crois, espère, aime.

Transcription

crois, espère, aime.
Paula HOESL
JEUNE FILLE…
CROIS, ESPÈRE, AIME.
Nouvelle édition à partir de celle de 1961
Éditions Saint-Remi
– 2013 –
Table des matières :
I Problèmes. ......................................................................3
Incertitudes. ................................................................................5
Prends garde. ..............................................................................9
La lumière dans l’ombre. ........................................................12
II Crois…......................................................................... 15
Crois pour comprendre...........................................................17
Crois à la réalité des valeurs surnaturelles. ...........................18
Crois en la valeur de ton âme.................................................22
Crois en la beauté de la vie. ....................................................24
Crois en la valeur de ta vie......................................................27
Crois en tes responsabilités futures.......................................29
III Espère… .................................................................... 31
Espère pour chanter. ...............................................................33
Espère quand tu ne comprends pas. .....................................35
Espère en ta propre victoire...................................................38
Espère en la fécondité de la souffrance................................41
Espère en Dieu.........................................................................43
IV Aime… .......................................................................47
Aime pour vivre. ......................................................................49
Aime le devoir. .........................................................................50
Aime les petites joies. ..............................................................53
Aime ton foyer. ........................................................................55
Aime tes amies..........................................................................58
Aime ton prochain...................................................................60
Aime les humbles.....................................................................63
Aime Dieu.................................................................................66
V Prière à la Vierge.......................................................... 71
© Nous prions les ayant-droits de Paula Hoesl de se manifester, nos
recherches ayant été vaines.
Éditions Saint-Remi
BP 80 – 33410 CADILLAC
05 56 76 73 38
www.saint-remi.fr
I
PROBLÈMES.
« Le monde est un livre écrit à la fois à l’envers et à l’endroit. »
« Celui qui marche dans la nuit se heurte. »
CLAUDEL.
Saint JEAN.
INCERTITUDES.
la vie t’apparaissait avec les couleurs
Qnaïves tudesétaisbellespetite,
images d’Épinal où les braves gens sont
UAND
toujours sympathiques et récompensés de leur vertu, où les
méchants font toujours peur au premier abord et sont finalement
punis de leur méchanceté.
Tu croyais fermement que, pour être heureuse, il suffit d’être
sage. En effet, lorsque tu l’étais, tout marchait pour toi à souhait.
Tu avais le baiser de ta maman, la récompense promise au bout
de l’effort accompli. Le travail imposé ne dépassait jamais tes
forces. Quand tu avais fait tes devoirs, appris tes leçons, rendu les
menus services qu’on te demandait à la maison, tu t’en allais avec
le bonbon ou la tartine de confiture bien gagné goûter les joies
tumultueuses de récréations dans la paix d’une conscience
tranquille.
Et tu voyais la vie dans une perspective toute semblable… Le
bonheur étant le compagnon inséparable de la sagesse et du
devoir accompli, la réussite marchant la main dans la main avec la
vertu, et tous les braves gens vivant dans la douce félicité de leur
conscience et de l’estime universelle.
Maintenant, tu as grandi et tu comprends que ce n’est pas si
simple. Comme les brumes du matin en se levant dissipent le
voile doré de l’horizon et révèlent le contour net des collines, la
vie t’apparaît dans des lignes plus précises et aussi plus brutales.
Tu as ouvert les yeux sur le monde et vu déjà bien des réalités
tristes que tu ne soupçonnais pas.
Tu as pu constater parfois, avec un étonnement douloureux,
que la vertu ne suffisait pas pour assurer certaines réussites
humaines. Que telles ou telles dont tu connaissais la noblesse
d’âme et le cœur profond passaient inaperçus, « restaient pour
compte », tandis que l’écervelée et l’audacieuse, attiraient les
cœurs et faisaient « le beau mariage ».
Tu as constaté aussi, en écoutant parler les gens autour de toi
— et ils parlent si haut, ceux-là, qu’on est bien obligé de les
entendre ! — que le monde se moque bien des sages principes
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JEUNE FILLE…
dont on t’a donné le culte, que pour lui il s’agit seulement de ne
pas être dupe, ce qui veut dire « généreux et désintéressé » et que
réussir une bonne affaire, même avec des accrocs à la morale —
« que voulez-vous, il faut bien se débrouiller ! » — lui semble plus
intelligent que de se dévouer à un idéal français ou chrétien !
Et dans ta propre vie, tu as constaté que, souvent, tes bonnes
intentions sont restées stériles, — que tes efforts vers le bien ont
échoué, que le désir de la perfection ou de la simple netteté
morale n’est pas immédiatement source de félicité, — que si
« l’oreiller du méchant est rembourré d’épines », comme l’assurait
ton livre de morale avec une belle image à l’appui, les appels de
l’idéal dans une âme jeune sont souvent douloureux aussi et que
celles qui s’amusent à disperser leur jeunesse aux quatre vents de
leur fantaisie semblent avoir déniché un immédiat secret de
bonheur !
Tu te demandes si tu ne serais pas plus tranquille, en effet, en
prenant la vie tout bonnement comme elles, sans trop penser à
toute la misère humaine qui rôde sur les chemins, et si le « chacun
pour soi » ne représente pas le dernier mot du bon sens humain !
Il t’arrive d’avoir un peu le vertige au milieu de ce tourbillon
du monde, d’être mordue au cœur par la peur « d’être dupe »,
comme certains te le chantonnent sur tous les tons :
« Mais vivez donc votre vie, — mais la jeunesse est bien faite
pour le plaisir, — après tout, on n’a qu’une vie, il faut bien en
profiter, — ma pauvre petite, quand vous vous serez bien
dévouée pour les autres, qui donc se dévouera pour vous…
etc.… »
Parfois même, devant tant de réalités décevantes et
contradictoires, il t’est peut-être arrivé de murmurer ce mot
d’angoisse vieux comme le monde, prélude de toutes les lâches
capitulations : « Où donc est la vérité… »
Alors, c’est une grande angoisse et une grande tristesse qui
montent à tes yeux clairs… l’angoisse de tous les jeunes, lorsqu’ils
se heurtent aux dures réalités de la vie et voient se dissiper les
naïves illusions de leur enfance.
CROIS, ESPÈRE, AIME
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On croit facilement que la jeunesse est l’âge de toutes les
joies… peut-être autrefois, quand la jeune fille restait au foyer
l’enfant protégée qui ne connaissait de la vie que ce que la
prudence vigilante des parents voulait bien lui laisser entrevoir.
Peut-être aujourd’hui encore, pour quelques rares privilégiées qui
n’ont qu’à étendre la main pour se servir et qui ne voient encore
l’existence qu’à travers le mirage de leur bien-être et de leur
ignorance !
Mais pour toi et pour toutes celles qui, comme toi, doivent,
toutes jeunes, se préoccuper de leur avenir — gagner déjà leur
vie, — lutter au milieu des autres, passer par l’atelier, le bureau, la
faculté, la jeunesse c’est l’âge où l’on a déjà bien réfléchi, trop
réfléchi peut-être sur tant de problèmes dont la solution échappe.
L’âge où l’on est facilement triste en refusant de le laisser voir,
parce que l’âme a la pudeur de ses sentiments intimes.
L’âge où, meurtri de la chute de tant d’illusions, on ouvre tout
grands les yeux comme quelqu’un qui sort du rêve et on en veut
inévitablement à tous les désirs secrets.
On passe d’un excès à l’autre et, parce que la vie ne paraît plus
ce rêve enchanteur vers lequel on tendait les bras, on la voit
maussade, terne, et l’on se demande à quoi peut bien servir ce
bouillonnement ardent de vie qui circule dans l’âme et le cœur !
Plus on tombe de haut, plus on se meurtrit.
Plus grande était la noblesse de l’âme, plus amère est la
déception. On se dit : « À quoi ça sert d’être sage, puisque ce sont
les autres qui sont heureux…, à quoi ça sert d’avoir un haut idéal
de conscience, puisqu’on ne peut le réaliser. » On veut bien
travailler de tout son courage, mais le travail dépasse souvent les
forces et les travailleurs consciencieux se font moins apprécier
que les malins qui, sans rien faire, savent se mettre en valeur. À
quoi ça sert d’essayer d’être bon, puisqu’on se heurte partout à
l’indifférence ou à la méchanceté. Les efforts se perdent dans le
grand remous général comme un cri d’insecte dans la grande
rumeur de la création. L’être humain est petit, faible, désarmé. La
conscience est vaincue. La justice cède à la force ou à la
« combine ». L’argent est plus que jamais la clef de tout. On se
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JEUNE FILLE…
fait trop difficilement sa place au soleil. L’âme ouvre ses ailes, ne
peut pas se porter et retombe. Tant d’efforts stériles, tant de zèle
dépensé en vain… le monde, qui a finalement bien l’air d’avoir
raison !
À quoi cela aurait-il servi que je reste une honnête fille gardant
jalousement mon cœur pour mon mari, si jamais mes élans de
tendresse ne trouvent un écho dans un autre cœur, si je n’ai
jamais la joie de serrer contre moi le corps doux et chaud d’un
petit enfant !
Tout cela murmure en toi si fort, à certaines heures !…
PRENDS GARDE.
D
l’amertume à l’erreur, le pas est vite franchi.
Es-tu bien sûre de la connaître, la vie ?
Es-tu bien sûre que cette vision du monde que tu as
aujourd’hui n’est pas aussi superficielle que celle que tu avais à dix
ans ?
Autrefois, tu voyais tout en beau. Maintenant, tu as tendance à
voir tout en mal. C’est peut-être logique d’ailleurs. Le mal frappe
en premier. Le scandale s’étale. Ce sont les fripons qui crient le
plus fort, les autres ont la pudeur délicate d’eux-mêmes. La
beauté est au dedans des âmes, inconnue le plus souvent, et le
mal est au dehors, exploité par toutes les puissances de
propagande. Mais l’une reste aussi réelle que l’autre. Les coquins
mènent le train sur la place publique et les braves gens pleurent
dans leurs maisons. Les coquins chanteront-ils toujours ? Où s’en
vont-ils, quand leurs mains lassées abandonnent la ronde de joie ?
Tu entends toujours la même fête aux carrefours… Crois-tu que
ce sont toujours les mêmes qui sont dans la ronde des plaisirs ?…
Où sont-ils allés, les autres ?… Où leurs compagnons les ontils « laissés tomber » sans un geste pour les retenir ?…
Et les braves gens ? Au fond de leurs yeux en larmes, n’as-tu
jamais vu monter parfois le reflet de l’inoubliable sérénité de
l’âme plus ineffable que tous les bonheurs !
La joie des saints n’est-elle plus une réalité d’expérience ?… et
une réalité non moins contestée, le dégoût de tous les
« viveurs » ?…
Aie patience dans la vie, ne la juge pas si vite !
Comme une lumière trop crue au premier plan ne permet pas
de distinguer le reste, ainsi les yeux, blessés par une première
vision de l’existence, ne savent plus voir la beauté réelle cachée
dans le monde.
Plus tard, lorsque la vie aura passé et aura dépouillé pour toi
bien de ses mystères, tu sauras mieux juger sereinement. Ton œil,
après avoir été ébloui par un jour trop cru, peu à peu distinguera
les nuances.
E
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JEUNE FILLE…
Mais il faut du temps. L’erreur de la jeunesse est d’être trop
pressée et son malheur est que tant et tant de voix mauvaises
autour d’elles s’empressent d’exploiter les premières défaillances
de l’idéal.
Tout contribue à fausser la vision réelle des choses, sous
prétexte de mieux les éclairer : le cinéma, le journal, le livre où il
n’est souvent question que de « vivre sa vie » en piétinant, au nom
de grands principes fallacieux, les humbles mots si grandioses
pourtant de conscience et de devoir.
Le chœur des gens « sages », qui branlent la tête devant les
illusions qui te restent, te trouvent « jeune » parce que tu as l’âme
haute et parlent de la vie comme d’une « bonne affaire à réussir »,
où tous les moyens sont bons, pourvu qu’ils procurent le résultat.
Et tous ceux aussi qui, ayant étouffé leur conscience, veulent
se trouver des complices, rient de la vertu et, pour entraîner les
autres, font miroiter devant les jeunes les soi-disant profits de
leurs vices !
C’est pour cela que le contact de la vie est souvent
démoralisant.
Pour beaucoup, le choc aura été trop rude. Les ailes cassées
traîneront dans la poussière des médiocrités subies d’abord,
acceptées ensuite et finalement aimées. Ou bien la barque, ayant
cassé son gouvernail, ira se perdre n’importe où, un soir
d’orage…
Et ce sont parfois les meilleurs qui font naufrage !
Songe à tant et tant de jeunes qui étaient pures comme toi,
nobles comme toi pourtant et qui sont maintenant dans la foule
lamentable des déchues, celles que les hommes recherchent et
méprisent.
Songe à tant et tant de naufrages définitifs de tant d’âmes qui
portaient dans leurs yeux de vingt ans la noblesse et le
rayonnement de leur idéal. Regards éteints maintenant ou qui ne
s’allument plus que pour de mesquines convoitises. Enlisement
dans la boue où l’on se trouve bien, du grand oiseau du large dont
les ailes s’ouvraient pour planer.
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Ou bien détresse de l’âme en qui survit un idéal frémissant qui
ne veut pas se résigner à mourir, dont chaque soubresaut fait
longtemps mal et qui, néanmoins, se sentant trop seule, veut se
mettre à l’unisson des autres, rire de ces rires où les autres
semblent trouver du plaisir, partager leurs mêmes idées, quitte à
s’enliser dans la même misère…
Si tu ne veux pas devenir une de celles-là, prends garde à tout
ce qui te guette.
Prends bien garde à ces heures troubles de découragement où
l’on est près de se renier soi-même pour moins souffrir.
Prends garde à toutes les voix qui te feront entendre leur
refrain de plaisir qui ne serait pour toi qu’un refrain de mort…
Sais-tu où elle se termine, la ronde effrénée de toutes celles qui
« s’amusent » et en quels cris de détresse s’étouffent les plus fous
refrains ?

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