La Cour d`Appel de Versailles vient de rappeler, le 5

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La Cour d`Appel de Versailles vient de rappeler, le 5
LE PACKAGING : UN INVESTISSEMENT POUR RESTER
LE PHENIX DES LINEAIRES
Paris, 19 février 2016
Par Martine BLOCH-WEILL
Associée
REGIMBEAU
La Cour d’Appel de Versailles vient de rappeler, le 5 janvier 2016 qu’on ne peut pas indument
profiter du succès de certains produits de marque et qu’il convient de rester vigilant avant de
lancer de nouvelles marques de distributions (MDD).
Cette affaire est d’autant plus intéressante qu’elle met par ailleurs en avant les liaisons
dangereuses entre les fabricants des produits originaux et la grande distribution.
La société SAVANCIA (anciennement dénommée BONGRAIN) qui commercialise le fromage
Caprice des Dieux a fabriqué initialement les produits de MDD pour les centres Leclerc sous la
marque Cœur de Crème et pour Carrefour sous la marque Cœur Complice. Depuis ces deux
distributeurs font fabriquer leur produit par des concurrents de SAVANCIA.
En 1988, la société SAVANCIA a décidé de créer un nouveau format pour son produit et a lancé le
Mini Caprice des Dieux de 50 gr, vendu par trois, dans un étui en carton découpé le faisant
apparaitre en partie.
En 2010, aussi bien les centres Leclerc que la société Carrefour décident chacun de leur côté de
lancer leur produit Cœur de Crème et Cœur Complice en petit format de 50gr et vendus par 3.
La société GUILLOTEAU a obtenu le marché pour les deux distributeurs et a fabriqué les Mini
Cœur de Crème et les Mini Cœur Complice.
La société SAVANCIA a assigné la société GUILLOTEAU en concurrence déloyale et parasitisme en
raison de la forme en calisson à croute blanche du fromage, de la présentation par 3, dans un
étui horizontal cartonné bleu, de la présence des couleurs bleu, jaune et rouge et du mot
« mini ».
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Le TGI avait rejeté les demandes de la société SAVANCIA sur la base aussi bien de la concurrence
déloyale que du parasitisme. La société SAVENCIA a fait appel du jugement.
La Cour d’Appel vient d’infirmer le jugement sur les deux fondements et rappelle très
clairement les bases et motivations de chacun des griefs.
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Sur la Concurrence déloyale :
Bien que la Cour affirme que Carrefour et les centres Leclerc peuvent faire fabriquer par des
concurrents de la société SAVANCIA les fromages grand format Cœur Complice et Cœur de
Crème, et donc que tout concurrent peut décliner ces fromages en miniature, elle indique
néanmoins que cela ne confère pas un droit de reprendre les caractéristiques du Mini Caprices
des Dieux qui n’a jamais été fabriqué en MDD.
Après avoir analysé les caractéristiques des trois fromages Mini Caprices des Dieux, Mini Cœur de
Crème et Mini Cœur Complice (produit du même type, de même apparence, de même forme, de
même poids et vendus en nombre identique par lot de trois, dans des étuis qui reprennent de
manière similaire le type, la forme et les couleurs) la Cour d’Appel en déduit que les deux
produits MDD « reproduisent les éléments caractérisant et identifiant » le Mini Caprice des
Dieux qu’il s’agisse du produit, de son étui, de sa présentation, de son mode de
commercialisation, ces éléments n’étant pas nécessaires.
Contrairement au juge de première instance, la Cour rappelle que l’appréciation doit se faire
dans son ensemble et que « même si pris isolément chacun des éléments ne caractérisent pas à
lui seul un acte déloyal, leur ensemble relève de la reprise sans nécessité de multiples
caractéristiques du produit Mini Caprice des Dieux de nature à créer une confusion ».
Cette reprise de l’ensemble traduit donc un comportement déloyal imputable à la société
GUILLOTEAU « attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce ». De plus ces actes
constituent des facteurs de banalisation du Mini Caprice des Dieux.
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Sur le parasitisme :
La société SAVANCIA considère que la société GUILLOTEAU a voulu tirer profit de la réputation
de qualité et de prestige de son produit, sans investissement de conception, de promotion et de
commercialisation, dans le but d’améliorer le résultat de son entreprise. Elle précise d’ailleurs,
que le dirigeant de cette entreprise affirmait dans les colonnes du magazine Réussir Lait et
Elevage intéresser la grande distribution avec « des copies du Mini Caprice des Dieux »…
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La société SAVANCIA démontre de plus la notoriété de son produit auprès des consommateurs et
les investissements publicitaires engagés.
La Cour d’Appel rappelle tout d’abord la définition du parasitisme qui se caractérise
« indépendamment du risque de confusion, par la circonstance selon laquelle une personne, à
titre lucratif et de façon injustifiée, s’inspire ou copie une valeur économique d’autrui,
individualisée et procurant un avantage concurrentiel, fruit d’un savoir-faire, d’un travail
intellectuel et d’investissements, manifestant une volonté de se placer dans le sillage d’un
concurrent pour profiter de sa notoriété ».
Puis elle considère au vu des éléments produits par la société SAVANCIA que la mise sur le
marché des produits litigieux ne serait être fortuite mais procède de la « volonté délibérée de
profiter indument du fruit des investissements d’autrui, de la notoriété acquise » par le Mini
Caprice des Dieux et de se placer dans le sillage de la société SAVANCIA. Elle en déduit qu’il
s’agit donc d’un « comportement fautif lui procurant un avantage concurrentiel pour
développer un produit concurrent » qui caractérise les actes parasitaires reprochés.
Outre les condamnations financières prononcées, la Cour d’Appel interdit à la société
GUILLOTEAU directement ou indirectement la fabrication, la commercialisation et la distribution
des produits litigieux dans la forme, l’emballage et la présentation incriminés.
Cet arrêt qui condamne le fabricant de MDD sur ces deux fondements distincts et justifiés vient
renforcer la valeur économique de la recherche, de l’innovation et du savoir–faire des sociétés
créant de nouveaux produits quels qu’ils soient.
Cette leçon vaut bien un fromage sans doute.
Martine BLOCH-WEILL ([email protected]),
Associée
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