La France et la Suisse se partagent l`aéroport de Bâle

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La France et la Suisse se partagent l`aéroport de Bâle
24 //
Jeudi 28 juillet 2016 Les Echos
en
direct
Saint-Nazaire :
le parc éolien divise
Bretèche Industrie
reprend Shick
PAYS DE LA LOIRE — Un collectif
baptisé « Défense de la mer »
a déposé un recours contre
le projet de parc éolien au large
de Saint-Nazaire. Il réclame
de déplacer le projet à 5
ou 10 kilomètres afin de sortir
d’une zone riche en biodiversité.
Les opposants avaient jusqu’au
25 juillet pour se prononcer
après le feu vert du préfet.
PAYS DE LA LOIRE — Le fournisseur d’équipements industriels
(alimentaire, chimie, pharmacie)
Bretèche Industrie rachète l’américain Shick. Basée à Kansas City,
dans le Missouri, au centre des
Etats-Unis. Cette société fabrique
notamment des silos et des équipements de dosage utilisés en
amont de la phase de pétrissage
dans le secteur de la boulangerie
shutterstock
PME
&REGIONS
industrielle américain, le plus
important du monde. Shick
a réalisé, l’an dernier, un chiffre
d’affaires d’environ 50 millions
de dollars (45 millions d’euros).
Implantée à Nantes, Bretèche
Industrie compte 870 employés
et réalise un chiffre d’affaires
de 180 millions d’euros. La société
est détenue par Equistone
Partners et a repris, l’an dernier,
l’allemand IsernHäger,
autre acteur de la boulangerie
industrielle.
4/10
LES AÉROPORTS DE LÉGENDE // Troisième aéroport suisse, cinquième français, l’EuroAirport
de Bâle-Mulhouse est l’unique plate-forme binationale au monde. Soixante-dix ans après
sa création, il agrège un écosystème industriel et tertiaire de 32.000 emplois.
La France et la Suisse se partagent
l’aéroport de Bâle-Mulhouse
Christian Lienhardt
— Correspondant à Starsbourg
ocalisé sur le sol français, l’aéroport de
Bâle-Mulhouse est
devenu, derrière le
groupe automobile
P SA , l e d e u x i è m e
poumon économique du sud de
l’Alsace. Et il est aussi le cœur de la
« Regio », cet espace trinational
entre France, Suisse et Allemagne,
qui recense près de 1 million d’habitants, au pouvoir d’achat quasi
identique à celui des Californiens.
Le trafic aérien, proche de 8 millions de passagers, le fret, alimenté
par la chimie et la pharmacie
bâloise et les activités aéronautiques, ont un impact considérable
sur ce territoire du Rhin supérieur :
27.000 emplois directs et indirects,
3,9 milliards de chiffre d’affaires,
dont 1,4 milliard de valeur ajoutée.
Et la dynamique perpétue, malgré le trou d’air de 2002 et la déconfiture de Swissair qui avaient provoqué une chute d’un tiers du trafic,
tombé à 2,5 millions de passagers.
L’économie bâloise qui fait travailler plus de 30.000 frontaliers
alsaciensauraété,commeàchaque
fois, le « turboréacteur » de ce
rebond. Accompagné, il est vrai,
par le débarquement en force des
compagnies low cost, dont le seul
easyJet truste 59 % du trafic, mais
aussi le renforcement des
dans les entreprises suisses sur la
zone a fait l’objet en 2012 d’un
« arrangement sur mesure ». Et un
accord de principe a été trouvé tout
récemment sur un traitement fiscal réservé aux firmes helvètes de
la zone. Il faut éviter d’effaroucher
un voisin généreux et pourvoyeur
d’emplois par dizaines de milliers...Les Suisses sont les principaux clients de cet aéroport, et ce
depuis l’origine.
L
DR
Ne pas dépendre de Zurich
Une soixantaine de compagnies assurent de 120 à 160 vols quotidiens vers une centaine de destinations.
Lufthansa, British Airways et
autres Air France -KLM. Une
soixantaine de compagnies assurent de 120 à 160 vols quotidiens
vers une centaine de destinations.
En parallèle, les promoteurs
d’EuroAirport ont su attirer dans
sa zone suisse plusieurs prestataires de l’aéronautique. Jet Aviation
et Amac Aerospace y emploient
près de 2.000 personnes dans la
maintenance et, surtout, la personnalisation de jets privés et de
Boeing 737 Executive. Tous ces VIP
exigent la plus grande discrétion.
Dans l’enclave suisse, le culte du
secret n’est pas que bancaire.
Statut public plébiscité
Dans le fret, l’EuroAirport accélère
avec la mise en service de nouveaux
entrepôts de fret à température
régulée pour l’industrie pharmaceutiquebaloise :plusde40millions
d’investissements pour un terminal
cargode21.000mètrescarrés.« D’ici
à 2020, nous voulons capter environ
50 % de l’ensemble du fret aérien de la
région trinationale du Rhin supérieur, contre 20 % aujourd’hui »,
avance Jean-Pierre Lavielle, président du conseil d’administration de
l’aéroportetpatrondelaCCIdeMulhouse. Il pèse de tout son poids pour
arracher près de 260 millions
d’euros afin de réaliser le raccordement ferroviaire de la plate-forme.
Pas question de privatiser l’aéroport, le statut public et exclusif
convient parfaitement à tous dans
cette région frontière. L’application du droit du travail français
Dans les années 1930, ils se sont
rapprochés du gouvernement
français pour étudier un projet
commun, l’aérodrome de BâleSternenfeld devenant trop exigu.
« Les Bâlois ne voulaient à un aucun
prix dépendre de Zurich, pourtant à
moins de 90 kilomètres », commente un ancien responsable de
l’aéroport. Du coup, après l’abandon d’un premier projet en 1940,
c’est à Blotzheim que les deux pays
décident d’édifier l’aéroport binational. Dépourvue de moyens, la
France fait don du foncier et la
Suisse paie toute la construction
qui démarre en 1946, avec mise en
service ultra-rapide.
Ce n’est qu’en 1998 que le paritarisme en matière d’investissements
va s’imposer. La gouvernance est
régie par la convention francosuisse de 1949. Tout y est prévu :
deux zones douanières, un parfait
équilibre des pouvoirs au sein de
D
Les dates clefs
1946 Création de l’aéroport
•à Blotzheim,
en France, à 5 kilomètres de la frontière suisse.
La construction dure deux mois.
1949 Signature de la Convention binationale franco-suisse
qui régit le fonctionnement
de l’établissement public
gestionnaire de la plate-forme.
1995 Commercialement,
l’aéroport devient celui de Bâle,
de Mulhouse et de Fribourgen-Brisgau.
2012 Accord sur le droit du
travail spécifique appliqué aux
Français travaillant dans la zone
suisse de l’enclave aéroportuaire.
2015 Mise en service
du nouveau terminal cargo
de 21.000 mètres carrés.
•
•
•
•
cetétablissementpublicbinational,
une route douanière grillagée
de 5 kilomètres menant à Bâle
sous statut particulier ou encore le
contrôle aérien, qui incombe à la
France. Mais là aussi, un régime
met les avions à l’abri des grèves des
aiguilleurs du ciel tricolore.
M
Demain : Lyon-Bron
Marseille, nouveau hub des liaisons câblées sous-marines
PACA
Plusieurs liaisons
fibrées vont relier
l’Europe à l’Asie
via Marseille.
L’écosystème digital
se frotte les mains.
Paul Molga
@paulmolga
— Correspondant à Marseille
Affluence record sur les plages
marseillaises, mais celle-là est
digitale. Guidés par leur position
géographique ouverte sur l’Europe,
voilà qu’après les touristes, les
opérateurs télécoms se pressent
pour y brancher la tête de réseau
de leurs connexions à haut débit.
Une dizaine de câbles sous-marins
y étaient déjà connectés pour rallier
le Moyen-Orient et l’Afrique. En
novembre, une fibre optique
de 25.000 kilomètres, AAE-1,
reliera, pour 1,2 milliard d’euros
d’investissement partagé par dix-
neuf opérateurs, les rivages phocéens et Hong Kong, doublant d’un
coup la capacité des lignes installées il y a dix ans.
Puis ce sera le tour de SEAME-WE 5 de tracer une autoroute
à haut débit au fond de la Méditerranée pour rallier Singapour, sous
le contrôle d’Orange Marine. Dans
le même temps, l’opérateur Angola
Cables déroulera un long corridor
digital entre le Brésil, la côte ouest
du continent africain, pour finir à
Marseille.
Avec Stockholm – hub digital
entre l’Europe, les pays baltes et la
Russie – et Vienne – voie de passage
obligée des opérateurs télécoms
vers l’Europe centrale –, la cité phocéenne s’est imposée comme « la
troisième gateway » européenne.
« Au point, renchérit Fabrice
Coquio, que les opérateurs mondiaux ont ajouté la lettre M au réseau
FLAP qui concentre déjà 80 % de la
consommation informatique européenne entre Francfort, Londres,
Amsterdam et Paris ».
« Une ville de contenu »
10 % de croissance
D’autres projets sont également
dans les tuyaux : la connexion à
la cité phocéenne de Seacom, le
câble sous-marin de l’océan Indien
reliantdepuis2009l’AfriqueduSud
au Kenya ; celle du réseau africain
WIOCC, couvrant plus de 500 localités d’une trentaine de pays du
continent noir. Sans oublier le câble
sous-marin transatlantique privé
de Facebook et Microsoft, qui connectera Virginia Beach et Marseille
via Bilbao, avec une capacité colossale de 160 téraoctets par seconde
fournie par huit paires de fibres.
Pour suivre la demande de ses
clients, Interxion a déjà investi
75 millions d’euros dans l’aménagement de 14.000 mètres carrés de
salles connectées aux câbles sousmarins, climatisées et sécurisées,
pour accueillir les serveurs d’environ un tiers de ses clients tricolores
comme Canal+, Société Générale
ou Total. La demande est telle (il
vient de finir son 48e trimestre avec
plus de 10 % de croissance générée
par 1.350 clients) qu’il a décidé un
nouvel investissement de 150 millionsd’eurosdanslacitéphocéenne
Le navire câblier « René Descartes » de France Télécom Marine.
Photo Jean-Claude Moschetti/RÉA
Autotal,d’icià2020,unevingtaine
de câbles à haut débit relieront Marseille au reste du monde. « Un
record », compare Fabrice Coquio,
président d’Interxion France, la
filiale du numéro un européen des
constructeurs opérateurs de « data
centers » qui considère désormais
Marseille comme « une ville de contenuetnonplusseulementdetransit ».
1,2
MILLIARD D’EUROS
D’importants investissements
se multiplient pour connecter
l’Europe à l’Asie en haut débit
via Marseille. AAE-1,
activé en novembre, coûtera,
à lui seul, 1,2 milliard d’euros.
après avoir obtenu la concession
de deux bâtiments du Grand Port
maritime de Marseille totalisant
25.000 mètres carrés de planchers.
Début des travaux en septembre.
L’arrivée de ces nouvelles liaisons
va aussi permettre de nourrir les
ambitions de l’écosystème numérique phocéen. Depuis sept ans par
exemple, l’hébergeur de données
marseillais Jaguar Network qui
comptedanssonportefeuilleFrance
Télévisions, Cdiscount, AlloPneus,
Générale de Santé ou Voyage Privé,
affiche une progression annuelle de
près de 30 % et vise désormais un
chiffre d’affaires de 100 millions
d’euros d’ici à cinq ans. n