu à la possibilité d’une longue perduration du
SOM en parallèle de la culture du Gord. » La question
de la chronologie de la fin du Néolithique était posée.
J.-C. Blanchet (Blanchet, 1984) approfondit l’analyse
du groupe du Gord et ses relations avec la culture
artenacienne issue du Massif central. Par la suite, Ph.
Chambon et L. Salanova établirent la « Chronologie
des sépultures du IIIe millénaire dans le bassin de la
Seine » (Chambon, Salanova, 1996), mettant en
évidence deux périodes de construction, l’une relevant
du SOM et rattachée au Néolithique récent, l’autre,
après un hiatus, appartenant à « l’extrême fin du Néolithique, voire au Bronze ancien. » (op. cit. p. 113).
Quoiqu’il en soit, l’utilisation des monuments SOM
est encore largement attestée au Néolithique final, mais
« seulement perceptible à travers quelques objets
(poignards, racloirs à encoches…) » (op. cit., p. 113).
Enfin, la progression décisive de la connaissance de la
période n’a été enregistrée que récemment grâce aux
travaux du PCR Le IIIe millénaire dans le Centre-Nord
de la France (coordination L. Salanova puis ­R. Cottiaux)
qui, en recensant tous les matériaux disponibles, a pu
rééquilibrer les données au profit de l’habitat, et permis
la restitution d’une vision réaliste des cultures en
présence – voir L. Salanova, Cl. Mordant, J. Gomez
de Soto, ce volume.
Conclusion
Entre 1958 et 1959, dates de la reconnaissance de
l’originalité du matériel des sites d’Augy et de SaintePallaye, puis de la création du type de Menneville, et
1967, date du dépôt du manuscrit de l’article paru dans
Fundamenta (1971) qui crée le groupe de Marcilly et
la culture de Chambon, il s’écoule neuf années. En
neuf années, seulement, Gérard Bailloud met sur pied
le cadre complet du Néolithique du Bassin parisien.
Et, en ce qui concerne les quatre ensembles culturels
que nous venons de mentionner, il faut ajouter que trois
d’entre eux sont créés à partir de matériel peu abondant, presque uniquement de la céramique issue de
deux sites, et que le quatrième – le type de Menneville – repose sur un site unique. On voit là le discernement pointu dont il fait preuve, qui lui permet de
saisir l’individualité culturelle des ensembles inédits.
Dans les années suivantes, en tenant compte des
découvertes qui se multiplient à partir des années
Bulletin de la Société préhistorique française
517
soixante-dix, il précise l’ordonnancement chronologique des cultures et affine ses hypothèses sur leurs
origines et les filiations qui les relient.
Gérard Bailloud s’est évidemment appuyé sur les
travaux des chercheurs étrangers pour établir l’ossature
du Néolithique du Bassin parisien. La présence du
Néolithique à céramique rubanée, d’origine rhénane,
était attestée depuis le début du siècle (Reinecke,
1900) : divers auteurs en établirent la liste des sites, au
nombre de 11 dans Les civilisations néolithiques… Les
études outre-Rhin sur cette culture permirent, sans
difficulté, de confirmer l’origine rhénane (phase
récente, groupe de Plaidt) du Rubané du Bassin parisien qui arrive comme un bloc dont tous les éléments
sont intrusifs. Chasséen et Seine-Oise-Marne constituaient au départ, dans les années cinquante, deux
entités culturelles bien représentées par des corpus
significatifs et par des mobiliers diversifiés. Entités
culturelles également identifiées, au préalable, par des
chercheurs étrangers, à partir des années vingt (1925
pour le SOM des auteurs espagnols P. Bosch-Gimperra
et J. de C. Serra-Rafols ; 1932 pour le Chasséen des
auteurs britanniques G. Childe, J. et C. Hawkes) et
dont les études furent diversement assimilées par les
chercheurs français. Il est certain que la thèse de
Nougier en 1950 ne s’inscrivait pas dans la même
dynamique de recherche, même si elle visait un cadre
européen… En revanche, les travaux précurseurs de
J. Arnal à la grotte de La Madeleine, à partir de 1950
(Arnal, 1953), donnèrent à l’évidence un écho particulier aux propositions sur le Chasséen – voir J. Guilaine,
ce volume. L’apport de G. Bailloud aura donc été, à
partir d’une connaissance sans faille de toute la littérature, d’ordonner, critiquer et surtout enrichir les
premières propositions, en s’appuyant sur les concepts
forts ainsi élaborés. L’intelligence de son travail a été,
pour ces périodes, de s’inscrire dans une continuité de
construction et de clarification, donc une synergie de
recherche. Qu’on ne s’y trompe pas, G. Bailloud n’était
pas un simple suiveur érudit, loin s’en faut : il a su
innover de façon magistrale, comme nous venons de
le rappeler.
Dans le domaine des héritages, tout en précisant
publication après publication ses hypothèses, il ne
parvient cependant pas à conclure avec certitude. Tout
d’abord sur l’héritage mésolithique. En plus du fait que
l’on a peu de connaissances sur l’importance démographique des populations mésolithiques présentes au
moment de la colonisation danubienne, les étapes les
plus importantes de leur assimilation ne peuvent être
datées avec précision. Le second héritage concerne
l’impact des éléments méditerranéens dans le Néolithique du Bassin parisien. Gérard Bailloud évoque
quelques indices et avance quelques acquis de détail,
mais l’importance des impacts, leurs mécanismes, les
moments essentiels du contact restent difficiles à cerner
sauf, évidemment, pour la montée chasséenne vers le
Nord, dont les jalons ne sont quand même pas si
nombreux, surtout du côté de la Bourgogne. On lui fera
d’autant moins le reproche de n’avoir pas conclu dans
ces domaines qu’aujourd’hui, en 2011, la situation est
à peine plus claire qu’au milieu des années quatre-vingt
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
518
Claude CONSTANTIN, Daniel MORDANT
quand il publia ses dernières contributions. Et si, en
dernière analyse, on s’interroge de savoir pourquoi il
ne se détermina pas sur ces points, la réponse s’impose : sa rigueur scientifique ne le lui permettait pas.
Il refusait, en tant que chercheur attaché aux faits, de
conclure en absence de données archéologiques
concrètes comme, par exemple, le manque, qui reste
en grande partie à combler aujourd’hui, de connaissances sur les relais, du sud vers le nord, dans la zone
des latitudes moyennes de la France.
Gérard Bailloud a bien ouvert la voie d’une archéologie française sur le Néolithique et, cela va de soi,
sans aucun chauvinisme, en s’appuyant sur les travaux
des savants (sic) étrangers et en proposant, en premier,
avec Les Civilisations néolithiques…, de rassembler
« l’essentiel des données acquises durant ces dernières
années, tant en France qu’à l’étranger, sans chercher
à en cacher les lacunes ou les incertitudes » (op. cit.,
p. 6). Trop modestement, les auteurs déclaraient alors,
en tête de leur introduction : « La présente publication
n’est pas un travail de recherche. » Néanmoins, face
aux positions réservées de certains quant à la nécessité
d’établir une synthèse dans la situation actuelle, ils
estimaient « nécessaire que des travaux de synthèse
suivent pas à pas les progrès de la recherche analytique ». Il s’agissait donc bien d’une impulsion déterminante. Avec Le Néolithique dans le Bassin parisien,
le travail de G. Bailloud évolua selon une ligne de
recherche résolument palethnologique : « … donner un
tableau palethnologique aussi complet qu’il est
possible de chacune des civilisations néolithiques
représentées dans le Bassin de Paris » (op. cit., p. 6),
et ce en réservant une large part à l’analyse fine de
découvertes méconnues ou récentes. Il a, avec esprit
critique et clairvoyance, su adapter les concepts fondamentaux établis par ses prédécesseurs et, en même
temps, innover avec mesure et rigueur, en fonction des
acquis les plus récents des investigations de terrain.
Après un demi-siècle, son œuvre reste toujours d’actualité.
Annexe :
Évocation de quelques souvenirs
personnels (DM)
La parution du Néolithique dans le Bassin parisien
ne fut pas accueillie avec l’enthousiasme que les
auteurs de ces lignes développent près d’un demi-siècle
plus tard – quarante-sept années pour être exact ! Le
milieu amateur de l’époque – pour s’en tenir à lui –
était largement tourné vers les prospections de surface,
aussi les « quelques tessons décorés » les laissaient-ils
indifférents… Et puis s’exprimaient aussi certaines
jalousies locales. Pierre Parruzot, conservateur des
musées de Sens, avait mis en évidence les influences
danubiennes dans le Néolithique de l’Yonne (Parruzot,
1957) : bien que son étude figurât en bonne place dans
la présentation du Rubané (p. 14), il estimait que
G. Bailloud l’avait un peu spolié (!). Et d’ajouter, sans
doute par dépit : « Heureusement qu’il avait le SOM
pour remplir sa thèse, car le reste est plutôt mince ! »
Bulletin de la Société préhistorique française
Autre réaction, cette fois-ci d’un collègue étranger de
passage à Sens, et dont je fus témoin : fort de la chronologie rhénane, qui seule devait faire référence, il
s’esclaffait devant les quelques planches de tessons de
céramique qui fondaient le Groupe de Cerny ! J’étais
prêt à accepter l’attitude de P. Parruzot dont je connaissais l’intransigeance, mais alors celle du second
collègue me révolta, car j’avais l’impression que c’était
l’archéologie française qui était atteinte et dénigrée.
Cela me donna d’autant plus de détermination pour
soutenir la démarche novatrice de G. Bailloud, grâce
aux fouilles de Marolles-sur-Seine, alors en cours, et
achevées en 1969 (Mordant et Mordant, 1970). Disonsle tout de même : rencontrer l’intéressé, pour un jeune
chercheur d’une vingtaine d’années était, de prime
abord, une épreuve difficile, surmontée cependant assez
rapidement une fois que le contact, par le truchement
du matériel archéologique, était établi. Rencontres dans
un lieu un peu singulier : l’atelier d’artiste occupé par
Gérard rue Descombes à Paris XVIIe, où lui furent ainsi
présentés, en 1964, le Cerny de Marolles, puis l’année
suivante, le Néolithique moyen de Balloy, Gros Bois…
À l’occasion de la découverte de ce dernier site,
G. Bailloud nous mis spontanément en relation avec
A. Gallay qui, intéressé par la présence d’un assemblage où l’on discernait Cortaillod, Chasséen et Michelsberg, au centre du Bassin parisien, nous communiqua
une bibliographie très détaillée sur la question qui
touchait le cadre de sa thèse (Gallay, 1977). Peu après,
la découverte de la seconde sépulture collective de
Marolles-sur-Seine, les Gours-aux-Lions, en juin 1966,
dans la carrière dont l’exploitation avait repris, mérite
aussi d’être évoquée. Afin de pousser une dalle de
grès – qui scellait la sépulture –, le bulldozer centra sa
lame sur le bloc, ce qui épargna miraculeusement
l’amas osseux sous-jacent, les chenilles passant de part
et d’autre de celui-ci… Un premier dégagement fin
nous permit de mesurer la complexité de la fouille à
entreprendre. Le directeur des Antiquités préhistoriques, Gérard Bailloud, aussitôt prévenu – juste avant
son départ pour sa fouille de Conquette (Héraut) –,
nous mit en relation instantanément avec A. LeroiGourhan en fouille à Pincevent : après la visite de
celui-ci sur le terrain, avec M. Brézillon, la décision
fut prise de nous apporter le soutien attendu, qui permit
la constitution d’une équipe, point de départ de la
collaboration amicale et particulièrement enrichissante
avec Claude Masset et Jean Leclerc qui venaient
d’achever la campagne annuelle de fouille à Pincevent.
La monographie du site était en effet publiée l’année
suivante (Masset, Mordant, 1967) dans les colonnes
de Gallia Préhistoire, faisant écho, en quelque sorte,
à celle des Mournouards de 1962. Ce fut aussi Noyen,
à partir de 1965 : si les premiers matériaux lithiques
recueillis en surface à cette date orientaient bien la
datation de l’enceinte fossoyée (découverte par D. Jalmain en 1960) vers le Néolithique, la découverte
inopinée, à la suite d’un labour profond, de très larges
tessons d’un grand vase à provisions, à col resserré et
court bord oblique, jeta un trouble passager dans l’approche préliminaire du site. En effet, devant cette belle
céramique, remarquablement façonnée, résistante et
2011, tome 108, no 3, p. 505-520
Gérard Bailloud et le Néolithique du Bassin parisien
bien conservée, G. Bailloud eut cette première réaction,
qui nous déconcerta un peu, il faut le dire : « ça ne fait
pas tellement néolithique ! » dit-il. Et pourtant si !
L’avenir le prouva, avec justement toute une série de
grandes amphores de style Michelsberg, conservées in
situ dans l’habitat !
Gérard Bailloud, avec ses deux ouvrages fondamentaux, impulsa donc une archéologie moderne « à la
française ». En cela aussi son œuvre est fondatrice. Elle
permit aux travaux pionniers des petits groupes d’amateurs des années soixante, dans les contextes d’urgence
qui marquèrent cette période, de prendre la réelle
dimension scientifique qu’ils auraient été dans l’impossibilité totale de trouver en l’absence de « l’ouvrage
de référence » : en effet, on y découvrait, à chaque
page, en plus des connaissances nécessaires, un écho,
une réponse, une mise en garde, un jugement nuancé
519
vis-à-vis d’observations de terrain encore toutes fraîches, voire la copie conforme d’un tesson décoré que
l’on venait de découvrir, encore pris dans sa gangue
de terre… Nous étions bien sur la même longueur
d’ondes, celle d’une recherche fondée avant tout sur
la collecte de données la plus précise et la plus humble
qui soit, mais avec l’ambition déterminée de faire
progresser la connaissance dans des domaines presque
vierges. Et l’exemple était donné avec ces moindres
tessons décorés, scrupuleusement dessinés et
commentés – tirés de ses « célèbres fiches » –, qui
constituaient le premier apport tangible d’investigations souvent ingrates, et en tout cas très physiques,
faut-il le rappeler ! Merci, Gérard, de nous avoir fait
découvrir le Néolithique et nous avoir permis de contribuer, en cette période héroïque, à sa connaissance dans
la voie ainsi ouverte !
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Association bourguignonne des sociétés savantes, p. 31-37.
REINECKE P. (1900) – Zur jüngeren Steinzeit in West-und Süddeutschland, Westdeutsch Zeitschrift für Geschichte und Kunst, 19, p. 209270.
Bulletin de la Société préhistorique française
Claude CONSTANTIN
Ancien membre de l’URA 12 du CNRS
16, clos de Verrières, 91370 Verrières-le-Buisson
Daniel MORDANT
Conservateur du patrimoine émérite
[email protected]
2011, tome 108, no 3, p. 505-520

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