Le lait et la croissance des enfants: les effets des protéines du

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Le lait et la croissance des enfants: les effets des protéines du
Le lait et la croissance des
enfants: les effets des protéines du
lactosérum et de la caséine
Christian Mølgaard, Anni Larnkjær, Karina
Arnberg et Kim Fleischer Michaelsen
La consommation de lait de vache pendant l’enfance est recommandée dans de nombreux pays. Les protéines et les minéraux qu’il
apporte sont nécessaires pour la croissance. Cependant, sa teneur en
protéines est très différente de celle du lait humain, tant en quantité
(environ 3 fois plus élevée), qu’en qualité: le rapport caséine/lactosérum
étant de 20/80 dans le lait de vache et de 60/40 dans le lait humain. La
composition du lait humain étant considérée comme optimale pour
une croissance normale chez le nourrisson, la quantité de protéines
et le rapport caséine/lactosérum ont été ajustés dans les préparations
pour nourrissons de façon à se rapprocher de la composition du lait
humain. Une imitation exacte est toutefois difficile, car la nature et
la teneur des protéines spécifiques dans les fractions de caséine et de
lactosérum sont différentes dans ces deux laits.
Une étude publiée il y a quelques années [1] résumant les résultats d’études observationnelles et interventionnelles conclut que le
lait de vache semble avoir une influence positive sur la croissance des
enfants. Ceci paraît indéniable dans les pays pauvres, bien qu’une telle
association ait également été démontrée par des études observationnelles dans les pays riches [1, 2]. Ainsi, un travail américain récent
réalisé chez des jeunes filles a permis de constater que parmi les différents nutriments et aliments examinés, la consommation de protéines laitières étaient positivement associée à une croissance staturale
importante [3]. Cependant, l’effet du lait sur la croissance ne semble
pas être le même à tout âge [4]. Ainsi, le lait semble stimuler spécifiquement la croissance linéaire, non seulement dans les pays en voie
de développement, où l’incidence de la malnutrition est élevée, mais
aussi dans les pays industrialisés [1].
Les composants du lait responsables de cette stimulation de la
croissance n’ont pas encore été identifiés. Ce pourrait être des protéines, des peptides, des minéraux (calcium, phosphore), des vitamines
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Composants bioactifs potentiels
Protéines
Peptides bioactifs
IGF-1 du lait
Calcium et autres minéraux du lait
Autres composants?
Lait de vache
IGFs
Croissance
Maladies non contagieuses
Fig. 1. Associations possibles entre la consommation de lait, la
croissance et la santé. D’après Hoppe et al. [1].
ou un mélange de ces nutriments. Plusieurs indices basés sur la composition des protéines en acides aminés tels que l’Indice chimique corrigé
de la digestibilité – ou Di-sco (Digestibility Score) et le Protein Digestibility Corrected Amino Acid Score (PDCAAS) ont été proposés pour
évaluer leur qualité [2]. Selon la plupart de ces indices, les protéines du
lactosérum présentent une qualité légèrement supérieure à celle de la
caséine, mais l’influence de ce paramètre sur les effets stimulants de
ces deux protéines du lait sur la croissance reste inconnue.
Selon certaines études, les protéines du lactosérum ont également
le pouvoir d’augmenter la masse musculaire [2], et ainsi d’exercer un
effet bénéfique sur la composition corporelle des enfants. La plupart
de ces études ont été menées par des équipes s’intéressant à la médecine du sport, et ont identifié cette augmentation de la masse musculaire lorsqu’un mélange de protéines laitières à digestion lente et à
digestion rapide (telles que celles présentes dans le lait de vache) est
consommé immédiatement après un exercice d’endurance. Les constituants du lactosérum du lait de vache présentent également un certain nombre d’autres propriétés potentiellement bénéfiques, comme la
capacité de stimuler le système immunitaire, ce qui, dans certains cas,
peut favoriser la croissance.
Le mécanisme par lequel le lait stimulerait la croissance implique probablement une stimulation de la synthèse de facteur de croissance-1 analogue à l’insuline (IGF-1) (fig. 1) [5, 6]. Par ailleurs, le lait
semble aussi induire une augmentation de la sécrétion d’insuline [7],
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hormone anabolisante inhibant la protéolyse et pouvant ainsi favoriser
la croissance chez l’enfant. Dans une étude plus récente, nous avons
montré que les protéines du lactosérum stimulent principalement la
sécrétion d’insuline, tandis que la caséine a un effet plus marqué sur la
synthèse d’IGF-1 [8]. Ainsi, un mélange de ces deux types de protéines,
comme dans les produits issus du lait de vache, peut à la fois induire
une augmentation de la synthèse d’IGF-1 et de celle d’insuline et ainsi
stimuler la croissance.
En conclusion, il existe suffisamment de données pour affirmer
que le lait stimule la croissance linéaire. Le mécanisme n’est pas
encore complètement élucidé et des études interventionnelles complémentaires sont nécessaires pour comprendre quels composants du
lait sont responsables de la stimulation de la croissance. Les effets du
lait sur la croissance linéaire et la taille adulte peuvent avoir des conséquences positives et négatives à long terme.
Bibliographie
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2
3
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