« La Toilette » de François BOUCHER Page 1/2 BOUCHER

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cher, Lausanne-Paris, 1976, vol. 1, n° 208. p.
324, fig. 643; A. de Gaigneron, “Nouveau
regard sur la collection Thyssen”,
Connaissance des Arts, 306, août 1977, p. 58,
fig. 15.
BOUCHER François
Paris 1703- id. 1770.
LA TOILETTE
Toile. H. 0,525 ; L. 0,665.
Signé et daté en bas à gauche: F.
Boucher, 1742.
Hist. : Comte Charles Gustave Tessin, Paris;
Comte Charles Gustave Tessin, Akerd Suède;
L. Masreliez, Stockholm; Baron E. Cederstrom,
Lôfsta, Suède; Baron Nathaniel Rothschild,
Vienne; Baron Alphonse Rothschild. Vienne ;
Rosenberg et Stiebel, New York acquis en
1967.
Bibi. : 1 969, Catalogue n° 39 ; C. Sterling (R.
Heinemann, ed.) Sammiung Thyssen-Borneinisza, Lugano-Castagnola, 197 1, n° 39.
pp. 49-51, pi. 307 ; A Ananoff, François Bou-
« La Toilette » de François BOUCHER
Une jeune femme élégante, assise
près du feu, attache son bas. Elle a
gardé le simple déshabillé blanc qu’elle
portait pendant qu’on la maquillait et
qu’on lui poudrait les cheveux. Elle se
retourne vers sa femme de chambre,
qui lui montre un bonnet et attend son
approbation. La jeune maîtresse est
par excellence la créature de Boucher,
avec son joli petit minois suffisant, son
teint crémeux, ses seins petits et
rebondis et sa jambe bien faite. On la
retrouve dans son oeuvre sous des
aspects divers, dans des costumes
différents ou sans vêtement, et l’on
s’étonne que Madame de Pompadour
ait confié à Boucher le soin de peindre
les jeunes filles du Parc aux Cerfs
lorsqu’elle désirait attirer l’attention du
roi sur une’ “tête nouvelle”. Son
attitude et son déshabillé sont d’un
charme provocant; un chat, jouant
avec une pelote de fil, s’est abrité sous
ses jupons relevés. L’attitude de la
femme de chambre a quelque chose
d’exquis et son costume — d’un
mauve pâle et d’un vert subtiles — est
peut-être le plus beau morceau de la
peinture. L’oeil est sans cesse distrait
par la profusion des détails, le
désordre pittoresque des bibelots et
par tous les accessoires d’une vie
douillette. Un portrait, qui paraît être un
pastel de Rosalba Carriera, apparaît
au-dessus du paravent, décoré
d’oiseaux chinois sur un fond jaune (le
même paravent apparaît dans le
portrait de Madame Boucher à la Frick
Collection, à New York). Il y a
abondance de taffetas et de soie
froissée: la tenture que l’on aperçoit à
travers la porte vitrée, la draperie
autour du miroir et le manteau
négligemment jeté sur la chaise. Un
soufflet, un balai et un éventail peint
sont posés sur le sol, un sac â
ouvrages est suspendu au pare-feu et
attend, des objets sont disposés sur la
cheminée: une chandelle allumée dans
un bougeoir d’argent, une lettre, un pot
en porcelaine à couvercle et monture
dorée, un oiseau en céramique et des
rubans. Une théière fumante avec des
tasses et des soucoupes est posée sur
une table à côté de notre petite
élégante.
Le charme de Boucher est facile et
immédiat. L’aspect brillant et très
coloré
de
La
Toilette
repose
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essentiellement sur les couleurs
primaires, rouge, bleu, jaune, fortement saturées à peine modifiées et
distribuées avec l’art d’un grand
décorateur. Ananoff (loc. cit.) publie
deux dessins qui ont un rapport avec
La Toilette: l’un avec la jeune femme
attachant sa jarretière (Orléans, Musée
des Beaux-Arts, dossier Fourché, n°
322 M. attr. à Fragonard, une copie
pour Sterling), l’autre avec la femme
de
chambre
bien
que
le
rapprochement soit peut-être un peu
léger (Collection F. Lugt, Paris, Institut
Néerlandais). Le tableau daté
de 1 742 a été acquis directement de
Boucher par le Comte Charles
Gustave Tessin, Ambassadeur de
Suède en France de 1736 à 1742, ami
et protecteur du peintre. Tessin lui
commanda en 1745 une série de
quatre tableaux représentant “La
journée d’une élégante”. On n’en
connaît qu’un, le seul peut-être qui ait
été peint, Le Matin, (daté de 1 746) au
Musée National de Stockholm. Une
autre série du même genre, “Une
journée” a existé représentant des
jeunes femmes en buste et gravée par
Petit. Le comte Tessin qui devait avoir
une faiblesse pour ces peintures,
possédait une grisaille de Boucher. Le
« La Toilette » de François BOUCHER
Matin, qui correspond à la première
des gravures et il est probable que
seules des grisailles ont été exécutées.
Sterling cite une lettre de Berch,
secrétaire de Tessin, écrite à Paris, le
27 octobre 1 745, au sujet d’un projet
d’une suite de peintures “Points du
Jour” dans laquelle les moments du
jour correspondraient aux saisons; en
raison d’analogies entre “L’aprèsdîner” (également “L’automne”) et la
peinture de la collection Thyssen, il
propose que celle-ci aurait pu faire
partie d’une série analogue, qui aurait
pu dépeindre les “La journée d’une
courtisane” dans le genre de “La
carrière d’une prostituée” de Hogarth,
mais sans intention moralisatrice.
Malgré cela, il estime aussi que
Madame Boucher a posé pour la jeune
femme attachant sa jarretière. D’après
Diderot et d’après d’autres auteurs
contemporains, Boucher faisait poser
sa
femme
pour
des
sujets
mythologiques et d’autres plus osés,
ainsi que pour des scènes de genre.
Suivant
J.
Cailleux
(Burlington
Magazine, février 1966), elle apparaît
dans Le Déjeuner (1739) du Louvre, et
dans Le Matin (Stockholm). La
ressemblance entre Madame Boucher
dans la peinture de la Frick Collection
et la jeune femme de La Toilette de la
collection Thyssen n’est pas vraiment
convaincante et on peut se demander
si Boucher cette fois ne se serait pas
passé de modèle.
Il n’est peut-être pas inutile de citer La
Toilette du matin de Jan Steen, qui
appartient â la Collection de la Reine
(Palais de Buckingham) dans laquelle
toute l’attention se porte sur le bas que
l’on met. Steen a certainement
contribué à la diffusion de ce thème
dans la peinture française du XVIIIC
siècle.
La Toilette est une des oeuvres de
Boucher les plus séduisantes. Il en
existe une copie avec des variantes
dans l’ameublement, dans la collection
Jess I. Strauss à New York.
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