D`Haussmann aux Arts décoratifs

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D`Haussmann aux Arts décoratifs
- Rapport de fin de Licence -
D’Ha ussm ann a ux A rts déco ratifs
L’ é vo l ut io n d’ un c o nce pt de fa ç ad e.
B O TH I E R H u g ue s
Encadré par M. PROTH
Sommaire
Introduction
I.
p. 3
Explication des styles
Introduction préalable sur l’historique des façades.
1. Le style Haussmannien : un principe imposé
p. 5
2. Le style Art déco : un retour aux sources
p. 7
3. L’évolution des styles
II.
p.4
p. 11
Un aspect globalement ressemblant
1. La notion de gabarits
p. 15
2. Les avancées
p. 18
3. Le décor
p. 21
III. Vers un nouveau style
1. Le jeu des volumes et des lignes
p. 24
2. Du système structurel aux matériaux
p. 27
3. Les combles
p. 29
Conclusion
p. 32
Annexes
p. 34
Bibliographie
p. 34
Iconographie
p. 36
-2-
Introduction
Arrivant de province à Paris pour faire mes études, j’ai rapidement eu envie de découvrir
cette ville que l’on classe comme une des plus belles du monde. C’est donc en arpentant les
rues de cette cité, à l’image des situationnistes des années 70 comme Guy Debord, que j’ai
appris à la connaître et ce, grâce aux façades des bâtiments qui la composent. Je me suis plu à
flâner pour admirer ces constructions qui témoignent d’un passé, d’une vie antérieure. Ces
balades m’ont conduit à penser que la connaissance du passé associée au savoir faire actuel,
nous permet alors d’innover et de penser le futur.
Une fois mes études d’architecture entamées, je fus donc à mon tour amené à composer
ce que j’avais pu observer durant mes visites. C’est à ce moment là que je me suis rendu
compte de la difficulté à produire cette séparation habitat / ville. Basé sur mes virées, le
résultat désiré ne s’est cependant pas fait ressentir dans mes projets. Par ce travail, je voudrais
donc mieux comprendre comment s’organise, se compose ou se décompose une façade, afin
de pouvoir à mon tour réussir à concevoir cette séparation public / privé.
On peut comprendre assez aisément que l’évolution d’un bâtiment dépend de son
contexte historique. Elle peut donc se faire par une rupture d’un mode de vie (due à une
guerre...), par une évolution technique (industrialisation...)... ce qui implique des variations
techniques, esthétiques ou visuelles. La problématique que je me poserai pour ce rapport sera
donc la suivante :
Comment le concept des façades d’habitations évolue-t-il entre le XIXème et le XXème
siècle et qui est-ce qui le règle?
Ces deux siècles étant très riches sur le plan architectural, je propose de les étudier à
travers deux styles : le style Haussmannien (initié vers 1853) et le style Art déco (attribué aux
environs de 1930).
Pour répondre à cette question, il me faudra tout d’abord replacer chaque style dans
son époque et dans le mode de vie dont il est issu, puis comparer ces deux styles
apparemment contradictoires afin de discerner leurs points communs et leurs différences.
Cette mise en relation des deux types permettra donc de mieux comprendre les mécanismes
de leur évolution au sein d’une même société.
-3-
I.
Explication des styles
Introduction préalable sur l’historique des façades.
Les premiers abris construits par les hommes afin de se protéger, n’ont jamais cessé
d’évoluer au fil du temps. En effet, la hutte préhistorique avait pour unique fonction d’abriter
ses occupants alors que les Egyptiens ont commencés à construire les mastaba (premiers
temples) dès 2500 avant J.C. Par la suite, ces habitations ont évolué en fonction du savoir
faire et des outils mis à la disposition des différents peuples. Lorsqu’on arrive à la période
Romaine, on s’aperçoit que ces maisons, les domus, sont tournées vers elles-mêmes avec leur
fameux atrium. Ces édifices ne comportaient sur rue peu ou pas d’ouvertures puisque tout
s’articulait sur le patio central. Plus tard, dès l’époque des guerres Puniques (au IIIème siècle
avant J.C.), on débute la construction d’immeubles (= insulae) afin de loger les populations
moins aisées. C’est seulement à partir de ce moment là que l’on crée des ouvertures sur les
rues, permettant ainsi un meilleur éclairage des intérieurs; c’est ainsi qu’apparaît le mur que
l’on appellera façade au XVIIème siècle.
Face à ces grandes surfaces, un nouveau besoin s’est rapidement fait sentir. Il a alors
fallu travailler ces pans de mur afin de leur donner une esthétique : l’ordonnancement du
palais s’imposa donc aux habitations. Même si les premières traces que nous avons de façades
d’habitation sont issues du traité de Vitruve (Ier siècle avant J.C.), nous savons que,
rapidement, des hommes se sont appropriés ces surfaces visibles depuis l’espace public.
Ainsi, avec le traité du premier homme considéré comme un architecte : Alberti (traité écrit en
1450), on a la preuve de cette appropriation et surtout, de l’intérêt porté par les charpentiers,
les maçons... sur les façades. Ces conquêtes d’une surface privée visible par tous et même
dessinée pour tous, ont ainsi conduit à des règlementations qui existent aujourd’hui encore
dans les plans locaux d’urbanismes (PLU).
-4-
1. Le style Haussmannien : un principe imposé
A chaque roi son style ! Telle est la remarque que l’on pourrait faire en regardant le
passé. Cette vision quelque peu simpliste du pouvoir royal est cependant compréhensible.
Effectivement, en ces temps royaux, la majeure partie de la population française était illettrée
ce qui obligeait le pouvoir à trouver des moyens, autres que les écritures, pour transmettre ce
qu’il souhaitait. Parmi ces modes de communication, on retrouve le dessin, la sculpture mais
aussi la musique... Avec l’image, le roi arrivait donc facilement à se faire comprendre. Ce
système est alors rendu visible sur les bâtiments du pouvoir, par la richesse des
ornementations, leur qualité... Par cela, nous pouvons remarquer que la construction est
devenue un moyen (cependant déjà utilisé par les Grecques et les Romains) de montrer la
puissance du gouvernant. Puis, au fil de l’histoire, ces décors n’ont eu de cesse d’évoluer au
fur et à mesure des innovations techniques et stylistiques.
Porte d’entrée du château de Versailles1.
A partir du XVIIème siècle, sous Louis XIV, un nouveau style de vie apparaît dans les
mœurs des nobles. En effet, il devient à la mode de quitter ses châteaux de province (qui n’ont
plus de rôle défensif) afin de venir s’installer en ville ; il s’agit du développement des hôtels
particuliers dans les grandes villes françaises comme Paris, Nancy, Caen, Toulouse... Par cette
nouvelle mutation, on recherche un nouveau style adapté à la ville et à ces petits édifices !
Vue de l’hôtel Salé (actuel musée Picasso), Paris, côté cour2.
1
2
Voir iconographie page 36
Voir iconographie page 36
-5-
Ensuite, vient Louis XVI et la Révolution française. Cette période de l’histoire est
tellement prise par les événements politiques, que très peu de constructions remarquables sont
entamées. Il faudra attendre l’arrivée de Napoléon Bonaparte, en 1804, pour que l’on continue
à bâtir des édifices à caractère politiques. Ainsi, la première construction qu’on attribue au
premier consul est l’Arc de Triomphe place de l’Etoile -commandé en 1806 au lendemain de
la victoire d’Austerlitz-. Ces constructions, voulant toujours montrer une certaine puissance,
vont continuer de s’intensifier sous Louis-Philippe qui décidera alors de codifier les formes
urbaines en insistant sur la grande composition ; le roi souhaite ainsi regrouper en un seul
bâtiment plusieurs immeubles construits par des propriétaires différents. L’effort ici visé par
la monarchie est donc d’unifier les nouveaux quartiers pour leur donner un aspect global
cohérent, accentuant l’unité et la monumentalité par opposition à l’image ancienne du
désordre urbain (notion que l’on retrouvera majoritairement sous Haussmann).
En 1848, le roi abdique, en faveur de son neveu, poussé par les prémices d’une
nouvelle révolution. C’est alors que Napoléon III revient en France pour se présenter aux
élections ; notons qu’à ce moment là, il a déjà passé 17 ans en Angleterre. De ces nombreuses
années passées à l’étranger, l’empereur retiendra beaucoup d’améliorations possibles pour la
France, notamment à propos des cités-jardins anglaises. Afin de pouvoir appliquer un
renouvellement urbain de la capitale qui devient urgent, il décide alors de s’entourer d’un
homme de main capable de mener à bien ses travaux : Haussmann, qui sera chargé de
construire un nouvel espace parisien.
Georges Eugène Haussmann (1809-1891) est préfet de la Seine de 1853 à 1870 ; date
à partir de laquelle de sérieux doutes concernant les comptes lui sont reprochés et surtout date
à laquelle Napoléon III abdique suite à la défaite de Sedan contre les Allemands. Durant tout
son temps à la préfecture, il travaillera à rendre Paris plus salubre. Ses travaux concernaient
en priorité l’espace public et les articulations spatiales des quartiers de la ville. La percée des
nouvelles voies, le réseau des égouts ou encore l'adduction d'eau sont donc la mise en pratique
de son plan de relance pour Paris. Pour les différentes constructions de bâtiments, il créa la
première agence d’architecture qu’on appellera par la suite le service de l’architecture. Fondé
en 1860, c’est Victor Baltard qui en sera le premier directeur. Ainsi, sous la direction du
préfet et avec l’accord de l’empereur, Baltard sera le maître d’œuvre de l’ensemble des
travaux de cette époque. C’est donc à lui, mais sur l’initiative d’Haussmann, que l’on doit les
façades ainsi que les différents règlements d’ordonnancement que nous connaissons.
-6-
2. Le style Art déco : un retour aux sources
La période Haussmannienne ne s’est pas arrêtée avec la chute de l’empire de
Napoléon III et la démission d’Haussmann. On peut en effet remarquer que certains
architectes ont continué à produire ce type d’édifices jusque dans les années 1940-1950. Cette
prolongation du style est due à M Alphand, le second directeur des services de l’architecture,
qui a maintenu la politique après la chute de l’empire en 1870, et ce jusqu’à l’adoption, en
1882 et 1884, de nouvelles règles sur les saillies et les gabarits des immeubles. C’est avec ces
nouvelles règles qu’apparaît la première rupture avec l’esthétique haussmannienne.
Par la chute du pouvoir de Napoléon III, certains architectes ont tout de même
commencé à réfléchir sur la nécessité d’un nouveau style, ou d’un nouveau type de
construction. Parmi eux, on peut noter le projet novateur de Viollet-le-Duc qu’il propose en
1872. Il s’agit d’un immeuble à structure métallique avec un revêtement en faïence colorée.
Cependant, cette rupture avec l’immeuble classique en pierre de taille est trop importante pour
être suivie par la population.
Immeuble en pan de fer et parement de faïence, Viollet-le-Duc, 18713.
En 1893, apparaît un nouveau règlement qui marque une nouvelle césure. Il concerne
le principe de base de l’ordonnancement Haussmannien que certains qualifieront d’ailleurs
comme étant à l’origine même de sa dégradation. En effet, d’après les dire de cette époque,
cette hiérarchie omniprésente dans les constructions dévalorisait trop les autres tissus urbains,
empêchant ainsi l’uniformité de la ville. Dans cet arrêté de 1893, la modification du gabarit
devient possible ce qui entraîne donc une modification fondamentale de la silhouette et de
3
Voir iconographie page 36
-7-
l’alignement souhaités par le préfet. Il manquera alors aux derniers immeubles
Haussmannien, une partie de leur fondement qu’ils perdirent dans la prolifération du décor.
Cette multiplication de l’ornementation introduira une répétition due, en partie, à la
systématisation des balcons en fonte.
L’immeuble Haussmannien et ses balcons filants4.
Afin de mieux comprendre le basculement entre le style Haussmannien et ce qu’on
appellera plus tard l’art nouveau, il est important de préciser une autre modification qui voit le
jour dans la société de 1900. En effet, par la démission d’Haussmann de la direction des
travaux, apparaît un changement de statut des constructeurs. Ce qui ne concernait, jusque là,
que des particuliers qui venaient demander un nouvel immeuble (suite à la démolition de celui
dans lequel ils vivaient, afin de créer les percées), va devenir un véritable marché immobilier.
Les propriétaires privés se transformèrent alors en promoteurs, entraînant ainsi, pour des
questions économiques, une uniformité des constructions. Ce passage d’une architecture que
je qualifierai d’utile à une architecture commerciale (c'est-à-dire à celle de l’affiche, de la
réclame...) crée dans un premier temps des « ensembles sans fantaisie dont la seule qualité
tient à leur extrême minéralité - des sols pavés de pierre grise et des façades de pierre
jaune »5. Ce même état d’esprit de changement existe aussi sur les opérations où la rentabilité
économique prime, passant alors d’une architecture commerçante à une architecture
capitaliste. On abandonne ainsi l’échelle du type Haussmannien au profit d’une composition
plus monumentale et d’une typologie très compacte et très unitaire, jusqu’à ce que les
4
Voir iconographie page 36
5
LOYER François, « La crise de l’haussmannisme », in PARIS XIXème SIECLE. L’immeuble et la rue, page
353, Hazan, Paris, 1997
-8-
bâtiments aient: « l’efficacité, la rentabilité et peut-être aussi une sorte de morale austère qui
critique l’outrecuidance vulgaire des parvenus du début du règne »6.
Arrive ensuite le règlement de 1902 à partir duquel la rupture d’échelle avec les
immeubles traditionnels apparaît. Ainsi, même si les alignements sont toujours d’actualité, le
paysage urbain se voit transformé par la différenciation des volumes et la générosité des
saillies en façades. Cet arrêté a donc pour effet visuel d’exhausser le profil du bâtiment sur
rue, permettant ainsi une nouvelle composition des masses qui permettra le développement
voir la prolifération de décor sur la façade ; le style art nouveau est né.
Exemples de décors qui envahissent la façade7.
Depuis le néoclassicisme (fin XVIII-début XIX), l’ornement ne joue qu’un rôle
graphique. Avec l’art nouveau, ce graphisme discret devient de plus en plus présent jusqu’à
couvrir la façade d’une trame serrée d’horizontales et verticales associé à une multiplication
des baies. Toutefois les gens se lassent rapidement de cette décoration, inspirée des motifs
floraux, qui envahit l’immeuble. S’opère alors une réaction où l’ornement se réduit en
quantité pour redonner de la puissance et de la monumentalité au mur.
Vers 1905, l’état d’esprit qui règne en construction est donc basé sur l’explosion de
libertés dues au règlement de 1902 ; chaque artiste semble alors abandonner toute règle pour
matérialiser sa fantaisie. Cette nouvelle indépendance induit presque instantanément une non
appartenance à un style en particulier. Les artistes, les architectes... s’en rendent alors
comptent et décident, en 1910, de reprendre la succession des styles là où elle avait été
6
LOYER François, « La crise de l’haussmannisme », in PARIS XIXème SIECLE. L’immeuble et la rue, page
353, Hazan, Paris, 1997
7
Voir iconographie page 36
-9-
laissée. On remarque ici un retour à la tradition délaissée depuis Louis-Philippe ; c’est la fin
du style art nouveau qui sera alors caricaturé de style nouille !
Dans cette logique, une exposition universelle est prévue en 1913 afin de montrer ce
que chaque artiste a réussi à réinterpréter dans son domaine (sculpture, ébénisterie,
orfèvrerie...). Cette exposition n’aura pourtant pas lieu à cette date à cause de la première
guerre mondiale (1914-1918) mais en 1925, et prendra le nom d’Exposition International des
arts décoratifs et industriels de Paris. Cet évènement aura alors pour but de réinterpréter les
références, de faire des choix techniques en fonction de la vie humaine ainsi que de maîtriser
la composition. Toutes ces recherches s’articuleront autour d’une question fondamentale :
« tout ce qui est utile à l’homme doit-il être traité comme une œuvre d’art, dans la tradition
des grands ébénistes et des orfèvres, ou faut-il dégager la profondeur artistique de l’utilité
même ? » 8. On ne verra cependant, de façon précise, la frontière avec les autres mouvements
qu’en 1920.
Affiche de l’exposition internationale de 19259.
8
PLUM Gilles, « Le style en question », in Paris Art déco, Immeubles et maisons de l’entre de guerres (19181940), page 43, Parigramme, Paris, 2008
9
Voir iconographie page 36
- 10 -
3. L’évolution des styles
L’évolution des styles n’est pas due aux mêmes raisons pour le style Haussmannien ou
le style Art déco.
Pour Haussmann, le but de ces travaux résidait dans les percées. Son intention
première n’était pas de créer un paysage urbain avec la même façade, mais juste d’aérer un
Paris médiévale insalubre. Afin de mener à bien son idée, il dut mettre en place
l’expropriation « pour cause d’utilité publique ». Grâce à cela, le préfet réussit à tracer ces
grandes avenues que nous connaissons toujours. C’est donc avec cette intervention sur le
vieux tissu urbain que la nécessité de construire est arrivée, pour rétablir l’ordre dans le chaos,
par le biais de la hiérarchie. Ainsi, on a vu se construire des zones précises à l’intérieur
desquelles s’est opéré le renouvellement urbain. Dans le cahier des charges intégré à l’acte de
vente des parcelles bordant les nouvelles voies, il est précisé que les maisons de chaque îlot
doivent avoir « les mêmes hauteurs d’étage et les mêmes lignes principales de façade »10, afin
que celui-ci forme un « ensemble architectural »11. Ces contraintes posées, la marge de
manœuvre des architectes est assez limitée.
Percée Haussmannienne de la rue de Rennes, Paris VIIIème 12.
Ayant affaire à différentes couches sociales -les nobles, les bourgeois ou les ouvriers -,
Haussmann décida de créer trois types d’édifices pour border ses avenues. Ces constructions
10
MIGNOT Claude, « Paris, capitale du XIX° (1848-1881) », in Grammaire des immeubles parisiens, Six
siècles de façades du Moyen-âge à nos jours, page 121, Parigramme, Paris, 2004
11
MIGNOT Claude, « Paris, capitale du XIX° (1848-1881) », in Grammaire des immeubles parisiens, Six
siècles de façades du Moyen-âge à nos jours, page 121, Parigramme, Paris, 2004
12
Voir iconographie page 36
- 11 -
étaient alors réalisées en îlots, sachant que les différents types n’étaient pas mélangés. Pour se
faire, il n’inventa pas un style précis mais il recopia, en le modifiant, un axe construit sous
Napoléon Ier : la rue de Rivoli.
L’immeuble type Haussmannien13.
Dessin de la rue de Rivoli.
Tout y est ! Il supprimera seulement les arcades du rez-de-chaussée et permettra, au fur et à
mesure, des évolutions dans les combles ou dans les saillies. C’est donc à partir de cet
exemple que vont se décliner les trois types d’habitations avec une seule contrainte : la
richesse des occupants doit-être visible en façade. Cette gradation esthétique en parallèle de la
gradation sociale, introduit une certaine variété que César Daly commente de la façon
suivante : « les maisons forment une série croissante en importance, en commodité et en luxe,
depuis les maisons à loyer des ouvriers et des petits fabricants jusqu’aux riches maisons des
boulevards »14. Ainsi, chaque type d’immeuble évoluera de façon différente, selon les
occupants, les besoins, les attentes...
Immeubles de première, seconde et troisième classe15.
13
Voir iconographie page 36
14
MIGNOT Claude, « Paris, capitale du XIX° (1848-1881) », in Grammaire des immeubles parisiens, Six
siècles de façades du Moyen-âge à nos jours, page 121, Parigramme, Paris, 2004
15
Voir iconographie page 36
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Pour l’immeuble de première classe, le plus huppé, les variations possibles résident dans le
décor avec les médaillons qui ornent l’immeuble, ainsi que les cariatides qui soutiennent le
balcon axial - s’il existe-. Par la suite, on verra la prolifération d’un ordre colossale entre les
deuxième et troisième étages ainsi que l’encadrement des fenêtres par de belles figures
d’atlantes. A l’immeuble de deuxième classe, on demande de « se distinguer par aucun trait
trop exceptionnel. Par son aspect, [il] doit se conformer à peu près à tous les goûts, sans plier
à aucun en particulier. (…) [Il] doit convenir à la foule, non à la façon d’une mode éphémère,
mais à titre d’installation invariablement confortable et décente. Peu ou pas de fantaisies
donc, car la fantaisie est l’aversion de l’autre. Peu ou pas d’essai de Renaissance, de l’antique
ou de Moyen-âge, car ces tentatives ne sont, la plupart du temps, inspirées que par des
influences passagères. »16. L’équilibre des baies, la mise en place des balcons balancés (c’està-dire filants) et le répertoire abstrait des tables et consoles classiques, sont les principaux
éléments qui composent cette façade et qui lui permette d’évoluer avec le temps. Enfin,
l’immeuble de troisième classe, plus dépouillé encore, est composé de façades nues avec ou
sans balcons. Seul diffère des éléments ponctuels de décors comme la porte piétonne à simple
ou deux vantaux.
Les différentes évolutions de l’immeuble Haussmannien sont donc dans un premier
temps ponctuelles. Elles concernent en premier des zones de détails comme les ouvertures
leur donnant ainsi du caractère vis-à-vis de la rue. Il faudra cependant attendre de nouveaux
règlements afin de pouvoir changer les gabarits qui induiront à leur tour une série de
modifications sur les façades.
Pour le style Art déco, l’évolution est beaucoup plus formelle. Frappé des mêmes
règlements que ceux de la fin du style Haussmannien, il évoluera très peu. Il est vrai que par
sa volonté de revenir à l’ordre, d’avoir des lignes simples, des formes droites..., ce style
évoluera peu puisque dès que des changements se font sentir, le mouvement s’arrête. Ainsi, le
courant s’essouffle peu à peu vers la fin des années 1930, progressivement remplacé par
l’influence grandissante du Bauhaus de Gropius et plus généralement du Style International ;
ils accompliront alors le rêve des artistes de l’époque Art déco : la production en série.
16
MIGNOT Claude, « Paris, capitale du XIX° (1848-1881) », in Grammaire des immeubles parisiens, Six
siècles de façades du Moyen-âge à nos jours, page 126, Parigramme, Paris, 2004
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Immeuble type art déco17.
En ce qui concerne la forme des îlots et des quartiers, aucun changement n’intervient.
On peut voir dans le paysage urbain les mêmes alignements que sous Haussmann, impliquant
ainsi une unité formelle de la ville ; toujours d’actualité. A cette idée de forme urbaine, une
différence est tout de même présente sur la quantité des bâtiments. En effet, construits pour la
bourgeoisie qui s’est enrichie avec la première guerre mondiale, les immeubles de ce
mouvement furent construits sur commandes. On en trouve donc à différents endroits dans
Paris, et non sous forme d’îlots, comme des actes isolés qui symbolisent, aujourd’hui encore,
une réelle volonté de rupture avec le passé d’Haussmann.
Dès le début de cette nouvelle architecture, certains bâtiments de l’époque du préfet
furent détruits afin de laisser place à de nouveaux immeubles. On peut remarquer l’infiltration
de ces bâtiments dans les quartiers Haussmanniens qualifiés de sectorisés, quant on se balade
dans la capitale. La plupart des gens ne voit pas ces changements au sein d’une même rue ou
avenue, puisqu’il y a eu cette volonté de garder les gabarits. Ainsi, les bâtiments dits « Arts
déco » se voient alignés sur leurs aïeuls, du rez-de-chaussée jusqu’aux combles. Même si
l’appareillage change avec le temps, les modifications ne sont clairement visibles qu’en
toiture où le pan coupé laisse progressivement place à la toiture terrasse (inspiré par le
mouvement moderne ?!).
Cette évolution au sein de la rue est alors rendue subtile par le parement. Si l’on trouve
des bâtiments qualifiés d’art déco construits en pierre de taille, le béton est rapidement présent
et surtout de manière habillée (peintures, parements...). On observe ici un retour à l’échelle
piétonne où le calepinage des matériaux devient la préoccupation des architectes. Le souci du
détail du temps d’Haussmann et de l’art nouveau se transforme alors en une hiérarchie de
surfaces planes sous les arts déco.
17
Voir iconographie page 36
- 14 -
II)
Un aspect globalement ressemblant
1. La notion de gabarits
Comme je l’ai stipulé précédemment, la notion des gabarits sous les arts déco est
largement inspirée des différents règlements imposés par Haussmann et ses successeurs. Cette
hiérarchie sera dictée en fonction de l’importance des voies. Toujours sous l’inspiration du
modèle Napoléonien de la rue de Rivoli (due à Percier et Fontaine), Haussmann a donc créé
un principe de gabarits dès 1859 -rappelons qu’il arrive à la tête de la préfecture en 1853-. Ce
règlement permet une variation selon la largeur des rues avec l’apparition de la nouvelle
avenue de 20 mètres de large. Une meilleure circulation, à double sens, est donc possible par
rapport à la rue médiévale de 12 mètres maximum. Ainsi, on voit se profiler un volume
général pour ce grand chantier de reconstruction.
Cette silhouette est accentuée dès le début par l’apparition des combles : précisons que
par le règlement de 1784, le pignon sur rue est rendu obligatoire, c'est-à-dire qu’il faut rejeter
l’eau sur la rue et non sur le mitoyen. S’inscrivant dans les anciennes lois, Haussmann dessine
donc, dès le début, des combles selon la règle des 45° dans lequel « le plan horizontal limitant
l’oblique est porté à 5 mètres au dessus de la verticale »18. Afin de mieux comprendre ces
gabarits, voici un schéma qui donne la hauteur du bâti suivant la largeur de la rue 19 :
Ainsi, une rue de 20 mètres de large induit un bâtiment de 25 mètres de haut avec 5 mètres de
brisis. (Autres exemples : si L = 12 m, H =22 m 55 ou encore si L = 6 m, H = 16 m 70...)
18
19
Anonyme, Historique des règlements parisiens
Voir iconographie page 36
- 15 -
Cette volumétrie est scandée en plusieurs parties que l’on compte au nombre de trois
sous Haussmann comme à l’époque des Arts décoratifs. Il y a tout d’abord un sous bassement
qui comprend le rez-de-chaussée plus l’entresol, puis quatre niveaux et encore un cinquième
de combles (aménagés en chambres pour le personnel).
Immeuble Art déco20
Immeuble Haussmannien
Ce que Percier et Fontaine ont construit sous arcades, Haussmann le met sur rue. Il libère
ainsi un rez-de-chaussée et un entresol pour les commerces et leurs logements ; rendus plus
vivable que le modèle de base. Sous la période Art déco, ce soubassement sera récupéré pour
des magasins ou pour des appartements de bas standing.
D’autre part, aux abords de la rue de Rivoli, on remarque la présence de balcons aux
second et cinquième niveaux. Il s’agit en effet des étages nobles correspondant aux
appartements les plus chères de l’immeuble (d’où l’expression avoir pignon sur rue car on
affiche en façade son niveau de vie !). Le deuxième étage l’est par tradition tandis que le
cinquième gardera son statut par soucis d’esthétisme ; au niveau de la rue de Rivoli, les
balcons du cinquième étage permettaient une meilleure vue sur le jardin des Tuileries situé
juste en face. Cet étage d’attique restera sous les Arts décoratifs mais sera finalement surélevé
d’un niveau, avec la modification des combles que nous verrons plus tard.
La notion d’horizontalité que nous pouvons observer sur les bâtiments de type
Haussmannien, correspond au changement du mode de vie de l’époque. Il se trouve en effet
que vers la fin du XVIIIème siècle, s’opère le passage d’un habitat horizontal à l’habitat
vertical ; soumis au manque d’espace à l’intérieur des villes. Ce changement typologique
induit une nouvelle façon de vivre et c’est ainsi que les pièces à vivre, initialement orientées
20
Voir iconographie page 36
- 16 -
sur le jardin, se retrouvent sur la rue (les chambres et pièces secondaires donnant sur les cours
intérieures). Ce n’est donc pas le type de l’hôtel particulier qui est imité mais sa distribution.
C’est ainsi qu’apparaît, par cette organisation que l’on retrouve au moment de l’Art déco, une
nouvelle notion de dimensionnement des immeubles, afin d’obtenir au minimum trois pièces
en enfilade sur la rue. D’après les règlements, la largeur des immeubles ne doit pas être
inférieure à 15 m de large. Cette règle s’applique dans le cas d’un seul appartement par niveau
mais il faut imaginer la juxtaposition de deux voir trois appartements en façade, ce qui peut
donner lieu à des dimensions très importantes ! A cela, s’ajoute une nouvelle règle concernant
les ouvertures qui sont maintenant placées suivant des espacements précis -afin d’avoir une
harmonie depuis la rue- et non en fonction des pièces qu’elles desservent. Ce style de vie ne
changeant pas sous les Arts déco, on n’observe pas de changements en façade.
Plan d’un appartement où les pièces de réception (en bas) sont en enfilade sur la rue21.
Initiée sous Louis-Philippe, une autre composition est très présente sous Haussmann :
il s’agit du traitement de l’angle, omniprésent à cause du nombre important de voies tracées
pas le baron. Cette forme, que certains qualifient en fer à repasser, est due à l’importante
hausse du trafic de cette époque. La voiture se développant dès 1880, il a fallu dégager la
visibilité au niveau des carrefours. Sur cet angle, on peut donc voir deux ouvertures
maximum ; juste ce qu’il faut pour pouvoir l’habiter. Pan coupé dans sa forme initiale, cette
partie de l’îlot deviendra par la suite arrondie : c’est l’apparition de la rotonde, sous
l’influence du Pavillon de Hanovre (déplacé en 1931 dans le parc de Sceaux).
Pavillon de Hanovre ; dans son contexte initial...
21
Voir iconographie page 36
22
Voir iconographie page 36
- 17 -
... puis actuel22.
La notion de gabarits est quelque chose qui me paraît important pour un bâtiment. Un des
premiers éléments que l’on remarque lorsqu’on regarde un édifice, c’est son intégration dans
le lieu. Celle-ci ne peut-être réussie que si le bâtiment ne s’impose pas ou, a contrario, s’il
s’efface trop par rapport à son entourage ! L’équilibre des masses à l’échelle de la ville, du
quartier mais aussi du bâtiment, est donc un des fondamentaux de l’intégration. De plus, un
édifice doit être cohérent avec lui-même. Il sera donc esthétiquement beau si ses proportions
sont pensées non pas par parties mais plutôt par un tout formé de parties. C’est le tracé
régulateur qui anime, par exemple, le chevet de Notre Dame de Paris.
2. Les avancées
Image forte de l’immeuble type Haussmannien, les balcons sont le principal lieu de
fantaisie dans cette architecture si réglementée. Cette liberté est visible d’une part au niveau
des consoles mais aussi dans ces longs gardes corps qui filent sur l’ensemble de la façade.
C’est en effet à ce niveau de l’édifice, que les styles Haussmannien et Art déco se permettent
une différenciation suivant l’idée du constructeur ; encore une fois, le service de l’architecture
impose un gabarit mais laisse libre cour à l’imagination des architectes pour les quelques
détails autorisés. Le dessin de ces protections est alors assez différent à l’intérieur de chaque
style. Pour le type Haussmannien, les premiers garde-corps étaient tout simple c'est-à-dire
verticaux et sans ajouts. Avec la démocratisation du balcon à tous les niveaux -car il est le
symbole de la réception-, la nécessité de trouver un nouveau motif se fait rapidement sentir.
Ainsi, ces pièces métalliques ont évoluées en laissant apparaître tout d’abord des figures
géométriques puis des motifs floraux.
Du balcon géométrique aux motifs floraux23.
23
Voir iconographie page 36
- 18 -
Cette démultiplication des balcons induira une nouvelle sorte de hiérarchie où les balcons
continus se transformeront en balcons partiels ou balconnets24 :
Avec les Arts décoratifs, le même système hiérarchique des gardes corps est utilisé.
Mais, contrairement à l’évolution observée sous Haussmann, cette hiérarchie s’opère dans le
sens inverse. Le décor passe donc de quelque chose de travaillé pour aboutir à une
géométrisation très présente.
Par ailleurs, les règlements de 1884 et de 1902, permettant notamment une plus grande
liberté dans les saillies, sont ceux qui ouvriront la façade à une plus grande autonomie. Mais
ces avancés seront aussi très règlementées en fonction des largeurs des voies, afin de ne pas
casser l’harmonie de l’immeuble (exemple : si une voie fait 20 mètres de large, la saillie peut
faire, au maximum, 1 mètre). Par cette ouverture de la loi, les architectes vont donc se lancer
dans une nouveauté qui sera une des principales caractéristiques de l’art déco : le jardin
d’hiver (que l’on retrouvera de manière quasi-systématique avec les arts décoratifs, sous le
nom de bow-window).
Ce jardin d’hiver est donc apparu à partir de 1884 soit dès la construction de l’édifice, soit en
se rajoutant sur les balcons existants. Construits afin de permettre une extension de la pièce à
vivre ainsi qu’un ensoleillement supplémentaire sur trois orientations, ces oriels sont souvent
rajoutés sur les bâtiments déjà existants. Ainsi, sur certains immeubles, l’ancienne balustrade
de pierre est toujours visible. Dans leur forme de départ, ces avancées sont rectangulaires.
Cependant, avec l’apparition de la rotonde et l’arrivée de l’Art déco, ce rectangle se
transforme de façon à obtenir des pans coupés en cercle ou ½ cercle25 :
24
Voir iconographie page 36
25
Voir iconographie page 36
- 19 -
Initialement construits et remplis en pierre de taille, les bow-windows seront rapidement
édifiés en métal -avec le développement de l’industrialisation- et parfois remplis en céramique
(surtout sous les arts décoratifs).
Exemple d’un jardin d’hiver Haussmannien où l’ancienne balustrade en pierre est toujours visible26.
Le bow-window art déco27.
L’échelle de lecture d’un bâtiment est donc observable à différents niveaux. Ce qu’on
voit tout d’abord en gabarit se décompose ensuite en ensemble pour arriver au décor.
L’harmonisation des compositions est donc fonction des éléments qui composent l’édifice.
Ainsi, ce qui semble être une ligne depuis le bout de la rue se transforme après en balcon
plein, puis, une fois que l’on se rapproche, ce balcon devient géométrique jusqu’au moment
où le détail nous paraît être tout.
26
Voir iconographie page 36
27
Voir iconographie page 36
- 20 -
3. Le décor
Si les deux styles que nous étudions dans ce rapport rejettent l’ornementation de
masse, on peut cependant y trouver un certain nombre de décors. Ces éléments se situent alors
à des endroits précis sur le bâtiment, afin de ne pas en entraver la lecture globale. Ces
décorations sont au nombre de deux dans le style Haussmannien comme dans le style Art
déco, et se situent soit au niveau des consoles des balcons, soit à l’entrée de l’immeuble.
Symbole fort de la période Haussmannienne, les nombreux balcons qui habillent la
façade obligent les constructeurs à trouver un moyen afin de les mettre en valeur. On peut
donc voir, pour les soutenir, des consoles ou des caryatides (pour le maintient du balcon
axial). [Notons que sous les Arts déco, ces parures disparaissent au profit des formes
géométriques, puisque le savoir faire des sculpteurs, qui sont morts pendant la première
guerre mondiale, est en grande partie perdu]. Puis, en 1852, Labrouste invente un nouveau
type de décoration pour la bibliothèque Ste Geneviève à Paris. Ses entrelacs floraux stylisés,
pour partie incisés dans la pierre, pour partie sculptés en bas relief, vont alors se répandre sur
une grande partie des immeubles, laissant place à un répertoire abstrait dans une architecture
plutôt classique. Ces décors floraux simples et élégants, seront les principes mêmes de
l’ornementation envahissante de l’Art nouveau.
Illustration du changement du décor : de la ligne aux courbures28.
A la deuxième moitié du style Haussmannien, on observe un retour vers les styles
classiques d’ordonnancement. Dans ce schéma, la décoration toute entière tâche de se mettre
en proportion avec la masse. Les décors floraux se réduisent alors en quelques médaillons
pour l’immeuble de première classe, laissant place au style Gabrielien, maniériste ou même
Louis XIV. Ce retour en arrière n’est pas opéré, d’après les historiens de l’architecture, d’une
28
Voir iconographie page 36
- 21 -
manière nostalgique. La schématisation des décors floraux introduirait une harmonie mieux
adaptée aux exigences d’une grande production. Le détail sculpté se banalise alors tandis que
le moulé ressuscite. Ces décors, ayant comme principe de base la modernité, s’actualiseront
en permanence ; il est donc normal de voir une multitude de dessins pour ces éléments.
Pour les Arts déco, l’idée de base est, encore une fois, la réinterprétation des
référence ; pour contrer le style nouille. Par ce principe, on peut observer sur la façade de ces
édifices aussi bien des portraits romains en rond de bosse, que des colonnes ou des pilastres
engagés. Mais ces références sont systématiquement réinterprétées afin de réduire, autant que
possible, les formes à quelques volumes simples. Dans la dernière partie de ce mouvement
Art Déco, et probablement sous l’influence du mouvement moderne de la même époque, une
autre écriture voit le jour. Il s’agit du style paquebot où le détail est visible dans la ferronnerie
d’art ainsi que dans les aplats et les bas reliefs. L’opposition entre ces balcons, avec leurs
ornements de fonte, et le travail sculptural du mur qui lui sert de fond, va peu à peu reprendre
la place des jeux d’échelles qui avait intéressé la génération Haussmannienne. Malgré ce
retour aux sources, l’embellissement des façades garde néanmoins le même principe :
maîtriser et contrôler la composition.
D’autre part, un autre lieu des édifices est soumis aux décorations. Il s’agit des entrées
des immeubles qui sont ornées afin de les mettre en valeur par rapport au reste de la façade.
Sous le style Haussmannien, ces portes englobent deux niveaux : le rez-de-chaussée et
l’entresol afin de pouvoir permettre l’entrée des calèches et de leurs cochers dans les cours
intérieures des îlots. A partir du moment où la voiture s’est développée, cette hauteur libre de
presque cinq mètres devient inutile. Les modifications laissent alors place à une porte dite
bâtarde, puisque d’apparence elle contient toujours les deux niveaux alors qu’elle ne s’ouvre
en réalité que sur la partie inférieure (la partie de l’entresol ayant généralement était
réaménagée pour des logements !). La forme de cette ouverture est souvent arrondie en tête,
avec un arc de cercle plus ou moins tendu suivant les architectes ; on retrouve exactement la
même chose sous les Arts déco sauf que les entrées n’enjambent jamais deux niveaux car
l’entresol a disparu au profit d’un nouvel étage courant.
- 22 -
Exemples de portes d’entrées Haussmanniennes...
... et Art déco29.
Les moyens utilisés pour mettre en valeur ces grandes ouvertures qui s’imposent
finalement sur la façade par leurs dimensions, sont alors les mêmes que ceux que nous venons
de voir pour les balcons. Il s’agit d’ailleurs souvent de caryatides ou de consoles (soutenant le
balcon situé juste au dessus) qui sont exagérées pour cette mise en valeur.
Pour la porte, pas d’innovations techniques. Haussmann reprend la grande porte de
menuiseries néo-Louis XIII, néo-Louis XIV ou néo-Louis XV à deux ouvrants. Ce même
dessin sera par la suite repris sous la période Art déco : en bois ou en fer forgé ; dans tous les
cas, ces ouvertures sont toujours très composées et ouvragées.
Le détail en architecture est quelque chose d’obligatoire. Que ce soit du décor ou
fonctionnel, sa présence est une des définitions même d’un édifice. Initialement dessiné,
affiché... en façade, il est toujours visible sur nos bâtiments. Le calpinage des matériaux, par
exemple, est un détail qui prend tout son sens dans la masse ! On pourrait d’ailleurs
rapprocher cette notion du détail à ce que dit l'architecte américain Louis Sullivan sur la
forme : « form follows function » ; la forme découle de la fonction. Ainsi, en gardant cette
même idée, on pourrait dire que le bâtiment découle du détail, ou encore : la somme des
détails donne le bâtiment.
29
Voir iconographie page 36
- 23 -
III. Vers un nouveau style
1. Le jeu des volumes et des lignes
Cantonné dans un gabarit très strict, l’immeuble Haussmannien présente cependant
des jeux de volumes en façade ; ils sont visibles par les proportions et l’ordonnancement de
l’édifice. Ces contraintes visuelles sont mises en places par le baron, afin d’assurer une
meilleur harmonie de ces nombreux édifices.
Lorsqu’on regarde ces constructions, on se rend immédiatement compte de l’existence
de différentes surfaces. Il y a effectivement le rez-de-chaussée qui est traité d’une manière
propre puis un étage noble richement ornementé, deux niveaux plus simples, un étage
d’attique mis en relief par ses balcons et enfin, la couverture qui contraste par sa couleur avec
le reste de l’édifice. Si les deux étages (le deuxième et le cinquième) se différencient
essentiellement du reste du bâtiment par leurs ornementations particulières, on peut aussi voir,
entre ceux-ci, quelques variations de décors ou même de hiérarchie des balcons (qui sont
filants, partiels...). Entre ces deux niveaux « privilégiés », on peut également observer deux
autres étages que certaines personnes qualifient de carrés. Ils leurs donnent cette appellation à
cause du peu de décors que l’on peut voir en façade ; en tout cas au début de la période
Haussmannienne.
Le jeu des volumes ne se fait donc pas avec la forme du bâtiment mais avec ce qui
compose sa façade. Les ouvertures jouent alors, elles aussi, un rôle essentiel dans cette
composition. Imposées du point de vue de leur nombre, elles sont également superposées,
créant ainsi de grandes lignes verticales. Cette superposition n’est cependant pas banale
puisque leurs dimensions varient suivant l’étage, au même titre que leurs décors. Au fil de
l’évolution Haussmannienne, ces rythmes peuvent être plus ou moins serrés (deux ou trois
travées alternées), laissant plus ou moins de place aux tables et consoles.
Avec le temps, on voit apparaître sur ces façades un quadrillage qui est dicté par de
grandes horizontales et verticales. En effet, quand on regarde une façade de cette époque, un
réseau graphique de bandes horizontales continues ou discontinues (toujours dues aux balcons
filants, partiels...), se détache très fortement. Mais si on s’efforce quelques instants de
regarder la verticalité des pleins et des vides due aux ouvertures, on distingue également de
puissantes lignes perpendiculaires au sol. Ces grandes horizontales couplées aux verticales,
assurent donc un équilibre complet à cette façade. Dans son développement, ce quadrillage
- 24 -
sera renforcé par l’apparition du bow-window ainsi que par la systématisation des balcons à
tous les niveaux.
L’horizontalité des balcons est opposée à la superposition des ouvertures30.
Pour les arts décoratifs, le jeu des volumes n’est pas tout à fait semblable. Si les
balcons et les bow-windows sont toujours présents, la volonté de géométriser la façade se fait
ressentir. Cette volonté peut alors arriver jusqu’à une « symétrie accusée ou asymétrie
équilibrée »31 de celle-ci, sur certains bâtiments. Dans tous les cas, ce qui prédomine sous
cette période est le volume simple. Préoccupation majeure de ce courant qui veut rompre avec
l’art nouveau et sa profusion de courbes, les bâtiments Arts déco prônent effectivement un
retour aux lignes géométriques simples, droites, épurées...Cela peut notamment se sentir dans
les surfaces planes des murs où le décor disparaît totalement au profit de la matière32 :
Cette matière, que nous avons vue précédemment, est aussi un moyen de géométriser
cette façade. En jouant sur le calpinage des matériaux, l’épaisseur des joints..., les
constructeurs affirment donc ces lignes directrices de la façade. Mais façade plane ne veut pas
30
Voir iconographie page 36
31
PLUM Gilles « Symétrie accusée ou asymétrie équilibrée », in Paris Art déco, Immeubles et maisons de
l’entre de guerres (1918-1940), page 30, Parigramme, Paris, 2008
32
Voir iconographie page 36
- 25 -
dire lisse ! Au contraire, l’ornement disparaissant du mur, les architectes utilisent la matière
pour avoir des jeux d’ombres..., justement par le biais de leur assemblage.
En ce qui concerne les ouvertures, elles aident à renforcer la géométrisation de la
façade. Issues des principes modernistes, celles-ci sont effectivement composées en bande ou,
ponctuellement, en hublots. Couplées à des menuiseries fines rendues possibles avec le
développement de l’inox, ces percées paraissent encore plus théâtrales. L’image de la façade
n’est plus quadrillée mais linéaire par le biais de la matière, des ouvertures...
Enfin, une autre composition influe le jeu des volumes des bâtiments Arts déco : c’est
l’apparition, dans les étages, de terrasses et pergolas. Elles apportent alors un changement
dans ces grandes surfaces uniquement rythmées par les ouvertures, comme nous pouvons le
voir sur cet immeuble de Roux-Spitz au 115 avenue Henri Martin, Paris XVIème 33.
Les terrasses apportent donc des retraits sur la façade, par opposition aux saillies des bow-windows.
Le jeu des volumes et des lignes est facilement visible depuis la rue ; sa composition est donc
le point clé de la façade. Dans les deux exemples que j’ai choisi, on remarque que cette
organisation est soit imposée par des règlements, soit dictée par les principes forts de la
modernité de l’époque. La façade du bâtiment peut donc être remise à jour en changeant ces
lignes directrices suivant les idées et les goûts de l’époque actuelle. C’est ce que proposent
certains architectes, avec par exemple la réhabilitation des ZUP, où la couleur et la
multiplication d’utilisation de matériaux est un moyen de rompre avec l’ancienne image !
33
Voir iconographie page 36
- 26 -
2. Systèmes structurels et matériaux
Sur l’immeuble Haussmannien, la question de la structure n’est pas trop compliquée.
Inscrits dans un style et une époque où l’on utilise quasiment que la pierre, ces édifices
perpétuent donc sans surprise la tradition de la maçonnerie lourde. Ces bâtiments ont donc
une image massive que certains jugent trop monumentale par rapport à l’immeuble en plâtre
de l’époque Louis-Philippe. Notons cependant que, soucieux du problème économique de ces
grands travaux, Haussmann a hiérarchisé les façades ; construisant ainsi celles sur cour -à
l’intérieur de l’îlot- en brique enduite de plâtre.
Sur la rue, l’image que nous avons de l’immeuble est divisée en plusieurs parties.
Souhaitant libérer le rez-de-chaussée et l’entresol pour les commerces, le préfet a fait dessiner
une sorte de sous bassement pour l’édifice. Construits généralement avec des blocs de pierre
plus durs que ceux utilisés aux niveaux supérieurs, l’appareillage de ces deux niveaux est dit
rustique (les joints des pierres sont creux afin d’être visibles). Au dessus, les étages sont aussi
en pierre de taille ainsi que toutes les moulures, consoles, entablements... que l’on y trouve.
Les blocs sont donc dégrossis au sol, montés à leur place définitive puis taillés suivant
l’usage. D’un point de vue constructif, cette méthode est très pratique. Ainsi, d’après certains
textes que nous avons de cette époque, on peut lire que la percée étant faite, on montait
immédiatement les façades sur rue et les propriétaires construisaient ensuite leurs immeubles
derrières ; ce schéma a été opéré plusieurs fois mais il n’était pas systématique. Poussé à son
paroxysme, cette façade dissociée du bâtiment est visible sur certains édifices où le modèle lui
a été imposé pour l’unité de l’avenue.
Façade construite avant l’immeuble34
34
Façade construite devant un immeuble existant
Voir iconographie page 36
- 27 -
Pour le style Art déco, le passé historique de la construction française est respecté. En
effet, à l’époque où les Anglais intègrent le métal dans leurs nouveaux édifices, les architectes
préfèrent se cantonner à l’habitude française : la maçonnerie. C’est donc le béton qui sera le
principal système constructif des bâtiments de cette époque. L’ossature du bâtiment,
traditionnellement en pierre calcaire, est alors progressivement remplacée par le béton. Celleci devient donc un simple matériau de revêtement parmi d’autre ; Roux-Spitz emploiera ce
matériau, sous forme de pierre agrafée, dans son immeuble, que nous avons déjà vu, du 115
avenue Henri Martin, Paris XVIème 35:
L’espace entre les systèmes porteurs initialement pris par la maçonnerie devient alors libre en
façade, permettant donc un simple matériau de remplissage. C’est ainsi qu’apparaît la brique.
Si les architectes de cette époque renièrent et bannirent la décoration envahissante de
l’art nouveau, le principe de l’ornementation est toujours présent. Ainsi, par le biais de la
brique, une nouvelle image de la façade va voir le jour. En effet, les constructeurs de l’époque
vont utiliser ce matériau en jouant tant sur le calpinage que sur sa couleur. Des murs entiers
de brique sont donc montés avec un appareillage changeant à chaque niveau, ainsi que des
motifs dessinés par le biais de la couleur de ce matériau. Ces surfaces, lisses et nues,
introduisent donc une nouvelle gamme de couleurs dans le paysage parisien : brique de
Vaugirard au rouge soutenu, grès cérame en jaune ou brun... Mais rapidement, de nouveaux
revêtements simples vont remplacer la brique jugée trop colorée. La céramique, le sgraffite,
les gravillons lavés, la mosaïque décorative et les enduits vont donc prendre sa place pour
habiller la façade.
Brique rouge
35
Voir iconographie page 36
36
Voir iconographie page 36
Motifs réalisés avec différentes briques
- 28 -
Céramique36
Le système constructif d’un bâtiment me paraît être le fruit même de la modernité (au sens
actuel du mot). Son choix est toujours issu d’une réflexion sur la rentabilité et l’économie des
matériaux ou sur l’aspect global ; chaque matière ayant des propriétés particulières, il se peut
qu’une construction osée ne peut-être réalisable qu’avec un type de matériau. Il arrive aussi
que ce choix soit plastique ; c’est ce qu’ont développés les constructeurs sous la période Art
déco avec l’arrivée du parement. La façade devient alors une simple barrière physique ou
garde-t-elle sa limite psychologique entre un lieu de vie en groupe et son habitat individuel où
chaque côté de la façade est différent ?
3. Les combles
Toujours par leur inspiration de la rue de Rivoli, les édifices du type Haussmannien
ont les toits brisés. C’est à l’ingénieur Mansart que l’on doit ces fameux toits à quatre pans
qui prendront son nom. Le principe est de libérer l’espace sous la toiture afin de le rendre
aménageable. Pour cela, l’ingénieur-architecte de Louis XIV imagine un premier pan
quasiment vertical, surmonté d’un deuxième très aplati. La première partie verticale est
appelée brisis, par opposition au terrasson qui se trouve au dessus. Posant de nouveaux
problèmes dus à la pente des couvertures, il a fallu trouver un type de recouvrement pour cette
toiture. Ainsi, pour le brisis, on peut voir des ardoises alors que les terrassons sont recouverts
de zinc 37 :
Autre nouveauté de l’époque, qui est depuis ce jour obligatoire sur toutes
constructions, c’est l’invention des chenaux et des gouttières qui sont réalisés en zinc. En
effet, depuis le règlement interdisant la faîtière d’un toit à deux pans d’être perpendiculaire à
37
Voir iconographie page 36
- 29 -
la rue et de rejeter ainsi ses eaux sur les murs mitoyens, l’évacuation des eaux pluviales se fait
sur la rue. Soucieux de rendre Paris propre, Haussmann a donc fait établir ce système en
renvoyant ainsi toutes les eaux dans les réseaux d’égouts nouvellement créés.
Par la suite, en 1884, un nouveau règlement apparaît après la démission du préfet.
Celui-ci permet le dédoublement des combles : au dessus du brisis à pente verticale, on en
installe un deuxième à 45° qui fait ensuite le lien avec le terrasson du toit. Issu d’une nouvelle
vague de densification de Paris, ce système permet donc de récupérer un nouvel étage pour
des appartements bourgeois, renvoyant ainsi les chambres de bonnes un niveau au dessus. Les
ouvertures pour le premier niveau sous combles seront alors remplacées en grandes portesfenêtres donnant généralement sur un nouveau balcon (pour profiter de la vue), alors que
l’étage d’attique gardera ses tabatières (petites ouvertures) pour ses logements de seconde
classe 38:
L’évolution des combles a donc considérablement modifié l’image de l’immeuble
Haussmannien. Ainsi, on peut voir sur certains édifices jusqu’à neuf niveaux habitables contre
les six de départ !
Sous les Arts décoratifs, deux tendances se font sentir. Il y a d’un côté les architectes
qui recopient les toits à la Mansart rendus courants sous Haussmann, et de l’autre les radicaux
qui, certainement influencés par le mouvement moderne, réalisent des toits terrasse. Ces
derniers optent en effet pour un changement total, afin de retrouver une géométrie qui leur est
chère.
38
Voir iconographie page 36
- 30 -
Cette innovation, impossible sous Haussmann, l’est maintenant grâce à l’évolution des
techniques. Ainsi, tous les problèmes d’étanchéité... sont résolus par un savoir faire
permettant ainsi de composer les formes. Les architectes de ce courant exploitent ainsi au
maximum les innovations du second empire pour satisfaire leurs besoins, puisqu’ils utiliseront
massivement les adductions d’eau ; principal problème de ce type de couverture. Ces toits
terrasses sont issus d’un nouveau mode de vie qui correspond au déplacement des chambres
de service au rez-de-chaussée, permettant ainsi de libérer le dernier étage pour profiter de la
vue sur Paris. Les derniers appartements ainsi modifiés ont donc besoin d’avoir un volume
sous plafond normal, c’est-à-dire sans les contraintes des bois de charpentes, du brisis... Dans
les derniers instants de ce mouvement Art déco, la toiture prendra une autre dimension en se
transformant en terrasse pour le dernier niveau.
Même si l’évolution d’un style ne peut se faire sans regarder son contexte social et
architectural, sans regarder ce qui s’est déjà fait..., son observation est souvent révélatrice
d’un mode de vie particulier. Si on reste dans cet exemple du transfert des appartements entre
les combles et le rez-de-chaussée, on s’aperçoit qu’aujourd’hui encore, ce qui se trouve au
dernier niveau d’un édifice est presque systématique convoité pour la vue, l’ensoleillement...
Cet intérêt se fait souvent, à mon sens, au détriment d’un rez-de-chaussée sur lequel on ne
veut plus construire de logements pour des raisons de tranquillité.
Je pense que l’architecte a un rôle social à jouer. Son but n’est pas de renvoyer un
problème autre part mais d’essayer, à chaque projet, d’innover pour répondre à tous les
besoins, toutes les contraintes. Ainsi, je crois important de donner une qualité égale à chaque
partie d’un édifice : par exemple, le dernier étage a peut-être la vue mais le logement du rezde-chaussée a un jardin... La lutte des classes n’étant plus d’actualité dans notre société, il est
de notre devoir, nous architectes, de ne pas penser un type de logement au profit ou au
détriment d’un autre.
- 31 -
Conclusion
Comme nous avons pu le voir tout au long de ce rapport, le gabarit d’un édifice est
fondamental dans la composition urbaine. C’est de cette notion que dépend son intégration,
par le biais de l’équilibre des masses, vis-à-vis de son entourage... Dans cette même idée des
gabarits apparaît, à une échelle plus petite, ce qu’on pourrait appeler le jeu des volumes et des
lignes. Changeant le langage de la façade via de nouveaux éléments visible à moindre échelle
que le gabarit, ce jeu est primordial aussi bien dans l’intégration du volume que dans sa
définition même par rapport aux autres édifices qui l’entourent. On arrive ainsi à une
troisième échelle qui est de l’ordre du décor, du détail. Par détail, ne comprenons pas la petite
chose inutile que l’on rajoute par folie, mais bien au contraire une infime partie de la
construction qui influence cependant le tout. Ainsi, par détail, on pourrait aussi bien parler du
système constructif permettant de nouveaux effets (comme nous l’avons vu sous la période
Art déco) comme du type d’ouverture utilisé. Je suis convaincu que c’est par ce principe
constructif que la modernité d’un bâtiment est visible. Par un savoir technique combiné à un
autre qui serait plus artistique, l’architecte est en partie responsable de l’évolution de la
société. Je pense effectivement qu’en tant que futur constructeur, j’aurai un rôle social à jouer
dans cette société. Par ce travail, je me suis notamment rendu compte de l’influence de chaque
mode de vie sur les styles ; à moi donc, de mieux comprendre celle dans laquelle nous
vivons ! Construire, c’est faire vivre mais pas en contraignant les gens ; il faut au contraire
répondre à leurs attentes...
Avec l’étude des styles Haussmannien et Art déco, je me suis aperçu qu’au-delà de la
contrainte, c’est l’art qui s’exprime. Il y a ici un certain paradoxe car les attentes de la
population, pour qui sont construits ces édifices, sont toujours les mêmes, alors qu’on observe
une grande différence sur le style. Ainsi, un mur à qui on demande de séparer la ville et le
logement peut-être traité de manières différentes selon chaque époque, alors que sa fonction
est identique !
L’idée de l’évolution des styles n’est, bien évidement, pas nouvelle. Mais au XXème
siècle, un philosophe français : Deleuze, a initié le phénomène de déconstruction en
architecture. Suivi par des architectes comme Lérida, ils ont critiqué le passé puis essayé de
nouvelles théories de déstructuration de l’espace (comment déstructurer un espace non
- 32 -
matérialisable ?). Arrivé à la fin de leur raisonnement, ce courant, le destructivisme, s’est
rendu compte que ce n’était pas possible et que, à chaque génération, une nécessité de faire du
jamais vu se faisait sentir. Ils décrivent alors ce besoin d’invention qu’ils ont observé, comme
issu d’une démarche de questionnement et non de rupture. Les avancées se font donc par
compréhension et non par abandon du passé!
A l’heure actuelle, la façade n’a plus le même sens. Si sa fonction demeure inchangée,
sa définition n’est plus la même. En effet, dans les constructions actuelles, et avec l’arrivée
des toits végétalisés, on a vu naître ce qu’on appelle la cinquième façade. Par la généralisation
de ce terme de façade à la toiture, un nouveau mot arrive en architecture : l’enveloppe. Celleci apparaît ainsi comme une peau venant se greffer sur un membre : le bâtiment. Si de nos
jours le développement durable est un point majeur de la construction, on pourrait se
demander comment la façade et cette enveloppe vont pouvoir évoluer ? Est-ce que l’unique
recherche de matériaux durables est suffisante pour répondre aux besoins ou va-t-il falloir
trouver un nouveau concept de construction ?
- 33 -
Annexes
Bibliographie
- Livres
Anonyme, Historique des règlements parisiens, document de travail remis par M.
RIVOIRARD, slnd
BERNSTEIN Daniel, CHAMPETIER Jean-Pierre, VIDAL Thierry, « Enveloppe et
environnement », in Anatomie de l’enveloppe des bâtiments, page 11, Le Moniteur, Paris,
1997
BOULET Pierre, DELACOU Philippe, DESCHAMPS Jean-Pierre, in LE BATIT EN ILE
DE France, 2. Le bâti parisien du second empire, EDF-Arim Ile de France, Paris, 1983
-
« Les entrées », page 20
-
« Les reliefs », page 21
-
« Les ouvertures », page 24
-
« Oriels », page 25
-
« Façades », page 34
-
« Eléments de façade », page 35
DES CARS Jean et PINON Pierre, in PARIS-HAUSSMANN, Pavillon de l’arsenal, Paris,
1993 :
-
« De la parcelle à l’immeuble », page 142 à 145
-
« La construction d’un nouveau paysage parisien », page 180 à 183
-
« La conception Haussmannienne », page 260 à 263
-
« L’appartement de l’immeuble Haussmannien », page 284 à 289
LOYER François, in PARIS XIXème SIECLE. L’immeuble et la rue, Hazan, Paris, 1997
-
« La crise de l’haussmannisme », page 347 à 365
-
« Le règlement de 1902 », page 407 à 451
- 34 -
MIGNOT Claude, Grammaire des immeubles parisiens, Six siècles de façades du Moyen-âge
à nos jours, Parigramme, Paris, 2004
PINON Pierre, Atlas du Paris Haussmannien, La ville en héritage du Second Empire à nos
jours, Parigramme, Paris, 2002
PLUM Gilles, Paris Art déco, Immeubles et maisons de l’entre de guerres (1918-1940),
Parigramme, Paris, 2008
REMON Michel, « Démarche », in La façade épaisse, page 4 à 7, Plan Construction, Paris,
1978
SCHAAL Rolf, « Introduction », in Les Murs-rideaux, page 8 à 10, Dunod, Paris, 1966
- Sites Internet
http://fr.wikipedia.org/wiki/Haussmann
http://fr.wikipedia.org/wiki/Art_d%C3%A9co
http://www.paris1930.com/
http://www.lesartsdecoratifs.fr/francais/
- 35 -
Iconographie
Toutes les photographies et les dessins sont d’Hugues BOTHIER, sauf mention suivante :
Hôtel Salé :
http://www.linternaute.com/paris/magazine/diaporama/06/marais-par-daniellechadych/images/13.jpg,
p.5
Viollet-le-Duc, Immeuble en pan de fer :
http://www.musee-orsay.fr/de/k ollektionen/erwerbe/die-juengstenerwerbe.html?zo om= 1&t
x_damzoom_pi1%5BshowUid%5D=116357&cHash=148cf40f89
p.7
Page de couverture du livre du PINON Pierre, in Atlas du Paris Haussmannien, La ville en
héritage du Second Empire à nos jours, Parigramme, Paris, 2002
p.8
Affiche de l’exposition internationale des arts décoratifs :
http://www.postersparis.com/artistes/B/Affiches-Robert-Bonfils/paris-art-deco-1925/@@post
er_view
p.10
Photo aérienne d’une percée, page 9 du livre de PINON Pierre, Atlas du Paris Haussmannien,
La ville en héritage du Second Empire à nos jours, Parigramme, Paris, 2002
p.11
Dessin de la rue de Rivoli, page 40 du livre de PINON Pierre, Atlas du Paris Haussmannien,
La ville en héritage du Second Empire à nos jours, Parigramme, Paris, 2002
p.12
Plan d’appartement page 289 du livre de DES CARS Jean et PINON Pierre, PARISHAUSSMANN, Pavillon de l’arsenal, Paris, 1993
p.17
Pavillon de Hanovre dans son contexte initial :
http://www.parisenimages.fr/fr/galerie-des-collections-selection.html?couleur=& count=10&
debut=&exact=&fin=&lieu=&mots=italiens&noiretblanc=&oeuvre=&oeuvre=&personnalite
=&source=&start=60
p.17
- 36 -
Pavillon de Hanovre dans son contexte actuel :
http://fr.topic-topos.com/pavillon-de-hanovre-antony
p.17
Photo d’une façade construite avant le bâtiment, page 195 du livre de PINON Pierre, Atlas du
Paris Haussmannien, La ville en héritage du Second Empire à nos jours, Parigramme, Paris,
2002
p.27
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