To x o p l a s m o s e,r u b é o l e,t r é p o n é m a t o s e s,hépatite

Transcription

To x o p l a s m o s e,r u b é o l e,t r é p o n é m a t o s e s,hépatite
Toxoplasmose, rubéole, tréponématoses, hépatite virale B
et infection par le VIH chez les femmes suivies pour grossesse
de la population de la côte Est de Nouvelle-Calédonie.
D. Ménard
Institut Pasteur de Bangui,BP 923,Bangui,RCA.
Manuscrit n°2232. “Santé publique”. Reçu le 24 août 2000. Accepté le 16 octobre 2001.
Summary: Study of seroprevalence of toxoplasmosis, r u b e l l a ,s y p h i l i s , hepatitis B virus and HIV infection
among pregnant women consulting the East Coast provincial hospital, New Caledonia.
In view of the sparse available data concerning the main infectious illnesses screened for during
pregnancy (toxoplasmosis, rubella, syphilis, hepatitis B virus and HIV) in the Northern Province
and generally throughout New Caledonia, we decided to undertake a retrospective study based
on the files of pregnant women having consulted between September 1996 and Septem ber 1999 in the East-Coast provincial hospital (New-Caledonia). First, we wished to estimate
the prevalence of toxoplasmosis, rubella, syphilis, hepatitis B virus and HIV Second, we wished
to specify the main characteristics of these pregnant women, to trace the evolution of sero prevalence over the study time period and consider the influence of various factors such as age,
place of residence and professional occupation.
The biological study of these pregnancies was hindered by the fact that approximately half of
women consult only from the second trimester of their pregnancy. This result underlines the
importance of emphasising efforts aiming to bring women to consult earlier and of improving
the regularity and also the interpretation of serological tests (especially for toxoplasmosis sero logy).
Within this population, we found the following percentages of seroprevalence: for toxoplas mosis between 83,6% and 89, 6% (zone of hyperendemla), for rubella between 91,6% and
95,8%, for syphilis between 7% and 12,4%, for hepatitis B virus between 61,8% and 76% (for
women immune to hepatitis B, the frequency of acquisition of immunity by viral infection was
understood between 64,3% and 80,3%) and for HIV 0%. The hepatitis B surface antigen
(HbsAg) carrier rate was estimated between 1,7% and 4,9%.
Following and informing pregnant women of the risk of toxoplasmosis appears to be of key
importance as well as screening HbsAg crriers in order to limit viral transmission to the foetus.
pregnancy
seroprevalence
toxoplasmosis
rubella
syphilis
hepatitis B virus
HIV
New-CaIedonia
Melanésia & Micronesia-Polynesia
Résumé :
grossesse
séroprévalence
toxoplasmose
rubéole
tréponématose
hépatite B
VIH
Nouvelle-Calédonie
Mélanésie et Micronésie-Polynésie
À partir des dossiers de consultations externes du service de maternité du CHP de Poindi mié (Nouvelle-Calédonie) concernant le suivi de grossesse des femmes entre sep t e m b r e 1996 et septembre 1998, nous avons proposé pour la première fois une estimation
des séroprévalences de la toxoplasmose, de la rubéole, des tréponématoses, de l’hépatite B et
de l’infection par le VIH.
Les résultats de cette étude rétrospective soulèvent plusieurs problèmes comme le retard de
consultation des femmes suivies pour grossesse (en moyenne entre la 18e et la 20e semaine
d’aménorrhée), le manque d’information des femmes séronégatives vis-à-vis de la toxoplas mose sur les risques encourus et le dépistage efficace des femmes porteuses de l’antigène Hbs.
Introduction
L
e Centre hospitalier provincial (CHP) de la côte Est de
Nouvelle-Calédonie, situé à Poindimié, prend en charge
les 15 000 habitants des communes de Hienghène à Houaïlou.
Les consultations externes du service de maternité, géré par
Bull Soc Pathol Exot, 2001, 94, 5, 403-405
3 sages-femmes, assurent le suivi des grossesses, les accouchements ainsi que la promotion de la contraception. À partir des dossiers de consultations externes du service de
maternité du CHP de la côte Est concernant le suivi de grossesse des femmes entre septembre 1996 et septembre 1998,
nous avons estimé les séroprévalences de la toxoplasmose, de
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D. Ménard
la rubéole, des tréponématoses, de l’hépatite B et du VIH
Nous avons pu également préciser les principales caractéristiques des femmes enceintes, rechercher une évolution des
séroprévalences étudiées entre 1996 et 1998 ainsi que l’influence de différents facteurs comme l’âge, le lieu de résidence
ou l’activité professionnelle.
élevée chez les femmes sans profession par rapport aux femmes
exerçant une activité professionnelle (p = 0,01). Enfin, le pourcentage de femmes porteuses de l’antigène Hbs est compris
entre 1,7 % et 4,9 % (IC 95 %) (16 femmes sur 484). Il n’a pas
été mis en évidence de différence statistiquement significative en fonction de l’année, de l’âge, du lieu de résidence ou
de la profession.
Résultats
S
ur les 595 femmes suivies pour grossesse entre septembre 1996 et septembre 1998, nous avons pu exploiter 510 dossiers (85,6 %).
Données générales sur la population étudiée
La moyenne observée des âges est de 26,5 ans (extrêmes 14 et
43 ans). La plupart des femmes sont d’origine mélanésienne
(95 %), vivent en Province Nord sur la côte Est (99 %) et
n’exercent aucune activité professionnelle (84,7 %). En
moyenne, la première grossesse survient entre 20 et 22 ans, la
2e entre 24 et 26 ans, la 3 e entre 26 et 28 ans, la 4 e entre 27 et
29 ans, la 5 e entre 28,5 et 31,5 ans, la 6e entre 30 et 32 ans, la
7e entre 32 et 36 ans, la 8e entre 32et 38 ans et la 9e entre 32,5
et 43, 5 ans. Le terme moyen du premier bilan biologique
effectué au cours du suivi de la grossesse est compris entre la
18e et la 20e semaine d’aménorrhée.
Estimation des séroprévalences
Le tableau I résume les estimations des différentes séroprévalences étudiées (toxoplasmose, rubéole, tréponématoses,
hépatite B et VIH) et les différences observées selon l’année
(de 1996 à 1998), l’âge, le lieu de résidence ou l’activité
professionnelle.
Tableau I.
Séroprévalences de la toxoplasmose, rubéole, tréponématoses, hépatite
virale B et infection par le VIH chez les femmes suivies pour grossesse selon
l’âge, le lieu de résidence, l’activité professionnelle et l’année.
Centre hospitalier provincial de la côte Est,Nouvelle-Calédonie, 1996-1998.
Seroprevalence percentages of toxoplasmosis, rubella, treponemiasis,
viral hepatitis B and HIV infection in pregnant women according to age,
place of residency, professional occupation and year.
séroprévalences
étudiées
% de femmes
différence (p < 0,05) selon
séropositives année âge
activité
lieu de
(positifs/effectif)
professionnelle résidence
toxoplasmose
86,6 (458/524) DNS
DS 1
DNS
DS 2
rubéole
93,7 (463/494) DNS
DS 3
DNS
DNS
tréponématoses 9,7
(46/471) DNS
DS 4
DNS
DS 5
hépatite B
68,9 (120/174) DNS
DNS
DNS
DS 6
VIH
0
(0/364)
• DNS :différence non significative
• DS 1 : différence statistiquement significative entre les classes d’âge 20 à 24 ans
(p =0,007) et 25 à 29 ans (p =0,01) avec la classe d’âge ≥ à 30 ans.
• DS 2 : séroprévalence statistiquement beaucoup plus faible entre la commune de
Houaïlou et les communes de Hienghène (p =0,01), Poindimié (p =0,04)
et Ponérihouen (p =0,03).
• DS 3 : différence statistiquement significative entre la classe d’âge 20 à 24 ans
et 25 à 29 ans (98 % vs 90,3%) (p =0,03) et entre la classe d’âge 20 à 24 ans
et ≥ à 30 ans (98 % vs 91,9%) (p =0,01).
• DS 4 : différence statistiquement significative entre la classe d’âge 14 à 19 ans
et ≥ à 30 ans (2,3 % vs 16,5%) (p =0,03) et entre la classe d’âge 20 à 25 ans et
≥ à 30 ans (5,5 % vs 16,5%) (p =0,02).
• DS 5 : séroprévalence statistiquement beaucoup plus élevée entre la commune
de Ponérihouen et les communes de Hienghène (p =0,03), Touho (p =0,03),
Poindimié (p =0,006) et Houaïlou (p =0,02).
• DS 6 : séroprévalence statistiquement beaucoup plus élevée entre la commune
de Houaïlou et les communes de Hienghène (p =0,03), Touho (p =0,007)
et Poindimié (p =0,03).
Chez les femmes immunisées contre l’hépatite B, la fréquence
de l’acquisition d’une immunité contre le virus de l’hépatite
B par infection naturelle (présence d’anticorps anti-Hbc et
anti-Hbs) est comprise entre 64,3% et 80,3% (IC 95 %) (86
femmes sur 119). Il existe une fréquence statistiquement plus
Santé publique
Discussion
L
a population étudiée dans ce travail semble représentative
de la population vivant sur la côte Est (majorité de femmes
d’origine mélanésienne, répartition par lieu de résidence proportionnelle à la répartition de la population de la côte Est par
commune). Le retard de consultation du suivi biologique des
grossesses observé souligne la nécessité d’accentuer les efforts
visant à amener les femmes à consulter plus tôt, pour améliorer
le suivi et bien souvent l’interprétation des sérologies (notamment pour la toxoplasmose). La séroprévalence de la toxoplasmose permet de caractériser la côte Est comme zone
hyperendémique. Ce résultat est concordant avec la publication, en 1976, de WALLACE (3) (84 % à 100%) et renforce la
nécessité de cibler le plus rapidement possible les femmes
séronégatives (respect des règles hygièno-diététiques et nécessité d’effectuer tous les mois une sérologie afin de dépister
une éventuelle séroconversion en cours de grossesse). À cet
égard, nous avons retrouvé 14 femmes suspectes de séroconversion entre septembre 1998 et septembre 1999 parmi 178
femmes suivies pour grossesse. La séroconversion a été confirmée chez 3 femmes (1,7%), exclue chez 5 d’entre elles. Pour
les 6 autres femmes, l’insuffisance des résultats disponibles
ne nous a pas permis de conclure.
La diminution significative de la séroprévalence de la rubéole
avec l’âge traduit l’amélioration de la couverture vaccinale
depuis 10 ans et fait apparaître la nécessité de poursuivre ce
programme de vaccination chez les adolescentes et chez les
femmes séronégatives en âge de procréer.
Nous n’avons retrouvé dans notre population aucune femme
séropositive vis-à-vis du VIH. Les données les plus récentes
montrent que la circulation du virus reste très limitée dans la
population néo-calédonienne avec un nombre de cas cumulés de séropositifs et de sida avéré de 158 depuis 1986.
La diminution significative des séroprévalences des tréponématoses est inversement proportionnelle à l’âge et montre
une amélioration de la situation depuis une dizaine d’années,
vraisemblablement en relation avec la mise en place d’un programme de prévention et d’information sur les maladies sexuellement transmissibles (MST).
La séroprévalence élevée de l’hépatite B montre l’importance
de cette affection en Nouvelle-Calédonie. Il confirme les résultats trouvés en 1981 à Ouvéa (89,3 %) (2). La différence d’acquisition d’une immunité contre le virus de l’hépatite B
(infection par le virus ou vaccination) entre les femmes sans
profession et les femmes actives peut être expliquée par la
vaccination systématique des femmes à l’occasion des consultations de médecine du travail. Le pourcentage de femmes
porteuses de l’antigène Hbs est moins élevé que les pourcentages décrits lors de l’enquête à Ouvéa (2) de 1981 (11,7 %)
ou lors de l’enquête de 1987 (1) chez les donneurs de sang et
les femmes enceintes (7,6 %). Cependant, il convient, lors du
suivi de grossesse et selon le décret n° 92-143 du 14/02/92, de
pratiquer la recherche de l’antigène Hbs à partir du 6e mois.
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Toxoplasmose, rubéole, tréponématoses,hépatite virale B et infection par le VIH,Nouvelle-Calédonie
Conclusion
C
ette étude rétrospective a permis de préciser les principales caractéristiques des femmes enceintes vivant sur la
côte Est de Nouvelle-Calédonie et de proposer pour la première fois une estimation des séroprévalences des principales
affections surveillées pendant la grossesse (toxoplasmose,
rubéole, tréponématoses, hépatite B et VIH) et de la prévalence
du portage de l’antigène Hbs. Ces résultats soulèvent plusieurs problèmes, à commencer par le retard de consultation
des femmes suivies pour grossesse. L’amélioration de la surveillance des femmes enceintes passe par le ciblage et l’information des femmes séronégatives vis-à-vis de la toxoplasmose
sur les risques encourus et, enfin, par le dépistage des femmes
Bull Soc Pathol Exot, 2001, 94, 5, 403-405
porteuses de l’antigène Hbs afin de limiter la transmission
fœto-maternelle du virus.
Références bibliographiques
1.
2.
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l'antigène Hbs. en Nouvelle-Calédonie. Étude selon l'ethnie.
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KUBERSKI T, LEGONIDEC G, GUST ID, DIMITRAKAKIS M, CANTALOUBE D & ZIMMET P - Hepatitis B virus infections in Melanesians and Polynesians in New Caledonia. Am J Epidemiol,
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WALLACE GD - The prevalence of toxoplasmosis on Pacific
islands, and the influence of ethnic group. Am J Trop Med Hyg,
1976, 25, 48-53.
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