Courrier 14 - Lettre à Mr le Directeur de l`IUFM de Nice du

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Courrier 14 - Lettre à Mr le Directeur de l`IUFM de Nice du
R. AMORETTI
19, rue de Puget
06100 Nice
Tel : 04 93 84 74 78
Port : 06 09 66 60 94
Monsieur le Directeur de L’I.U.F.M. de Nice
89, av Georges V
06046 Nice cedex 1
Nice, le 21 mars 2002
Monsieur le Directeur,
J’ai bien reçu votre lettre du 13 mars dernier et je vous en remercie.
Je vous remercie également d’avoir soumis mes propositions d’intervention au Conseil Scientifique et
Pédagogique auprès duquel je regrette de n’avoir pu être entendu (aux deux sens de ce terme car, étant
donné le sujet, il eut peut-être été judicieux de me donner l’opportunité de le soutenir de vive voix…).
Quoiqu’il en soit, je prends acte du « rejet » dont mes propositions ont fait l’objet.
Toutefois ce rejet étant pour moi inexplicable et d’ailleurs inexpliqué (sans citer la loi du 11 juillet 1979
qui précise que, lors d’un refus, la décision administrative doit comporter l'indication des motifs de droit
et de fait sur lesquels elle est fondée, j’aurais apprécié que le Conseil veuille bien m’éclairer sur les
motifs de cette fin de non recevoir), il amène, de ma part, les ultimes réflexions suivantes.
Il n’existe en effet, selon moi en tout cas, que quatre raisons, non exclusives, pour rejeter une
proposition d’intervention :
- l’offre ne correspond pas aux besoins
Tous les rapports convergent pour montrer que deux professeurs sur trois font du forçage vocal en cours
de carrière, cet argument ne peut être avancé. D’ailleurs un Médecin Conseiller du Recteur m’a confié
récemment qu’il était effrayé (ce sont ses propres termes) de l’état vocal et psychologique de beaucoup
de jeunes professeurs, fraîchement sortis de l’I.U.F.M., après juste les toutes premières années
d’enseignement.
- la compétence du demandeur est douteuse ou non appropriée
Toute personne ayant pris la peine de lire les témoignages que je vous ai fait parvenir ne peut qu’être
convaincue de l’adéquation du travail que je propose à la prévention de la dysphonie.
- il y a déjà sur place des gens compétents en nombre suffisant pour s’occuper de ce problème
Si c’est le cas, comment expliquer les propos, cités plus haut, du Médecin Conseiller du Recteur ?
J’ai moi-même rencontré les étés précédents, dans cette académie, des professeurs sortant de l’IUFM,
déjà enroués et, de ce fait, complètement angoissés à l’idée de commencer leur carrière dans cet état.
D’ailleurs certains n’ont pas, pour cette raison, pris leur poste.
-
il ne ferait pas partie de la formation que doit dispenser un IUFM, de donner à chaque professeur
une émission vocale de qualité permettant :
de parler longtemps et sans fatigue sur un timbre agréable,
de pouvoir faire vocalement preuve d’autorité, comme de « séduction », vis à vis de l’auditoire
de ne pas fausser l’oreille des tous petits en évitant de leur présenter un modèle harmonique
inesthétique et cliniquement risqué
et de ne pas décourager les plus grands en évitant de se servir d’un vecteur acoustique
désagréable pour tenter de les intéresser à la matière que l’on enseigne (une voix déplacée est aussi
difficile à côtoyer qu’une mauvaise haleine)…
Sur ce dernier point, j’avoue ne pas connaître le cahier des charges du plan de formation. Mais, si l’on
veut bien prendre en considération, d’une part, que la dysphonie est la seule maladie professionnelle
reconnue aux enseignants, d’autre part, qu’à l’évidence le meilleur des pédagogues, une fois aphone,
n’est plus capable de la moindre pédagogie, et qu’enfin, l’enseignement des langues comme celui de la
musique (qui font d’ailleurs, comme vous le savez, partie des priorités des directives du Ministre)
demandent d’éduquer l’oreille spectrale des enfants et non pas de courir le risque de la fausser par un
modèle d’émission vocale harmoniquement faux, il semblerait souhaitable, si elle n’est pas prévue dans
les textes officiels, que cette formation vocale soit mise sans tarder à l’ordre du jour.
Voilà, Monsieur le Directeur. Je vous rassure : il s’agit bien de ma dernière lettre. Je n’ai ni l’énergie ni
le goût de continuer plus loin mes tentatives de faire comprendre aux responsables l’urgence et
l’importance de l’enjeu. Je vais désormais m’adresser directement aux intéressés qui, eux, n’ont jamais
douté, une fois informés, de l’utilité de ce travail.
Malheureusement ce ne sont pas eux qui décident, pour l’instant du moins, de ce qui leur paraît
prioritaire, voire vital, dans la formation qu’ils espèrent.
Vous me dites, en terminant votre lettre que, je vous cite : «… vous ne pouvez pas répondre
positivement aux dizaines de demandes d’interventions, similaires à la mienne …».
Sans préjuger de l’intérêt de toutes ces demandes auxquelles vous faites allusion, je pense que des
priorités, pour les raisons explicitées plus haut et pour d’autres encore, peuvent être facilement trouvées
quand les offres d’intervention concernent le principal outil de travail des enseignants, c’est-à-dire leur
voix. En outre, si on prend en considération que la proposition d’intervention vient d’une personne qui a
été payée (sur une décision prise au plus haut niveau puisqu’il s’agissait du Ministre de l’Education
nationale), pendant deux ans et demi aux frais du contribuable, pour justement apporter une aide aux
enseignants et aux élèves dans ce domaine, il ne semble pas inconvenant de penser qu’un refus aussi
définitif du Conseil (pas de contre-proposition) pose ici, selon moi en tout cas, la question de
l’utilisation de l’argent public.
En vous remerciant néanmoins pour votre écoute, je vous prie de croire, Monsieur le Directeur, en mes
sentiments respectueux.
R. AMORETTI