Made by China - F Clérot_okdef - DCA Chine
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Made by China - F Clérot_okdef - DCA Chine
Made by China, les secrets d’une conquête industrielle / Jean-François Dufour Paris, Dunod, 2012, 168 p. La Chine est-elle une menace pour les économies occidentales ? Selon Jean-François Dufour, la réponse est « clairement oui » (p. 153). Tandis que le pays pesait à peine 3 % du produit intérieur brut mondial en 2000, il en représente aujourd’hui 10 %, et se classe au second rang économique mondial, derrière les États-Unis (p. 17). La Chine change de modèle de croissance pour passer du « Made in China » (p. 18) au « Made by China » (p. 19), des produits conçus et développés par des groupes nationaux. D’« atelier » (p. 18) ou d’« usine du monde » (p. 18) elle entend devenir le « laboratoire du monde » (p. 19), 46 entreprises chinoises se classent parmi les 500 plus grands groupes mondiaux « La Chine n’en comptait que 16 il y a six ans » (p. 9). Ce qui étonne le plus, au delà du phénomène de rattrapage, c’est la rapidité de cette montée en puissance. Les années 2000 ont été marquées par des mouvements de restructuration et d’acquisition, qui ont fait émerger des champions nationaux de taille à rivaliser avec leurs compétiteurs internationaux (p. 49). Jean-François Dufour étaye son propos de monographies des principaux secteurs industriels chinois, de portraits d’entreprises phares et de biographies de grands patrons chinois, aux profils variés et souvent inconnus en Occident, autodidactes ou ingénieurs, membres du Parti communiste entrepreneurs privés, tels Liu Chuanzhi patron de Lenovo ou Zhang Ruimin à la tête de Haier. Le premier chapitre est consacré au secteur du textile, symbole du « décollage de l’industrie chinoise » (p. 23). S’il reste encore focalisé sur la sous-traitance pour des donneurs d’ordre étrangers, certaines entreprises comme Youngor, Li Ning, Anta ou Peak sont devenues des marques leaders du marché domestique. Dans le domaine électronique (p. 31), le géant est HonHai, qui avec sa « célèbre » filiale Foxconn, produit des tablettes, des consoles, des téléviseurs, des téléphones portables pour Apple, Dell, Hewlett Packard, Nokia... Le groupe, à capitaux taïwanais, emploie plus d’un million de personnes (p. 33). Côté électroménager, Haier, ancien atelier de fabrication de réfrigérateurs en déshérence, s’est imposé en 20 ans comme le numéro un mondial des « produits blancs ». Selon Newsweek « Haier se retrouve en 2010 dans un top 10 mondial des entreprises innovantes » (p 52). La percée « foudroyante » des années 2000 a été réalisée par l’industrie des télécoms (p. 55). Huawei et Zhong Xing telecommunication equipment (ZTE) investissent près de 10 % de leur chiffre d’affaires dans la recherche pour passer de la « partie invisible du marché – les infrastructures » (p. 59) à la fourniture de terminaux (p. 65). Classés dans « les 50 premiers dépositaires de brevets internationaux » (p. 62) ils veillent sur la protection de « leur propriété intellectuelle » (p. 62). Si « Huawei réalise 65 % de son chiffre d’affaires hors de Chine, et ZTE 55 % » (p. 59), leur expansion internationale s’est heurtée à la ferme opposition des États-Unis de les voir s’implanter sur leur territoire (p. 58). Autre exemple de la réussite chinoise, avec 25 % de la production mondiale, l’automobile. L’auteur retrace l’ascension des « Big Five » chinoises : Shanghai Auto Industrial Corporation (SAIC), FAW, DongFeng, ChangAn et Beijing Automotive Group (BAIC). L’industrie aéronautique avec la création de Commercial Aircraft Corporation of China (COMAC), l’industrie pétrolière avec les trois grandes compagnies (China National Petroleum Corporation (CNPC), China Petroleum and Chemical Corporation (Sinopec), Chinese national off-shore oil company (CNOOC), le secteur ferroviaire avec China South Locomotive and Rolling Stock Corporation (CRS) et China North Locomotive and Rolling Stock Industry Corporation (CNR), la métallurgie (MinMetals, Chinalco) figurent aussi parmi les nouveaux fleurons de l’économie chinoise. La Chine se veut également en pointe dans les nouvelles technologies associées à la production d’énergie (liquéfaction du charbon, biocarburants, photovoltaïque, batteries lithium-ion au phosphate de fer…) et dans les nouveaux matériaux (silicones, composites). L’ouvrage permet de prendre la mesure de la véritable puissance industrielle chinoise et nous invite à éviter les « erreurs de perspective » (p. 154), les visions datées, « l’aveuglement ». Plutôt que d’accuser la Chine de « tricher » (p. 158), l’auteur suggère de réagir face aux défis chinois, par « la coopération et le partenariat » (p 156) et la mise en œuvre urgente d’une stratégie européenne. Fabienne Clérot IRIS