Vieillir et s`aimer encore - Théâtre des Marionnettes de Genève
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Vieillir et s`aimer encore - Théâtre des Marionnettes de Genève
12 CULTURE LE COURRIER JEUDI 25 FÉVRIER 2016 Le monde selon Sagan EXPOSITION • Des photographies inédites retracent la vie littéraire de l’auteure de «Bonjour Tristesse» à l’espace culturel du Boléro à Versoix. MAXIME MAILLARD Inaugurée en avril dernier, la galerie du nouveau centre culturel Boléro à Versoix accueille la première exposition consacrée à l’écrivaine Françoise Sagan (1935-2004). Déjà présentée à Paris au printemps 2015, cette dernière fait la part belle aux étapes-clés de la vie littéraire de la bourgeoise de Carjac, née Quoirez, Sagan étant un pseudonyme emprunté à l’univers de Proust. Avec pour fil rouge une succession chronologique de panneaux articulés autour des dates de parution de ses livres, de Bonjour Tristesse (1954) à Derrière l’épaule (1998), en passant par La Garde du coeur ou Le Lit défait. Un choix documentaire visant à rétablir l’image d’une écrivaine dont la postérité a davantage retenu ses extravagances que le statut littéraire de son travail. «J’ai tenu à mettre en lien écriture des livres et vie intime, explique Denis Westhoff, commissaire de l’exposition et fils de l’écrivaine, né en 1962 de son second mariage avec le mannequin américain Robert Westhoff. Car on parle plus de ses frasques, comme le fait qu’elle conduisait pieds nus, que de ses œuvres. Et aujourd’hui, elle est presque un auteur classique, étudié dans beaucoup de classes de français à l’étranger.» Phénomène médiatique Intitulée «Liberté d’écrire, liberté de vivre», l’exposition présente un ensemble de photographies inédites, issues du fonds d’archives photographiques de France Soir (acquis par la Ville de Paris lors de la disparition du journal en 2012), et de la collection Roger-Viollet. Le visiteur découvre ainsi Françoise Sagan en pleine séance d’autoportrait au polaroïd devant sa psyché à Paris. Une image qui fera la couverture du Magazine littéraire à la fin des années 1970, et qui illustre le rapport passionné qu’elle entretient avec l’appareil photographique, dont elle possédait de nom- EN BREF DANSE ET MUSIQUE, GENÈVE Danse et musique en deux solos L’Abri accueille le danseur et chorégraphe malien Tidiani N’Diaye, qui s’est formé à Bamako avant Angers et Montpellier. L’artiste a fondé la compagnie Copier Coller, centre de danse, de ressources multimédia et de création artistique pluridisciplinaire, actif entre le Mali et la France. Il présentera demain et samedi un premier solo Moi, Ma Chambre, Ma Rue, oscillant entre le désordre d’une chambre bamakoise et le chaos des rues de la capitale malienne où s’empilent déchets et objets divers. Pour enchaîner ensuite avec Naturel Mystique, alliant mouvement reptilien et prière. Place ensuite aux compositions rock, blues et psyché du Genevois Julien Zumkehr, créées lors de sa résidence à L’Abri en2015. CDT Ve26 et sa27février, 20h, L’Abri –Espace culturel pour jeunes talents, 1, place de la Madeleine; rens. ☎ 0227770077, www.fondationlabri.ch CONFÉRENCE-DJ, GENÈVE L’Iran souterrain Bongo Joe est plus qu’un magasin de disques, c’est le QG d’un bouillonnement culturel qui s’incarne dans la passion du vinyle, l’édition et la réédition discographique (sous l’étiquette Moi J’Connais et désormais aussi Bongo Joe Records) ou encore la pédagogie, à l’enseigne d’«Innervision» – cycle de conférences, concerts ou performances DJ confiés à de fins connaisseurs. Ce jeudi, Sebastien Reier, disquaire de Hambourg, collectionneur de raretés et spécialiste des musiques orientales et extrême-orientales, lèvera le voile sur «L’Iran obscur» (18h). Le voyage musical se poursuivra dès 22h au Cabinet en compagnie des DJ genevois Mr. Cheeky et Rythme de Vie. Vendredi, le trio téléportera ses plaques au Bourg à Lausanne (dès minuit). RMR Françoise Sagan dans son appartement parisien dans les années 1960. SAEML PARISIENNE DE PHOTOGRAPHIE breux exemplaires. Dans la rue, depuis sa voiture, dans la campagne autour de sa résidence d’Équemauville, Sagan capture le réel, jouant de sa propre image, alors qu’elle fait par ailleurs l’objet d’un véritable emballement médiatique. C’est là un des principaux mérites de l’exposition: rendre sensible le «phénomène Sagan», coïncidence d’une écriture qui bouleverse son temps et d’une révolution de l’usage de la photographie dans la presse des années 1950. Avec le brouillage des frontières entre vie privée et vie publique, et l’arrivée des premiers appareils à visée reflex qui rendent la pratique du reportage plus aisée. Entre succès et ennui Preuve en est la prolifération des images de la jeune Sagan à la parution de Bonjour Tristesse, son premier roman au succès fulgurant (850 000 exemplaires vendus en un an) publié à seulement 18 ans. Propulsée à la une de Paris Match, Vue, Elle, l’étudiante à la Sorbonne devient en quelques mois une icône générationnelle. Sur les cimaises du Boléro, la femme de lettres immortalisée dans la salle à manger de son appartement parisien, un livre de Rimbaud à la main, une clope et une tasse de café sur la table, côtoie la femme publique, que l’on découvre à la première de sa pièce Château en Suède, accompagnée de son mari Bob Westhoff. De Paris à Honfleur, dans un photomaton avec Juliette Gréco et Michel Magne, en passant par SaintTropez (aux côtés du photographe Robert Frank), Françoise Sagan mène une existence balancée entre succès et désenchantement, excès et ennui. Notamment suite à un grave accident de voiture (1957)qui la laissera quasi morte, et dépendante à diverses drogues, dont l’opium et l’alcool. Une expérience qu’elle relatera dans Toxiques, le premier volume des ses mémoires. James Dean au féminin L’œil photographique s’immisce partout dans sa vie, et Sa- gan s’en accommode. Avec son allure de James Dean au féminin (jeans, T-shirt, espadrilles), elle incarne une jeunesse éprise de liberté dans une société française d’après-guerre sclérosée et fermée. «Elle a révélé une part de l’inconscient d’une génération, bien avant Brigitte Bardot et Mai 68, incitant les filles à être libres», détaille son fils, qui a aussi puisé dans sa collection personnelle (lettres, livret scolaire) pour garnir les vitrines jalonnant l’exposition. Ce dernier sera d’ailleurs présent ce week-end à Versoix, à l’occasion d’une série d’événements autour de l’œuvre-vie de celle que François Mauriac aimait appeler «charmant petit monstre». I «Liberté d’écrire, liberté de vivre», jusqu’au 13 mars, galerie du Boléro, Versoix (face à la gare) Week-end Sagan: > Ve 26, 20h30, projection du film «Françoise Sagan, l’élégance de vivre», de Marie Brunet-Debaines > Sa 27, 20h30, conférence-débat avec Alain Vircondelet et Valérie Mirarchi > Di 28, 17h, concert-lecture avec Maria Mettral et Michel Bastet. www.versoix.ch/bolero Ce soir à 18h (conférence en anglais), www.bongojoe.ch LITTÉRATURE, GENÈVE Paolo Cognetti lit au Parnasse La librairie genevoise Le Parnasse reçoit lundi l’écrivain Paolo Cognetti pour une lecture croisée et bilingue avec le comédien Claude Thébert, à l’occasion de la parution de son livre Le Garçon sauvage aux Editions Zoé. L’histoire d’un narrateur qui, après dix années passées dans un univers urbain, éprouve le besoin impérieux de rejoindre la montagne, dans un hameau isolé de la Vallée d’Aoste. Il y fait l’expérience de la solitude, avec mélancolie, et affronte une nature parfois hostile. Avec le temps, il finit par trouver ce qu’il était venu chercher: la sérénité, la liberté du corps et de l’esprit, et surtout l’inspiration. MOP Lu 29 février à 19h à la librairie Le Parnasse (6, rue de la Terrassière). CONCERT, GENÈVE Tsiganes du futur Gypsy Sound System est de retour. Le tandem de DJOlga (chanteuse d’origine polonaise) et Raphaël Piuz, alias Dr.Schnaps (accordéoniste et vigneron à Hermance), sillonne la planète depuis onze années, mettant le feu aux pistes avec sa sono tsigane à la sauce electro mêlée de reggae, de hip-hop et autres saveurs relevées. En version orchestrale, Gypsy Sound System s’entoure de cuivres, guitares, percussions et machines pour un live irrépressible. Un nouveau 6-titres baptisé Gypsy Sound System Orkestra Number One est verni ce vendredi à l’Usine, avec un invité de choix, le Britannique DJScratchy, ainsi que les vétérans genevois du ska Gingala. RMR Ve 26février, 23h, Usine, www.kalvingrad.com Vieillir et s’aimer encore SCÈNE • Des marionnettes sidérantes de réalisme incarnent des personnes âgées en EMS dans «Silence». Un regard tendre et émouvant sur la vieillesse par le Night Shop Théâtre. nettes de Genève (TMG). La première pièce de leur compagnie Night Shop Théâtre, fondée en 2011, leur a valu de belles récompenses dans leur pays. Elle y a notamment reçu le Prix de la Ministre de la jeunesse et le Prix de la Critique de la presse francophone de Belgique en 2014. «Silence». YVES KERSTIUS CÉCILE DALLA TORRE Le thème alimente autant la fiction cinématographique que le théâtre. Mais quand la vieillesse se mêle à l’amour, il devient d’autant plus rare et complexe à traiter. Fortes de leur vécu, les comédiennes belges Julie Tenret et Isabelle Darras se sont lancées dans l’aventure avec Silence, à voir jusqu’à dimanche au Théâtre des Marion- Elise et Jean y forment ce couple d’octogénaires en EMS qui pourrait presque ressembler à Emmanuelle Riva et Jean-Louis Trintignant dans Amour, de Michael Haneke. Sauf qu’ici, c’est par l’hyperréalisme de marionnettes à taille humaine, rappelant les sculptures en silicone de Ron Mueck, que se brosse une histoire de vie touchante. Par une longue observation de ces infimes gestes du quotidien, baignés de lenteurs et de maladresses, de petits péchés de gourmandise bien affirmés et de la nécessaire remémoration du passé, les deux comédiennes et leur metteur en scène Bernard Senny ont tissé une intimité emplie de tendresse chez ce couple attachant. La manipulation à vue par le duo de marionnettistes, qui prêtent leurs mains à celles des personnages, leur confère un réalisme poignant. Si leur entreprise est réussie, c’est aussi parce qu’elles incarnent sur scène le rôle d’aides-soignantes complices et empathiques, loin de refléter la réalité du terrain. Un milieu qu’elles ont côtoyé de près, notamment Isabelle Darras, qui travailla dans un home durant ses études. Mais c’est aussi parce qu’elles dessinent ici un portrait du grand âge inspiré de leurs propres grands-parents, Jean évoquant le grandpère de Julie Tenret et Elise la grand-mère d’Isabelle Darras. Silence aborde également les vides laissés par la mémoire, suggérant implicitement la maladie d’Alzheimer, ainsi que le drame de l’absence physique, lorsque l’autre est fauché par la mort en premier. Un spectacle-hommage au troisième âge qui pétille de vie et d’altruisme. I Dès 10ans. Jusqu’au 28février, je 25 à 19h, ve 26 à 20h, sa 27 à 19h et di 28 à 17h, Théâtre des Marionnettes de Genève, rés.☎ 0228073107, www.marionnettes.ch THÉÂTRE MUSICAL, GENÈVE Le secret des perles de verre Avant une tournée francosuisse, Patrick Mohr reprend Les Larmes des hommes au Théâtre de La Parfumerie. Une pièce musicale et métissée autour de nouvelles réunies dans Le Fil des missangas de Mia Couto (notre critique du 7mars2014). Une missanga ou «perle de verre», «tout le monde peut la voir, mais nul ne remarque le fil qui rassemble les perles en un collier coloré. Ainsi est la voix du poète. Un fil invisible de silence recousant le temps», écrit l’auteur mozambicain qui parle ici d’amours, de blessures, de femmes et d’enfants, réinventant leurs rêves autant que le réel. A noter que les représentations de vendredi et samedi seront également assurées en langue des signes en collaboration avec les interprètes du projet Sourds & Culture. CDT/JEAN MOHR Jusqu’au 28 février, Théâtre de la Parfumerie, Genève, puis en tournée rés. ☎ 022 341 21 21 www.laparfumerie.ch