Encourager et développer la création d`entreprise

Transcription

Encourager et développer la création d`entreprise
Secrétariat d’État
aux Petites et Moyennes Entreprises,
au Commerce, à l’Artisanat, aux Professions libérales
et à la Consommation
encourager
et développer
la création
d’entreprise
Document
de consultation
et d’orientation
A O Û T
2 0 0 2
Quelle est la clé de la croissance,
de l’emploi, du pouvoir d’achat, de
la consommation, du progrès
social et technique, bref du
dynamisme économique et social
de notre pays ?
C’est l’entreprise ! Nos entreprises
doivent se développer, oui ! Mais
avant, il faut qu’un jour… elles
naissent ! A partir d’une idée, à
partir d’une activité existante, à
partir d’une volonté : ce livre
blanc est une introduction à la
naissance de l’entreprise. Avec
vous, le débat est ouvert !
Renaud DUTREIL
Création d’entreprise : la France peut faire mieux ! la France doit faire mieux !
La création d’entreprise stagne en France depuis plusieurs années. Alors que
jusqu’à la fin des années 1980, près de 200 000 entreprises étaient créées annuellement,
ce nombre s’est réduit à environ 170 000 / 180 000 créations depuis deux ans. Le nombre
total d’entreprises qui s’établit à 2,4 millions reste ainsi stable compte tenu d’un nombre
équivalent de disparitions.
Cette situation n’est pas satisfaisante si on la compare à celle qui prévaut à
l’extérieur de nos frontières : le nombre d’entreprises rapporté au nombre d’habitants
(densité entrepreneuriale) est sensiblement inférieur à celui d’autres pays. Ainsi, à
densité entrepreneuriale équivalente à celle du Royaume-Uni, la France compterait 3,4
millions d’entreprises, ce chiffre atteindrait même 4,4 millions si cette densité égalait
celle des Etats-Unis.
Ce déficit se mesure également en termes de flux de créations : la France crée
moins d’entreprises que la plupart de ses partenaires européens. Ainsi l’Espagne crée
deux fois plus d’entreprises que la France, le Royaume-Uni une fois et demie plus.
1
La France figure parmi les pays au monde dans lesquels la création d’entreprise
est le moins souvent envisagée spontanément comme choix professionnel. Ceci est attesté
par l’enquête menée par le conseil des affaires de l’ONU et synthétisée dans une étude
annuelle (Global Entrepreneurship Monitor) au sein de 29 pays. Elle illustre un état de
fait : devenir créateur d’entreprise reste un parcours atypique en France.
Les conséquences en termes d’emploi sont clairement défavorables, alors que les
études de l’OCDE tendent à établir un lien très fort entre le dynamisme de la création
d’entreprise et la croissance et l’emploi. Ce sont les pays qui comptent le plus
d’entrepreneurs qui ont aussi le plus accru leur volume d’emploi dans le secteur privé.
L’attention presque exclusive portée à la gestion de la demande et à la gestion de
la politique macroéconomique pour assurer la croissance a contribué à détourner
l’attention de mesures de nature micro-économique susceptible d’accroître la
production de richesse et donc d’emplois dans notre pays. Parmi ces politiques figurent
l’amélioration de l’environnement du créateur ou du repreneur d’entreprise et celle de
la promotion de l’esprit d’entreprise qui exercent une influence déterminante pour le
passage à l’acte de création.
Dans le contexte actuel de fort renouvellement des techniques, le faible
renouvellement de nos activités doit nous mettre en alerte.
Alors qu’en France toutes les entreprises cotées au CAC 40 existaient en 1960,
40% des entreprises américaines cotées au New York Stock Exchange ou au NASDAQ
étaient encore à naître à cette date. Aussi, l’encouragement à la création d’entreprise
doit aider au renouvellement du tissu économique et préparer les champions
économiques de demain et d’après-demain.
La création doit enfin être entendue au sens large : elle concerne également la
reprise d’entreprises existantes, car bien souvent les difficultés sont similaires entre le
créateur qui lance une activité ex nihilo et celui qui reprend une affaire existante.
A horizon de dix ans, 500 000 entreprises devront changer de main. Tout comme
la création, la reprise est un enjeu majeur. A l’heure actuelle, une entreprise sur cinq ne
2
fait pas l’objet d’une reprise avec les conséquences économiques et sociales que présente
une cessation définitive d’activité.
Notre pays est confronté à deux enjeux majeurs : faciliter la création d’entreprise
et assurer la pérennité des entreprises existantes.
3
I
L’Etat doit faciliter la création d’entreprise
A) La création est nécessaire à l’économie
1. Créer des emplois
Le tissu économique ne se limite pas aux grandes entreprises multinationales et à
leurs filiales nationales. En effet, en France, 93,1% des entreprises ont moins de 10
salariés et 99,8% des entreprises ont moins de 200 salariés.
Répartition des entreprises selon leur nombre de salariés
Nombre de salariés
Nombre d'entreprises
Proportion des
entreprises
0
1 196 205
49,5%
1à9
1 051 807
43,6%
10 à 49
139 285
5,8%
6,6%
93,1%
50 à 199
21 220
0,9%
200 à 499
500 et plus
4 029
1 964
0,2%
0,1%
0,2%
Total
2 414 510
100,0%
100,0%
Source : INSEE 2001
Ces petites entreprises de moins de 200 salariés ont une place prépondérante et
stratégique sur le marché de l’emploi. Elles emploient déjà aujourd’hui nettement plus
de la moitié des salariés (56,6%). Si l’on y ajoute le fait que ces petites entreprises
emploient leur chef d’entreprise ainsi que très souvent son conjoint, c’est en fait plus des
deux tiers des emplois du secteur privé qui sont pourvus par les entreprises de moins de
200 salariés.
Répartition des emplois salariés selon la taille de l’entreprise
Nombre de salariés
Nombre de salariés
Proportion des salariés
0
1à9
2 638 027
19,7%
0,0%
19,7%
10 à 49
50 à 199
2 924 975
2 015 884
21,8%
15,1%
36,9%
Source : INSEE 2001
4
200 à 499
500 et plus
1 263 039
4 551 733
9,4%
34,0%
43,4%
Total
13 393 658
100,0%
100,0%
Plus important encore, ce sont les petites entreprises qui créent des nouveaux
emplois, non les grandes. Sur longue durée, le phénomène est frappant : alors que les
entreprises qui avaient moins de 10 salariés en 1991 ont créé près de 2 millions
d’emplois entre 1991 et 1998 ce qui représente une augmentation de 48%, les entreprises
de plus de 100 salariés en ont détruit 1,2 millions.
Evolution du nombre d’emplois selon la taille de l’entreprise (1991-1998)
Taille de l’entreprise
(nombre de salariés)
Variation réelle
0 à 10
11 à 100
plus de 100
Total
1 887 059
- 526 996
- 1 229 140
130 923
48%
15%
- 20%
(base taille de départ)
En % du stock 1991
1%
dont :
Emplois perdus
par les disparitions
- 1 720151
- 43%
- 1 142 786 - 1 086 233 - 3 949 170
- 18%
- 33%
- 29%
Emplois créés par les
entreprises pérennes
1 230 050
31%
75 883
2%
- 488 167
- 8%
817 766
6%
Emplois créés au
travers des créations
2 377 160
60%
539 907
16%
345 260
6%
3 262 327
24%
Source : PH group
Dans ce processus de création d’emplois par les petites entreprises, la création
d’entreprise joue un rôle prépondérant puisqu’elle contribue pour les deux tiers aux
emplois créés. Sans la création d’entreprise, plus de 3 millions d’emplois auraient été
perdus entre 1991 et 1998 soit près d’un emploi sur quatre. Qui peut dire que la création
d’entreprise ne serait pas primordiale pour l’économie ?
2. Transformer l’économie
Le jeu des créations-cessations d’entreprises a un impact très fort sur l’évolution
et la transformation de l’économie. Les plus petites entreprises, souvent plus
dynamiques et performantes, croissent en taille et en importance et supplantent les
entreprises plus grandes dont les méthodes ou les technologies employées sont dépassées.
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Le renouvellement des entreprises
Nombre d’entreprises
en 1991
1124963
1247514
CESSATIONS
PERENNES
CREATIONS
28%
31%
1247514
1154252
29%
NEES PUIS MORTES
DANS LA PERIODE
454602
TOTAL EN VIE
actives
entre 91 et 98
en 1998
2401766
11%
3981331
2372477
Source : PH group
Près de la moitié des entreprises qui existaient en 1991 avaient cessé leur activité
en 1998. Parmi celles-ci, de nombreuses grandes entreprises cédaient le pas et leur place
à des entreprises plus petites. En outre, la création d’entreprise étant plus forte dans les
secteurs les plus dynamiques de l’économie, le processus de création et de destruction
d’entreprise conduit à un renouvellement en profondeur du tissu économique.
Evolution du nombre d’entreprise entre 1997 et 2000 suivant l’activité de l’entreprise
Industries
agricoles et
alimentaires
Autres
industries
Construction
Commerce
Transports
-2,9%
-1,9%
1,2%
-0,6%
1,9%
Activités
Services aux
immobilières entreprises
6,3%
11,7%
Autres
services
Total
6,7%
3,5%
Source : BDPME d’après INSEE (SIRENE)
3 .Animer les territoires
Les entreprises nouvelles ont, par leur dynamisme particulier, un impact fort sur
l’animation des territoires. Pas de territoire vivant sans entreprises actives ! Aidées par
des incitations bien ciblées, les entreprises peuvent aussi contribuer au développement
de zones économiquement défavorisées.
6
De nombreux acteurs locaux apportent déjà leur contribution au développement
de nouvelles entreprises sur leur territoire. Parmi eux, on compte les organismes
consulaires et les collectivités locales dont l’action est parfois réalisée en direct ou à
travers des réseaux d’aides à la création d’entreprise, des associations spécialisées ou des
fonds locaux intervenant dans le financement des projets de création. La conjonction de
l’ensemble de ces volontés a un fort impact sur la cohésion des populations au niveau
local.
B) La création est encore trop freinée
1. La complexité est le premier obstacle à la création
Pour une majorité de créateurs d’entreprise potentiels qui hésitent ou renoncent
à mettre en œuvre leur projet, la complexité est le premier obstacle : complexité de l’acte
de création lui-même, complexité de la relation avec les différents interlocuteurs de
l’entreprise (organismes sociaux, administration fiscale notamment), complexité des
dispositifs d’aides à la création d’entreprise.
Les textes légaux permettent théoriquement de créer une entreprise en 24 heures
en se rendant en un lieu unique qui est le Centre de Formalités des Entreprises (CFE).
Dans la pratique le délai effectif est souvent bien plus long du fait des circuits
compliqués empruntés par les documents fournis par le créateur au CFE (greffes des
tribunaux de commerce, INSEE, INPI, organismes sociaux…). De plus, des démarches
préalables au passage dans un CFE sont obligatoires (publication d’une annonce de
création, passage au centre des impôts, libération de fonds sur un compte bancaire).
Une fois l’entreprise créée et avant-même que celle-ci ait pu démarrer son
activité, le créateur d’entreprise reçoit de multiples courriers émanant notamment de
l’administration fiscale (pour le paiement TVA notamment) ou des caisses de protection
sociale. Les démarches administratives occupent le créateur d’entreprise plus d’une
demi-journée par semaine dès la création alors que celui-ci a besoin de tout son temps
pour développer son activité.
7
Les dispositifs d’aide sont multiples et souvent difficiles d’accès pour les
créateurs mal informés : les rapports d’études les plus récents recensent 64 dispositifs
d’aide directe ou indirecte. Ces dispositifs sont d’une manière générale complexes et
émiettés. Les aides à l’entreprise recouvrent souvent d’autres politiques : aménagement
du territoire, promotion de l’innovation, politique de l’emploi. Enfin, la diversité des
interlocuteurs rend la connaissance de ces dispositifs et l’accès aux aides d’autant plus
difficile.
2. Le poids des charges sociales
Au début de son activité, le créateur doit à la fois développer une clientèle,
réaliser les investissements et effectuer les dépenses nécessaires. En conséquence, au
cours des deux premières années, le revenu des créateurs d’entreprise est en moyenne
proche du montant du RMI.
Cette situation très difficile du créateur d’entreprise au début de son activité est
fortement aggravée par le poids des prélèvements sociaux qui représentent environ la
moitié du revenu du créateur d’entreprise. Ce n’est pas de nature à favoriser la création
d’entreprise : le créateur d’entreprise potentiel risque de renoncer à son projet pour
vivre des prestations sociales auxquelles il a droit ou de débuter son activité « au noir ».
Il existe un dispositif d’exonération de charges sociales pour les créateursdemandeurs d’emploi, l’ACCRE. Cependant, celui-ci comporte un coût très élevé :
il représente une grande partie de l’aide financière accordée par l’Etat à la création
d’entreprise.
3. La difficulté à quitter le statut de salarié
Le statut de salarié est très protecteur en comparaison de celui de chef
d’entreprise. L’écart est si fort que les salariés potentiellement intéressés par la création
d’entreprise hésitent fortement avant de se lancer.
De surcroît, certains salariés qui souhaiteraient effectivement franchir le pas de
la création malgré cet écart se voient opposer des clauses le leur interdisant. Parmi elles,
8
on peut citer les clauses d’exclusivité par lesquelles le salarié se voit interdire toute autre
activité que son activité salariée, ce qui ne lui permet pas de lancer officiellement son
activité et de déclarer son entreprise avant d’avoir démissionné.
C) Le créateur est souvent seul
Dans la très grande majorité des cas, le créateur d’entreprise est seul et ne doit
compter que sur ses compétences et sa détermination pour réussir son projet de création
d’entreprise.
Les nombreux dispositifs d’aides et la multitude d’intervenants locaux, régionaux
et nationaux évoqués ci-dessus cachent une réalité : 3 entreprises sur 4 sont créées sans
recevoir aucune aide et sans être aucunement accompagnées, soit une proportion en
hausse depuis le début des années 1990. Cette solitude du créateur qui trouve d’ailleurs
son prolongement dans la solitude de l’entrepreneur n’est pas de nature à favoriser la
création d’entreprise.
D) La création est partout aidée
L’aide à la création d’entreprise est une nécessité acceptée par tous. Tous les pays
ont des dispositifs d’aide à la création, certains étant plus volontaristes et mieux financés
que les dispositifs mis en œuvre en France. La question n’est donc pas de savoir s’il faut
ou non aider la création mais plutôt de quelle manière et avec quel budget.
A titre d’exemple, le dispositif d’aide à la création d’entreprise mis en œuvre par
la Finlande au milieu des années 90 et essentiellement fondé sur des subventions à
l’investissement dans les nouvelles technologies a permis à ce pays de prendre une très
forte position concurrentielle sur ce secteur stratégique. De manière diamétralement
opposée, le système d’aide à la création d’entreprise mis en œuvre aux Etats-Unis depuis
le début des années 50 dynamise très efficacement l’intervention des banques et des
fonds de capital risque à travers des garanties de prêts et d’apports en capital.
9
S’il n’existe pas un modèle unique et parfait d’aide à la création d’entreprise, il
est néanmoins certain que la question du rapport coût/efficacité des aides doit être posée
aussi bien du point de vue de l’Etat que de l’entrepreneur bénéficiaire.
10
II
Quelques principes simples pour réformer
L’objectif que se fixe le Gouvernement est de permettre la création de plus d’un
million d’entreprises nouvelles à horizon de cinq ans et donc d’inverser radicalement la
tendance actuelle.
Le Gouvernement a fait de la création d’entreprise un de ses objectifs prioritaires
en matière économique, car en matière économique, la première liberté est celle
d’entreprendre, mais plus largement dans son projet de bâtir une République plus unie,
plus dynamique, plus libre, plus juste :
-
l’entreprise favorise l’expression des talents, l’esprit d’initiative, qui
caractérisent le dynamisme d’un pays et sa confiance dans l’avenir ;
-
elle conditionne la création de richesse et d’emplois
-
elle irrigue les territoires
-
elle diffuse les innovations
-
elle est un vecteur d’intégration sociale et une chance de réussite,
d’épanouissement et de réalisation personnelle pour ceux qui veulent
travailler.
Les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre afin de promouvoir et
favoriser la création d’entreprise concernent tous les projets, qu’il s’agisse d’entreprises
individuelles ou de sociétés, d’activités artisanales, commerciales, industrielles de
services ou de haute technologie. Elles s’adresseront à tous les publics porteurs de
projet, demandeurs d’emploi ou salariés, jeunes ou moins jeunes, personnes en
reconversion ou salariés désireux de prendre un nouvel essor personnel et professionnel
par la création d’entreprise.
11
L’entreprise consacre les valeurs d’autonomie, d’initiative et de responsabilité.
Elle a vocation à être le moteur d’une République vivante, donnant sa chance à chacun,
récompensant le travail, la créativité et le talent.
La dynamique des territoires est étroitement liée à celle des entreprises. Il faut
resserrer les liens entre ceux qui prennent les initiatives et ceux qui, sur le terrain local,
sont susceptibles de les soutenir. A cet égard, la mobilisation de l’épargne de proximité
en faveur du tissu économique local constitue un objectif important.
En parallèle, l’Etat devra déconcentrer encore davantage au profit des
collectivités territoriales les missions d’animation économique. Ce sont les collectivités
locales, au premier rang desquelles les régions, qui sont les plus à même de répondre aux
attentes des entrepreneurs en leur proposant un environnement propice au
développement de leurs activités.
Les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre comprennent le
respect des valeurs de responsabilité propres à la création d’entreprise et qui s’appuient
sur l’initiative, l’autonomie, la prise de risque, la volonté de réussite tout autant que la
recherche de croissance et la libre détermination des choix d’action.
Il ne s’agit plus de jouer à l’Etat-Providence au travers d’aides et de subventions
ou de tomber dans l’écueil de l’économie mixte.
Pour les pouvoirs publics aujourd’hui, il s’agit moins de subventionner que de
faciliter, d’intervenir que d’accompagner.
Nous voulons :
-
Faciliter l’accès à la création d’entreprise, parce que la simplification est un
facteur d’égalité des chances et de démocratisation de la réussite
entrepreneuriale.
-
Favoriser l’insertion sociale, parce que la part des chômeurs dans le total des
créateurs oscille entre 35 et 50% dans la dernière décennie et que l’entreprise
est un puissant « ascenseur social ».
12
-
Permettre un accès plus aisé au financement, afin que le créateur puisse
financer son projet, grâce à des dispositifs tels que les avances remboursables,
les garanties de prêt ou diverses mesures fiscales en faveur de l’investissement
dans le capital des entreprises.
Accroître les chances de chaque Français et de chaque Française de réussir par
l’entreprise, tel est le pari que nous prenons aujourd’hui.
13
III
Des pistes pour l’action
Le projet du Gouvernement doit couvrir un large champ :
-
Toutes les catégories d’entreprises nouvelles. Ceci suppose que des mesures
soient envisagées pour les différentes catégories de créateurs, les besoins
n’étant pas strictement identiques pour tous les projets.
-
Toutes les thématiques d’actions possibles. C’est ainsi que le projet
s’intéressera aux questions :
de financement
sociales
juridiques
d’accompagnement des créateurs
de régionalisation
et de développement de l’esprit d’entreprise.
A) Le financement
Une des problématiques principales de la création d’entreprise est celle du
financement.
Pour l’ensemble de la création d’entreprise, les concours financiers annuels
représentent environ 2,3 milliards d’euros. Ces financements se répartissent de la
manière suivante : 20% proviennent de ressources publiques via des concours directs ou
des aides indirectes, 20% proviennent des banques et 60% de l’épargne du créateur ou
de son entourage immédiat.
14
L’ambition
de
développer
le
nombre
de
créations
d’entreprises
doit
s’accompagner d’un accroissement des sources de financement.
1. Les besoins de financement sont inégalement couverts
Si les entreprises innovantes ou les entreprises de croissance à fort potentiel de
développement peuvent accéder à des concours relativement abondants sous la forme
d’aides directes accordées par l’ANVAR, ou d’apports en fonds propres par
l’intermédiaire des FCPI ou du capital-risque, en revanche, certains besoins ne sont pas
suffisamment satisfaits.
Les plus petits projets mais également les futures PME qui exercent leur activité
dans des secteurs plus traditionnels rencontrent des difficultés pour accéder à des
financements externes, en particulier au premier stade de leur développement.
L’appréciation du risque pour une entreprise en création est nécessairement délicate :
la viabilité du projet dépend de critères divers que le financeur – le banquier la plupart
du temps – a des difficultés à apprécier. La pertinence du projet, l’existence d’un
marché solvable, les qualités commerciales du créateur, sa capacité à mobiliser et réunir
les compétences techniques mais aussi les ressources humaines adéquates sont des
variables déterminantes pour la réussite du projet. Elles sont par définition difficiles à
évaluer. Il semble que les besoins mal couverts concernent principalement les projets de
montants compris entre 50 000 et 150 000 euros.
2. Des financements différenciés doivent être prévus
L’adoption des modes de financement aux différentes catégories de projets est
nécessaire. Hormis le risque propre des projets, le coût d’instruction et de gestion des
financements est un paramètre essentiel.
En deçà d’un certain montant de prêt ou de participation, les réseaux de
financement classiques ne peuvent dégager une rentabilité positive compte tenu de
l’impact de ces frais.
15
Le recours à des systèmes alternatifs de financement s’impose donc dans une
certaine mesure pour les petits projets.
De même, les financements mutualisés et des investissements individuels ne
s’adressent ni à la même cible d’investisseurs ni aux mêmes projets.
La question des incitations fiscales est ici essentielle. De leur ciblage sur
l’ensemble des modalités d’investissement, individuelles ou collectives, dépend dans une
proportion non négligeable le volume des fonds investis dans la création et la reprise.
3. L’accompagnement joue un rôle clé
L’accompagnement du créateur constitue un facteur très favorable pour la
pérennisation des entreprises créées : il contribue à la validation des projets, il aide à
leur mise en place, apporte des conseils au démarrage de l’entreprise, et le plus souvent
contribue au financement sous forme de prêts d’honneur. Ces concours exercent un effet
de levier sur les financements bancaires classiques, les banques étant d’autant plus
enclines à prêter que le créateur est entouré de conseils et accompagné dans sa
démarche.
Partant de ce constat, un accès plus aisé aux ressources financières ne peut
reposer sur une simple augmentation des volumes financiers accordés à la création mais,
également,
sur
une
différenciation
des
circuits,
sur
un
renforcement
de
l’accompagnement et une meilleure connaissance du tissu économique par les
financeurs.
Questions
Q1 : Quels sont les projets pour lesquels les financements doivent être renforcés ?
Q2 : Faut-il privilégier aides définitives, garanties ou prêts ?
16
Q3 : Quels circuits spécifiques faut-il utiliser selon la dimension des projets ?
Q4 : Comment mobiliser de l’épargne locale pour aider des projets ?
Q5 : Faut-il privilégier la prise de participation en capital ou des avances ?
Q6 : Faut-il rendre l’accompagnement obligatoire pour certains projets ?
Q7 : Les dispositifs d’exonération fiscale sont-ils bien ciblés pour la création et pour
la reprise d’entreprise ?
17
B) Les mesures sociales
Près de 80 000 personnes au chômage retrouvent aujourd’hui une activité en
créant une entreprise. Le volet social de la création d’entreprise concerne
principalement les aides en faveur de cette population. Il comporte :
-
Des exonérations de charges sociales : l’ACCRE qui exonère de charges
sociales pendant un an le créateur d’entreprise qui était au chômage.
-
Des aides directes aux bénéficiaires de minima sociaux : le dispositif EDEN.
Pour beaucoup de petits projets initiés par des personnes en difficulté
temporaire, ces dispositifs ont prouvé leur efficacité. Ils constituent souvent une partie
non négligeable du financement initial des projets. Il convient donc de les améliorer.
Une brève analyse permet de constater les défauts majeurs du dispositif actuel :
-
Les déclarations sociales à effectuer lors de la première année sont multiples
du fait de leur périodicité et du nombre d’organismes collecteurs.
Le régime de cotisations forfaitaires oblige à payer des charges élevées en
l’absence même de tout chiffre d’affaires et provoque des ressauts de cotisations qui
pèsent excessivement sur l’entreprise lors des régularisations.
Les questions posées peuvent donc porter sur leur volume global, leur ciblage, les
modalités d’octroi et le cas échéant de remboursement .
Mais au-delà de ces problèmes spécifiques, il faut également s’intéresser à la
situation des autres créateurs. Ceux-ci sont confrontés le plus souvent à deux difficultés :
-
L’abandon d’une activité salariée pour lancer une entreprise est une étape
particulièrement difficile à passer. Les revenus tirés de la nouvelle entreprise
sont souvent très faibles au départ et le salarié perd brutalement lors de sa
18
démission toute sécurité financière. Il faut donc rechercher des solutions
(temps partiel, double activité…) permettant à la nouvelle entreprise de
fonctionner effectivement avant que tous les liens ne se soient rompus.
-
Le nouveau créateur a besoin de temps libre, de ne pas être submergé de
contraintes administratives ou de charges diverses avant même d’avoir
commencé réellement sa nouvelle activité.
Trois orientations principales doivent donc être examinées :
-
Faciliter la transition entre le statut de salarié et celui de créateur
indépendant
-
Renforcer les systèmes d’aides aux personnes en difficulté
-
Mettre en place un dispositif allégeant les contraintes liées aux charges
sociales pesant sur le créateur (complexité, coût, temps passé aux diverses
déclarations) au moment où il crée son entreprise.
Questions
Q8 : Les aides en faveur des personnes en difficulté (chômage, minima sociaux) devraientelles être améliorées pour répondre mieux aux besoins des porteurs de projet ?
- dans leur nature
- dans la durée de versement?
- en montant ?
Q9 : Comment faciliter la transition entre le statut de salarié et celui de créateur
d’entreprise ?
Q10 : Comment alléger les contraintes financières et administratives liées aux cotisations
sociales en début d’activité ?
19
C) Les questions juridiques
Le créateur d’entreprise doit choisir le statut juridique le mieux adapté au regard
de son projet professionnel et de sa situation personnelle. Le choix et l’adaptation d’une
structure juridique vont conditionner la protection sociale du créateur, son régime
d’imposition, l’ampleur de sa responsabilité, la possibilité d’ouvrir son capital à des
partenaires financiers ou à des associés, le développement économique, la pérennité et la
transmission éventuelle de l’entreprise.
1. Le secteur d’activité
En fonction de la nature de l’activité, l’entreprise relèvera du secteur de
l’artisanat, du commerce, de l’industrie ou des professions libérales.
L’artisan exerce une activité indépendante de production, de transformation, de
réparation ou de prestations de services, avec l’aide éventuelle de sa famille et d’un
nombre de salariés limité à dix. Cette activité est immatriculée au Répertoire des métiers
et relève de la Chambre de métiers.
Le commerçant effectue des opérations commerciales à titre habituel (achats pour
revente, transports…) ou exerce une activité assimilée à du commerce (auto-école,
agents commerciaux…). La plupart de ces activités donnent lieu à inscription au
Registre du commerce et des sociétés qui est tenu par les greffes des tribunaux de
commerce. En outre, les Chambres de commerce et d’industrie offrent diverses
prestations en vue d’aider l’entrepreneur à démarrer ou développer son activité.
L’industriel exerce une activité indépendante de production, de transformation,
de réparation ou de prestations de services, en employant plus de 10 salariés.
L’industriel est inscrit auprès du Registre du commerce et des sociétés.
La profession libérale peut être liée à une nomination par l’autorité publique (les
notaires) ou relever d’un ordre professionnel (les pharmaciens).
20
Par ailleurs, l’activité professionnelle sera considérée comme libérale dès lors
qu’elle n’est pas assimilée à une activité salariée, et qu’elle ne relève pas des secteurs de
l’artisanat, du commerce, de l’industrie et de l’agriculture.
2. La forme juridique doit-elle être améliorée ?
On distingue traditionnellement les entreprises individuelles, pour lesquelles le
patrimoine de l’entreprise et celui de l’entrepreneur sont confondus sur le plan
juridique, des sociétés commerciales qui jouissent de la personnalité morale et possèdent
un patrimoine distinct de celui des associés. Au sein des sociétés commerciales, il existe
deux grandes familles : les sociétés de personnes dont le caractère personnel est fort (par
exemple la société en nom collectif) et les sociétés de capitaux comme la société par
actions. La société à responsabilité limitée (SARL) et l’entreprise unipersonnelle à
responsabilité limitée (EURL) combinent des éléments des sociétés de personnes et des
sociétés de capitaux. Ces différentes formes sociétales répondent à des règles de
constitution et de fonctionnement rappelées dans le tableau suivant :
Entreprise
individuelle
Nombre
d’associés
Capital
Minimum
Responsabilité
des associés
1
Statut
Dirigeants
Entrepreneur
Commerçant
Aucun
Indéfinie
SNC
SARL / EURL
Minimum 2
Minimum 2 (SARL)
Minimum 1 (EURL)
Aucun mais apports 7 500 €
obligatoires
Solidaire
Limitée
et indéfinie
aux apports
Sauf faute de gestion
et cautions
1
ou plusieurs 1 ou plusieurs gérants
gérants
désignés désignés par une
des
par une assemblée assemblée
associés
des associés
Régime social Travailleur
des dirigeants
non salarié
Travailleur
non salarié
Imposition
du dirigeant
Impôt revenu
sur BIC
Impôt revenu
sur BIC
Même
non distribué
Même
non distribué
Travailleur
non salarié
si majoritaire
Salarié si minoritaire
ou égalitaire
Impôt revenu
sur :
- salaires
- dividendes pour
gérant salarié
Rémunérations
ou
BIC pour gérant TNS
21
SA / SAS
Minimum 7 (SA)
Minimum 1 (SAS)
37 000 €
Limitée aux apports
Sauf faute de gestion et
cautions
1 PDG nommé
par
un
conseil
d’administration
(3 à 18 membres)
désigné
par
une
assemblée
des
actionnaires
Salarié
Impôt revenu
sur :
- salaires
- dividendes pour gérant
salarié
Entreprise
individuelle
SNC
SARL / EURL
SA / SAS
Publicité
des comptes
Commissaire
aux comptes
Non
Non
Oui
Oui
Non
Non
Oui
Droits
enregistrement
sur
transmission
4,80 %
à partir de
23 000 €
4,80 %
Seulement si
2 critères :
CA > 3 100 K€
Bilan > 1 550 K€
Effectif > 50
4,80 %
1% plafonné à
3 049 €
En France, même si progressivement les entreprises individuelles laissent place
aux sociétés, plus de la moitié des créations se font toujours sous forme individuelle. Un
sondage réalisé par l’IFOP au 20 décembre 2001 montre que la forme d’entreprise la
plus souhaitée par les futurs créateurs reste à une forte majorité l’entreprise individuelle
(63 % des réponses).
Répartition des entreprises en fonction des différents statuts juridiques
Formes
Nombre au
juridiques
1/1/2002
Entreprise
1 386 282
individuelle
SARL
759 999
EURL
81 739
SA
138 202
Autres formes
129 321
Total
2 495 543
Source: fichier SIRENE, INSEE
%
Nombre au
1/1/2001
%
Nombre au
1/1/2000
%
55,6 %
1 371 426
56,4 %
1 366 289
57,3 %
30,5 %
3,3 %
5,5 %
5,2 %
100 %
722 648
72 893
145 890
117 344
2 430 201
29,7 %
3%
6%
4,9 %
100 %
695 692
65 848
151 136
105 937
2 384 902
29,2 %
2,8 %
6,3 %
4,4 %
100 %
L’EURL instituée par la loi du 11 juillet 1985 n’a pas rencontré le succès
escompté et ne représente que 3 % du nombre d’entreprises existant et seulement 4,8 %
des créations contre 52,3 % pour l’entreprise individuelle.
Nombre de créations d’entreprises en fonction des différentes formes juridiques
Statut
juridique
Total
créations en
2001
Entreprise
92 545
individuelle
EURL
8 560
SARL
63 599
SA
2 133
Autres formes
10 192
Total
177 029
Source : fichier SIRENE, INSEE
En %
Total
créations en
2000
En %
Total
créations en
1999
En %
52, 3 %
92 656
52,4 %
91 733
54,1 %
4,8 %
35,9 %
1,2 %
5,8 %
100 %
7 688
63 309
3 553
9 548
176 754
4,3 %
35,8 %
2,0 %
5,4 %
100 %
6 568
61 029
3 802
6 527
169 659
3,9 %
36,0 %
2,2 %
3,8 %
100 %
22
La question est donc de savoir si des simplifications des formes juridiques
prévues par la loi peuvent faciliter utilement la démarche des créateurs.
3. Le capital est-il le véritable gage des créanciers ?
Tout commerçant exploitant une entreprise individuelle peut créer une entreprise
sans contrainte de capital minimum. Il en va différemment pour les sociétés
commerciales pour lesquelles la loi impose un capital minimum. Cette contrainte trouve
en principe sa justification dans la nécessité de protéger les créanciers sociaux. Les
associés ne pouvant être en principe responsables des dettes sociales qu’à concurrence
de leurs apports.
Dans cette logique, le capital social est considéré comme le gage exclusif des
créanciers de la société. Cette analyse apparaît aujourd’hui largement dépassée. En
effet, les apports effectués pour constituer le capital peuvent être librement utilisés et
avoir été entièrement dépensés ou investis juste après la constitution. L’obligation d’un
capital minimum n’offre donc pas la garantie que la société dispose effectivement d’un
patrimoine au moins égal à son capital.
En réalité, c’est au regard du patrimoine de l’entreprise (ou les capitaux
propres), et non du montant du capital social, que les tiers accepteront ou non de
contracter avec la société.
4. La libération du capital est-elle un problème ?
De nombreuses activités ne nécessitent pas de mise de fonds de départ pour
démarrer. Conscient de cette situation le législateur a autorisé la possibilité de libérer le
capital minimum d’une SARL ou d’une EURL, fixé à 7 500 euros, en cinq ans pour les
apports en numéraire (soit 1 500 euros).
De plus, la loi sur les nouvelles régulations économiques (mai 2001) permet la
constitution du capital social par des apports en industrie. Jusqu’à présent, en principe
interdits dans les SARL, les apports en industrie sont désormais admis lors de la
constitution mais ne rentrent pas dans le calcul du capital social.
23
5. La responsabilité limitée est-elle le corollaire du capital social ?
En fait, il n’y a pratiquement pas de corrélation entre le niveau de capital d’une
société et sa santé financière. Le capital n’est pas une caisse. Une société fortement
capitalisée peut se retrouver en cessation de paiement dès lors qu’elle ne peut faire face à
son passif exigible avec son actif disponible. De même pour obtenir un financement
bancaire, il vaut mieux avoir un actif facilement réalisable, une capacité à dégager de la
trésorerie ou pouvoir fournir des cautions personnelles. Là encore, le montant du capital
n’a que peu de signification si la société a une trésorerie chroniquement négative.
Les questions à examiner concernent donc la forme juridique la plus appropriée
aux différents types d’entreprises en création, de même que le rôle précis du capital
social, et enfin la protection des biens personnels de l’entrepreneur et de sa situation
individuelle.
Questions
Q11 : Est-il utile de simplifier encore les formes juridiques ?
Q12 : Les modalités de la libération du capital des SARL sont-elles satisfaisantes ?
Q13 : Faut-il faire évoluer les règles concernant le capital social ?
Q14 : Faut-il protéger les biens personnels du créateur et selon quelles modalités ?
24
D) Les formalités de création
Une fois surmonté l’ensemble des problèmes liés à la décision de créer une entreprise
(obstacles
psychologiques,
définition
d’un
projet,
étude
de
marché,
exploitation
prévisionnelle, recherche de financement, choix d’un statut juridique,…), le créateur doit
effectuer les démarches administratives qui se concrétiseront par la délivrance de l’acte de
naissance officiel de son entreprise.
Depuis une vingtaine d’années, des progrès importants et continus ont été faits pour
simplifier cette étape importante de la vie de l’entreprise avec un double objectif : limiter le
nombre d’interlocuteurs et accélérer les délais. Les formalités administratives liées à la
création d’entreprise ont un quadruple objectif :
-
l’information de l’existence de l’entreprise et de son activité pour certaines
administrations : services fiscaux et services du ministère du travail ;
-
l’attribution du numéro unique d’identification, pour son usage pratique, par
l’INSEE ;
-
l’ouverture des droits – et des obligations de cotisations – au régime général de
sécurité sociale et aux régimes particuliers des non-salariés non agricoles des
dirigeants concernés ;
-
l’information des tiers, après contrôle de certains éléments publiés, par le greffier
(ou le président de chambre de métiers) par l’immatriculation au RCS (et/ou au
RM).
C’est à la fin des années 1970 qu’est née l’idée d’un « guichet unique » pour dispenser
le créateur d’avoir à traiter successivement avec de nombreuses administrations ou
organismes concernés. Ces guichets uniques ont été généralisés dans les années 1980, mais
c’est la loi du 11 février 1994, relative à l’initiative et à l’entreprise individuelle qui a institué
les Centres de Formalités des Entreprises (CFE) comme interface obligatoire entre les
entreprises déclarantes et les administrations.
Le fonctionnement des CFE est régi par les décrets du 19 juillet 1996 et du 19 mars
2002 et repose sur trois principes :
1 – Unicité de déclaration par l’emploi d’un seul formulaire (liasse CFE).
25
2 – Unicité du lieu pour l’accomplissement des déclarations.
3 – Gratuité de la formalité.
Malgré les améliorations successives apportées au dispositif CFE, plusieurs problèmes
subsistent :
1 – le principe de l’unicité de déclaration ne résout pas le problème de la complexité
du dossier et des pièces justificatives qui doivent accompagner la liasse, source de délais
supérieurs à ceux prévus par les textes.
2 – le principe de l’unité du lieu est partiellement battu en brèche par la diversité des
réseaux CFE et la « concurrence » qu’ils peuvent parfois se livrer entre eux. (CCI- CMURSSAF- Greffes des tribunaux de commerce – Services fiscaux.)
3 – le principe de gratuité est parfois contourné par des pratiques de facturation des
interventions des CFE sans qu’il soit toujours possible de justifier de la réalité de conseils
techniques ou d’un accompagnement du créateur.
Les comparaisons au sein des 15 Etats membres de l’Union européenne montrent que
la France se situe plutôt en bonne position en matière de formalités et de coûts liés aux
formalités de la création d’entreprise.
-
délais : 2 à 12 jours en France (1 jour en Grande-Bretagne, 35 en Italie)
-
coût : 240 euros pour une entreprise individuelle, 0 euro en Grande-Bretagne,
1572 euros en Espagne).
Questions
Q15 : Les formalités constituent-elles encore un problème important pour les créateurs
d’entreprise en termes de délai, de complexité et de coût ?
Q16 : La mise en œuvre de dispositifs de déclarations par Internet est-elle opportune et
réalisable dans de bonnes conditions ?
Q17 : Comment atteindre l’objectif de création d’entreprise en un jour et en un lieu ?
26
E) L’accompagnement de la création d’entreprise
Les acteurs dont le rôle est d’aider les créateurs d’entreprises à démarrer leur
projet sont nombreux et variés. On peut les répartir en quatre groupes selon leur rôle
respectif et leur nature : administrations d’Etat et collectivités locales, Chambres de
Commerce et d’Industrie et Chambre des Métiers, acteurs publics et privés du
financement, réseaux d’accompagnement et associations diverses.
Fortement centralisée dans son impulsion, l’intervention de l’Etat est mise en
œuvre sous la responsabilité du préfet, par les Directions Régionales du Commerce et de
l’Artisanat (DRCA), les Directions Régionales du Commerce Extérieur (DRCE), les
Directions Régionales de l’Industrie, de la Recherche et de l’Industrie (DRIRE) et les
Directions Départementales du Travail de l’Emploi et de la Formation Professionnelle
(DDTEFP). Par ailleurs, l’Agence Pour la Création d’Entreprise (APCE) réalise un
portail Internet qui réunit et tient à jour des informations utiles pour le créateur
d’entreprise.
Les organismes consulaires (Chambres de Commerce et d’Industrie et Chambres
des Métiers) ont un rôle essentiel d’information et de conseil vis-à-vis des créateurs
d’entreprise. En outre, ils jouent le rôle de Centre de Formalités des Entreprises (CFE),
c’est-à-dire de guichet unique pour l’acte de création stricto sensu.
Différents acteurs, publics et privés, interviennent pour aider au financement des
projets qui démarrent. L’intervention publique pour le financement de la création est
principalement réalisée par trois acteurs : l’Agence Nationale pour la Valorisation de la
Recherche (ANVAR), la Banque de Développement des PME (BDPME) et la Caisse des
Dépôts et Consignations (CDC). L’ANVAR vise à faciliter le démarrage et le
développement de projets innovants. La BDPME permet aux petits projets de se
financer à travers le Prêt à la Création d’Entreprise (PCE) et indirectement à travers la
garantie de prêt SOFARIS qu’elle propose aux autres banques. Enfin, la CDC intervient
financièrement dans de nombreux fonds de capital-risque régionaux ou nationaux.
27
Depuis quelques années, de nouveaux acteurs apparaissent pour accompagner le
créateur. Ces acteurs de l’accompagnement couvrent l’ensemble du territoire à travers
la mise en œuvre de réseaux d’accompagnement dont les principaux sont l’Association
pour le Droit à l’Initiative Economique (ADIE), le Réseau Entreprendre, Entreprendre
en France, France Initiative Réseau (FIR), le Réseau des Boutiques de Gestion (RBG),
l’Assemblée Permanente des Chambres des Métiers (APCM), l’Association des
Dirigeants de Pépinières d’Entreprises (ELAN) et France ACTIVE. La plupart de ces
réseaux se sont regroupés au sein de la Fédération des Organismes pour la Reprise et
Création d’Entreprise (FORCE) afin de développer des méthodes communes, de
partager des expériences et de faciliter l’accès à l’accompagnement pour le créateur.
Les réseaux d’accompagnement apportent une aide multiforme aux créateurs
d’entreprise : formation et conseil, aide à la formalisation des projets, assistance à la
recherche de fonds, prêts d’honneur, suivi post-création. Chacun a un public
d’entrepreneurs et de projets qui lui est propre et des méthodes qui lui sont bien
spécifiques.
Le soutien de l’Etat aux réseaux d’accompagnement est conditionné par les
engagements que ceux-ci ont pris devant le Conseil National de la Création
d’Entreprise, que préside le Secrétaire d’Etat aux PME. Il a été décidé, en 2001,
d’accélérer le processus de professionnalisation des services rendus aux porteurs de
projets de création d’entreprise par ces réseaux. La signature par les réseaux de la
charte qualité le 17 mai 2001, comportant neuf engagements précis pour un meilleur
accueil et un meilleur suivi des créateurs, est un préalable au soutien de l’Etat. Quatre
grands réseaux signataires ont ainsi bénéficié de conventions triennales (2002-2004),
pour renforcer les démarches qualité déjà en cours (ADIE, FIR, RBG, ELAN).
L’ensemble du dispositif public et privé présente une efficacité certaine.
Toutefois, la question fréquemment posée est celle du manque de lisibilité et de la
complexité du dispositif. Des améliorations doivent être recherchées en ce domaine.
28
Questions
Q18 : A qui doit être destiné l’accompagnement ? L’accompagnement doit-il plutôt concerner
la préparation avant la création ou le suivi post-création ?
Q19 : Comment rationaliser l’offre d’accompagnement ? L’Etat doit-il participer au
financement des réseaux d’accompagnement ? Selon quelles modalités et quels principes ?
Q20 : Comment l’efficacité des réseaux d’accompagnement peut-elle être mesurée ?
de quelle manière pourrait-on conditionner une intervention de l’Etat dans le financement des
réseaux d’accompagnement à leur efficacité respective ?
29
F) Régionalisation
Les lois de décentralisation de 1982 ont permis aux régions d’affirmer leur rôle
en matière de développement économique. Elles s’appuient pour remplir cette mission
sur le « comité économique et social régional » dont la consultation est obligatoire pour
l’établissement du plan régional de développement.
En ce qui concerne les interventions économiques proprement dites, les régions
jouent un rôle aux côtés de l’Etat, des communes et des départements sous forme d’aides
directes (subventions, prêts et avances, achats de bâtiments et terrains,…) et indirectes
(prises de participation, aménagement de Z.I., études et conseils, …)
Selon des statistiques récentes relatives aux interventions économiques des
collectivités locales, les communes restent les principaux intervenants avec un montant
d’aide de 900 millions d’euros en 2000, contre 785 millions d’euros pour les régions et
583 millions d’euros pour les départements.
En pratique, on constate depuis quelques années un renforcement du rôle des
régions dans le dispositif d’aides locales aux entreprises. Ces interventions représentent
7% des dépenses réelles des régions en 2000, alors que cette part est limitée à moins de
2% dans le budget des communes et des départements. Ce rôle s’explique par la
compétence générale des régions en matière de développement économique (articles L
1511-1 à 5 et R 1511-1 à 29 du Code général des collectivités locales). Les régions sont
également au centre du dispositif technique des politiques cofinancées avec l’Etat,
l’Union européenne et les autres collectivités locales .
Partant du constat du dynamisme des régions dans ce domaine, il est légitime de
s’interroger sur les meilleures solutions pour développer cette compétence en direction
de la création d’entreprise.
Une difficulté majeure demeure. Depuis 1982, on est passé progressivement d’un
principe de décentralisation par blocs de compétence à un système de partenariat et de
contractualisation. En outre, aux trois niveaux initiaux se sont ajoutées de nouvelles
30
structures
locales
(syndicats,
« pays »
et
différentes
formes
de
coopération
intercommunale).
Cette diversité peut être source d’enrichissement si elle correspond à un besoin,
mais elle peut aussi générer des surcoûts et un manque de lisibilité pour les entreprises.
Questions
Q22 : Comment développer le rôle des collectivités territoriales en faveur de la création
d’entreprise ?
Q23 : Comment garantir la lisibilité des structures et l’absence de doubles emplois ?
31
G) Développer l’esprit d’entreprise
La création d’entreprise est un atout précieux pour l’avenir de notre économie.
Elle dépend largement de l’environnement psychologique d’ensemble. Pourtant, trop
souvent, notre société décourage les créateurs. Trébucher et échouer une première fois
ne sont rien si l’on se relève ensuite pour repartir : nous devons favoriser la deuxième,
la troisième chance. Entreprendre, oser, risquer sont essentiels : nous devons encourager
ceux qui se lancent.
L’idée qu’il est plus facile d’aller créer et réussir à l’étranger est aujourd’hui
trop répandue. Il faut rompre avec cette réalité tout autant qu’avec cette idée : la France
doit devenir le pays d’Europe le plus favorable à la création d’entreprise.
1. L’enjeu
Les mesures en cours de préparation viseront à simplifier les formalités
administratives, améliorer l’accès au financement, assouplir le passage entre le statut de
salarié et celui de créateur, alléger les contraintes sociales et fiscales, et faciliter la
reprise d’entreprise.
Toutefois, au-delà de ces réformes législatives indispensables, la bataille de la
création d’entreprise ne sera véritablement gagnée que grâce à un changement profond
des mentalités.
Pour retrouver un souffle nouveau, il est nécessaire de créer un climat nouveau.
2. La mobilisation des esprits doit sans doute s’intéresser à toute la population
Lancer des actions de long terme pour faire évoluer les mentalités nécessite un
engagement et un appel à la mobilisation de tous ceux qui peuvent avoir une influence
et agir pour promouvoir l’esprit d’entreprise comme valeur. Positive pour la collectivité,
la création l’est aussi pour l’individu : elle contribue à l’épanouissement personnel.
32
Pour donner à tous l’envie d’entreprendre, de diffuser et de faire partager
l’esprit créateur, l’action doit s’organiser en direction de tous les publics : jeunes en
situation difficile, élèves scolarisés dans les filières générales ou professionnelles, acteurs
du système éducatif, salariés des grandes entreprises et petites entreprises, familles.
3. Comment faire la promotion de l’esprit d’entreprise au sein du système
éducatif ?
Il existe déjà en matière de création d’entreprise de nombreuses actions sur le
terrain. Mais, elles sont souvent méconnues car éparpillées. Dans le domaine éducatif,
plusieurs pistes semblent devoir être explorées :
-
Recenser
les
bonnes
pratiques
et
les
initiatives
pédagogiques
entrepreneuriales à tous les niveaux du système éducatif et en diffuser la
connaissance. A cet effet, la mission de l’Observatoire des pratiques
pédagogiques en entrepreneuriat créé par le Ministère de l’Economie et des
Finances et le Ministère de l’Education nationale et de la Recherche, doit sans
doute être redéfinie et amplifiée.
-
Assurer
une
promotion
des
meilleures
pratiques
pédagogiques
entrepreneuriales.
-
Susciter chez les jeunes une ouverture à la création. Le public scolaire reste
peu conscient de la signification et des compétences nécessaires à la création
d’entreprise. L’utilisation de dispositifs et supports pédagogiques existants
comme l’itinéraire de découverte au collège, les projets pluridisciplinaires à
caractère professionnel (PPCP) pour les lycées professionnels et les travaux
personnels encadrés (TPE) pour les lycées technologiques ou généraux peut
être envisagée.
-
Développer fortement la mobilisation des acteurs éducatifs et l’implication des
enseignants en faveur de la création d’entreprise. Ceci passe sans doute par
33
l’existence d’un réseau de personnes compétentes sur ce sujet au sein des
rectorats et des établissements.
-
Sensibiliser les enseignants au moment de leur formation à l’Institut
Universitaire de Formation des Maîtres (IUFM). On peut aujourd’hui
s’interroger sur le faible nombre d’enseignants ayant eu des contacts directs
avec le monde de l’entreprise notamment grâce à des stages.
4. Comment revaloriser l’image du créateur d’entreprise ?
Tout d’abord, pour donner envie de suivre son exemple, il convient de modifier le
regard que porte le grand public sur celui qui entreprend. C’est la condition de
déclenchement des vocations.
L’image du créateur et de l’entrepreneur a clairement souffert ces derniers temps
d’une surmédiatisation des cas d’échec, des difficultés de certaines grandes entreprises
comme des jeunes pousses de la « nouvelle économie ».
Des initiatives peuvent être prises, en dehors même du milieu éducatif déjà
évoqué, dans plusieurs directions :
-
ponctuellement, en lançant des campagnes nationales de sensibilisation et en
créant des forums ciblés par exemple sur l’insertion par la création de microentreprises.
-
de façon plus permanente en renforçant les liens entre l’entreprise et les
citoyens, qu’il s’agisse de participation à des actions collectives, de
développement du mécénat ou de journées portes-ouvertes.
34
Questions
Q24 : Quelles sont les actions les plus appropriées pour développer la connaissance de
l’entreprise et le goût d’entreprendre dans le monde éducatif ?
Q25 : Comment faire percevoir concrètement des exemples de réussite entrepreneuriale ?
Q26 : Comment intéresser les jeunes des milieux défavorisés à la création d’entreprise et
favoriser ainsi leur réussite sociale ?
Q27 : Comment développer la participation de l’entreprise à la vie de la cité et les échanges
avec cette dernière ?
35

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