Un syndicat engage le bras de fer

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Un syndicat engage le bras de fer
EXERCICE PROFESSIONNEL
Actualité l Hebdo
PLATEFORMES ASSURANTIELLES
Un syndicat engage le bras de fer
Le siège de Santéclair (Hauts-de-Seine), plateforme de gestion du risque santé pour le compte
de multiples complémentaires santé, a fait l’objet
de la visite d’un huissier début février à la demande
du président du Tribunal de grande instance de
Nanterre.
Celui-ci avait été saisi au mois de novembre 2014 par
l’avocat du syndicat dentaire FSDL en charge de plusieurs plaintes ordinales déposées par des praticiens
adhérents de ce syndicat à l’encontre de chirurgiensdentistes partenaires de Santéclair pour détournement
supposé de leurs patients.
Cette procédure devait permettre d’obtenir les scripts
utilisés par les conseillers Santéclair lors des conversations avec les assurés concernant la prise en charge
de leur devis prothétique ou implantaire. Car c’est à ce
moment-là, en effet, que Santéclair propose à l’assuré
de consulter un chirurgien-dentiste affilié à son réseau
pour faire baisser le montant de son reste à charge, les
praticiens adhérents acceptant de pratiquer des tarifs
de 20 à 40 % plus bas que ceux ordinairement constatés.
Ces scripts pourraient devenir une preuve des détournements dénoncés. L’avocat de la FSDL conseille aux
praticiens adhérents à ce syndicat qui l’ont saisi de
porter plainte auprès de leur conseil départemental de
l’Ordre. Plusieurs procédures sont en cours.
« Tout cela n’est que de la gesticulation et de la communication, répond Marianne Binst directrice générale
de Santéclair, qui confirme la visite d’un huissier. Ce
qu’ils appellent détournement de patientèle relève pour
nous de la simple mise en concurrence. Là où il y a une
liberté sur les prix, la concurrence doit s’appliquer. »
La plateforme estime être irréprochable en termes de
droit vis-à-vis de la loi sur les réseaux de soins adoptée en décembre 2013 comme de la « Charte de bonnes
pratiques pour les relations entre les chirurgiensdentistes et les organismes complémentaires d’assurance maladie » signée en juillet 2013.
La plateforme affirme, par exemple, donner systématiquement trois noms de praticiens partenaires de son
réseau lorsqu’un assuré présente un devis dont le reste
à charge est jugé trop élevé (le réseau compte 3 000 praticiens et 35 « implantologues »).
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Sur le plan déontologique, Marianne Binst attend
« sereinement » une éventuelle décision du conseil de
l’Ordre qui pourrait toucher les praticiens partenaires
du réseau. « Cela fait dix ans que nous travaillons avec
des chirurgiens-dentistes, dix ans que les contrats de
partenariat sont étudiés par le conseil de l’Ordre sans
qu’il n’ait jamais rien trouvé à redire. Les dossiers sont
vides. En revanche, il y a aujourd’hui une vraie campagne d’intimidation vis-à-vis de nos partenaires. On
incite des praticiens à porter plainte contre eux. On les
contraint à dénoncer leur contrat sous peine de poursuites plus importantes. À cela s’ajoute une campagne
de boycott systématique qui vise à entraver notre
activité. »
Santéclair a assigné fin janvier la FSDL devant le
Tribunal de grande instance de Paris pour, notamment, « dénigrement », « attaques et menaces visant
la direction » et « appel au boycott des fournisseurs
de Santéclair », pour des propos tenus sur différents
réseaux sociaux et sur le site internet du syndicat. « En
l’espace de quelques mois Santéclair a compté plus de
21 résiliations de leur contrat par des chirurgiensdentistes partenaires » sur 35 implantologues, souligne
le texte de l’assignation. La société réclame 100 000 € en
réparation du préjudice.
La CNSD soutient la FSDL dans cette affaire. Dans un
communiqué du 27 février, la confédération dénonce
« une attaque inacceptable contre la mission fondamentale d’un syndicat à défendre sa profession ». Le
syndicat estime, lui aussi, que « sous prétexte de libre
concurrence, ces plateformes assurantielles détournent
les patients sur des critères uniquement financiers et
portent atteinte à des principes fondamentaux tels que
le libre choix du praticien, la liberté thérapeutique et la
déontologie professionnelle ».
C’est dans ce contexte, houleux, que d’autres plateformes recrutent des chirurgiens-dentistes pour
renforcer leur réseau : Kalivia (Malakoff Médéric,
Harmonie Mutuelles…), Sévéane (Groupama, Pro
BTP…) ou Itélis (Axa, Humanis…), notamment…
L’INFORMATION DENTAIRE n° 10 - 11 mars 2015

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