Ressources et situations
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Ressources et situations
ANALYSER DES TACHES MOTRICES SUR LE VERSANT INFORMATIONNEL Aurore HUCHEZ FSSEP - Lille 2 INTRODUCTION La notion de tâche motrice Activité déterminée et obligatoire Peut être imposée • • de l’extérieur par autrui Ou par celui qui exécute la tâche lui-même ON FIXE A QUELQU’ UN / SOI MEME UN OBJECTIF, DES MOYENS D’ ACTION Les tâches motrices découlent d’une réflexion sur : Objectifs poursuivis Activités utilisées pour atteindre ces objectifs Contraintes et Ressources disponibles Niveau des élèves L’enseignant précise les propriétés qu’il veut donner à la tâche = ce à quoi elle sert Une tâche de nature (bio) informationnelle sert à optimiser ou à faciliter la prise d’informations par l’élève Elle sollicite les ressources informationnelles de celui-ci Ressources informationnelles Connaissances, capacités, aptitudes, attitudes que possède le sujet pour exploiter des informations, et qu’il peut modifier / utiliser . Plus les sources d’informations extérieures à prendre en compte pour atteindre le but d’une tâche sont nombreuses ou peu accessibles, plus ces ressources sont sollicitées Exemple : la configuration spatiale et temporelle des mouvements des adversaires et partenaires L’ ENSEIGNANT CHOISIT LES TACHES MOTRICES QU’ IL PROPOSE AUX ELEVES Ce choix revient à retenir certaines alternatives et à en rejeter d’autres JP Famose propose comme alternatives de manipuler : Le but de la tâche Les opérations nécessaires pour accomplir la tâche L’aménagement matériel Les feedbacks Le but des TD sera d’apprendre à manipuler ces notions CHOIX En fonction d’un objectif éducatif et du niveau des élèves : Quelles ressources solliciter prioritairement ? Ici : informationnelles Sur quels paramètres de la tâche va-t-on jouer pour mobiliser ces ressources comme on le souhaite ? Ces paramètres sont influencés par la connaissance qu’on a de la façon dont l’élève traite l’information 1. COMMENT UN ELEVE TRAITE-T-IL LES INFORMATIONS DANS LES TACHES MOTRICES ? A. Il traite des informations de façon consciente Approche cognitive du TI 3 étapes : z z z Perceptive (identification du stimulus) : l’élève prend des infos sur son milieu. En tennis, il prend l’information de la perception visuelle de la balle, de sa trajectoire Sélection de la réponse : réagir à l’info et sélectionner une réponse qu’il possède en mémoire (coup droit ou revers ?? Étape stratégique) Programmation de la réponse : produire et ajuster son geste On fait appel aux 3 étapes dans toutes les APSA Mais certaines APSA sont plus centrées sur la 1ère ou la 2ème ou la 3ème étape Ex : l’escalade est plus centrée sur l’Identification du stimulus (E1), le tir à l’arc est plus centré sur la programmation de la réponse (E3) Experts et débutants se différencient sur les 3 étapes Pour progresser, il faut donc améliorer le traitement de l’information E1 : identification du stimulus DEBUTANT Prend des infos de façon exhaustive en faisant abstraction des propriétés du milieu Ex : en escrime : prend des infos sur tout le corps de l’adversaire, principalement sur ce qui bouge (Ripoll , 1985) Gardien HB : suit la trajectoire de la balle (Derrider , 1985) •EXPERT Fait une recherche active des informations dans le milieu. Identifier un stimulus, c’est lui donner du sens Ex : •Escrime : s’informe sur l’avant bras, le genou et le sabre de l’adversaire •Gardien : s’informe sur l’avant bras du tireur Etape de recherche de sens active et sélective. Liée à la volonté de prendre l’information le plus tôt possible. (EX :L’expert est capable de traiter une info en vision périphérique si elle est signifiante pour lui, alors que le débutant aura besoin de tourner la tête pour prendre l’info en vision centrale car celle-ci n’est pas encore devenue signifiante pour lui.) Il est donc nécessaire de donner aux élèves des repères pertinents qui vont orienter la prise d’informations E2 : sélection de la réponse Etape + complexe et + coûteuse en temps lorsque le nombre d’alternatives est augmenté Apprendre à l’élève à sélectionner les réponses appropriées en fonction de l’identification du stimulus L’expert fait plus vite ses choix car il a construit des stratégies (si…alors…) E3 : programmation de la réponse L’expert a intégré la durée, l’intensité, l’amplitude relative et l’ordre des séquences du mouvement, et peut ajuster son geste plus finement grâce aux feedbacks. B. Il traite l’information de façon inconsciente Approches écologique et dynamique du couplage perception – action. (Temprado et Montagne Les Coordinations Perceptivo-motrices 2001) Le temps restant avant le contact des pieds avec le sol en salto arrière est une information traitée directement, sans passer par la conscience. C’est cette information qui permet de réguler automatiquement les instants de déclenchement et vitesses du dégroupé d’une réalisation à l’autre. (B. G. Bardy, 1998) Cette approche plus complexe à exploiter pour l’enseignant ne sera pas abordée en TD. 2. FACTEURS QUI INFLUENCENT LES CAPACITES DE TRAITEMENT DE L’ INFO PAR L’ ELEVE A. Facteurs liés à la tâche et à l’environnement L’incertitude Plus elle est grande plus le TI est difficile. Spatiale : probabilité de prévoir où un événement se produira (gardien : penalty tiré à g/d/ lucarne ? Temporelle : probabilité de prévoir quand un événement se produira (tennis : une balle qui s’accélère à cause d’un lift rend plus difficile la prévision du moment du contact balle – raquette) Evénementielle : probabilité de prévoir quel évènement va se produire (recevoir un CD, un revers…? La discrimination Possibilité de bien distinguer dans l’environnement les signaux pertinents à la réalisation de la tâche La dépense énergétique Le temps nécessaire pour réagir à un signal diminue après 5 minutes d’effort physique (René Arcelin, 1999) => échauffement Effort entre 40 et 80% VO2max => élévation du niveau d’activation du SN => TI + efficace, les choix sont effectués + vite Effort > 80% VO2 max => détériore les capacités de TI (Maya Collardeau, 2001) B. Facteurs liés au sujet L’âge La capacité de TI est plus lente chez l’enfant que chez l’adulte. Durand et Barna, 1986 1ère étape : • Frapper la balle avec une crosse. Modalités : avec ou sans rebond • Sujets de 6, 11 et 20 ans • On mesure les scores d’erreur • Plus les enfants sont jeunes, plus ils ont de difficultés à analyser la situation (+ d’erreurs avec rebond) 2ème étape : Il faut tirer à gauche / à droite selon la couleur de la cible 2 modalités : on annonce à l’avance ou pas la couleur de la balle. Sujets : 6, 11, 20 ans. Il y a interaction entre la difficulté et l’âge. 14 12 10 8 6 4 2 0 Couleur annoncée Couleur non annoncée 6 ans 11 ans adulte 3ème étape 2 modalités : la cible fait 60 cm x 60 cm ou 10 cm x 10 cm => il faut ajuster Pas d’interaction entre l’âge et la difficulté (les droites sont parallèles) L’exigence de précision affecte aussi la performance des adultes 6 5 4 3 2 1 0 60x60 cm 10 x 10 cm 6 ans 11 ans 20 ans •Durand parle de déficit spécifique chez l’enfant lié aux 2 premières étapes •Conséquence pédagogique : tant que l’enfant agit dans un milieu stable , sa capacité de traitement de l’info n’est pas limitante •En revanche, si dans la tâche demandée les identifications sont difficiles à réaliser et les prises de décisions importantes, l’enfant aura plus de difficultés que l’adulte => adapter la demande de la tâche et rechercher la progressivité de la 6è à la terminale Le niveau de pratique Une augmentation du niveau de pratique s’accompagne d’une évolution : Qualitative concernant la nature des informations traitées Quantitative affectant la durée des consultations Etude de Chantal Bard (1982) : on demande à des volleyeurs/ à des nageurs de prédire le point de chute d’une balle alors qu’ils ne voient pas la totalité de la trajectoire (un écran tombe à 1/8è, ¼, ½ de la durée de la trajectoire. On mesure la rapidité à laquelle les sujets répondent et la précision de leur réponse : •Les volleyeurs sont toujours + rapides / nageurs •Mais ils ne sont plus précis que pour la modalité 1/8ème Donc l’apprentissage: • réduit le temps d’analyse de la trajectoire •Permet au joueur de planifier plus tôt sa réponse Autre expérience avec un oculomètre : appareil qui permet de déduire la zone fixée par qqn en vision centrale . On présente à des basketteurs / non basketteurs des diapos de situations typiques d’attaque en BB. Le sujet doit donner le + vite possible une réponse à la diapo : tir / dribble / passe ? • Les experts ont moins de fixations que les débutants. • Ils utilisent saccades une succession de • Vont tout de suite rechercher l’info pertinente C. Précautions pédagogiques Si la réalisation de la tâche comporte des processus perceptifs (E1 et E2 ) et effecteurs (E3) complexes: •On peut réduire la charge informationnelle à l’un de ces processus pour favoriser le déroulement harmonieux de l’autre (Martenuik, 1976) •Mais attention à ne pas transformer des situations ouvertes en situations fermées Ex en base-ball Demander une frappe de balle stationnaire sur un tee permet de régler la hauteur du lancer, la position du corps, le fouetter du poignet, mais cela ne permet pas de régler les problèmes d’anticipation, d’adaptation spatiale du mouvement aux caractéristiques d’une balle en vol . ⇒Mieux vaut proposer une tâche avec balle lancée, et réduire la vitesse et la variabilité de la trajectoire ⇒ On conserve une situation ouverte en l’adaptant aux possibilités de l’élève 3. SUR QUELLES VARIABLES PEUT ON JOUER DANS LES TACHES POUR OPTIMISER L’ APPRENTISSAGE ? A. Faciliter l’identification du but Le matérialiser (« but physique ou environnemental » qui porte sur les effets à produire) Ex : en longueur, marque à dépasser, en vitesse 6ème : augmenter la distance parcourue dans le même temps : plus parlant pour l’élève Quantifier : 7 fois sur 10 But de forme : en terme de posture, de forme de mouvement à réaliser => suppose une observation B. Structurer la situation pédagogique Sur quelles variables on joue à travers l’aménagement matériel et les consignes. Ex : Espace Temps Type de relation aux autres pratiquants Espace Processus effecteur Processus perceptifs et décisionn els Simplification Complexification Atteindre une Cible moins large cible large. BB (erreur permise 6ème : tape le réduite) => seuls panneau 1 pt, le les paniers donnent cercle 2 pts, panier des points 3 pts Diminuer la Augmenter la densité de joueurs densité de joueurs sur le terrain Temps Simplification Complexification Gym : impulsion bras sur Gym 2de: saut de mains praticable => + contraignant, le avec impulsion bras sur Processus temps de vol est réduit trampoline : moins effecteur contraignant car le trampo TT : faire le max d’échanges en laisse du temps pour tourner 1’30 => + contraignant, la vitesse entraîne une diffic à garder la TT : pas de contrainte de même précision temps dans l’échange Processus perceptifs et décisionne ls Laisser plus de temps pou prendre l’info ex : VB : filet haut, balles hautes Crise de temps Metzler : VB équipe en réception dans un cercle, ne peuvent bouger qu’une fois que le serveur a frappé => pas de rôles prédéfini Type de relations aux autres pratiquants Simplification Complexification Diminuer les possibilités Laisser aux adversaires toutes d’intervention des leurs possibilités adversaires d’intervention Ex sport collectif Processus perceptifs interpénétré en 6è : balle au dessus de la tête pour le PB et = invulnérable 3 voire 5 décisionne secondes => laisse le temps ls de prendre et de discriminer les infos Ou augmenter ce nombre d’alternatives Ou diminuer le nombre d’alternatives que les adversaires peuvent utiliser Jean Roche (La leçon d’EP, un système complexe et vivant CRDP Dijon, 1996 donne des points de repères pour identifier le passage du simple au complexe dans les tâches motrices en EPS Pts de repères Tâche + facile De nature débutant : temporell Superposition e des actions (E1 + E2) +complexe Juxtaposition ex gym : éval Enchaînement (ex : d’élémts) s/ élts isolés Anticipation élaborer une stratégie en 3 coups en TT Espace mobilisé De nature spatiale (E1,2,3) > Haut bas Avant, contrôlé par regard > latéral avec priorité du côté >arrière (perturbe repères visuels (ex : avancer sur volant) de la latéralisation habituels) ex: reculer sur un volant Volume de l’espace sollicité Espace proche (longueur des membres) > espace lointain (déplacement des segments corporels et / ou utilisation d’engins ) Segmentaire s (E3) Posturaux Interdépendance segmentaire > Equilibre de terrien non remis en cause > dissociation Equilibre de terrien remis en cause (d’où (E1,2,3) (verticalité, équilibre sur les pieds ) du tonus, blocage articulaire, posture de refus) C. Stimuler l’attention Aider le débutant à discriminer parmi toutes les sources d’infos, celles qui sont pertinentes ou pas Réduire le nombre d’événements auxquels le débutant doit être attentif Ex : orienter vers des infos pertinentes à la réalisation de la tâche en TT : mouvement de la raquette adverse (haut / bas) => effet produit On peut stimuler l’attention sur des repères visuels mais aussi sur des sensations (ex en CLD : essoufflement, fatigue, en gym: répartition du poids du corps sur les appuis…) D . Guider l’élève lors de l’exécution Mettre en avant les similitudes avec une stratégie ou un mouvement connu Rester sur telle ligne … , passer par telle et telle zone…, étirement en fermeture : un camarade pose son coude sur le dos et étend son avant bras => repère % horizontale E. Favoriser les infos en retour pour que l’élève puisse évaluer sa réponse Feedback donné par la tâche : Zone atteinte par les épaules (1,2,3 ) ou en TT : coupé : table divisée en 3 zones ou trace sur la balle. Feedback donné par un camarade / le prof : Ex en saut en longueur : à l’impulsion, tu étais : écrasé / jambe tendue / genou haut Le feedback Renseigne l’élève sur l’efficacité et la nature de ses actions Doit être simple, rapidement lisible Ne pas dépasser le pouvoir de correction des élèves Ils doivent être adaptés au stade de l’apprentissage auquel l’élève se trouve Vereijken et Whiting 1990) Dire au débutant ce qu’il doit faire lors de l’essai suivant en terme de coordination (bras / jambes, en ATR) Dire à un élève qui a acquis le mouvement souhaité ce qu’il doit faire lors de l’essai suivant en terme de paramètres : amplitude, vitesse, précision CONCLUSION • Ramener la charge informationnelle dans des limites supportables pour l’élève • Tout en préservant la nature de la tâche • Puis complexifier au fur et à mesure que l’élève progresse