Algérie, terre d`asile Exils de Tony Gatlif Primé à Cannes pour la

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Algérie, terre d`asile Exils de Tony Gatlif Primé à Cannes pour la
Algérie, terre d’asile
Exils de Tony Gatlif
Primé à Cannes pour la mise en scène, Tony Gatlif fait un retour
fracassant avec son dernier film Exils. Ce road movie rythmé au
son des castagnettes et de la musique Arabo-Andalouse, touche
par la finesse du scénario et nous invite vers des contrées
lointaines. Voilà, un voyage à tenter sans aucune réticence.
Le monde des Gitans si cher à ce réalisateur occupait tout Gadjo Dilo. Il les insère à
nouveau dans son dernier film, ne reniant pas ses racines, mais cette fois-ci c’est le
monde Arabe qui domine. A travers les yeux de deux jeunes un peu égarés, il arrive à
filmer son pays avec toute l’affection qu’il lui porte. Aussi, le parcours effectué par les
deux héros va les pousser soit à révéler un passé enfoui, soit à se découvrir. Quant à
l’Algérie, elle est tout simplement belle scandée par ses chants et ses coutumes.
Néanmoins, elle occulte une grande souffrance.
Né d’une famille disparue, née d’origine peu connue
« Et si on partait en Algérie?». demande un jour Zano (Romain Duris) à sa compagne
Naïma (Lubna Azabal), pliée en deux, en se demandant bien ce qu’elle allait faire là-bas.
Lui, fils de pied noir, orphelin, est bien décidé à se rendre sur la terre de ses parents.
Elle, d’origine Algérienne mais Française, ne parlant pas un mot d’arabe et n’ayant pas
les pieds sur terre, décide de le suivre sans trop savoir ce qu’elle cherche réellement.
Tony Gatlif, filme ce jeune couple sur les routes, mais aussi dans les trains où ils se
cachent des contrôleurs. Certaines séquences de ce périple se distinguent. Comme le
reflet des deux vagabonds qui se dessine et s’efface dans une petite flaque d’eau, Zano
expliquant en hors champ l’histoire de sa famille. Les plans de la cueillette sont d’un
esthétisme parfait, la caméra suit délicatement le jeu de séduction des amoureux à
travers les fins rayons du soleil. Occupant une place prépondérante, la musique à son
mot à dire, elle transporte un message qui se transmet du walkman de Zano et Naïma à
nos oreilles. Gatlif prend soin de décrire quelques paroles afin qu’on s’en imprègne. Le
tempérament opposé des deux protagonistes est également fort, Zano connaît tout sur
lui et n’est venu chercher que des souvenirs, il aborde la vie sereinement. Mais, pour
elle, c’est la galère, elle est perdue. Gatlif ne se détache pas de ses personnages, il veut
les réconcilier avec eux-mêmes. Un message bien émouvant et attachant.
La mère patrie
Algéria….Algéria scandent des voix Arabes, lors de l’entrée des deux jeunes gens sur la
terre promise. Le plan choisi par Gatlif les montre alors marchant à contre sens d’une
foule, qui, elle, au contraire, fuit le pays en question. La caméra serpente à travers leurs
pas, soulignant la précipitation. Zano trouve ce qu’il veut mais, Naïma vit mal cette
aventure, elle se sent comme une étrangère. Le réalisateur à travers les bribes de
phrases de son héroïne troublante et morose, souligne alors le douloureux problème de
l’intégration. Où se situe réellement la place des personnes d’origine lointaine mais nées
en France ? Une fois, de retour dans leurs pays, doivent-elles se considérer intégrées ?
Suggérant ce point, le film s’attardera sur la musique Africaine, celle qui exorcise les
maux. La séquence dure bien dix minutes, mais ses femmes qui dansent sont
magnifiques. Tous les instruments sont détaillés par une caméra qui les filme en trois
cent soixante degrés. Le spectateur s’enivre de l’atmosphère de ce pays. D’où il fait
arpenter ses personnages dans les rues d’une Algérie détruite. En effet, dans quelques
plans, il est possible d’apercevoir des bâtiments en ruine, symbole du tremblement de
terre. Agissant de la sorte, Gatlif actualise son scénario. Cette mère patrie s’ouvrira donc
sous vos yeux, si bien que vous ne désirerez plus les fermer. Pas la peine de tergiverser,
il est temps que vous preniez la décision de suivre cette expédition.
Juliette Couderc

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