Saliha née en 1914 à Nebeur (gouvernorat du Kef) et décédée le 26

Transcription

Saliha née en 1914 à Nebeur (gouvernorat du Kef) et décédée le 26
CINQUANTENAIRE DE SALIHA
Effort soutenu pour un éveil culturel et identitaire
Mourad Ghachem
Le 26 novembre 1958, la radio Tunisienne annonça une nouvelle qui avait attristé tous les tunisiens : «
Saliha, la Grande Dame de la chanson tunisienne vient de nous quitter !». En réalité, cinquante ans
après, Saliha est toujours et encore présente dans nos cœurs, dans nos fêtes ainsi que dans notre vie de
tous les jours en tant qu’élément culturel identitaire. Nul ne peut prétendre être réellement tunisien sans
connaître au moins trois chansons de notre Saliha.
C’est dans les années trente que débuta la carrière de Saliha notamment avec la Rachidia. Son succès et
sa gloire illustrent l’élan culturel de plusieurs hommes de lettres qui étaient en quête d’authenticité
nationale et qui résistaient, à leur manière, à une occupation voire invasion culturelle extérieure. En outre,
ils se devaient de résister au mépris des chansons du terroir que manifestaient des tunisiens en
défenseurs zélés de la culture de l’occupant ou de celle de la radio égyptienne « la voix du Caire ».
Saliha, comme d’autres chanteurs tels que les Riahi, Jouini, Thraya, fait parti d’une dynamique d'éveil
culturel où des poètes s'évertuaient à choisir des mots et symboles issues de notre patrimoine et des
musiciens déployaient des efforts pour sauvegarder et imposer un style et des modes tunisiens. Cet éveil a
permis au tunisien d'apprécier et d’être fier de chansons tunisiennes qui, utilisant la langue parlée et une
symbolique tunisienne, étaient apte à exprimer des sentiments et à induire des émotions esthétiques.
A notre point de vue, la chanson " Yalli Bôodak thayâa fikri " -dont la traduction ci-après en françaispourrait illustrer la beauté des chansons de Saliha et contribuer, aux non arabophones, d'apprécier un tant
soit peu un volet de la chanson tunisienne.
O Toi dont l’éloignement !
Ton éloignement m’a fait perdre la raison !
Reviens vite regagner le giron de l’unisson !
Ton absence attise la flamme de ma passion !
Ma vie tient à un mot si doux si profond !
Parle-moi ! Je retrouverai ma candeur,
Laisse-moi savourer la mélodie du bonheur,
Souris-moi ! Apaise l’impatience de mon cœur,
En me baignant de la douce gaieté des fleurs
Mon cœur demeure avide de l’âme sœur,
Et seule notre communion calmera ses douleurs.
O ! Fille illustre du bel astre charmeur,
Ton charme a surpassé celui de ton géniteur.
Pareil à la lame d’un sabre, ton regard m’a percé,
Avec tout le charme que les dieux ont créé !
J’en voulais garder le secret, mais mes larmes ont coulé
Exprimant tout ce que mon cœur voulait cacher !
Ton amour me fait vivre et me fait veiller,
Il est à la fois le doux mal et le remède approprié.
Mon cœur demande : «ta patience où est-elle passée ? »
Ma réponse risquerait d’offenser l’être aimé !
Pourquoi m’imposes-tu tant de souffrance ?
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Et t’autorises-tu à torturer mon existence ?
Rongé par la langueur de ton absence,
Un enfer embrase ma vie sans tolérance !
Tolères-tu que je passe ma vie en pénitence ?
Sans pouvoir jouir de ta présence !
Pour toi, j’ai donné à l’exil une raison, un sens,
Alors que la raison du cœur condamne cette sentence.
Pourrais-je vivre avec toi et accéder au bonheur ?
Et faire ainsi taire les envieux et les râleurs !
Pourrais-je te serrer fort contre mon cœur ?
Ce cœur qui a subi tant de douleur !
Je trouverais la quiétude et la paix des seigneurs,
En oubliant mes larmes et mes pleurs.
Et, je te sertirai telle une rose dans mon cœur,
Qui, dans les âpres moments, se vivifie par tes senteurs
Traduction libre de « Yalli Bôodak thayâa fikri » de Saliha (texte de Jallel eddine Naccache, composition
de Khémais . Ternan)
Mourad Ghachem
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