SUR LA SPHÈRE VIDE Professeur à V Université de Leningrad

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SUR LA SPHÈRE VIDE Professeur à V Université de Leningrad
SUR LA S P H È R E V I D E
PAR M.
B.
DELAUNAY,
Professeur à V Université de Leningrad, Leningrad, Russie.
Soit E un système de points distribués régulièrement dans l'espace, au sens
de Bravais, c'est-à-dire un système parallélipipédique de points (Fig. 1). Je me
propose de considérer une sphère se mouvant entre les points de E se rétrécissant
et se dilatant à volonté et assujettie à la condition d'être "vide", c'est-à-dire de
ne pas contenir dans son intérieur des points de E.
Comme application de cette conception, je vais déduire quelques propriétés
du domaine D de tous les points de l'espace qui sont plus près d'un point du
système E que de tout autre point de E. Ce domaine D, que je propose d'appeler
le domaine de Dirichlet de E, est en quelque sorte le domaine de prédominance
d'un point de E.*
Il est facile de voir que le rayon de la sphère vide dans E est limité. Par
suite, il ne peut y avoir qu'un nombre fini de sphères vides qui aient 4 points de
E sur leur surface, si, bien entendu, on ne compte pas pour différentes deux
sphères obtenues par translation le long d'un vecteur de E. Observons que, si
sur quelques-unes de ces sphères, il y avait plus de 4 points de E, il suffirait de
faire une variation infinitésimale du paralléllipipède fondamental de E pour que
cela n'ait plus lieu. Nous allons donc supposer qu'aucune sphère vide dans E
n'a plus de 4 points sur sa surface. Nous dirons, dans ce cas, que le système E
correspondant est tlnon spécial".
Il est évident que le lieu géométrique de tous les centres de toutes les sphères
vides passant par le point O de E n'est autre chose que D0. Prenons une petite
sphère vide passant constamment par le point O, et éloignons son centre dans une
direction donnée passant par O. La sphère, en se dilatant de la sorte, se heurtera
à un point a de E (Fig. 2). Et alors, son centre sera le point de la frontière de
D0, situé dans la direction donnée. Ce point appartiendra à une face de D0
qui sera perpendiculaire à Oa (Fig. 3 et 4) et aura au point ß milieu de Oa un
centre de symétrie. Cela est évident si l'on remarque que ß est centre de symétrie de E. A chaque couple de points aa' (Fig. 5) heurtés ainsi simultanément
par cette sphère vide correspond une arête de D0. A chaque triplet de tels
points (Fig. 6), c'est-à-dire à chaque tétraèdre de E dont l'un des sommets est O
et dont la sphère circonscrite est vide, correspond un sommet de D0. Il est
facile de voir que tous les tétraèdres L de E dont les sphères circonscrites sont
*Nous ne connaissons que M. Voronoï (Journal für M a t h . Bde. 134, 136) et M. Wulf
(Zeitschr. für Krystallogr. Bd. XLV 1908) qui aient envisagé le domaine D.
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vides, partagent uniformément tout l'espace. Cela provient de ce que: 1°, en
déplaçant le centre de la sphère vide le long de l'arête correspondant à une
face Oaa' du tétraèdre L en la faisant toujours passer par les points Oaa', nous
la faisons quitter le sommet opposé a" et elle se heurte finalement à un point
quelconque a" situé du côté opposé de la face Oaa' \ ce nouveau point a" forme
avec les points Oaa' un nouveau tétraèdre L adjacent à L par la face Oaa'', 2°,
deux tétraèdres Li et L2 ont en tous cas leurs sommets sur les segments de leurs
sphères qui sont situés sur les côtés opposés du plan mené par le cercle d'intersection de ces sphères (Fig. 7) ; ils ne peuvent donc pas avoir de points communs
intérieurs. En ce qui concerne les points de leurs frontières, ils ne peuvent les
avoir en commun que s'ils ont un sommet commun, ou bien une arête commune,
ou bien une face commune.
Soit LY un de ces tétraèdres. Construisons tous les tétraèdres LT correspondant à tous les points de E (Fig. 8). Ils ne remplissent pas encore tout
l'espace. Construisons également tous les tétraèdres symétriques L^. Il ne
reste maintenant comme vide que des cavernes octaédriques (Fig. 9). Ces
octaèdres ont des points de E seulement à leurs sommets ce que l'on voit facilement (Fig. 10) en divisant chaque octaèdre en 16 tétraèdres en menant les
hauteurs ad et a'd' et les perpendiculaires de, ae, etc., et en envisageant les
sphères vides ayant les arêtes de l'octaèdre pour diamètres. Tous les 16 tétraèdres
seront intérieurs à l'une ou à l'autre de ces sphères vides. Comme les tétraèdres
L doivent remplir tout l'espace, ces cavernes octaédriques doivent aussi être
remplies. Mais elles n'ont pas de communication entre elles, étant entourées
par les tétraèdres LY et Lx>. Chaque caverne doit donc à elle seule être divisée
en tétraèdres. Cela est possible de 3 façons (Fig. 11), en menant l'une des
trois diagonales intérieures de l'octaèdre, mais seulement une seule de ces alternatives convient parce que la partition de l'espace en tétraèdres L est uniforme,
chaque tétraèdre L correspondant à un sommet des domaines D et réciproquement. Admettons que, dans notre cas, ce soit la diagonale aa' qu'il faille employer. Nous obtenons ainsi deux nouveaux couples de tétraèdres symétriques
Lu, Lu> et LU1, LÎUf. Les 6 tétraèdres L^L^L^L^L^L^
remplissent tout l'espace.
Envisageons tous les tétraèdres L dont l'un des sommets est le point O de
E (Fig. 12). Ces 24 tétraèdres constituent un polyèdre Z) à 24 faces ayant
14 sommets et 36 arêtes. Mais, comme ses faces triangulaires donnent deux
à deux des parallélogrammes, nous obtenons, en réalité, un dodécaèdre rhomboidal. Ce dodécaèdre a 4 paires de sommets opposés ternaires (c'est-à-dire
où se rencontrent 3 laces) et trois paires de sommets quaternaires (Fig. 13). On
peut l'envisager de 4 façons, respectivement aux 4 paires de sommets ternaires,
comme translation d'un parallélipipède le long de sa diagonale intérieure. Si l'on
mène des plans perpendiculaires par les milieux ß des 14 rayons de D, on obtient Z).
Il faut mener les diagonales des 12 faces par les 8 sommets ternaires pour
obtenir les 24 faces triangulaires (Fig. 14). A chaque sommet D correspond
une face de D. A toutes les arêtes de D, en comptant aussi les diagonales
susdites passant par un sommet de D correspondent les faces par lesquelles sont
adjacents les tétraèdres L formant D qui ont pour arête commune le rayon de
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D correspondant à ce sommet, c'est-à-dire correspondant aux arêtes de la face
de D relatives à ce sommet de D.
A chaque face triangulaire de D correspond un des tétraèdres L formant D,
c'est-à-dire un des sommets de D. La simple inspection de D fournit les propriétés de D:
(1) D est un polyèdre à 14 faces (Fig. 15 et 16) dont 6 sont des parallélogrammes et 8 des hexagones. En général, c'est une combinaison d'un parallélipipède avec 4 pinacoïdes, mais, dans des cas particuliers, d'un parallélipipède
et d'un octaèdre.
(2) D lui-même, ainsi que ses faces, ont des centres de symétrie.
(3) Les 36 arêtes de D sont partagées en 6 zones par 6 arêtes. Toutes les
arêtes d'une même zone sont égales et situées sur un même cylindre circulaire.
(4) Les 24 sommets de D sont situés sur les surfaces de 3 sphères concentriques dont les rayons sont justement les rayons des sphères circonscrites aux
3 tétraèdres Ll, Lu, LIU, et ainsi de suite.
Si l'on a un cas limite, c'est-à-dire si le système E devient spécial, il est
facile de voir que les 6 arêtes d'une zone disparaissent. Nous obtenons ainsi,
par conséquent encore 4 dégénérescences de D. Ce sont: un dodécaèdre allongé
spécial (Fig. 17), un dodécaèdre rhomboidal (Fig. 18), un prisme droit hexagonal
dont les faces hexagonales ont des centres de symétrie et sont inscrites dans
un cercle (Fig. 19), et le parallélipipède rectangulaire (Fig. 20).
Il est important de rappeler que tout corps convexe qui peut remplir uniformément l'espace en position parallèle, c'est-à-dire chaque paralléloèdre est
une affinité de D ou l'une de ses dégénérescences (Théorème de Voronoï, Creile
Bd. 134).
La méthode précédente montre entre autres qu'il n'y a qu'un seul point
(et son symétrique) en général, qui corresponde à un extremum (maximum)
d'éloignement des points de E. C'est le centre de la sphère vide qui ne peut
plus être dilatée, même si on lui permet de se mouvoir à volonté. Cette sphère
est l'une des 3 sphères correspondant à l'un des tétraèdres Llt Ln, LU1.
Mais
dans des systèmes E particuliers, qui peuvent ne pas être spéciaux, deux ou
même toutes les trois de ces sphères peuvent avoir cette propriété.
La Fig. 21 donne, pour finir, la partition uniforme de l'espace par les domaines D.
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Fig. 16
Fig 15
Fig. 14
Fig. 13
Fig. 17
Fig. 18
Fig. 21
Fig. 19
Fig. 20

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