ccas.fr culture / autour du livre >> le 18 Salon du livre et de la presse
Transcription
ccas.fr culture / autour du livre >> le 18 Salon du livre et de la presse
ccas.fr culture / autour du livre >> >> >> le 18e Salon du livre et de la presse jeunesse Montreuil (Seine-Saint-Denis) du 27 novembre au 2 décembre Le salon… Les livres et la jeunesse ont tenu salon Du 27 novembre au 2 décembre, s'est tenu le 18e Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil. La plus grande librairie du monde pour les enfants, avec ses 170 éditeurs, était à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Cette année pour la première fois, les journaux pour enfants (voir article) font leur entrée au milieu des livres. Tous les secteurs sont ainsi représentés : la bande dessinée, les illustrateurs, les romans, les documentaires, le multimédia. Si les tentations sont grandes de transformer cette manifestation, née en 1984 de la rencontre d'une passion et d'un public, en exposition à finalité purement commerciale, le Salon du livre et de la presse jeunesse va au-delà de toute dimension marchande, même si les éditeurs viennent y vendre beaucoup de livres. Néanmoins il demeure un formidable lieu d'informations, de débats, où se croisent libraires, bibliothécaires, enseignants, éducateurs, parents et une multitude d'enfants mis en présence des livres les plus créatifs, qu'on ne rencontre pas facilement ailleurs. L'édition jeunesse (voir encadré) invente sans cesse. Il y en a pour tous les goûts, pour tous les âges, des livres à tous les étages, pour les petits et les grands lecteurs, pour rire, pour réfléchir, pour rassurer, pour imaginer… Le petit bonheur de ce salon unique : c'est d'assouvir sa passion du livre, découvrir des livres différents, repérer des éditeurs innovants, rencontrer de nouveaux créateurs, mettre un visage humain derrière un livre, faire provision de coups de cœur… Innovation 2002 : 13 éditeurs de la presse jeunesse entrent au Salon Depuis les années 70 et 80, la presse jeunesse marquée par sa diversité est particulièrement créative et novatrice en France, en abordant les grands problèmes de société. Aujourd'hui, plus de 2 enfants sur 3 lisent régulièrement un titre de presse pour les jeunes parmi les 80 publications existantes. Près de 2000 parutions annuelles, soit 50 000 pages inédites (textes et images) sont proposées à ces 12 millions de lecteurs, âgés de 9 mois à 20 ans. Cet espace ouvert à la création participe activement à l'acquisition de savoirs fondamentaux, à l'accès à la culture et à l'information dès le plus jeune âge. Jeux, bandes dessinées, reportages, conseils… donnent aux revues ce petit supplément de convivialité absent des livres. Complémentaires les livres et les journaux se sont inspirés les uns des autres, et ont réduit leurs différences. Certains magazines de lecture comme J'aime lire, sont plus proches du livre de poche que du journal. Ainsi la presse, par ses tirages, la régularité de ses parutions, devient un laboratoire d'essai pour les éditeurs qui publient régulièrement des textes parus initialement en magazine. La lecture de la presse, recommandée officiellement par l'Éducation Nationale et beaucoup d'enseignants, est un outil de premier plan, à la fois pour la lecture et l'information. D'où la nécessité d'une presse très diversifiée, pluraliste, pertinente dans les contenus débouchent sur la notion d'engagement de l'enfant dans la citoyenneté active. Sources : Syndicat de la Presse des Jeunes. La vitalité de l'édition jeunesse Avec 2,35 milliards d'euros, l'édition a enregistré dans son ensemble en 2001 une croissance de 2,9% de son chiffre d'affaires (supérieure à la croissance du PIB qui était de 2%). La production en nombre d'exemplaires a connu une progression forte (+ 6,9%). Ce sont les livres en format de poche qui connaissent l'évolution la plus sensible : les ventes augmentent de + 10% (5,5% en 2000). Dans ce contexte général satisfaisant, les livres pour la jeunesse connaissent eux aussi une hausse fort honorable : l'augmentation de leurs ventes en valeur est de + 3,8% ce qui est notable après une année 2000 exceptionnelle 63 524 000 exemplaires ont été vendus (61 239 000 l'année précédente), ce qui représente 17,7% du nombre total de livres vendus en France. Le tirage moyen des livres pour la jeunesse (10 011 exemplaires par titre) est légèrement supérieur au tirage moyen dans l'ensemble de l'édition (8 306 exemplaires par titre). On peut noter que l'engouement général pour le livre de poche est notable aussi dans le secteur jeunesse puisque 3 385 100 livres jeunesse format poche ont été vendus, ce qui représente plus de la moitié de la vente globale des livres jeunesse en 2001. Sources : statistiques 2001 du syndicat National de l'Édition. Le colloque… Les métamorphoses du monde Dans le cadre du 18e Salon du livre et de la presse jeunesse, un colloque international s’est tenu autour du thème de la mondialisation. A quelques mois d'une nouvelle négociation au sein de l'organisation mondiale du commerce, il est primordial de s'interroger sur le thème : culture et mondialisation. En 1994, ces mêmes négociations avaient reconnu, sinon en droit, du moins en fait, l'exception culturelle. Aujourd'hui, la pression de la culture dominante et mercantile encourageant les replis identitaires sclérosants est forte pour mettre un terme à cette exception, c'est-à-dire de rendre illégales toutes les mesures qui visent à préserver la diversité culturelle. Garantir la diversité culturelle et les conditions de sa diffusion conduit donc à exclure les biens culturels des négociations commerciales. Ainsi la voie resterait ouverte à des cultures vivantes qui dialoguent, se croisent et s'enrichissent mutuellement. La diversité culturelle n'est-elle pas un bien commun de l'humanité, inaliénable ? Tout le monde parle de la mondialisation. Portée aux nues ou combattue, réduite à ses dimensions économiques ou construite pour être au service des peuples, instrument de domination ou objet de partage, que se cache-t-il derrière ce simple mot de mondialisation. Les 25 et 26 novembre derniers, écrivains, économistes, artistes, sociologues, philosophes ont disséqué cette notion et ont livré leurs analyses, au cours du colloque international, précédant l'ouverture du 18ème Salon du livre et de la presse jeunesse. Autant de points de vue personnels et de recherches collectives au service du projet culturel qui nous est commun. Les Métamorphoses du monde : cultures, littératures et mondialisation, thème du colloque, dont la CCAS est partenaire, est porteur de questionnements et d'enjeux importants. Colloque : "décrypter, interroger, comprendre" Mondialisation, globalisation… culture et économie Tous les grands mythes des civilisations parlent, chacun à leur manière, de l'origine du monde. Aujourd'hui nous ne savons plus lire nos propres mythes, nos propres histoires. "L'histoire que nous voulons entendre à travers nos mythes est celle que nous voulons subir. Nous sommes toujours en danger de devenir fous car nous ne connaissons pas nos histoires. Nous sommes dans l'obligation de connaître nos images, nos histoires pour comprendre nos symboliques" déclare l'écrivain Alberto Manguel. Tous les mythes évoquent un monde unique, sans frontières. N'est-ce pas déjà là, la naissance d'une certaine idée de la mondialisation ? L'histoire de la mondialisation s'inscrit à travers les siècles, dans le temps et dans l'espace. Le philosophe François de Bernard la met en perspective et la recadre avec la "vague de la mondialisation" apparue à la fin des années 80. À la lumière de l'histoire, intitulée de son intervention, il analyse de manière pluridisciplinaire le monde et la mise en mouvement de ce monde. "Le monde est un concept culturel, différent de celui de la planète ou du cosmos, qui s'est forgé au cours de la civilisation grecque du V° siècle, où Aristote s'interrogeait déjà sur la cité". Aujourd'hui, la mondialisation est portée par des idées néo-libérales qui ont trouvé un terrain favorable avec la conjonction géopolitique, l'ouverture du mur de Berlin à l'Est, l'émergence des nouvelles technologies d'information et de communication (les NTIC). "Identifiée comme mondialisation, ce phénomène n'est qu'une forme de globalisation -le globe n'étant pas le monde, qui dissout la dimension de la citoyenneté et de la politique". La globalisation basée sur l'économie, les finances, l'industrie, est une privatisation du monde. "On n'a jamais été aussi loin dans l'invalidation du social, du politique". Dans la mondialisation, il ne faut jamais oublier que le monde n'est pas la planète. Le village global n'est pas la cité. "Les habitants du village global sont des consommateurs qui se moquent de la citoyenneté, de l'origine des cultures". L'économie a construit une machine dont le seul but est de faire profit de tout, sans se demander à qui ça peut bénéficier. "Nous pensons vraiment être partout, en même temps. Le danger, c'est d'être partout et nulle part" précise Alberto Manguel. Au cœur de la mondialisation, il y a la contradiction entre "l'appétit de domination du monde économique et l'appétit du partage et des hommes qui résistent en s'ouvrant au monde" conclut François de Bernard. Colloque : médias et mondialisation(s) Dire, créer, résister… pour une information pluraliste Depuis une dizaine d'années, un seul système économique organise la vie sociale suivant le modèle des États-Unis d'Amérique. Le discours néo-libéral prône les libertés industrielles et défend l'idée qu'il faut tout contrôler. De fait, la liberté de la presse ne représente plus la liberté. "L'élite n'a pas à contrôler l'information, elle lui appartient" dénonce Serge Halimi, journaliste au Monde Diplomatique. Quand en France, seule une demi-douzaine de groupes -dont Hachette qui possède entre autres 70% de l'édition- contrôlent les médias, comment les journalistes peuvent-ils travailler librement, s'ils sont employés par les investisseurs, distributeurs, décideurs qui possèdent ces médias ? "On ne mord pas la main qui nous nourrit" assène S. Halimi. L'autonomie relative des médias disparaît. Soumise aux pressions du marché, tributaire de l'audience, l'information est une marchandise. Aujourd'hui, l'information désinforme au profit de l'émotion, du sensationnel, de l'audimat, des publicitaires. L'information sacrifiée ne doit pas être un divertissement racoleur. La pensée unique, de marché, qui traduit les intérêts du capital mondial, est propagée dans les organes de presse qui n'offrent au citoyen qu'un pseudo débat. La pluralité des titres ne traite pas l'information plurielle. La communication répétée du même type de message, d'un pays à l'autre, empêche la pensée de voyager. Dans sa brillante intervention Médias et mondialisations, Serge Halimi cite George Orwell "Dire aux gens ce qu'ils n'ont pas envie d'entendre". Bien informer ce n'est pas distraire, ni vendre, ni de faire vendre. "Combattons pour une information pluraliste. Contre la concentration croissante du pouvoir industriel, la puissante rentabilité économique, le leadership américain, des résistances se tissent. Le conditionnement n'aboutit pas toujours. La vie sociale et intellectuelle existe en dehors du petit écran. Nous possédons le pouvoir d'écrire, d'agir et espérons convaincre". (lire L'intervention politique de Pierre Bourdieu) Colloque / Propos recueillis François Salvaing, écrivain -"La littérature ne cesse de dire que chaque être humain écrit le monde. Elle ne se réduit pas à des images. Elle se situe nulle part qu'en elle-même, elle interroge le réel mais pour le raconter. Mais voilà, on craint l'imaginaire." -"L'opération Harry Potter se répète de façon fréquente. Des livres traduits dans différentes langues sortent au même moment. La tendance dominante est de traduire les livres américains qui représente le marché et non la réalité littéraire. Sur les 380 romans français sortis à la rentrée 2002, combien passeront le cap des 5000 exemplaires ?" Tanella Boni, philosophe, écrivain ivoirienne -"Que signifie ce mot monde ? Partage et culture, essayons de montrer ce qu'il y a de commun à l'humanité. Nous naissons nus, mais quel que soit l'endroit du monde, quelle que soit notre origine, nous naissons habillé de culture. Aujourd'hui, l'humanité est en souffrance, car nous ne parlons plus, ne dialoguons plus ensemble, à cause de l'économie du marché, de la globalisation." -"La diversité culturelle est la conscience que chacun à d'appartenir à un temps et un espace. Les cultures se multiplient à la croisée des traditions (objet de transmission, d'apprentissage de génération en génération) et de s'adapter à l'autre, aux autres. Ainsi on construit son identité en perpétuelle mutation." -"L'histoire nous apprend qu'il y a des cultures mineures, non émancipées et des cultures dominantes qui accompagnent le globe qui font disparaître l'humain mis entre parenthèses". Dossier réalisé par Frédérique Arbouet