Georges-Emmanuel Clancier

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Georges-Emmanuel Clancier
Le poète limousin Georges-Emmanuel Clancier revisite ses souvenirs
Georges-Emmanuel Clancier chez lui rue de Lübeck à Paris. (2014) - Archives Sylvain Compère
Il est le poète de nos terres. Le grand prosateur qui a frappé d’enchantements nos paysages et nos mémoires.
Un « paysan céleste égaré à Paris », qui défie l’éternité.
La publication des mémoires, période 1935-1947, de Georges-Emmanuel Clancier, Le temps d'apprendre
à vivre (*), est un événement. En ces temps de dilution culturelle, nous pouvons reconnaître en lui un véritable
poète. Un homme dont ses amis pressentirent très tôt qu'il n'était « jamais entièrement présent parmi eux, avec
eux ».
Le texte est irrigué par une force douce qui peut affronter l'adversité mais surtout servir l'amitié. La qualité
des réflexions personnelles n'est jamais prise en défaut de petitesse. Partout l'expression d'une empathie, en
particulier pour les souffrants, jalonne une trajectoire qui nous fait pénétrer la vie littéraire française mais aussi
la grande Histoire.
Au début, il y a la tuberculose qui contraint à l'isolement, rompt pour toujours le déroulé des études.
Accorde le temps de lire. L'épreuve « […] m'a donné conscience de la vie, de sa force, de sa richesse en
m'écartant. Elle m'a appris, dans et par la solitude, quelle grâce il pouvait paradoxalement y avoir à se montrer
fidèle à la vie alors même que celle-ci me fuyait ». Faut-il être exclu du monde pour en percevoir la pulsation?
L'évocation de la vie littéraire et artistique à Limoges, entre les deux guerres, est captivante. L'intense
activité des cercles d'amis de la culture, les conférences auxquelles participent des écrivains de premier plan
venus de Paris souvent grâce aux anciens de Gay-Lussac, la confluence des talents des artisans d'art, des
peintres et des porcelainiers… Les rencontres avec J.M.A. Partouaud, Raymond d'Étiveaud, Jean Blanzat…
Tant d'autres. Tout particulièrement Robert Margerit, l'ami de longue mémoire, journaliste comme lui au
Populaire du Centre où « il occupait un modeste et sombre bureau dont la fenêtre donnait sur une placette
ancienne, la place Fontaine-des-Barres ».
Et puis la guerre et une répugnance immédiate pour les défaitistes. Mais les désordres d'un pays qui
s'effondre sont également propices aux rencontres inconcevables en temps ordinaires. Comme à Carcassonne,
dans la chambre de Joël Bousquet où se pressent, autour du lit du poète écrivain Aragon, Elsa, Henri Michaux,
alors que « Gide, les Gallimard, les Paulhan étaient repartis quelques jours auparavant ».
Lire les mémoires de Georges-Emmanuel Clancier, c'est entr'apercevoir une société disparue. Porteuse d'une
exigence intellectuelle dont on a du mal, aujourd'hui, à percevoir l'intensité. C'est imaginer un jeune homme
seul, réchappé de la mort, au bord d'un ruisseau limousin, écrivant : « vie offerte aux reflets du ciel\Sur quoi
le temps s'écoule…\Au bout de mes doigts calmes qui pensent\Des visages caressent leur élan passé… ».
(*) Georges-Emmanuel Clancier, Le temps d'apprendre à vivre, Albin Michel, 550 pages, 24 €.
Jean-Guy Soumy
http://www.lepopulaire.fr/limousin/actualite/departement/haute-vienne/2016/02/04/le-temps-dapprendre-a-vivre-entre-1935-et-1947_11768535.html

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