L`éducation à but lucratif se profile à l`horizon…

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L`éducation à but lucratif se profile à l`horizon…
L’éducation à but lucratif se
profile à l’horizon…
Les entreprises à but lucratif
changeront-elles le “plan de match”
de l’apprentissage en ligne et de
l’éducation postsecondaire?
2012
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Octobre 2012 a été un mois remarquable dans l’univers de l’éducation à but
lucratif!
La plus importante société au monde dans le domaine de l’apprentissage,
Pearson, a en effet annoncé en octobre qu’elle allait acquérir EmbanetCompass
pour la somme formidable de 650 millions de dollars (en liquide). Cette
dernière est une entreprise qui travaille en partenariat avec des établissements
d’enseignement postsecondaire en vue de fournir des solutions d’apprentissage
entièrement en ligne pour plus de 100 programmes universitaires. La raison citée
par Pearson pour justifier cette acquisition est qu’elle lui procure d’excellentes
occasions d’augmenter sa croissance et son impact dans l’éducation en ligne et
les services éducatifs.
En outre, le Apollo Group a annoncé au cours du même mois qu’en raison d’une
diminution des revenus et des inscriptions, il avait l’intention de fermer 115 (ou
plus de la moitié) des centres d’apprentissage et campus de la University of
Phoenix, un autre établissement à but lucratif. À cause de ces fermetures, cette
université supprimera 800 emplois et n’aura plus que 112 lieux d’apprentissage.
En réponse à la demande des étudiantes et étudiantes, une partie des
300 millions de dollars économisés ainsi seront investis dans la plateforme
d’apprentissage en ligne de l’entreprise.
Tout au long de l’année 2012, des universités d’élite se sont jointes à des
consortiums en vue d’offrir des cours dans leurs domaines spécialisés
particuliers : notamment, des cours en ligne largement ouverts (massive open
online courses, ou MOOC) proposés gratuitement à des centaines de milliers
d’étudiantes et étudiants partout sur la planète.
Revenons un peu en arrière afin de mettre en perspective cette situation et
de poser comme postulat quelques conséquences qui en découleront pour
notre secteur de l’apprentissage en ligne, ici même en Ontario. Notre secteur
a vraiment besoin non seulement de réfléchir à l’impact de grande envergure
qu’auront ces « entreprises transformatrices », mais aussi de s’y préparer. Tout
d’abord, nous présentons plus d’information sur les activités dans le monde
capitaliste et du capital de risque ainsi que sur leurs conséquences possibles.
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Pearson
Cherchant à étendre ses capacités numériques en matière d’éducation, Pearson a
acheté EmbanetCompass en 2012 et elle a aussi cette année :
• été choisie par la California State University pour lancer Cal State Online
en janvier 2013, et ce, avec une sélection de programmes d’achèvement
de grades supérieurs et de maîtrises professionnelles qui recourent à la
technologie, aux services et au soutien en ligne de Pearson;
• annoncé ses plans pour le lancement d’une université en ligne au Mexique;
• publié des manuels multimédias et des ouvrages de référence pour le
iPad, dont les contenus sont enrichis par la vidéo, l’audio, l’évaluation, des
images interactives et l’animation3D.
De plus, d’autres acquisitions récentes d’entreprises étrangères par Pearson
comprennent Tutorvista, un groupe d’éducation en ligne de l’Inde, et la division
de systèmes d’apprentissage de la société brésilienne Sistema Educacional
Brasileiro (SEB). Ces entreprises augmentent la capacité massive en matière de
contenus, d’évaluation, de services et de système que Pearson a déjà accumulée
à l’égard de l’apprentissage en ligne à tous les niveaux.
Du point de vue stratégique, Pearson est en cours d’évolution afin de faire
la transition depuis son rôle initial d’éditeur de livres et de journaux pour
devenir une entreprise mondiale de gestion du savoir axée sur l’apprentissage.
L’entreprise possède maintenant des écoles et des collèges, et elle travaille en
partenariat avec des établissements d’enseignement dans le but de concevoir,
d’élaborer et de déployer des programmes d’apprentissage en ligne et
d’apprentissage mixte.
Les cours en ligne largement ouverts (MOOC)
Les investissements faits en ce moment dans des entreprises à risque en
démarrage, qui sont basées sur les MOOC, constituent une autre preuve
de l’intérêt accru que manifestent les organisations commerciales envers
l’apprentissage postsecondaire en ligne. Dans les derniers mois, plus de
110 millions de dollars ont été injectés dans des entreprises en démarrage
comme Coursera, The Minerva Project et StraighterLine. En 2011, des sociétés
de capital-risque et des particuliers américains ont investi près de 430 millions de
dollars dans de telles compagnies.
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Le meilleur exemple est la création récente de Coursera par deux professeurs de
la Stanford University. Cette plateforme destinée aux universités internationales
d’élite (dont Princeton University, École polytechnique fédérale de Lausanne,
CalTech, University of Edinburgh et University of Toronto) offre des cours
gratuits dans des matières allant du génie logiciel jusqu’à l’éducation et aux
visions du monde des autochtones. Depuis son lancement, Coursera a inscrit
plus de 1,5 million d’étudiantes et étudiants et a presque doublé le nombre de
ses universités partenaires, qui est passé de 16 à 33. En outre, cette entreprise
prévoit d’offrir plus de 250 cours en ligne largement ouverts (MOOC).
Un des défis actuels pour Coursera est le manque de crédits scolaires : cette
entreprise offre plutôt des lettres d’attestation de l’achèvement, souvent signée
par le personnel de formation, aux personnes qui ont réussi les cours selon les
évaluations.
Quelles sont les possibilités?
Comment le secteur privé et les sociétés de capital-risque envisagent-ils l’avenir
actuellement? Ce groupe d’entrepreneurs entrevoit que l’éducation et les titres
de compétence continueront d’être des aspects essentiels pour décrocher des
emplois au sein de l’économie du savoir.
De nos jours, la majorité des démographes prédisent l’accroissement de la
demande d’éducation postsecondaire en tant qu’une condition préalable pour
l’emploi. Linda Duxbury de la Queen’s University suggère que, d’ici 2020,
environ 77 % de la main-d’œuvre auront besoin d’une qualification collégiale ou
universitaire : cela représente une hausse par rapport à la moyenne canadienne
actuelle qui se situe à 60 %. À mesure qu’il devient plus facile de concevoir et
d’élaborer les cours en ligne grâce aux outils plus nombreux, aux logiciels plus
conviviaux et aux ressources gratuites plus accessibles que peuvent utiliser
les concepteurs dans leurs matériels, l’attention des entreprises d’éducation
à but lucratif et des sociétés de capital-risque se concentrera davantage sur
l’évaluation et l’accréditation.
De nouveaux investissements sont dirigés vers les technologies d’évaluation
qui sont adaptatives (une évaluation liée aux matériels de cours, qui rajuste
ce que l’étudiante ou étudiant apprend selon leurs compétences évaluées)
et vers les méthodes d’évaluer l’apprentissage informel et autodirigé. De
nouveaux organismes émergeront d’ici deux ou trois ans afin de négocier et
d’agréger des crédits scolaires pour les étudiantes et étudiants, et d’organiser la
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reconnaissance et le transfert de ces crédits.
Beaucoup d’intervenants interprètent l’arrivée du secteur privé, à une échelle si
grande, comme un changement du « plan de match » du secteur de l’éducation
publique. Voici ci-dessous des scénarios possibles pour imaginer des pistes
d’avenir pour l’éducation.
Imaginons : un avenir où Pearson et Google travaillent en partenariat
pour occuper une position dominante dans la fourniture des ressources
d’apprentissage en ligne; entre autres, des logiciels puissants et efficaces
pour l’élaboration et la prestation des cours, et une vaste gamme de cours, de
manuels, de matériel vidéo et audio, de simulations et de jeux peu coûteux ou
à utilisation gratuite qui sont tous reliés à l’usage flexible de leurs bibliothèques
massives de contenus. Le modèle opérationnel serait édifié autour de l’offre de
crédits scolaires sous une multitude de formats.
Imaginons : une nouvelle fusion dont résulte la création de Google Phoenix,
qui réunit Google Scholar, les applications Google, le curriculum en ligne de la
University of Phoenix et une collection grandissante d’objets d’apprentissage
numériques pouvant tous être partagés par l’intermédiaire du réseau de
collaboration Google Plus. En plus d’offrir les crédits scolaires de la University of
Phoenix, Google Phoenix met aussi en place un système d’insignes numériques,
qui décerne le genre de titres de compétence que comprenaient auparavant les
grades collégiaux et universitaires.
Imaginons : Disney, Sony et Apple se fusionnent et incorporent la bibliothèque
de iTunes, les studios de Pixar, les parcs thématiques, la division des jeux de
Sony et les énormes archives cinématographiques de Columbia Pictures. La
Disney Foundation commence alors à acquérir plusieurs campus en difficulté
partout dans le monde, promettant de les revigorer grâce à la formule magique
de Disney et de monter un catalogue regroupant des cours qui seront à la fois
éducatifs et divertissants.
Ces scénarios peuvent vous sembler extrêmes. Mais qui aurait pu imaginer il
y a trois ans qu’un cours en ligne réunirait un auditoire de 160 000 étudiantes
et étudiants de partout sur la planète, comme Coursera arrive à le faire
actuellement?
L’évaluation en tant que nouveau centre de profit
Nous assistons peut-être présentement au développement d’un avenir offrant
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un grand nombre d’activités d’apprentissage gratuites ou peu coûteuses pour
les étudiants et étudiantes, qui permettent d’abaisser les coûts de l’éducation
postsecondaire. Les centres d’évaluation aux fins d’accréditation sont là où les
entreprises entrevoient des profits.
Quoique des apprenantes et apprenants se contenteront du type de
reconnaissances offertes actuellement par les MOOC, d’autres voudront obtenir
une accréditation, pour laquelle ils devront payer des frais. Les collèges et les
universités décerneraient alors des certificats, des diplômes et des grades non
seulement sur la base des études effectuées dans leur propre établissement
d’enseignement, mais aussi sur la base des crédits accumulés et évalués dans
d’autres établissements. Par conséquent, nous pouvons envisager l’élaboration
par Microsoft ou Oracle de différentes analytiques permettant de produire des
évaluations et des accréditations de manière harmonieuse et rapide.
Le changement propulsé de l’extérieur
Il surgira bientôt de gros réseaux de pairs regroupant le personnel enseignant,
les étudiantes et étudiants, et les spécialistes du savoir. Ces derniers partageront
librement des matériels d’apprentissage dans un mode de source ouverte et
ajouteront aux succès remportés par Wikipedia et la iTunes University, tout
en collaborant à de nouveaux programmes et cours. Au fil du temps, cette
démarche deviendra de plus en plus efficace à mesure que les outils pour
élaborer et mettre au point les cours deviennent plus faciles à utiliser.
Or, le rendement du capital investi proviendra des contenus spécialisés, des
évaluations et des accréditations, et de l’attribution de titres de compétence. Les
établissements d’enseignement respectés mondialement se débrouilleront bien,
mais ceux qui n’ont qu’une faible réputation mondiale ou sont de petits joueurs
anonymes dans un marché de plus en plus mondialisé éprouveront beaucoup de
difficultés. Autrement dit, ce sont des répercussions découlant du changement
du « plan de match ».
Cependant, il ne faut pas s’attendre à assister à la croissance et à l’expansion
des universités et collèges privés en Ontario. Ce ne sera pas nécessaire. Les
étudiantes et étudiants choisiront leurs cours et leurs programmes partout dans
le monde, en se fiant aux estimations de la qualité et des prix. La croissance
se manifestera plutôt dans des champs d’activité comme l’évaluation flexible et
les crédits scolaires transférables. Ce sont les vrais avantages et défis que nous
lèguent ces développements récents dans l’éducation.
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Ces nouveaux développements constituent donc un phénomène de « l’orignal
dans le salon », alors que se déroulent des discussions parmi les établissements
d’enseignement du secteur public et les agences gouvernementales. Pourtant, ce
sont exactement ces développements qui pousseront les étudiantes et étudiants
à chercher ailleurs pour trouver des choix et des options qui leur conviennent.
Le changement est à nos portes… mais il est propulsé de l’extérieur.
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