PlayTime, de Jacques Tati – étudié dans la cadre de l`enseignement

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PlayTime, de Jacques Tati – étudié dans la cadre de l`enseignement
PlayTime, de Jacques Tati – étudié dans la cadre de l'enseignement de l'HidA – niveau Troisième
PlayTime (1967), quatrième long métrage de Jacques Tati (1907-1982) et troisième film mettant en scène le personnage de
Monsieur Hulot, PlayTime est une comédie burlesque sur la modernité.
Synopsis - À l'aéroport d'Orly, à l'aube, un
groupe de touristes américains débarque pour
une visite de 24 heures. On les promène dans
un Paris ultra-moderne et inhumain. De son
côté, Monsieur Hulot comme toujours ne fait
rien de spécial, sinon croiser le groupe de
touristes, attendre en vain dans un nouvel
immeuble construit tout en verre un certain M.
Giffard au creux d'un dédale de bureaux
cubiques, errer dans une foire expo, se faire
happer par un ancien copain de régiment puis
embringuer au Royal garden, un restaurantdancing. Il y retrouve la jeune touriste
américaine croisée dans la journée. L'ouverture
prématurée du restaurant-dancing sera la
source de mille catastrophes mineures.
Le film
L'histoire de PlayTime, anecdotique en apparence, est composée d'une juxtaposition de moments de vie quotidienne
destinée à dresser l'état des lieux général de la France des années 1960. Au cœur des Trente Glorieuses, les années 1960 voient
la mutation de la France s'accélérer avec, pour effets sociologiques majeurs, la fin de la ruralité et l'explosion de la culture de
masse : des transformations urbanistiques à l'avènement de la télévision (seuls 9 % des foyers sont équipés d'un téléviseur en
1958, 42 % en 1965 !). Pour Tati, les années 1960 sont surtout l'époque du culte du gadget et de la culture de masse : les
touristes américaines préfèrent aller au Strand des Arts ménagers (foire exposition) où l'on peut admirer des colonnes-poubelles
grecques plutôt que de visiter le Louvre (la raison "culturelle" de leur passage dans la capitale française n'apparaît que dans les
reflets furtifs des monuments, ces images de la Tour Eiffel ou des autres grands monuments ne sont que la projection fantasmée
d'un Paris de légende qui n'existe que dans l'esprit des touristes comme un produit de grande consommation).
Cette standardisation de masse se retrouve aussi dans l'architecture, chaque grande ville du monde reproduisant la même
architecture (voir les affiches dans l'agence de voyage : Mexico, Tokyo, Stockholm, Hollande, Hawaï... et toujours le même
immeuble !).
Seul lieu d'humanité et de vie : le Royal Garden (lieu de l'oisiveté nocturne opposé au monde diurne du travail). Mais c'est
encore le théâtre d'une sectorisation : la salle de restaurant est l'espace social de la comédie bourgeoise tandis que dans
l'ombre de la cuisine règnent le désordre et l'incompétence.
La fin du film donne cependant le signe de la victoire de l'humain sur les contraintes du progrès : c'est le chaos et la
destruction du décor fragile au profit de l'invitation aux retrouvailles et au partage de l'amitié entre êtres humains socialement
indifférenciés qui agissent enfin librement en réinventant un espace (un club dans le club) dont ils avaient été dépossédés. C'est
enfin le retour de la couleur avec le petit matin : les ouvriers font sortir la terre du trottoir, l'embouteillage du sens giratoire est
transformé en un immense manège, c'est jour de fête avec le départ en vacances.
Un film "burlesque"
Parfaitement adapté au muet, le burlesque est un genre qui se distingue par une abondance de gags visuels plus ou moins
absurdes. Personnage principal, à la fois spectateur et fil narratif du film, Hulot au visage neutre et presque muet, se distingue
moins pour ses caractéristiques physiques que sa démarche particulière qui tient à l'effet burlesque : ses mouvements raides et
saccadés lui donnent des allures de pantin monté sur ressort. Quant à la sobriété de ses accessoires vestimentaires,
imperméable, pantalon trop court, chapeau, pipe et parapluie font de lui un être anachronique qui n'est guère à sa place
partout où il se rend.
Le comique burlesque de Tati naît en partie de la distance qui sépare l'individu du monde moderne et des situations ridicules
qu'elle engendre. Pour Tati, la parole est un bruit comme un autre. C'est pourquoi, réduisant le dialogue au strict minimum ou à
quelques onomatopées, il lui préfère la pantomime et le bruitage.
Pour réaliser son film, Jacques Tati choisi un format de pellicule peu utilisé à l'époque, à part pour les westerns et les peplums :
le 70 mm. Ce format, très large, permet d'inscrire une quantité d'actions différentes dans l'espace d'un même plan. Tati
multiplie les actions et les détails au sein d'une même image élargie : ce n'est plus la caméra qui guide le regard du spectateur
en lui indiquant ce qu'il y a à voir, mais c'est le spectateur lui-même qui doit chercher à lire dans cette "grande image".

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