le calvaire de pontchâteau

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le calvaire de pontchâteau
LE CALVAIRE
DE
PONTCHÂTEAU
AU CŒUR DE L’HISTOIRE MONTFORTAINE
1710 – 2010
Jean-Louis Courchesne, s.m.m.
En majuscules, les principales étapes
de la vie de saint Louis-Marie de Montfort
Le diocèse de Nantes
Couverture : Le Père de Montfort quittant Pontchâteau, aquarelle de Jacques Houle, c.s.v.
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Chapitre 1
« FAISONS UN CALVAIRE ICI… »
L’histoire que nous allons raconter se passe en Bretagne.
Elle est celle de l’audace apostolique d’un saint : Louis-Marie Grignion de Montfort. Elle
est aussi celle d’un peuple de croyants, uni et déterminé, qui a porté un projet durant
des générations et n’a laissé ni le temps, ni les contretemps, ni les forces occultes le
décourager.
Nous sommes en 1709. Saint Louis-Marie de Montfort et son équipe sont dans le
diocèse de Nantes. Ils prêchent dans les paroisses de la Grande Brière, région voisine
de Saint-Nazaire, à quelques kilomètres des côtes de l’Atlantique.
À cette époque, les plantations de croix étaient chose courante. La plupart du temps,
elles marquaient la fin d’une mission paroissiale. Saint Louis-Marie a conservé la
tradition. Mais il voyait plus grand.
Il était évidemment inspiré par l’héritage religieux de sa Bretagne natale. Il gardait aussi
le souvenir du Calvaire du Mont-Valérien, à Paris, où, quelques années plus tôt, son
seul exemple avait réussi à recréer l’unité chez les ermites qui y vivaient.
Il rêvait d’ériger un Calvaire quand les conditions le permettraient.
En 1707, le duc de la Trémoille avait rapidement mis fin à l'érection d'un calvaire dans
sa ville natale de Montfort-la-Cane. Le missionnaire, qui avait fait sculpter un Christ à StBrieuc, le conservait pour la prochaine occasion.
À Pontchâteau, les conditions semblent réunies : des terres incultes, que personne ne
convoite; une élévation dominant toute la région; une population à la foi profonde et
ardente, qui s’impliquera dans le projet.
Quand le Père de Montfort parle d’ériger un Calvaire sur ce qu’on appelait la « lande de
la Madeleine », les gens font le lien avec un événement mystérieux qu’ils interprètent
maintenant comme un signe annonciateur. Les anciens racontaient qu’une quarantaine
d'années plus tôt, vers 1673, année de la naissance de saint Louis-Marie, en plein midi,
au lieu où se trouve maintenant le Calvaire, ils avaient vu des croix et des étendards
descendre du ciel. Un roulement de tonnerre avait effrayé les animaux. Une harmonie
céleste s'était ensuite fait entendre. Le tout avait duré une bonne heure. Louis-Marie
voyait dans ce récit une invitation à réaliser son projet.
On raconte aussi que les travaux auraient commencé à Ste-Reine, le village voisin.
Mais le Père de Montfort, voyant deux colombes transporter la terre sur le site du
Calvaire actuel, y aurait vu un autre signe.
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Un menhir isolé, dressé tout près, témoin d’un antique culte païen, constituait une
invitation supplémentaire à y ériger un haut-lieu du culte chrétien.
Quoi qu’il en soit, lors de la mission de Pontchâteau, en mai 1709, il annonce son
intention de construire un calvaire grandiose : c’est avec enthousiasme que le clergé et
la population accueillent son projet.
Expert quand il s’agit de rassembler les foules, il compose le cantique qui unira les voix
et les cœurs et rythmera la cadence des travaux :
Faisons un calvaire ici,
Faisons un calvaire.
Les travaux commencent. C’est comme une nouvelle croisade. Les croyants de
l'époque déploraient que les Lieux Saints soient toujours entre les mains des infidèles. À
ces gens qui rêvent de libérer la Terre Sainte, le Père de Montfort va proposer un projet
réalisable : si l’on ne peut libérer la Palestine, c'est la terre-sainte du cœur de chacun
qui sera libérée. Et, comme mémorial, on va ériger un Calvaire chez nous.
C’est ce qu’il fait chanter :
Hélas, le Turc retient le saint Calvaire
Où Jésus-Christ est mort.
Il faut, chrétiens, chez nous-mêmes le faire.
Tâchons d'avoir cette sainte montagne,
Par un divin transport,
Dans notre cœur et dans notre campagne.
Oh! qu'en ce lieu l'on verra de merveilles!
Que de conversions,
De guérisons, de grâces sans pareilles.
Travaillons tous à ce divin ouvrage,
Dieu nous bénira tous,
Grands et petits, de tout sexe et de tout âge,
Faisons un calvaire à Dieu,
Faisons un calvaire.
(Cantique 164)
De près et de loin, à mesure que l’invitation est entendue, on répond à l'appel. Hommes,
femmes, jeunes et vieux, pèlerins « flamands et espagnols » en route vers un
sanctuaire, gens de diverses langues mais de même foi, « même des prêtres »... On
travaille dans le silence et le jeûne, souvent au rythme du chapelet... Le salaire, c’est de
vénérer le Crucifix qui sera planté sur le Calvaire... C’est une véritable éducation à la foi
communautaire. On compte jusqu'à 500 travailleurs à la fois. Chacun apporte le peu
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qu'il mangera au cours de la journée. Bien des gens donnent de leur nécessaire pour
loger et nourrir les travailleurs venus de loin.
Le Père de Montfort nourrit « à la Providence » les mendiants qui viennent travailler. Il
quête leur nourriture...
Durant les travaux, il loge dans une ferme appelée « La Viauderie ». Au temps du
prophète Élie, la veuve de Sarepta ne manqua jamais de farine ni d’huile (1 Rois 17, 816). C’est maintenant Jeanne Guigan, la maîtresse des lieux, qui trouve toujours de quoi
nourrir les ouvriers affamés qui se présentent chez elle.
Les plans du Calvaire sont imposants. Il sera composé de trois cercles concentriques.
Au centre, la colline, où se trouveront les trois croix et les statues de la Vierge Marie, de
Jean et de Marie-Madeleine.
Le tout sera entouré de douves. Sur le cercle extérieur, ce sera un rosaire dans la
nature : une série de 150 sapins, entrecoupée de 15 cyprès... On prévoit quelques
chapelles pour rappeler les mystères de Jésus et de Marie. Et, dans l'avenir, une
miniature de l'histoire de la Passion...
C’est un projet génial et incarné, qui prend en compte toutes les données du lieu, autant
l'environnement naturel que l'accueil et la foi des gens.
Toute la doctrine chrétienne et la spiritualité montfortaine y sont illustrées.
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Chapitre 2
L’HEURE DES TÉNÈBRES
En août 1710, les travaux sont pratiquement terminés. Selon les témoins, c'est un tour
de force.
Malgré certaines oppositions, Mgr de Bauveau, évêque de Nantes, autorise la
bénédiction solennelle. Elle aura lieu le 14 septembre, jour de l'Exaltation de la Sainte
Croix.
Plus de 20,000 personnes affluent de partout. Le père de Louis-Marie et quelques
membres de sa famille sont du nombre.
Louis-Marie peut préparer la fête en faisant chanter son Cantique nouveau en l’honneur
du Calvaire :
Chers amis, tressaillons d'allégresse,
Nous avons le Calvaire chez nous;
Courons-y, la charité nous presse
D'aller voir Jésus-Christ mort pour nous.
(Cantique 137)
Mais, en fin d’après-midi du 13 septembre, un messager arrive de Nantes. La nouvelle
qu’il apporte met brusquement fin aux réjouissances. Mgr de Bauveau interdit de bénir
le Calvaire! – Surprise et mystère!
Le Père de Montfort part aussitôt pour Nantes, à pied selon son habitude, pour chercher
la lumière.
Le 14 septembre, il est absent. On fait tout ce qui était prévu, sauf la bénédiction.
Le lendemain matin, il est de retour et confirme la décision de l'évêque.
Que s'est-il passé? – La décision a été prise par l'administration civile, au plus haut
niveau. Pendant que la foi d’un peuple édifiait le Calvaire, un fonctionnaire blessé dans
son orgueil et quelques envieux préparaient déjà, dans l’ombre, sa démolition.
L’année précédente, le Père de Montfort prêchait une mission à Campbon, tout près de
Pontchâteau.
En faisant nettoyer l’église, il avait fait disparaître les armes du duc de Coislin sur les
murs. M. Guischard de la Chauvelière, sénéchal du duc, avait alors voulu poursuivre le
Père de Montfort en justice, mais le duc, malade, avait laissé tomber l'affaire, avant de
mourir, peu après. Son frère Henri, évêque de Metz, héritier du titre, avait même
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approuvé la construction du Calvaire sur ses terres, en réponse à la demande que
Louis-Marie lui avait adressée par l'entremise de son ami, Mgr de Saint-Vallier.
Mais le sénéchal, lui, ne pardonne pas! Il s'y prend donc autrement. Il s'adresse au
maréchal de Châteaurenault, commandant de Haute-Bretagne et invoque l'argument de
la sécurité de l'état. Que fera-t-on le jour où les anglais ou des brigands occuperont ce
lieu qui domine la région? Argument démesuré et ridicule qui couvre ses vrais motifs!
Le commandant fait un rapport au marquis de Torcy, ministre des affaires étrangères.
Le ministre charge M. Ferrand, intendant de Bretagne, de faire enquête. Pour être bien
vu, M. Ferrand présente un rapport qui va dans la ligne qu'on lui suggère.
Bien plus, frustré de ne pas avoir été mis au courant plus tôt, il ira jusqu'à l'injustice et la
mesquinerie, comme en témoigne sa correspondance. L'affaire retourne à Paris : Louis
XIV ordonne la démolition.
Mgr de Bauveau apprend la nouvelle peu avant le 14 septembre. Il n’ose pas protester,
de peur de perdre son crédit à la cour! Il interdit de bénir le Calvaire!
Le 20 septembre, sans doute honteux de sa faiblesse, il suggère timidement au P. Le
Tellier, confesseur du roi : « Il serait bon de conserver une croix pour contenter le
peuple... et de compléter la chapelle... »
Si l’évêque s’était opposé à la décision royale de démolir le Calvaire, est-ce que cela
aurait changé quelque chose? Personne ne le saura jamais. Le fait est qu’il n’a pas osé!
Le Calvaire sera rasé! Normalement, cette histoire devrait se terminer ici. Mais on en
veut à l’homme qui a su conquérir le cœur de toute une population et la mobiliser.
Les pires ennemis de saint Louis-Marie ne sont pas les jansénistes, mais l’envie et la
jalousie. Mgr de Bauveau n’ose pas les affronter.
Du Calvaire, il peut dire que l’autorité supérieure a décidé.
Mais, lui, que fait-il du prêtre qu’il a le pouvoir et le devoir de traiter avec justice? Sa
peur le met à genoux devant ceux qui veulent neutraliser Montfort. Il a dit et il dira qu’il
n’a rien à lui reprocher, bien au contraire! Cela ne l’empêche pas de le sacrifier à
outrance en allant jusqu’à lui interdire pratiquement tout ministère.
Trois ans après les événements, l’évêque écrira dans une attestation officielle : « M.
Grignion, prêtre de bonne vie et de mœurs, d'une saine doctrine, d'une piété et d'une
modestie rare... a exercé, avec notre permission, dans plusieurs paroisses de notre
diocèse, la fonction d'annoncer l'Évangile, d'une manière pieuse et digne de louange. »
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Chapitre 3
« TÂCHONS D'AVOIR CETTE SAINTE MONTAGNE
DANS NOTRE CŒUR… »
Le Calvaire sera démoli! Sans la grâce de Dieu, un homme l’aurait été aussi!
Après son retour de Nantes, le 15 septembre, le Père de Montfort a repris ses activités
régulières. Le dimanche suivant, il ouvre une mission à St-Molf. Dès les premiers jours,
M. Olivier, un membre de son équipe qui ne l’accompagne pas pour cette mission, lui
apporte la lettre de Mgr de Bauveau lui interdisant de prêcher et de confesser dans son
diocèse. M. Olivier est désigné pour terminer la mission.
M. Olivier rapporte que Montfort pleura un instant, mais ne fut « ni troublé, ni aigri. »
Montfort court chez l’évêque, qui maintient sa décision. C’est à ce moment qu’il lui
apprend que le Calvaire sera démoli. À voir sa réaction, il confie à M. Barrin, son vicaire
général, un fidèle ami de Montfort : « M. Grignion est un grand saint, ou le plus insigne
des hypocrites. »
M. Ferrand écrit : « Grignion en mourra de douleur. » Il ne peut imaginer que la croix
puisse être une expérience de croissance.
Louis-Marie se garde bien de jouer au martyr. Il part faire une retraite chez les Jésuites
de Nantes. Le P. de Préfontaine témoigne : « Je le considérais comme un homme de
bien... mais son calme, son égalité, sa tranquillité... me le firent regarder comme un
saint. »
M. des Bastières, un proche collaborateur, court consoler son ami, mais c'est lui qui le
réconforte : « Que son saint nom soit béni! »
Louis-Marie vit profondément le cantique qu’il fait chanter aux foules :
La croix est un mystère
Très profond ici-bas,
Sans beaucoup de lumière
On ne le connaît pas.
Il faut pour le comprendre
Un esprit relevé,
Il faut pourtant l'entendre
Afin d'être sauvé.
(Cantique 19)
Il éprouve la joie de ressembler à son Maître jusque dans sa souffrance.
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Comme Jésus, il ne se contente pas de supporter la croix : il l’accueille, parce qu’elle
fait partie de sa vie et de sa mission : « Ma vie, personne ne me la prend, c’est de moimême que je la donne! » (Jean 10, 18).
Comme Jésus, il nous apprend à aimer la croix :
C’est un amour tout spirituel qui naît de la connaissance du bonheur qu'on a de
souffrir pour Dieu... un amour qui réjouit intérieurement et fortifie…
On goûte, par la vue de la pure foi, la croix qu'on porte, et on dit, avec JésusChrist : Père, que ta volonté soit faite et non la mienne!
(Lettre aux Amis de la Croix, 52, 53)
Tâchons d'avoir cette sainte montagne
Dans notre cœur et dans notre campagne.
Le missionnaire et le peuple qui l’a soutenu ont décidé de planter la croix dans leur
cœur. C’était le premier but de son projet. Il est atteint.
Très rarement a-t-on vu une si grande identification entre un homme, un lieu, et une
population. Louis-Marie laisse tout en attente pour la reconstruction quand le temps sera
venu. L’homme s’est tu. Dieu parlera.
Il reste à Nantes jusqu’au printemps 1711. L’hiver est particulièrement difficile. La Loire
déborde. La région est dévastée. Des milliers de gens doivent être secourus. Montfort
prend la direction des opérations de sauvetage. Cette détresse a été pour lui un appel :
« La divine Croix me cache et m'interdit la parole » (Lettre aux Amis de la Croix, 1). « Je
ne peux plus proclamer l’amour de Dieu par la bouche. Eh bien! ce sont mes bras et
mes mains qui vont le faire. » On ne fait pas taire un vrai missionnaire!
Puis, pus libre et plus fort que jamais, « exaltant la croix au fond de son cœur, plus haut
encore que sur la colline de la Madeleine, Montfort ne songea plus qu'à continuer le
travail des missions » (Louis Le Crom).
La ressemblance est frappante :
- La raison d’état…
- Un homme qui a peur de ne plus être considéré comme l’ami de César…
- Une victime innocente…
- Un lieu appelé « Calvaire »…
Et, au jour de Dieu, ce sera, encore une fois, la victoire de la vie!
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Crucifix sculpté par
le Père de Montfort
Un calvaire breton
Le Père de Montfort
à Pontchâteau
(Gravure ancienne)
Le Père de Montfort
(Gravure ancienne)
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Chapitre 4
DE LA MORT À LA VIE
Après l’échec de 1710, le Calvaire de Pontchâteau semblait tout au plus appelé à faire
partie de la légende régionale. Pourtant, trois siècles plus tard, il figure dans tous les
guides touristiques de la Bretagne. Il est l’un des grands monuments de son riche
patrimoine religieux.
Son histoire est à l’image du grand mystère qu’il veut illustrer : un passage de la mort à
la vie.
LA DÉMOLITION
Le 7 septembre 1710, M. de Torcy, ministre des affaires étrangères, communique l'ordre
du roi à M. de Châteaurenault. Le 13, Mgr de Bauveau interdit de bénir le Calvaire. Le
18, M. Ferrand charge M. Mellier de voir à la démolition. Le ton de sa lettre sort du
cadre des communications administratives, c’est le moins qu’on puisse dire. Il y écrit : «
Grignion en mourra de douleur… grand fou!... Sans savoir ce que deviendra M. Barrin...
Qu'il ne reste RIEN... Si on laisse quelque muraille, ce sera pour enfermer Grignion. »
Le Chanoine Barrin et d’autres amis de Montfort protestent. M. Ferrand écrit : « Tous
ces dévots ont perdu l'esprit... J'ai bien perdu de ne pas m'être trouvé à Nantes lorsque
la députation de Grignion y est arrivée. J'en aurai bien ri. Pour réponse : tout sera
abattu. »
Chargé de la démolition, M. de Lannion (lieutenant général de Nantes), ami des Barrin,
se désiste. C'est le commandant de la milice de Pontchâteau, M. d'Espinose, qui est
désigné. Il conscrit de 400 à 500 hommes. Pendant deux jours, à genoux, ils refusent de
toucher au Calvaire qu'ils ont construit. Lorsque les soldats menacent de scier la croix,
ils acceptent enfin.
Le commandant raconte : « La vraie descente de croix à Jérusalem par Nicodème et
Joseph d'Arimathie ne dut pas être plus émouvante. »
Trois mois plus tard, les travaux ne sont que partiellement complétés. Les hommes qui
avaient des bras de fer pour construire ont maintenant des bras de laine pour démolir...
On en reste là. Officiellement, l'ordre du roi a été respecté. À la fin de 1710, le Calvaire
n’est plus qu’un chantier de démolition abandonné.
Les statues sont entreposées chez M. de la Carrière, prêtre à Pontchâteau. En 1714,
Montfort les fera transporter à l'hôpital des Incurables de Nantes. « Ce ne sera que pour
les retourner avec plus de gloire au Calvaire », écrit-il. Ce qui se réalisera en 1748.
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LA RECONSTRUCTION
Le Père de Montfort meurt en 1716. Mais sa mémoire et son projet demeurent bien
vivants.
Au cours des deux siècles suivants, les petits-enfants et arrière-petits-enfants des
ouvriers de la première heure, probablement au-delà de ses rêves, rebâtiront son
Calvaire.
La reconstruction se fera en trois étapes.
En 1747, les montfortains prêchent une mission à Pontchâteau. Le P. René Mulot,
successeur de Montfort, désigne le P. Audubon pour la reconstruction du Calvaire et la
restauration de la chapelle, dont M. de Torcy avait finalement autorisé la construction.
L'évêque est d'accord. Mais les autorités militaires jugent que c'est contraire à la
sécurité publique. Le P. Audubon suspend les travaux et donne une bénédiction simple.
Durant la révolution, en 1793, ceux qu’on appelait les « patriotes » saccagent la
chapelle et tentent de l'incendier.
En 1821. M. François Gouray, curé de Pontchâteau, reprend les travaux. L'amiral
Halgan s'assure de l'accord du pouvoir. La population s’implique activement. Plus de
10,000 personnes participent à la célébration que préside l'évêque de Nantes.
En 1865, les montfortains s’installent sur les lieux et en deviennent les gardiens. En
1891, le P. Jacques Barré entreprend l’aménagement de l’ensemble actuel. Durant des
années, des foules de travailleurs vont se succéder : plus de 40,000 pour la seule
année 1899. On y construit des monuments qui rappellent la Terre Sainte. On y érige un
imposant chemin de croix. Toute l’histoire du salut y est illustrée. On plante des arbres
pour créer un environnement paisible, favorable à la méditation. La colline est
surélevée. Le lieu devient vraiment la terre-sainte que Montfort désirait.
On parle de faits merveilleux, de miracles opérés au contact de la terre rapportée du
Calvaire.
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Conclusion
LE COURONNEMENT D’UN SAINT
Que de gens y viendront en voyage,
que de processions...
Montfort aurait-il pu prévoir que le plus grand rassemblement aurait lieu à l’occasion de
sa propre canonisation, en 1947? Plus de 150,000 pèlerins participent alors aux
célébrations, présidées par Mgr Angelo Roncalli, le futur Jean XXIII.
Louis-Marie n’a sans doute jamais revu ce lieu.
Mais, depuis trois siècles, il y prêche toujours.
S’il s’était opposé à l’autorité, on aurait eu les arguments pour démolir l’homme avec
son œuvre.
Plus que la croix de son Calvaire, la croix qu’on a mise sur ses épaules a fait connaître
son œuvre et son message bien au-delà des frontières de son pays.
La foi de la Vierge Marie a été le moule dans lequel Montfort a grandi. En partageant
avec elle la croix de son Fils, il s’est avancé à pas de géant sur le chemin de la sainteté
(cf. Secret de Marie 41).
Après trois siècles,
le pèlerin qui s’arrête sur cette terre bénie,
y entend toujours l’éloquent silence
d’un homme qui, dans l’épreuve,
a décidé de se taire
et de laisser à Dieu
le soin de réaliser son œuvre.
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Le Christ que le Père de Montfort a fait sculpter.
Il se trouve maintenant dans la chapelle au pied du Calvaire. Les cœurs qu’on a peints sur la croix
rappellent un thème cher à Montfort : l’offrande du cœur.
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L’histoire du Calvaire de Pontchâteau est celle de l’audace apostolique d’un saint : Louis-Marie Grignion
de Montfort. Elle est aussi celle d’un peuple de croyants, uni et déterminé, qui a porté un projet durant des
générations et n’a laissé ni le temps, ni les contretemps, ni les forces occultes le décourager. Très
rarement a-t-on vu une si grande identification entre un homme, un lieu, et une population.
Plus qu’une belle histoire, c’est une interpellation sur notre route à la suite de Jésus.
Jean-Louis Courchesne, s.m.m.
Juin 2010
Maison Marie-Reine-des-Cœurs
Missionnaires Montfortains
1400, rue Montplaisir
Drummondville, QC
J2B 7T5
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