30 ans, en théorie
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30 ans, en théorie
MatMan 30 ans, en théorie Publié sur Scribay le 03/07/2015 30 ans, en théorie À propos de l'auteur "Le secret, c'est d'oser écrire n'importe quoi, parce que lorsqu'on écrit n'importe quoi, on commence à dire les choses les plus importantes. " J.Green À propos du texte Mon enfance a été bercée par le générique de Dragon Ball Z et les parties de pogs dans la cour de récré. Adolescent, des posters de Buffy recouvraient les murs de ma chambre, j'avais un Nokia 3310 et je chattais sur MSN. Aujourd'hui, mon meilleur ami gay est mon colocataire, je suis un libraire au bord de la crise de nerfs et j'écume les soirées où l'alcool coule à flots à la recherche de l'amour avec un grand A. Bientôt j'aurai 30 ans et il est grand temps de mettre un peu d'ordre dans ce chaos ordinaire ; mais je n'avais pas prévu que les anneaux de Saturne viendraient eux aussi y mettre leur grain de sel. Je suis un produit marketing estampillé Génération Y. Un pur rejeton de l'ère de l'entertainment. Je suis votre enfant, votre frère, votre ami. Je suis vous. En pire ! "30 ans, en théorie" est dès à présent disponible en version papier et numérique sur : http://www.librinova.com/shop/mathieu-narbonnet/30-ans-en-theorie Parce que vous, membres de Scribay, m'avez fourni aide, commentaires, encouragements lors de l'écriture de ce roman, je ne le laisse disponible ici sur le site. La version éditée est cependant une version retravaillée et corrigée, alors si le coeur vous en dit de vous replonger dans mes aventures, n'hésitez pas ! Licence Tous droits réservés L'œuvre ne peut être distribuée, modifiée ou exploitée sans autorisation de l'auteur. 30 ans, en théorie Haute Tension Le moteur crachait encore des râles d'agonie semblables à une vilaine toux quand Jill, perdant son sang-froid, s'en est pris à Bateman, l'accusant d'être l'unique responsable du pétrin dans lequel nous nous trouvions. Fatigué de les entendre brailler et ayant jugé inutile de prendre la défense de Bateman, puisque Jill, malgré sa réaction disproportionnée, n'avait pas entièrement tort, je suis sorti de la voiture et l'air glacial de la nuit m'a immobilisé sur place comme autant de lames de poignards me lacérant les chairs. J'ai mentalement fait le point. Il était plus de deux heures du matin, notre voiture en rade sur une route de rase campagne à peine goudronnée probablement connue uniquement des troupeaux de bovins des environs. Évidemment, comme dans un mauvais scénario, nous étions, dans ce lieu inconnu, hors de portée de tout réseau pour tenter d'appeler du secours. Quand finalement nous avons décidé, à l'unanimité, de tenter notre chance de trouver de l'aide en poursuivant la route à pied, ce n'est qu'après deux éreintants kilomètres que nous avons aperçu les lueurs d'une habitation, comme un oasis inespéré en plein désert. Pour y accéder, nous avons longé une interminable allée bordée d'inquiétants bosquets d'où grouillait le lugubre tumulte d'une faune sauvage prête à nous bondir dessus. Arrivés sur le perron d'une bâtisse dont nous ne percevions, dans l'obscurité, à peine les contours, Bateman a sans plus attendre lourdement tapé à la porte. Quelques heures, jours, semaines plus tôt... Si l'on réfléchit à la réaction en chaîne des événements qui nous ont conduits ici, le récent licenciement de Bateman en est le point de départ. Si le chèque d’indemnité qui lui avait été signé lui promettait plusieurs mois d'une vie plus que confortable, c'est son charisme qui en avait pris un coup. Fini le sex appeal du charmeur invétéré, il avait perdu cette étincelle de confiance absolue qui brillait dans ses yeux, si bien qu'aucune proie ne se laissait depuis prendre au piège de ses draps. J'en étais à réfléchir à un surnom bien plus approprié pour l'occasion, celui de Bateman devenant une impudente imposture. C'est en justifiant cet état de délitement avancé et par preuve d'une incommensurable amitié que j'ai convaincu Jill de l'emmener avec nous pour ce week-end originellement annoncé comme un tête-à-tête romantique. Pour nous 3 30 ans, en théorie remercier de notre geste, il nous avait réservé une chambre dans un luxueux hôtel situé non loin du lieu où nous nous rendions: le vernissage de l'exposition d'une vieille amie de Jill et qui voyait l'occasion de revoir nombre de ses anciens camarades d'université. Je n'ai jamais été un grand amateur d'art contemporain, puisque totalement hermétique à la notion d’œuvre d'art dans une mise en scène où deux chaises en rotin sont disposées nonchalamment sur une estrade blanche et recouverte chacune d'une peau de vison teintée d'une couleur fluo. Mais j'ai été encore plus décontenancé par les différentes mises en scène que j'observais depuis maintenant une demie-heure, accroché au bras de Jill. C'était une succession de photographies et des peintures aux différents formats, accrochés aux murs ou suspendus au plafond par de longs fils en nylon. Ils représentaient des corps, nus pour la plupart. Plusieurs écrans illuminaient aussi les différentes pièces de leur lueur blafarde, dont un ensemble de télévisions à tubes cathodiques diffusant en noir et blanc avec quelques secondes de décalage, l'acte sexuelle de trois individus plongés dans une mélasse visqueuse. Je n'ai jamais été prude, ni choqué par les références à la sexualité, vous en conviendrez, mais là, toutes les œuvres dépeignaient la réalité d'un sexe brut. Ni érotique, ni pornographique, je n'aurai su le décrire, néanmoins c'était une représentation qui me mettait mal à l'aise. Pendant que Jill échangeait quelques mots avec une ancienne connaissance, mes yeux s'étaient arrêtés sur un immense collage où une photographie centrale avait figé dans l'instant le corps nu de deux femmes, l'une assise en tailleur, l'air ingénu, cachant maladroitement sa poitrine, alors que la tête de la seconde reposait voluptueusement sur sa cuisse qu'elle embrassait à pleine bouche, une crinière de cheveux dorés dissimulant son intimité. Elles étaient belles, et jeunes. Le regard de l'ingénue me fixait avec une certaine insistance et alors j'en eu le souffle coupé, c'était sans hésitation possible... « Jiiiiiilllll ! » Ma révélation a été perturbée par l'arrivée au pas de charge, comme l'éléphante courant au secours de son petit dans un documentaire animalier, d'une femme rayonnante, l'artiste à l'honneur de cette soirée et accessoirement, la femme à la crinière dorée de la photo. « Jill, je suis si heureuse de te voir ! » Elles se sont prises dans les bras un long moment. Un moment si long qu'il en est devenu gênant au point de vouloir attraper la première bouteille de champagne à portée de main pour la boire d'un trait. Les présentations ont été faites, j'ai aussi eu 4 30 ans, en théorie le droit à mon étreinte, et toutes les deux, aussi excitées qu'à l'annonce de leur première soirée pyjama, se sont aussitôt mises à rire, et à parler si vite et simultanément qu'il m'a fallu quelques minutes pour prendre le fil de leur conversation. « Initialement, l'exposition est composée de cinquante-quatre œuvres, mais faute de place, j'ai dû en sélectionner seulement trente. Je n'en ai pas dormi pendant une semaine tellement le choix a été difficile. Sélectionner les trente œuvres clés qui représente l'évolution de ma sexualité sur ces quinze dernières années. Mais tout ce travail m'a permis de reconsidérer la chose avec recul et ici est finalement représenté le cycle sexuel qui m'emprisonne depuis mon adolescence. Des périodes de batifolages et de curiosités propices aux expériences, voire aux expérimentations, suivi de phases plus stables, misant plus sur la qualité de l'acte, sur la jouissance absolue. J'ai déjà reçu les louanges de deux journalistes spécialistes de l'art présents ici ce soir, je suis aux anges. Le sexe s'est tellement démocratisé cette dernière décennie, aujourd'hui même les femmes regardent et produisent du porno. Enfin, assez parler de moi ! Raconte-moi tout ! J'ai été si heureuse de te retrouver après toutes ces années. » Pendant que Jill lui contait l'aventures de ces dix dernières années, j'ai cherché Bateman du regard dans la salle. Je l'ai trouvé en pleine tentative de charme sur une jeune femme qui a finalement pris la fuite vers un groupe de personnes riant aux éclats à la première occasion venue. J'ai ressenti de la peine pour lui, avant de le voir, semblant ne pas être refroidi par un quelconque refus, s'attaquer à une autre demoiselle quelques mètres plus loin. J'ai ressurgi dans la conversation, comme d'instinct, au moment où Jill reprit la parole. « Regarde-les tous. Il y a une dizaine d'années de cela, nous étions tous les mêmes. Et aujourd'hui, on a vieilli, ils ont vieilli. Ils ont rencontré quelqu'un et ils ont mis un gamin en marche. Ils ont acheté une maison, alors ils se tuent à la tâche, avalant à leur pause déjeuner de l'insipide junkfood dans l'espoir d'économiser trois sous et rembourser plus rapidement leur endettement sur vingt ans. Puis le soir ils rentrent chez eux dans leur intérieur inspiré par Valérie Damidot, paient les factures, font leurs comptes et entendent les pleurs strident de bébé. Alors ils se disent que ça serait bien d'en avoir un deuxième pour tenir compagnie au premier. Et ils bossent toujours plus, ils rentrent le soir, regardent le journal télévisé, les Experts, ne sortent plus que le samedi soir, et encore... Ils se saignent pour payer la nounou, trouvent in extremis une place en crèche et participent aux réunions parents/élèves où ils s'entendent dire que leur enfant ne sera pas un futur Nobel. Puis ils se croient 5 30 ans, en théorie heureux malgré tout, alors certains ont l'entreprise de concevoir un troisième rejeton, d'autres s’aperçoivent que l'illusion a assez duré alors ils s'arrêtent là. À quoi bon ? Ils mourront probablement d'un accident cardiovasculaire lié au stress de leur vie médiocre. Égoïstement, ma liberté de vivre comme je l'entends est probablement ce à quoi je tiens le plus, c'est comme un deuxième vagin. Alors tout ça, non merci. Je passe mon tour. » Le choc fut tout aussi important qu'en buvant ses paroles avec une immense douleur dans le gosier, je réalisais que ils c'était aussi moi. J'étais devenu au fil de ces derniers mois l'allégorie suprême de ce conformisme confortable. Jill m'avait provoqué cette envie, celle d'un couple uni, celle d'une maison, celle du cri des enfants, celle d'une vie illusoire mais parfaite. Parce que c'est notre lot à tous. Parce que nous sommes formatés depuis notre plus jeune âge à ressentir ce désir. Mais Jill, apparemment, n'était pas de ceux-là. J'avais secrètement des rêves sur un avenir, proche ou lointain, ils s'effondraient dans le concert de râles orgasmiques diffusées par les écrans de télévision. Sonné par KO, je me suis éloigné sans demander mon reste, errant au milieu des convives aussi cooltivés les uns que les autres à la recherche de Bateman. À les observer, la majorité des ces personnes portaient des fringues vintages et j'aurai parié que la moitié collectionnait les vinyles tandis que les autres pratiquaient la photographie ou tout autre sorte d'art visuel. Une bande de bobos prétentieux antitélé, écolo et humanistes, se gargarisant d'être allé voir un film introspectif, chimérique et avant-gardiste, ce que tout le monde qualifie de chiant, ennuyeux et indigeste, tout autant d'adjectifs pour décrire cette soirée. Je suis resté distant envers Jill jusqu'à notre départ de la galerie et mon explosion de colère n'est intervenue que quelques heures plus tard, alors que nous étions garés sur le parking de l'hôtel dans l'attente que Bateman règle quelques derniers détails à la réception. « Pourquoi ? Tu veux savoir pourquoi je réagis comme ça ? Parce que ce soir j'en ai appris plus sur toi que durant tout ce temps passé ensemble ! Ce discours sur un hypothétique futur...c'est vraiment ce que tu penses ? Tu ne désires donc pas profiter du bonheur et de l'amour qui te tombes dessus? Fonder un jour un foyer ? Je sais. Je sais qu'il est beaucoup trop tôt pour l'envisager, mais ton discours semblait si définitif, sans aucune concession ! Est-ce donc si inenvisageable ? Et puis cette photo... Te découvrir nue avec ton amie de jeunesse n'est pas le problème, sauf que tu as oublié de mentionner que vous vous broutiez le minou entre deux cours 6 30 ans, en théorie d'amphi ! Ce n'est pas de la jalousie... quoique peut-être un peu et si la plupart des hommes sont excités à la vue de deux femmes ensemble, moi pas ! Et encore moins s'il s'agit d'une de tes ex ! Voilà la Jill que j'ai découvert ce soir et j'ai l'impression d'avoir été trompé. Trompé sur l'idée que je me faisais de toi, de nous ! » Avant qu'elle n'ait le temps de répondre à mes attaques, Bateman est réapparu, arborant un rictus gêné. « Je suis désolé de devoir remettre votre engueulade à plus tard mais disons qu'on a comme un petit problème... » Il nous a expliqué qu'il avait malencontreusement omis de confirmer la réservation des chambres et que de ce fait, elles avaient été relouées. Si l'hôtel n'avait pas été complet cette nuit-là, l'affaire aurait été arrangée. Ce qui n'était pas le cas. Je crois que Jill a répandu toute la rage de notre dispute, ou tout du moins des reproches que je lui avais adressé sans qu'elle n'ait le temps d'y répondre, en insultes à l'égard de Bateman. Nous avons repris la route à la recherche d'un endroit où passer le reste de la nuit, jusqu'à ce que la voiture décide elle aussi de nous abandonner à notre bien triste sort au beau milieu de nulle part... Le toc toc de Bateman contre la porte a résonné dans la nuit, nous figeant dans l'anxieuse attente d'une réponse. Un chien a aboyé au loin, puis il y a eu des bruits sourds à l'intérieur durant une minute avant que finalement les gonds de la porte ne se mettent à grincer, s'ouvrant sur la silhouette effrayante d'un homme dans le contre jour de la faible lumière intérieure. Malgré sa petite taille, il était d'une imposante carrure, le crâne parsemé de quelques touffes de cheveux ébouriffés. La cinquantaine bien entamée en apparence, il était vêtu d'un bleu de travail souillé de tâches brunâtres, dont certaines encore fraîches. Le visage d'Hannibal Lecter m'est furtivement apparu en tête, image que je me suis empressé de chasser. Après lui avoir exposé notre situation, il nous a invité à rentrer dans un patois presque incompréhensible, nous expliquant qu'il n'avait pas de téléphone en état de fonctionnement mais pouvait nous héberger jusqu'au petit matin où il nous conduirait alors au village le plus proche pour faire venir une dépanneuse. Faute d'autres choix, nous avons accepté. Alors qu'il a disparu dans la cuisine pour nous préparer un café chaud et revigorant, nous avons pris place dans le salon. De toute ma vie, je n'avais jamais vu aussi lugubre décoration. Parmi les trophées de chasse, têtes de sangliers, cerfs et autres gibiers décapitées et encadrées au mur, trônait l'immense canevas d'un paysage 7 30 ans, en théorie bucolique aux couleurs ternies. Il régnait dans la pièce une odeur âcre de renfermé et de moisissure. Pendant qu'un sentiment de malaise s'emparait de moi, Bateman est parti en exploration dans le couloir adjacent. Alors qu'il s'approchait d'une lourde porte en métal placée sous l'escalier menant à l'étage, nous avons tous les trois sursauté au cri menaçant de notre hôte qui avait par surprise fait sa réapparition. « Ne touchez pas cette porte ! » J'ai ravalé ma salive alors qu'un frisson me parcourait la colonne vertébrale avant de balbutier quelques mots embarrassés. - Il est désolé ! Nous sommes désolés, nous ne voulions pas vous déranger. Peut-être qu'il vaudrait mieux que nous retournions à notre voiture en attendant le matin. - Ne dîtes pas de bêtises, voyons ! Vous attraperiez une pneumonie en passant la nuit dehors, et les bois sont pleins de bêtes que vous ne voudriez pas croiser, croyez-moi! Buvez votre café et ensuite je vous montrerai la chambre où vous pourrez vous reposer. Nous avons bu notre café en silence, alignés en rang d'oignons sur le canapé, s'interrogeant à chaque gorgée si le breuvage ne contenait pas quelque poison, puis nous sommes montés dans la chambre indiquée par le propriétaire. Une pièce dont la décoration n'avait rien à envier à celle du salon, il était désormais certain que je ne fermerais pas l’œil de la nuit. Jill et moi étions allongés sur un lit aux ressorts hurlant à la mort à chacun de nos mouvements. Bateman avait pris place sur un fauteuil délabré dans un coin de la pièce. Nous étions alors immobiles et silencieux, à l’affût du moindre bruit suspect, comme dans tout bon film d'horreur qui se respecte, le calme apparent avant le déchaînement de violence, les cris, la tentative de fuir et le sang qui coule. Il y eut d'abord le crissement d'une porte, un parquet qui craque puis la symphonie sinistre d'un vacarme étouffé en provenance du sous-sol. Le bourdonnement d'une machine, froissements de tôle, cliquetis métalliques, grincements méthodiques, et un énorme boum ! Bateman a bondi de son siège en hurlant. « Il est hors de question que je reste une minute de plus dans la maison de Leatherface ! » Jill, loin d'être rassurée, s'est pourtant élevée contre cette décision de quitter la maison, exposant que nous étions tout de même plus à l'abri ici que dans l'obscurité glaciale de l'extérieur. Le ton est monté et pendant que je les suppliais de parler moins fort, plusieurs mots ont été prononcés : désaxé, malade mental, je ne mérite pas de mourir dans le kilomètre carré le moins peuplé du pays et je ne viendrai pas te chercher si tu finis suspendue à un crochet de boucher. Le silence s'est abattu sur notre trio quand nous avons remarqué la silhouette du dit psychopathe nous observant sur le pas de la porte. Alors que nous avions les yeux rivés sur lui, prêts à 8 30 ans, en théorie nous défendre de quelconque attaque, il a tourné la tête pour finalement poursuivre son chemin sans dire un mot. Quelques heures plus tard... Nous avions repris la route depuis deux heures et aucun de nous trois n'avait daigné ouvrir la bouche, à l'exception de Bateman qui ronflait sur la banquette arrière. Leatherface nous avait accueilli gaiement à notre réveil et après un café rapidement avalé, nous avions pris la direction du village, installés à l'arrière de sa fourgonnette. Sa vieille maison, tout compte fait, n'avait plus grand chose d'effrayant à la lumière du jour et je me suis senti stupide et désolé de notre comportement. Je l'ai chaleureusement remercié pour son hospitalité avant qu'il ne s'en retourne pour sa cave mystérieuse. Quelques centaines d'euros en réparation plus tard, nous étions donc là, sur le chemin du retour. Le silence d'une nuit d'angoisse laissant désormais place au silence des reproches et de la colère, à la rancune d'une scène de jalousie inachevée, à l'incertitude d'un avenir trop vite écrit. Notre premier week-end romantique en tête-à-tête s'était finalement transformé en une grave dispute, notre première crise. Nous étions si loin de nos habitudes, de nos draps, de nos lectures. Le cocon s'était lézardé. Elle a posé sa main sur ma cuisse pendant que je conduisais, tournant le regard vers le paysage brumeux défilant derrière la vitre. Je lui en voulais, énormément. Ou peut-être qu'après tout ce n'était pas si grave que ça... 9