AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 23 MAI 2016 Le Tribunal

Transcription

AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 23 MAI 2016 Le Tribunal
REPUBLIQUE
DE COTE D’IVOIRE
------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
--------------TRIBUNAL DE COMMERCE
D’ABIDJAN
--------------RG N°1012/2016
------------JUGEMENT
CONTRADICTOIRE
DU 23/05/2016
Affaire
La société Corporate
Elite Group dite CEG
(SCPA ALPHA 2000)
Contre
La
société
BRAINSTORMING
(SCPA RAUX, AMIEN ET
ASSOCIES)
----------------Décision
CONTRADICTOIRE
Déclare la société Corporate
Elite Group dite CEG
recevable en son opposition ;
Constate la non-conciliation
des parties ;
Dit la société Corporate Elite
Group dite CEG bien fondée
en son opposition ;
Dit
la
société
BRAINSTORMING
mal
fondée en sa demande en
recouvrement ;
L’en déboute ;
La condamne aux dépens.
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 23 MAI 20161
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience publique ordinaire du 23
Mai 2016 tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient :
Monsieur TRAORE BAKARY, Président ;
Messieurs BAGROU BAGROU ISIDORE, ALLAH-KOUADIO JEAN
CLAUDE, OKOUE EDOUARD et Madame MATTO JOCELYNE
DJEHOU, Assesseurs ;
Avec l’assistance de Maître SEKONGO Minata Evelyne, Greffier ;
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre :
La société Corporate Elite Group dite CEG, société anonyme, au capital
de 21.000.000 F CFA, RC N°CI-ABJ-2015-M-122562, dont le siège social est à
Abidjan-Plateau, Avenue Chardy, immeuble ALPHA 2000, 1er étage, 17 BP 116
Abidjan 17, Tel : (225) 20 21 22 04, Fax : (225) 20 21 22 00, représentée par
son Directeur Général, Monsieur Jean Claude KOUYO, de nationalité
Ivoirienne, lequel fait élection de domicile en cette qualité au siège de ladite
société ;
Laquelle a pour conseil, la SCPA ALPHA 2000, Avocats près la Cour d’Appel
d’Abidjan, y demeurant Plateau, Avenue Chardy, Immeuble Alpha 2000, 1er
étage, Porte 3, Tel : 20 21 65 64, Fax : 20 33 41 37, BP 122 Post’Entreprises
Abidjan, Cédex 1, E-mail : [email protected] ;
Demanderesse d’une part ;
Et
La société BRAINSTORMING, SARL, au capital de 1.000.000 F CFA,
RCCM N°CI-ABJ-2007-B-7024, dont le siège social est à Abidjan-Cocody,
Corniche, face à la société NESTLE, 10 BP 87 Abidjan 10, représentée par son
Gérant, Monsieur TIA Goueu Fernand, de nationalité Ivoirienne, demeurant en
cette qualité au siège de ladite société ;
Ayant élu domicile en l’Etude de la SCPA RAUX, AMIEN ET ASSOCIES,
Avocats à la cour, demeurant à Abidjan-Cocody II Plateaux-Vallons, immeuble
Antilope, 2ème étage, BP 503 Cidex 3 Riviera, Tel : 22 22 41 76 72 / Fax : 22 41
79 14 ;
Défenderesse d’autre part ;
Enrôlée pour l’audience du 09/03/2016, l’affaire a été appelée et renvoyée au
14 Mars 2016 devant la 5ème chambre pour attribution ;
A cette date, le tribunal a procédé à la tentative de conciliation qui s’est soldée
par un échec ;
Une instruction a alors été ordonnée et confiée au Juge BAGROU Isidore, qui a
fait l’objet de l’ordonnance de clôture N°636/2016 du 07/04/2016 ;
2
La cause a été renvoyée à l’audience publique du 11/04/2016 pour être mise en
délibéré.
A cette audience, la cause a été mise en délibéré pour décision être rendue le
09/05/2016 ;
A cette date, le délibéré a été prorogé au 23/05/2016 ;
Advenue cette date, le Tribunal a vidé son délibéré ;
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’échec de la tentative de conciliation ;
Ouï les parties en leurs moyens et prétentions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit d’huissier du 17 Février 2016, la société Corporate Elite Group dite
CEG a formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer N°250/2016 du
21/01/2016 rendue par la juridiction présidentielle du Tribunal de Commerce
d’Abidjan, signifiée le 03 Février 2016 et a assigné la société
BRAINSTORMING, bénéficiaire de la décision à comparaître devant le
tribunal de ce siège le 09/03/2016 à l’effet d’entendre :
-
la déclarer recevable en son opposition et l’y dire bien fondée ;
rétracter l’ordonnance querellée qui l’a condamnée à payer à la
défenderesse la somme de 7.500.000 F CFA ;
condamner la société BRAINSTORMING aux dépens ;
Au soutien de son opposition, la société Corporate Elite Group dite CEG expose
qu’elle est en relations d’affaires avec la société BRAINSTORMING portant sur
des prestations en assistance conseil financier et qu’à ce titre, elle a bénéficié de
sa partenaire diverses prestations dont elle a réglé le coût ;
Par la suite, ajoute-t-elle, elle a entrepris des démarches auprès de la société
BRAINSTORMING à l’effet d’effectuer d’autres prestations « demeurées au
stade de gré-à-gré non matérialisées par un contrat » et c’est dans ces
circonstances que contre toute attente, elle a reçu une mise en demeure de
payer et d’avoir à libérer entre les mains de la défenderesse, la somme de
7.500.000 F CFA que celle-ci présente comme le montant
d’honoraires impayés relatif à l’obtention d’un concours financier de la BACI ;
3
Invoquant l’article 13 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures
simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, elle soutient que la
réclamation de la société BRAINSTORMING ne s’appuie sur aucun contrat,
celle-ci se contentant d’en viser un sans le produire, alors qu’un « contrat
suppose la transcription écrite de la volonté des parties et partant, son
application de bonne foi » ;
Elle ajoute qu’en tout état de cause, la société BRAINSTORMING a obtenu le
financement de la BACI au-delà de la date d’expiration du contrat, puisque les
parties avaient fixé le terme de leur contrat au 31 Décembre 2013 alors que le
financement prétendu a été obtenu le 08 Juin 2015 ;
Elle ajoute que la clause de renouvellement du contrat n’a pu jouer au profit de
la défenderesse puisque son application suppose « la discussion et l’accord des
parties », ce qui fait défaut en l’espèce ;
Elle en conclut que la défenderesse ne rapporte pas la preuve de la certitude de
sa créance et n’a pu valablement emprunter la voie de la procédure d’injonction
de payer pour réclamer sa créance, ce qui, pour elle, doit entraîner la
rétractation de l’ordonnance querellée ;
En réplique, la société BRAINSTORMING expose que dans le courant de
l’année 2011, les parties sont entrées en relations d’affaires matérialisées par la
signature de trois conventions à savoir, une convention d’assistance conseils
financiers conclue le 31/10/2011, une autre dénommée assistance conseils
recherche de financement signée le 1er Mai 2013 et une convention dite
« Mandat » en vue de la recherche de financement le 1er Mai 2013 ;
Elle ajoute que dans le cadre de l’exécution de la convention d’assistance
conseils recherche de financement, elle a entrepris des diligences qui ont
abouti dans une première phase à trouver un nouvel associé qui a injecté des
fonds dans le capital de la société CEG en tant qu’actionnaire, et dans une
seconde phase, à obtenir auprès de la BACI un financement à hauteur de
987.000.000 F CFA, qui a été notifié à la demanderesse ;
Elle indique que suite à cette notification, un rapprochement a eu lieu entre les
parties aux fins de détermination de sa rémunération à l’issue de laquelle ses
honoraires et commissions ont été fixés à la somme de 5.000.000 F CFA pour
l’entrée du nouvel associé dans le capital de la société CEG, et à la somme de
7.500.000 F CFA en ce qui concerne le concours bancaire de la BACI ;
Elle précise que ces deux sommes ont fait l’objet de factures respectives dont
celle de 5.000.000 F CFA uniquement a été réglée par la demanderesse, celle
de 7.500.000 F CFA restant en souffrance à ce jour, malgré les relances
adressées à la société CEG ;
Poursuivant, elle estime que l’argument de défaut de preuve écrite de contrat
soulevé par la demanderesse manque de pertinence dès lors que point n’est
besoin de formaliser un contrat, celui-ci se prouvant par tous moyens ;
4
Elle ajoute que la société CEG soutient ne pas reconnaître la créance alors
qu’en réaction à une sommation qui lui a été adressée, elle a marqué sa
disposition à une rencontre pour définir les modalités d’un règlement amiable ;
Elle conclut que contrairement aux allégations de la demanderesse, sa créance
est bien fondée à en juger les pièces produites notamment les factures
réceptionnées sans réserve et réglées en partie par la demanderesse ;
Elle demande par conséquent au tribunal de dire l’opposition de la société CEG
mal fondée et restituer à l’ordonnance son plein et entier effet ;
SUR CE
EN LA FORME
Sur le caractère de la décision
La défenderesse a conclu ;
Il y a lieu de statuer par décision contradictoire ;
Sur le taux du ressort
Aux termes de l’article 15 de l’Acte Uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution « La décision
rendue sur opposition est susceptible d’appel dans les conditions du droit
national de chaque État partie. Toutefois, le délai d’appel est de trente jours à
compter de la date de cette décision. » ;
En application de ce texte, il y a lieu de statuer en premier ressort ;
Sur la recevabilité de l’opposition
L’opposition de la société CEG a été formée suivant les formes et délais
prescrits par les articles 10 et 11 de l’Acte Uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ;
Il convient de la déclarer recevable ;
AU FOND
Sur le recouvrement de la créance
La société BRAINSTORMING sollicite la condamnation de la société CEG à lui
payer la somme de 7.500.000 F CFA au titre des honoraires résultant de
prestations de recherche de financement ;
5
Contestant la certitude de la créance, la société CEG estime que le financement
a été obtenu au-delà de la période de validité du contrat liant les parties si bien
que la créance n’est pas certaine ;
Aux termes de l’article 1er de l’Acte Uniforme portant organisation des
procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « le
recouvrement d’une créance certaine, liquide et exigible peut être demandé
suivant la procédure d’injonction de payer »;
Il résulte de cette disposition qu’une créance n’est recouvrable par cette
procédure que si la certitude se conjugue avec la liquidité et l’exigibilité de
celle-ci ;
Ainsi, à supposer même établie la certitude de la créance de la société
BRAINSTORMING pour obtention du financement et notifié en temps voulu
conformément à l’article IV comme elle le soutient, encore faut-il que cette
créance d’honoraires soit exigible pour qu’elle puisse être recouvrable par la
procédure d’injonction de payer empruntée ;
Une créance est exigible, lorsque le débiteur ne peut se prévaloir d’aucune
condition pouvant empêcher le paiement de sorte que le titulaire peut en exiger
immédiatement le paiement ;
Or, selon l’article III du contrat liant les parties, « Les honoraires à payer au
prestataire au titre de la présente et leur mode de règlement sont les
suivants :
-
NATURE : Il s’agit de la commission prévue pour rémunérer la
condition du prestataire à l’obtention du financement. Elle est exigible
dès lors que le financement recherché est effectivement accordé et mis
en place par une banque ou un partenaire financier, ou tout autre
partenaire, sous quelques formes que ce soit. Et ce, sur la base d’une
notification d’accord de crédit ou de contribution de toute nature» ;
Ce texte subordonne l’exigibilité des honoraires à deux conditions à savoir :
-
L’obtention du financement ;
La mise en place effective de ce financement ;
Or, si l’obtention d’un financement de 987.000.000 F CFA auprès de la BACI
est prouvé par la société BRAINSMORMING, il n’en est pas de même en ce qui
concerne la mise en place effective de ce financement ;
En effet, en matière bancaire, la mise en place d’un crédit suppose en plus de la
signature du concours entre la banque et le bénéficiaire, l’effectivité de la mise
à la disposition des fonds au profit de ce dernier, ce qui manque en l’espèce ;
La société BRAINSTORMING affirme encore qu’à la suite d’un rapprochement,
la société CEG a accepté de payer la somme de 7.500.000 F CFA réclamée,
6
rendant ainsi, cette créance exigible et en veut pour preuve le courrier de la
demanderesse écrite le 28/12/2015 qui énonce que « Cependant, nous sommes
disposés à rencontrer Monsieur TIA afin de définir ensemble des modalités
d’un règlement amiable de ce différent » ;
Ce courrier ne peut toutefois servir la cause de la société BRAINSTORMING
contrairement à ce qu’elle prétend ;
En effet, le tribunal constate que la défenderesse omet délibérément de faire
noter qu’avant d’inviter à une rencontre, la société CEG a indiqué dans le
même courrier ce qui suit : « Par voie de conséquence nous nous opposons au
recouvrement de la créance » ;
En raison de tout ce qui précède, il y a lieu de dire que la société
BRAINSTORMING n’a pas fait la preuve de l’exigibilité de sa créance ;
Dès lors, il convient de dire que la créance dont le recouvrement est poursuivi
ne remplit pas les conditions requises par l’article 1er précité, de déclarer la
société CEG bien fondée en son opposition, et conséquemment, la société
BRAINSTORMING mal fondée en sa demande en recouvrement et de l’en
débouter ;
Sur les dépens
La société BRAINSTORMING succombe en l’instance ;
En application de l’article 149 du code de procédure civile, commerciale et
administrative, elle doit en supporter les dépens ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et dernier ressort ;
Déclare la société Corporate Elite Group dite CEG recevable en son opposition ;
Constate la non-conciliation des parties ;
Dit la société Corporate Elite Group dite CEG bien fondée en son opposition ;
Dit la société BRAINSTORMING mal fondée en sa demande en recouvrement ;
L’en déboute ;
La condamne aux dépens.
7
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus.
ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.