Le 5, grand Numéro de Chanel

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Le 5, grand Numéro de Chanel
Le 5, grand Numéro de Chanel
Sommaire
Introduction
I- Le n° 5, « un parfum de femme à odeur de femme et le plus cher du monde »,
est la fragrance symbole du luxe, de la sophistication et du glamour
A- Les caractéristiques du produit à sa création
B- Le N°5 aujourd’hui
II- La maison Chanel a mis en place une communication parfaitement cohérente
avec le positionnement du N°5, afin de le rendre intemporel, immortel
A- Le choix d’égérie est essentiel : c’est le support même de la promotion
du produit
B- Le choix des supports de communication
C- Deux exemples de réussite publicitaire pour Chanel N°5
III- Comme la majeure partie de ses concurrents, Chanel a dû se plier à la règle
de la distribution sélective pour vendre le n°5
A- La relative démocratisation du luxe a poussé Chanel vers la distribution
sélective du N°5
B- La distribution sélective a su s’adapter aux critères du marché du luxe,
afin de limiter les risques de cette nouvelle façon de vendre
C- Un pari gagné
Conclusion
Bibliographie
Annexes I
Introduction
« Je ne veux pas de parfum à odeur de rose, de muguet, je veux qu’il soit
composé. […] Un parfum de femme à odeur de femme, car une femme doit
sentir la femme et non la rose. »
Coco Chanel.
Tel fût le souhait de Gabrielle Chanel, également
connue sous le nom de Coco Chanel qui, à l’âge de 20
ans, devint vendeuse dans un magasin de confection
pour dames dans l’Allier avant d’interpréter « Qui qu’a
vu Coco », chanson dont est extrait son surnom.
Elle monta en 1909 son premier atelier de modiste dans
une garçonnière du Boulevard Malesherbes avant de
s’installer, plus tard, dans des locaux beaucoup plus
grands au 21 de la rue Cambon, dans le 1er
arrondissement de Paris. À l'entrée, on pouvait y lire :
"Chanel Modes". À l’été 1913 alors qu’ils séjournent à
Deauville, Boy, son petit ami, loue une boutique entre le
casino et l’hôtel Normandy, permettant ainsi à Coco
d’être créatrice de chapeaux pour dames comme à Paris. Seule l’enseigne a
changé : GABRIELLE CHANEL. La boutique ne désemplit pas.
En été 1913, elle se lance dans la couture et s’attire rapidement une
clientèle fortunée. Son ascension se poursuit malgré la guerre et elle ouvre sa
première vraie maison de couture à Biarritz. Elle libère le corps de la femme en
modernisant l’habillement féminin par des jupes raccourcies, la suppression de la
taille et le lancement de la mode des cheveux courts. Elle popularisera aussi le
jersey et dirigera jusqu’à 300 salariés avant de revenir s’installer à Paris au 31
rue Cambon. Alors qu'elle règne sur le microcosme de la mode parisienne,
Gabrielle Chanel se lance un nouveau défi : créer son propre parfum.
Du latin per-fumum, signifiant " à travers la fumée ", le parfum a joué un rôle
dans toutes les civilisations, passant du sacré au profane. Chargé de transporter
les prières des hommes jusqu’aux dieux ou instrument privilégié de la séduction,
son histoire, passionnante, est liée à l’évolution des mœurs et des idées, chaque
époque privilégiant une manière de se parfumer, une senteur parmi d’autres.
En 1921, Gabrielle Chanel décida de lancer son propre parfum. Pour ce
faire, elle fit appel à Ernest Beaux, « grand nez réputé » afin de trouver la
fragrance adéquate. Beaux propose alors plusieurs échantillons, numérotés de 1
à 5 et de 20 à 24. L’originalité du contenu de la fiole n°5 séduit immédiatement
Chanel. À la question "quel nom allez-vous lui donner ?", elle répondit : "je lance
ma collection le 5 mai, cinquième mois de l'année, laissons lui le numéro qu'il
porte et ce numéro 5 lui portera chance".
Aujourd’hui encore, Chanel n°5 est le parfum le plus connu au monde. Mais
quelle a été la communication de la maison Chanel pour faire du numéro 5 un
parfum culte, symbole de la marque ?
Dans un premier temps, nous étudierons le positionnement du N°5 à sa
création et aujourd’hui. Puis, nous définirons la stratégie de communication de la
maison Chanel pour le N°5. Enfin, nous finirons par démontrer la stratégie
utilisée par Chanel sur la distribution du célèbre parfum.
I- Le n° 5, « un parfum de femme à odeur de femme et le plus
cher du monde », est la fragrance symbole du luxe, de la
sophistication et du glamour
A- Les caractéristiques du produit à sa création
Chanel est une marque de luxe connue et reconnue dans le monde entier.
Son premier parfum, le Chanel numéro 5, est devenu un produit phare. Il a été
concocté en 1921, par Ernest Beaux sur la commande de Gabrielle « Coco »
Chanel.

La création du parfum :
En 1924, la quasi-totalité des parfums possédait une senteur florale. La
fragrance du N°5 trancha totalement avec cette mode et fut de ce fait l’un des
facteurs de son succès. Gabrielle Chanel fut donc la première à sortir de ce
carcan. De plus, les aldéhydes, composés qui apportent cette spécificité au
parfum n’avaient jamais été utilisés auparavant dans la parfumerie.
Le N°5 est composé comme suit :
 Note de Tête : Aldéhydes/Bergamote/Citron/Néroli
 Note de Cœur : Jasmin/Rose/Muguet/Iris
 Note de Fond : Vétiver/Santal/Vanille/Ambre
Son jus fut également une des raisons du succès. En effet le jaune ambré
intense donne la sensation d’être parée de bijoux, de briller et de dégager une
aura lumineuse.
Le choix du nom :
Le nom donné au parfum fut, selon les spécialistes, un avantage car il ne
cadrait absolument pas avec les habitudes de la parfumerie. La fragrance est
issue de la cinquième fiole présentée à Coco Chanel pour son parfum, fiole
numérotée 5. La créatrice trouvait intéressant de laisser ce numéro au parfum
puisque celui-ci sortirait le 5 mai, le mois de mai étant le cinquième mois de
l’année. Elle y voyait aussi un signe de chance.

La conception du flacon :
Le flacon est un élément primordial pour tout parfum. Coco Chanel afficha
une volonté certaine de rompre avec les diktats artistiques de son époque et
dessina elle-même un flacon aux lignes épurées, en rupture totale avec les
bouteilles très travaillées de sa période. La créatrice recherche la simplicité et
l’élégance autour de couleurs neutres : le blanc, le noir, et le beige ou or (couleur
du jus du N°5). Ainsi, l’étiquette blanche et noire à la typographie simple est
indémodable.

Le flacon dessiné par Coco Chanel a quelque peu évolué depuis sa
création, mais reste toujours fidèle au concept de simplicité et d’élégance voulu
par sa créatrice.
Les cibles :
Chanel présenta d’abord le parfum à ses plus fidèles clientes,
fortunées et aux nombreux réseaux. En effet, la bouche à oreille obtenue permit
de faire connaître le N°5, et toutes les femmes de plus de trente-cinq ans,
désireuses de rompre avec les codes du XIXe siècle, mais aussi de suivre la
mode, s’éprirent du N°5.
Ce produit étant un produit de luxe, jouant sur la rareté et un prix élevé, était
destiné aux femmes des milieux les plus aisés de l’époque.

B- Le N°5 aujourd’hui
Les caractéristiques du parfum sont toujours les mêmes, à savoir que
le n°5 de Chanel comprend près de quatre-vingts ingrédients au cœur de sa
bouteille facettée.
Le parfum au cœur de deux lignes particulièrement bien pensées :
Chanel a décliné deux lignes autour du N°5 : la ligne parfums, et la
ligne pour le bain et le corps.

La ligne parfums est composée de quatre catégories :
 le parfum
 l’eau de parfum
 l’eau de toilette
Ces déclinaisons permettent de vendre des produits complémentaires,
ou de s’adapter aux choix des clientes qui pourraient trouver le parfum N°5 trop
fort, trop insistant, et ainsi se rabattre sur l’élixir ou l’eau de parfum plus légère.
La ligne pour le bain et le corps a été créée pour répondre à ces
mêmes attentes et offrir de nouvelles manières de profiter du N°5. Cette ligne
abrite donc une « Collection Séduction » composée :
 d’émulsions et de crèmes pour le corps
 d’huile et de gel moussant pour le bain
 d’élixirs (produits en texture gel)
 de savons, déodorants, et parfum pour les
cheveux.
Tous les produits de cette gamme sont de couleur rose pêche,
afin de les démarquer de la ligne parfums, couleur du jus du N°5.
 Le conditionnement :
Le conditionnement étant la première enveloppe du
produit, il est important que celui-ci respecte certaines
conditions tant au niveau du packaging que du produit luimême. Ainsi, les matériaux utilisés pour emballer le N°5
sont du papier et du carton. L’avantage étant qu’il est solide, léger, facilement
imprimable, bien qu’il n’aime pas l’eau.
On retrouve également du plastique qui a l’avantage d’être léger, étanche,
résistant bien que non biodégradable et pas recyclable facilement. Enfin, le verre
plus étanche, neutre et ayant une image plutôt chic, bien que lourd, fragile et
ayant un coût élevé termine la composition de l’emballage.
(Ci-dessus, le conditionnement de l’extrait de parfum en vaporisateur de
7,5ml, au prix de 70€)
Le conditionnement du parfum s'effectue encore aujourd'hui à la main, ce qui
accentue une fois de plus le côté luxueux et rare de l’enseigne haute couture.
Le N°5, parfum culte, semble indétrônable :
Ce parfum est le plus vendu au monde et il véhicule l’image d’une
femme libérée, élégante et sensuelle. Grâce à cette fragrance, la maison
Chanel vend autant de flacons du seul N°5 que la marque Dior, tous parfums
réunis, et trois fois plus que Hermès, autres noms du luxe qui se sont lancés
dans les parfums. Le N°5 se positionne donc sur le marché de la parfumerie haut
de gamme.

Le parfum Chanel numéro 5 est la référence dans le monde de la
parfumerie. Son positionnement luxe fait de lui un parfum presque unique. Il ne
semble pas avoir donc de réel concurrent. Toutefois, sur une même cible, et
avec un positionnement similaire, Lancôme et son parfum Trésor (qui use
également de la publicité télévisée), Guerlain et sa fragrance Shalimar, tentent
de grappiller des points sur un marché qui semble totalement acquis au N°5.
Première ligne de parfum féminin la plus vendue en décembre 2006, le
N°5 de Chanel laissait derrière lui Trésor et Shalimar, respectivement neuvième
et dixième.

Une cible plus étendue qu’à ses débuts :
 La cible générale est la femme, toutes les femmes.
 Le cœur de cible est la femme entre 35-50 ans.
 La cible secondaire est la femme plus âgée ainsi que les
hommes, qui peuvent être les prescripteurs (les belles égéries de
la marque leur sont aussi destinées !)
De plus, les femmes ont de plus en plus tendance à appartenir à un
groupe, à se référer à un modèle qui leur permettrait de se sentir exister parmi
les plus grandes. Le fait de porter le n°5 de Chanel permet à toute femme
d’entrer dans l’univers de Chanel, du luxe, de la beauté et surtout de la rareté. Le
luxe est souvent futile et ne représente pas d’avantages fonctionnels évidents.
L’avantage est d’abord psychologique, permettant une
satisfaction ou un certain statut.
On peut également noter que les lignes construites autour du N°5
(notamment la ligne pour le bain et le corps) permettent à certaines femmes de
s’offrir un produit n°5, même si elles n’achètent pas le parfum en lui-même, le
prix du parfum se situant entre 70 et 150 euros, selon la contenance. (Ci-contre,
l’eau de parfum N°5 en flacon : 95 € les 100ml, 150€ les 200ml)
II- La maison Chanel a mis en place une communication
parfaitement cohérente avec le positionnement du N°5, afin de le
rendre intemporel, immortel
A- Le choix d’égérie est essentiel : c’est le support même de la
promotion du produit
Le N°5 véhicule la liberté, la sensualité et l’élégance. Il fallait donc choisir
des égéries en parfaite adéquation avec cette image. Mais avant de mettre en
place une quelconque promotion de son parfum, Gabrielle « Coco » Chanel usa
d’un stratagème afin de faire parler du N°5. En effet, pour attiser la curiosité
autour de cette nouveauté, Chanel ne distribua le parfum qu’à ses plus fidèles
clientes, en prétendant qu’elle avait découvert par pur hasard cette fragrance, et
qu’elle ne se rappelait plus de son nom. Le bouche à oreille fonctionna
parfaitement et toutes furent conquises. La célébrité du N°5 s’étendit alors outreAtlantique.
1. Les plus grandes ambassadrices de Chanel.
En 1934, Gabrielle Chanel devint l’ambassadrice de la
première campagne pour le N°5. Cette campagne de presse était
exclusivement destinée aux Etats-Unis et publiée dans Harper’s
Bazaar, considérée comme la première revue de mode
américaine, créée en 1867. La parfumerie et la mode étaient
alors deux univers bien distincts mais Coco Chanel, qui avait déjà
marqué sa différence en affichant sa volonté de libérer la femme
des carcans vestimentaires du XIXe siècle et en donnant son
nom à un parfum, concrétisa la liberté qui la caractérisait en
promotionnant elle-même le N°5.
Au fil des années, les plus belles femmes du monde devinrent les
ambassadrices du N°5 :
Suzy Parker, célèbre cover girl et
actrice américaine devint la
première
figure populaire du N°5 durant
les
années 50.
Ali McGraw lui succède en 1965. Elle fut repérée par
Hollywood grâce à cette campagne
et deviendra l’héroïne de « Love Story » en 1971.
Candice Bergen, en 1966. L’actrice américaine,
qui n’a alors que 22 ans, est « The American Girl »
dont tout le monde rêve : cultivée, moderne, et troublante.
Lauren Hutton top-model et actrice,
est considérée en 1968 comme
l’allégorie du dynamisme et de l’action.
Catherine Deneuve : l’actrice française fut l’ambassadrice
du N°5 de 1968 à 1976, mais aux Etats-Unis
uniquement. Les campagnes furent réalisées par deux
maîtres de la photographie : Helmut Newton et
Richard Avedon.
Carole Bouquet, seconde actrice française à être l’icône de
la fragrance de Chanel, fut choisie pour son côté sophistiqué
et son élégance froide et mystérieuse. C’est en 1986, dans
un spot télévisé réalisé par Ridley Scott que Carole Bouquet
devient l’image de l’eau de parfum N°5.
Estella Warren, top model canadien remplace Carole
Bouquet en 1999. Cette ancienne nageuse de haut
niveau, sera sublimée par Luc Besson, qui fera d’elle un
Petit Chaperon rouge domptant le loup dans un spot qui
fera le tour du monde.
Nicole
Kidman,
est
ambassadrice
du
N°5
depuis 2003. Avec elle,
Chanel renoue avec la
tradition
des
actrices
hollywoodiennes, cinquante
ans après Marilyn Monroe qui, en 1954, offrit le plus bel écho
publicitaire dont Chanel puisse rêver.
À un journaliste qui lui demandait ce qu’elle portait la nuit pour
dormir, Marilyn répondit : « Mais, quelques gouttes de N°5
bien sûr ! » (1). Cette réplique charmante participa à la
construction du mythe N°5.
2. Pourquoi choisir ces femmes ?

Le prestige mutuel.
Les maisons de couture et les marques de beauté ont toujours eu pour
habitude de prendre pour ambassadrices les actrices les plus célèbres du
monde. Au fil des années, elles sont devenues les véritables muses du marché
du luxe, et reviennent avec force sur le marché de la parfumerie. Car après le
choix de mannequins inconnus du grand public (1999 : Estella Warren pour
Chanel N°5, et Carmen Kass pour J’adore de Dior), les grandes actrices sont de
nouveau au goût du jour.
Dans le cas de Chanel, il a toujours été primordial de choisir des
actrices, porteuses des valeurs véhiculées par la marque et le parfum. Elles
sont toutes des figures emblématiques du cinéma, connues dans le monde
entier. Leur célébrité et leur aura servent bien évidemment la communication
réalisée autour du parfum, mais la notoriété et l’image de Chanel, et plus
précisément du N°5, profitent également aux ambassadrices (Ali McGraw, ou
Carole Bouquet n’étaient pas encore des stars planétaires lorsqu’elles furent
choisies par exemple). On note donc que l’image et les valeurs de la célébrité
sont transférées sur le produit : l’élégance et le côté mystérieux de Carole
Bouquet ou Nicole Kidman collent parfaitement à l’image que la cible a du N°5 et
accroissent son impact.

Le phénomène d’identification.
L’égérie est le support même de la communication. Ici, elle est
également un facteur d’identification de la cible à l’ambassadrice, et ce pour
plusieurs raisons :
 Tout d’abord, l’égérie est une femme dont l’âge est similaire à celui
du cœur de cible (généralement plus de 35 ans).
 Mais avant d’être égérie de Chanel, l’ambassadrice du N°5 est une
actrice connue qui fait rêver le monde entier, comme Catherine
Deneuve ou Nicole Kidman. Non seulement les femmes
susceptibles de porter le N°5 connaissent l’œuvre de l’actriceégérie, mais elles connaissent surtout sa vie : Marilyn, icône
glamour soupçonnée d’être la maîtresse du Pdt Kennedy, ou Nicole
Kidman, ex-Madame Tom Cruise depuis un divorce retentissant.
 La cible est donc la spectatrice de la vie professionnelle et
personnelle de l’égérie. Elle aimerait être aussi glamour, sensuelle
et mystérieuse que celle qui prête son image au N°5. Et justement :
le N°5 devient le point commun entre l’actrice et la spectatrice. Star
du cinéma ou femme anonyme, toutes deux portent le N°5 de Coco
Chanel.
Notes :(1) Marilyn
Monroe s’adressant à un journaliste en 1954. Source :
http://poivrebleu.wordpress.com/2007/03/05/perfume-parfums-chanel-5/  « le blog du parfum
où votre nez bavarde »
B- Le choix des supports de communication
La presse.
La presse a tout d’abord été le média privilégié pour les campagnes
du N°5. Ainsi les espaces publicitaires dans les magazines féminins étaient la
base de la communication de Chanel. Des visuels réalisés selon les valeurs de
la marque et du produit : simplicité, élégance, sensualité. En effet, la grande
majorité des annonces sont construites autour de l’égérie, du flacon épuré
dessiné par Coco Chanel et du nom « Chanel N°5 ». On le remarque d’ailleurs
sur les photos précédemment choisies pour présenter les égéries.
Mais la distinction a été faite entre le marché américain et le marché
national. Tout d’abord certaines actrices ne furent les
égéries du N°5 qu’aux Etats-Unis, comme Gabrielle
Chanel, Ali McGraw ou même la Française Catherine
Deneuve. On remarque également qu’un personnage
masculin fait son apparition dans deux campagnes parues
outre-Atlantique entre 1960 et 1975. C’est l’image d’un
couple heureux, amoureux, et non d’une femme séductrice
que Chanel attache alors au N°5. De plus, un slogan complète le visuel :
« Chanel says it for you » ou Chanel le dit pour vous. Le N°5 traduit alors toute
la sensualité et le bonheur qui caractérisent une femme amoureuse, et le visuel
laisse voir le résultat : un homme captivé par celle qui porte le N°5 de Chanel.
Les visuels destinés à la presse ou à l’affichage peuvent être
aussi construits autour du flacon et du nom seulement, sans qu’il y
ait une ambassadrice. Afin de marquer les esprits, le N°5 a dû se
rajeunir et sortir des codes couleurs habituels de la marque : noir,
blanc, beige et doré (les couleurs préférées de Gabrielle « Coco »
Chanel).
(Exemple : campagne 2003 ; voir annexe
pour d’autres
exemples)
Et en 1997, ce n’est pas le N°5 qui rend hommage à
Andy Warhol, mais bel et bien Andy Warhol (décédé dix ans
plus tôt) qui rend hommage au N°5. En reprenant la toile du
flacon de N°5 pop’art que l’artiste réalisa en 1985 Chanel
marque ainsi les dix ans de la mort de Warhol, mais souligne
par cette formule l’immortalité, la célébrité et l’universalité du
N°5. (Annexe 2)
La télévision.
Le succès fut immédiat lorsque le média télévision fut ajouté à la
communication du N°5. En effet, Chanel a toujours su s’entourer des plus
grands réalisateurs du cinéma mondial. Ridley Scott en 1986, et Jean-Paul
Goude en 1995, mirent tous deux en scène Carole Bouquet. Cette dernière se
transformait en Marilyn Monroe grâce à la technique du morphing employée par
Goude. Le budget de cinq millions de francs paraissait dithyrambique à l’époque.
Le cinéma et l’affichage.
Les médias cinéma et affichage sont également exploités, le premier
permettant de rediffuser sur grand écran les spots publicitaires, et le second de
décliner en affichage JC Decaux les affiches dérivées de ces mêmes spots.
De toutes les réalisations télévisuelles pour le N°5, les deux dernières
attirent plus particulièrement l’attention. En 1999, Luc Besson, réalisateur à
succès du Grand Bleu et du Cinquième Élément entre autres, mit en scène sa
vision du Petit Chaperon rouge pour le n°5 ; puis ce fut le tour de Baz Luhrmann
de donner sa vision du parfum, autour de l’image de Nicole Kidman.
C. Deux exemples de réussite publicitaire dans la communication de
Chanel pour le N°5
1. Le Petit Chaperon rouge par Luc Besson. (Feuillet en
annexe 3)
En 1998, Jacques Helleu, directeur artistique de la maison Chanel, donna
carte blanche à Luc Besson pour réaliser le nouveau film publicitaire du N°5.Le
réalisateur choisit alors d’allier un au parfum légendaire un conte universel : le
Petit Chaperon rouge. Ce spot de 45 secondes fut construit comme un long
métrage : de l’intrigue, du suspens, et même une fin heureuse pour ce Petit
Chaperon incarné par le mannequin Estella Warren.
On aurait pu penser dans un premier temps que le choix d’une égérie
inconnue du grand public, donnant l’image d’une
« femme-enfant », aurait pu créer un manque de
reconnaissance chez le cœur de cible du N°5, qui ne
serait pas identifié à elle comme ce fut le cas avec les
égéries précédentes.

Les raisons du succès.
 La mise en scène : toutes les valeurs du parfum sont
sublimées dans ce spot. Luxe, sensualité, séduction et hyperféminité sont illustrés par l’égérie. La femme de plus de 35 ans
n’est donc pas choquée de voir cette jeune femme blonde en
jupe corset rouge.
 La référence au Petit Chaperon rouge est subtile : elle
n’arrive qu’après que la jeune femme a pris possession du N°5
et qu’elle le porte sur elle. Elle glisse ensuite l’un des flacons
dans son panier d’osier, et c’est à ce moment que toutes les
petites filles auxquelles on narrait le conte, aujourd’hui
devenues femmes, font le rapprochement.
 Le suspense : le loup sort de la pénombre derrière le Petit
Chaperon rouge qui vient d’enfiler sa cape. Il suffira à celui-ci
d’intimer au loup l’ordre de se taire pour qu’il s’asseye et
obéisse. Estella Warren laisse ainsi le loup derrière elle,
hurlant à la mort, pour rejoindre Paris et la tour Eiffel illuminée.
 Le final : Le fondu enchaîné sur le flacon de N°5 : le loup est
en fait assis au milieu du 5, puis laisse la place à l’éclat du
flacon.

Une publicité particulièrement bien perçue.
La performance de cette publicité en termes d’impact et d’agrément frisa
la perfection avec un score de 90%. Le score spécifique atteignit les 36%, soit un
résultat plus élevé que le score moyen des campagnes du secteur parfumerie.
Les points d’ancrage les plus cités par les consommateurs furent le Petit
Chaperon rouge (22%), le loup (22%), puis l’ordre au loup de se taire (12%) et
les flacons alignés (10%) (2). L’alliance entre le conte et le parfum est donc
parfaite puisque ce sont les deux éléments principaux du conte, l’élément
changeant (le loup obéit), puis la répétition du produit qui marquent le plus.
2. « La femme la plus célèbre du monde » de Baz
Luhrmann.
La dernière publicité en date pour le N°5 de Chanel fut conçue comme un
vrai film hollywoodien. D’une durée de deux minutes et trente secondes (rare
en publicité), ce film évènementiel avait pour vocation de mettre en scène la
nouvelle égérie du parfum, Nicole Kidman. Réalisée par Baz Luhrmann, cette
publicité est également connue pour son budget record de 30 millions d’euros,
dont 3,71 millions de dollars pour l’actrice oscarisée.
L’objectif affiché par les responsables de Chanel était de marquer les
esprits pour le lancement de la nouvelle communication du N°5, à quelques jours
des fêtes de cette fin d’année 2004. En effet, cette période est très porteuse pour
la parfumerie et notamment pour Chanel, la ligne N°5 étant la ligne de parfums
féminins la plus vendue en décembre.
Le film raconte donc l’histoire de la femme la plus célèbre du monde
s’échappant de sa limousine, courant au milieu des voitures dans Time Square,
sous les flashs des paparazzis. L’actrice saute dans un taxi où se trouve un
jeune homme, avec lequel l’égérie passe la nuit avant de retourner dans son
monde. La dernière scène offre la silhouette parfaite de Nicole Kidman dans une
robe noire, le dos nu orné d’un pendentif N°5 aux 647 diamants.
Notes : (2) : Source : Magazine Stratégies, n°1088 du 12 février 1999
Le film marqua les esprits grâce au spot en lui-même, mais aussi parce
que la communication fut semblable à celle d’un long métrage. En effet, l’agence
médias de Chanel, Mediaedge:cia, construisit la promotion de la publicité avec la
mise en place d’un teasing, d’un générique, de mini-spots sur TF1 et des
annonces dans des quotidiens, conçues comme des affiches de cinéma, invitant
à découvrir le spot sur la première chaîne. Stratégie payante puisque le
dimanche 21 novembre 2004 à 20h40, 9 millions de téléspectateurs regardèrent
la publicité, avec une part de marché conséquente (40, 7 % des ménagères de
moins de 50 ans étaient devant leur télévision) (3).
La campagne s’est également adaptée aux zones géographiques et aux
différentes cultures : elle commença le 29 octobre 2004 aux Etats-Unis pour
cause de Thanksgiving, et début janvier en Espagne, moment de l’Épiphanie,
une des fêtes les plus importantes pour la péninsule ibérique. Grâce aux
fabuleuses retombées presse dont le film a bénéficié, la communication de
Chanel fut et reste l’un des plus grands succès publicitaires de cette décennie.
Chanel n’a jamais relâché ses efforts sur la communication autour du N°5.
La maison a su s’entourer d’ambassadrices prestigieuses afin de toucher une
cible déjà influencée par l’immense notoriété du parfum. Cependant, pour ne pas
assister au déclin des ventes du N°5, Chanel a dû se plier à la même règle que
les grandes maisons du luxe s’étant plongé dans le secteur de la parfumerie : de
la distribution sélective.

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