Ton souffle bon - Fraternités Monastiques de Jérusalem

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Ton souffle bon - Fraternités Monastiques de Jérusalem
Retraite de Pentecôte 2010
Jour 6 • Vendredi 21 mai
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Ton souffle bon
«L
e cheminement de l’homme ne lui appartient pas, mais dépend de l’initiative de l’Esprit son
maître», nous dit aujourd’hui saint Bernard. Ces deux derniers jours de retraite seront
pour nous à la fois un terme et un commencement. Parvenus tout en haut du rocher, nous
ne sommes pas pour autant – et heureusement ! – au bout de l’aventure. L’Esprit Saint est un bon compagnon de route et la route ne fait que commencer !
Avec le psalmiste, nous prions aujourd’hui en demandant : «Que ton souffle de bonté me conduise
par une terre unie» (Psaume 143,10). Cette terre, c’est l’image de notre vie. À quoi servirait une retraite
si elle ne nous transformait pas au moins un peu ? En six strophes, le psalmiste semble parcourir toute
sa vie sous le regard de Dieu : un cri de confiance et d’humilité, un appel au secours, une anamnèse des
œuvres de Dieu, et puis, tourné vers l’avenir cette fois, une profession de foi qui l’engage résolument sur
le chemin de la confiance : «Je compte sur toi (…), je suis ton serviteur» (Psaume 143,8.12). Et s’il arrivait
qu’il soit «à bout de souffle», il ne craindrait pas car il sait que le «souffle bon» de l’Esprit de tendresse
toujours le conduira.
Au centre du psaume, un verset nous donne la clef de cette sixième journée de retraite : «Je me
redis toutes tes œuvres» (Psaume 143,5). Puisque nous sommes aujourd’hui dans le cloître de l’abbaye,
mettons à profit la grâce particulière de ce lieu de méditation et de lent cheminement pour nous «redire
toutes les œuvres» de Dieu en notre vie. Son Esprit, qui va à nouveau nous être donné en plénitude en
cette fête de Pentecôte, ne viendra pas nous distraire de la réalité concrète, quotidienne, de notre vie,
mais la féconder : à nous donc de la rassembler tout entière sous le regard de Celui qui a promis de
nous envoyer l’Esprit Consolateur et qui nous fera porter des fruits de «charité, joie, paix, longanimité,
serviabilité, bonté, confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi», comme l’écrit saint Paul aux chrétiens
de Galatie (Galates 5,22-23). Si l’Esprit est notre vie, qu’il nous fasse agir !
Psaume 143 (142)
[1] Seigneur, écoute ma prière,
prête l’oreille à mes appels.
Seigneur, écoute ma prière,
tu es fidèle, réponds-moi, tu es juste ;
[2] ne cite pas en jugement ton serviteur,
nul vivant n’est justifié devant toi.
[3] L’ennemi pourchasse mon âme,
contre terre il écrase ma vie ;
il me fait habiter dans les ténèbres
comme ceux qui sont morts à jamais ;
[4] le souffle en moi s’éteint,
mon cœur au fond de moi s’épouvante.
[5] Je me souviens des jours d’autrefois,
je me redis toutes tes œuvres,
sur l’ouvrage de tes mains je médite ;
je me redis toutes tes œuvres,
Fraternités de Jérusalem [6] je tends les mains vers toi,
mon âme est une terre assoiffée de toi.
[7] Viens vite, réponds-moi, Seigneur,
je suis à bout de souffle ;
ne cache pas loin de moi ta face,
je serais de ceux qui tombent dans la fosse.
[8] Fais que j’entende au matin ton amour,
car je compte sur toi ;
fais que je sache la route à suivre,
car vers toi j’élève mon âme.
[9] Délivre-moi de tous mes ennemis,
Seigneur, c’est vers toi, que j’ai fui ;
[10] enseigne-moi à faire tes volontés,
car c’est toi mon Dieu ;
que ton souffle de bonté me conduise
par une terre unie.
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Jour 6 • Vendredi 21 mai
[11] À cause de ton nom, Seigneur,
fais que je vive en ta justice ;
tire de l’oppression mon âme,
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[12] en ton amour anéantis mes ennemis ;
détruis les oppresseurs de mon âme,
car moi je suis ton serviteur.
Prier
S
eigneur, je te présente aujourd’hui toute ma vie. Souffle sur elle ton Esprit de force et de
douceur : qu’il me conduise par la terre unie de tes volontés et me fasse porter le fruit que tu
désires. C’est derrière toi que je veux marcher, à toi que je veux me donner, pour toi que je veux
chanter le chant de mon action de grâce et de ma joie. Pour ton Esprit qui nous guide et nous conduit,
et nous donne de marcher à ta suite sans nous lasser, Seigneur, béni sois-tu !
Pour aller plus loin
En parcourant la Bible
Isaïe 40,27-31
[27] Pourquoi dis-tu, Jacob, et répètes-tu, Israël : «Ma voie est cachée au Seigneur, et mon
droit échappe à mon Dieu ?» [28] Ne le sais-tu pas ? Ne l’as-tu pas entendu dire ? Le Seigneur est un
Dieu éternel, créateur des extrémités de la terre. Il ne se fatigue ni ne se lasse, insondable est son intelligence. [29] Il donne la force à celui qui est fatigué, à celui qui est sans vigueur il prodigue le réconfort.
[30] Les adolescents se fatiguent et s’épuisent, les jeunes ne font que chanceler, [31] mais ceux qui
espèrent dans le Seigneur renouvellent leur force, ils déploient leurs ailes comme des aigles, ils courent
sans s’épuiser, ils marchent sans se fatiguer.
Galates 5,22-25
[22] Le fruit de l’Esprit est charité, joie, paix, longanimité, serviabilité, bonté, confiance dans les
autres, [23] douceur, maîtrise de soi : contre de telles choses il n’y a pas de loi. [24] Or ceux qui appartiennent au Christ Jésus ont crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises. [25] Puisque l’Esprit
est notre vie, que l’Esprit nous fasse agir.
À l’écoute des Pères de l’Église
De saint Bernard, abbé de Clairvaux au XIIe siècle
C
elui qui marche sous la conduite de l’Esprit ne demeure pas constamment dans le même
état et ne progresse pas toujours avec la même aisance. Le cheminement de l’homme ne lui
appartient pas, mais dépend de l’initiative de l’Esprit son maître, qui lui donne à son gré d’oublier ce qui
est en arrière et d’aller de l’avant, tantôt avec lenteur, tantôt avec élan. Je pense que, si vous y prêtez
attention, votre expérience intérieure confirmera ce que je viens d’exprimer.
Si tu te sens atteint de torpeur, de chagrin ou de dégoût, ne perds pas confiance pour autant et
n’abandonne pas ton projet de vie spirituelle. Cherche plutôt la main de celui qui est ton secours. Implore-le de t’entraîner à sa suite jusqu’à ce que, attiré par la grâce, tu retrouves la rapidité et l’allégresse
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de ta course. Alors tu pourras dire : «J’ai couru dans la voie de tes commandements : tu as dilaté mon cœur»
(Ps 118,32). Tant que la grâce est là, réjouis-toi ; mais ce don de Dieu, ne va pas croire que tu le possèdes par droit, comme si tu étais assuré de ne jamais devoir le perdre. Sinon, pour peu que Dieu éloigne
sa main et retire son don, tu perdras courage et tu tomberas dans une tristesse exagérée. Lorsque tu
es comblé, ne dis pas : «Rien à jamais ne m’ébranlera», afin de n’avoir pas à dire en gémissant la suite du
psaume : «Tu as détourné de moi ton visage et je me suis effondré» (Ps 29,7-8).
Ainsi au jour où tu seras fort, ne t’installe pas dans la sécurité, mais crie vers Dieu avec le prophète : «Quand déclineront mes forces, ne m’abandonne pas» (Ps 70,9). Au moment de l’épreuve, redis-toi
pour prendre courage : «Entraîne-moi, Seigneur, à ta suite ; nous courrons à l’odeur de tes parfums» (Ct 1,3).
Ainsi l’espoir ne te manquera pas au temps du malheur, ni la prévoyance au jour du bonheur. Au milieu
des réussites et des échecs de ces temps instables, tu garderas comme l’image de l’éternité, une solide
égalité d’âme.Tu béniras le Seigneur en tout temps et ainsi, au cœur d’un monde vacillant, tu trouveras la
paix, une paix pour ainsi dire inébranlable ; tu commenceras de te renouveler et de te réformer à l’image
et à la ressemblance d’un Dieu dont la sérénité demeure éternellement.
Sermons sur le Cantique 21, 4-6
Le psaume à la loupe
A
vec le psaume 143, nous voici de nouveau devant un psaume de supplication attribué à David dans une circonstance particulière de sa vie : «Quand son fils le poursuivait» (cf. la révolte
d’Absalon contre son père David en 2 Samuel 15-16 où plusieurs expressions du psaume se retrouvent). Le plan suit la structure habituelle des supplications : une invocation initiale (v. 1-2) ; l’exposé de
la situation : le danger encouru (v. 3-4) et l’attitude de prière en réaction (v. 5-6) ; la demande (v. 7-11),
mêlée d’affirmations de confiance ; une imprécation finale assortie d’une confession de foi (v. 12).
Le psaume se divise en deux parties (v. 1-6 et 7-12) – séparées dans le texte hébraïque par une
pause – et forme un vaste chiasme. Les expressions des premiers versets se retrouvent en effet dans
les derniers : les mots «Seigneur» et «en ta justice» sont employés aux v. 1 et 11 ; «serviteur» et «vivant»
ou «vivre» aux v. 2 et 11-12 ; «fidélité» ou «amour» (deux notions très voisines en hébreu) aux v. 1 et 12.
Tandis que les expressions des versets centraux se répondent : «ennemi» (v. 3 et 9), «âme» (v. 3.6 et 9),
«souffle» (v. 4 et 7.10), «terre» (v. 3.6 et 10).
Au début de chaque volet de ce diptyque (v. 1-2 et 7-10), les demandes se multiplient, avec des
verbes à l’impératif pressant Dieu d’écouter et d’agir, et une inclusion du mot «souffle» (v. 7.10). Tandis
qu’ensuite (v. 3-6 et 11-12), les phrases deviennent affirmatives pour exposer la situation (v. 3-6), avec
une inclusion des mots «âme» et «terre», et pour affirmer la confiance du psalmiste dans le salut de Dieu
(v. 11-12). Il s’agit bien en effet d’une expérience de salut puisque tout, dans la situation de détresse, peut
être retourné : l’âme pourchassée (v. 3) et assoiffée (v. 6) s’élève vers Dieu (v. 8) ; le souffle défaillant (v. 4)
et épuisé (v. 7) est guidé par le souffle de Dieu (v. 10) ; la terre où la vie est écrasée (v. 3) devient une
terre vivifiée par Dieu (v. 10).
Peut-être récité au Temple pour obtenir un oracle, après une veillée de prière (cf. v. 8), le psaume
réaffirme dans les deux derniers versets justificatifs la foi en l’alliance établie entre Dieu (v. 10b) et son
serviteur (v. 12d).
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À la découverte du Mont-Saint-Michel
Le cloître
C
ommencé par Thomas des Chambres et terminé en 1228 par Raoul de Villedieu, le cloître
de l’abbaye du Mont-Saint-Michel semble être posé entre ciel et mer. Sa forme générale est
celle d’un quadrilatère irrégulier, composé de quatre galeries peu élevées, aux colonnettes disposées en
quinconce et reliées à leur sommet par des arcs diagonaux. Si cette disposition très particulière a pour
but de soutenir plus aisément le poids de la voûte, elle produit en plus une impression unique à la fois
d’espace et d’infini.
Les colonnettes, en granitelle,
et leurs chapiteaux ont été pour la
plupart refaits à la fin du XIXe siècle.
Ces petits supports reçoivent des arcs
finement moulurés qui délimitent des
écoinçons offrant un décor continu de
rinceaux et de rosaces de feuillage. Au
milieu de ce décor végétal, quelques
représentations, malheureusement
mutilées à la Révolution : une scène
de vendange figurant le pressoir mystique, l’une des plus anciennes représentations de saint François d’Assise.
Et, sous trois têtes très abîmées, apparaissent les noms des maîtres d’œuvre : Maîtres Roger, Garin et Jehan.
Dans l’architecture monastique, le cloître, lieu de passage vers l’église, est aussi un lieu de passage spirituel : du tumulte des activités à l’écoute de la Parole de Dieu, de l’agitation du monde (ou du
monastère !) au recueillement de la prière. On ne demeure pas dans un cloître, on le parcourt, on le
traverse, on y marche en procession : c’est vraiment l’image de la sequela Christi, la suite du Christ. Une
marche qui n’est pas close sur elle-même (contrairement à ce que la forme quadrilatère pourrait laisser
croire) mais toujours faite pour conduire ailleurs, à travers l’une des nombreuses portes qui l’encadrent.
Au Mont-Saint-Michel, le cloître est tout particulièrement un espace ouvert puisque les trois arches de
la galerie occidentale (qui devaient conduire à la salle capitulaire qui ne fut jamais construite) permettent au regard de qui y chemine d’atteindre directement le ciel et la mer.
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