Évaluez votre NIVEAU DE STRESS à l`aide du millepattes

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Évaluez votre NIVEAU DE STRESS à l`aide du millepattes
TRAVAIL ET SANTÉ
DÉCEMBRE 2006
VOL.22 No 4
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SANTÉ MENTALE
Jacques Lafleur
Évaluez votre
NIVEAU DE STRESS
à l’aide du millepattes
Prendre conscience de nos symptômes de stress est un premier pas
pour nous aider à éviter la tension excessive qui mène à la maladie. Le
test du millepattes que nous vous proposons vous permettra de faire
une première évaluation de votre niveau de stress actuel
Par Jacques Lafleur1
L
e stress se révèle par des symptômes corporels et psychologiques (1). Lorsque la
situation qui les engendre ne se résout pas
ou se détériore, ces symptômes finissent par
constituer à moyenne échéance une menace
sérieuse à la santé, voire à la vie. En pratique,
cela signifie que malgré de grands efforts pour
maintenir « sa tête hors de l’eau », l’individu
baigne dans un contexte pathogène tant dans
sa vie personnelle que dans son travail.
Les maladies résultant du stress croissent
habituellement en dents de scie sur une période
qui varie de quelques mois à quelques années.
Les symptômes augmentent en nombre et en
intensité jusqu’au moment où la vie devient un
enfer. Des malaises ou maladies sans gravité et
un relatif inconfort psychologique marquent le
début de cette période. Puis, les difficultés psychologiques s’accroissent tandis que les symptômes physiques se diversifient et se font plus
intenses et tenaces. Si des mesures radicales ne
sont pas alors prises pour corriger la situation,
une maladie invalidante se prépare. Elle sera le
plus souvent précédée de l’arrivée de quelques
1. PSYCHOLOGUE ET FORMATEUR.
symptômes plus patents, que l’on peut dès
lors considérer comme des avertissements sérieux : un sentiment persistant d’être au bout
du rouleau, une longue période d’insomnie,
de fréquentes pertes de contrôle émotif, de
graves problèmes digestifs, cardiovasculaires ou
autres, constituent des exemples de ces signes
précurseurs d’une invalidité imminente.
La prise de conscience de ces symptômes de
stress est donc d’un précieux secours à qui veut
éviter la tension excessive qui mène à la maladie. C’est une première étape qui, le cas échéant, indique qu’il est nécessaire de réduire sa
tension corporelle et psychologique. De plus,
elle pourrait signifier qu’il est grand temps de
s’attaquer aux causes de cette tension.
LE MILLEPATTES
Le tableau 1 contient un test, celui du millepattes. Il permet de faire une première évaluation de son niveau de stress. L’idée de base est
d’additionner des points correspondant aux
symptômes physiques et psychologiques ressentis par le sujet et de les soustraire du nombre 1000. Le nombre de pattes restantes constitue un indicateur de la tension corporelle et
psychologique. Selon les résultats, il s’avérera
utile, voire indispensable, de pousser plus loin
le diagnostic pour mieux faire les corrections
nécessaires afin d’éviter l’invalidité ou, à tout le
moins, pour retrouver une meilleure santé.
INTERPRÉTATION DES RÉSULTATS
800 pattes et plus
Ça va plutôt bien. Continuez de garder la
santé et le moral.
Entre 600 et 800 pattes
Ça pourrait aller mieux. Il faudra s’accorder
du repos quotidien et hebdomadaire, prendre du temps pour se ressourcer et s’occuper
rapidement de remédier aux symptômes les
plus dérangeants. Prendre du recul par rapport à ses difficultés personnelles, familiales ou
professionnelles, puis s’occuper activement de
redresser la situation. Eviter de laisser ces difficultés perdurer ou prendre le dessus.
Entre 400 et 600 pattes
Situation critique. Il est temps de mettre sa
santé physique et mentale en tête de liste de ses
priorités durant le prochain mois. S’accorder
beaucoup de repos et s’enlever immédiatement
du poids de sur le dos, du moins temporairement. Consacrer du temps à des choses intéressantes, agréables ou bénéfiques, prendre un
peu congé de la tyrannie des obligations. Revenir à ses valeurs, à ce qui est important dans la
vie, ne pas laisser les situations problématiques
prendre toute la place. Consacrer de l’énergie à
les corriger ou à changer d’attitude envers elles
de façon à retrouver une certaine sérénité.
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VOL.22 No 4
SANTÉ MENTALE
Il reste entre 200 et 400 pattes
Situation plus que critique. Il est probable
que certaines journées soient extrêmement
pénibles, même si toutes ne le sont pas. La
joie de vivre a disparu et les restes d’énergie
s’effritent. Recourir à de l’aide médicale et
psychologique. Il faut immédiatement réduire
l’investissement d’énergie : un très long arrêt
pour maladie est imminent.
Il reste moins de 200 pattes
Le millepattes n’en peut plus. Le stress l’a
rendu malade et il a besoin d’un cocon pour
guérir. Lâcher prise immédiatement, utiliser
le peu d’énergie disponible pour guérir et
demander de l’aide et du soutien.
QUAND LA SITUATION
SE FAIT CRITIQUE
La plupart des gens que le stress a fini par
rendre malades ont été longtemps obsédés
par le désir de reprendre le dessus sur les
sources extérieures de leur tension : ils voulaient avant tout « être à la hauteur », après quoi
ils s’accorderaient finalement le repos mérité.
Or, un mille pattes qui se retrouve avec moins
de 500 pattes a déjà montré qu’il n’arrivait pas
à faire tout ce qu’il croyait devoir faire, alors
même que sa santé et son énergie se dégradent
semaine après semaine, ce qui fait qu’il perd
de nouvelles pattes chaque jour. À ce stade,
il est essentiel que la personne comprenne et
accepte qu’elle ne parviendra pas à accomplir
avec le peu d’énergie qui lui reste ce qu’elle n’a
pas pu réussir à produire quand elle en avait
davantage. Le remède n’est plus dans le réussir
Tableau 1. Le millepattes (2).
Dans la liste qui suit, noter 15 points pour les symptômes ressentis très souvent ou très intensément et 5 points pour les symptômes ressentis relativement
souvent ou moyennement fort, et ce, depuis au moins un mois.
SYMPTÔMES PHYSIQUES
Tensions musculaires
____ Tensions dans le front ou la
mâchoire
____ Raideurs dans la nuque ou le cou
____ Poings serrés
____ Point entre les omoplates
____ Besoin de bouger constamment
____ Pression sur les épaules
____ Maux de tête
____ Tendance à sursauter
____ Tremblements
____ Difficulté à se détendre
Autres symptômes physiques
____ Fatigue
____ Yeux cernés
____ Bouffées de chaleur (ou des frissons)
____ Étourdissements
____ Problèmes digestifs
____ Palpitations cardiaques
____ Mains ou pieds froids ou moites
____ Transpiration
____ Souffle court
____ Brûlures d’estomac
____ Changement récent dans
l’appétit
____ Boule dans l’estomac ou dans
la gorge
____ Insomnie
____ Diarrhée
____ Constipation
____ Nausées
____ Hypertension artérielle
____ Maux de dos
____ Autres problèmes physiques
______________________________
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SYMPTÔMES PSYCHOLOGIQUES
Symptômes émotionnels
____ Inquiétude
____ Panique
____ Impatience
____ Nerfs à fleur de peau
____ Frustration
____ Changements rapides d’humeur
____ Colères démesurées
____ Mauvaise humeur
____ Perte de la joie de vivre
____ Pertes de contrôle émotif
SYMPTÔMES PERCEPTUELS
____ Perte du sens de l’humour
____ Perte de capacité à avoir du
plaisir
____ Attitude négative
____ Perte de confiance en soi
____ Dépréciation de soi
____ Tendance à être sur la défensive
____ Sentiment d’être pressé ou
débordé
____ Tendance à dramatiser
____ Préoccupations constantes
____ Tendance à tout voir comme une
montagne
SYMPTÔMES MOTIVATIONNELS
____ Pensée remplie de
« il faut »
1. Total A - Additionner tous les 5 points : 5 points x ____ fois = ____
2. Total B - Additionner tous les 15 points : 15 points x ____ fois = ____
3. Additionner : Total A + Total B = ______
____ Perte d’intérêt pour plein de
choses
____ Difficulté à se mettre à la tâche
____ Perte du désir d’apprendre
____ Perte du goût de faire les choses
____ Ne pas savoir ce qu’on veut
____ Perte d’enthousiasme
____ Découragement
____ Se contenter de faire ce qui est
exigé
____ Procrastination
SYMPTÔMES COMPORTEMENTAUX
____ Comportements brusques
____ gestes malhabiles
____ Saut de repas
____ Tics nerveux
____ Course continuelle
____ Beaucoup d’efforts, peu de
résultats
____ Préoccupation constante de
l’heure
____ Fuite : alcool, drogue, casino,
Internet
____ Manque de repos (faute de
temps)
____ Distractions, oublis, etc.
SYMPTÔMES INTELLECTUELS
____ Difficultés de concentration
____ Problèmes de mémoire
____ Tourbillon d’idées
____ Idées confuses
____ Rumination des mêmes idées
____ Faible production
intellectuelle
____ Sentiment que tout
est compliqué
____ Attirance vers les choses faciles
____ Sentiment d’avoir la tête vide
____ Erreurs de jugement
SYMPTÔMES RELATIONNELS
____ Peur de rencontrer des gens
nouveaux
____ Intolérance
____ Ressentiment
____ Agressivité
____ Difficulté à être aimable ou à
écouter
____ Fuite de l’intimité
____ Changement dans la sexualité
____ Isolement
____ Tendance à être « dans la lune »
SYMPTÔMES EXISTENTIELS
____ Sentiment d’inutilité
____ Sentiment d’être
au bout du rouleau
____ Vide intérieur
____ Impression de ne plus
se reconnaître
____ Sentiment que la vie
n’a pas de sens
____ Impression d’être brisé
intérieurement
____ Désespoir
____ Changement dans la vie
spirituelle
____ Perte des valeurs auxquelles
se raccrocher
____ Idéation suicidaire
4. Soustraire - On prend nos 1,000 pattes, desquelles on enlève le total
de la ligne 3, qui représente les pattes perdues : 1000 moins le total de
la ligne 3 = ____ pattes restantes.
Voilà le nombre de pattes qu’il reste à votre mille-pattes. Son traitement est indiqué dans la seconde partie de l’article.
Adapté de Lafleur, Jacques et Robert Béliveau, Les quatre clés de l’équilibre personnel (Quand il faut soigner sa vie), Outremont, LOGIQUES, 1994, 273 pages.
TRAVAIL ET SANTÉ
il est dans le lâcher prise, jusqu’à ce que la santé
et l’énergie reviennent. Il sera alors temps de
faire des choix plus sains en ce qui concerne
les causes du stress qui avait engendré tous ces
symptômes.
Bien sûr, il n’est pas toujours facile de prendre le recul nécessaire au lâcher prise, et ce
dernier apparaît encore plus comme un signe
de faiblesse que comme un acte d’intelligence
et de courage. Il est en effet plus valorisé de
mourir au combat que de s’éloigner dudit
combat pour réfléchir à sa réelle valeur en
la comparant à la valeur santé. À un certain
niveau de stress, c’est bien de cela qu’il s’agit:
ou bien on prend soin de soi et on retrouve
la santé, ou bien on continue de dissiper ses
restes d’énergie dans ce qui nous apparaît
comme obligatoire ou inévitable, et on tombe
malade. J’invite donc le lecteur qui se retrouverait avec un score de 500 pattes ou moins
à être extrêmement vigilant. Sa santé, son
intégrité physique et mentale sont en jeu.
QUAND LA SITUATION
EST MOINS CRITIQUE
À un niveau de stress inférieur (autour des
600-700 pattes), c’est la santé au sens de
l’Organisation mondiale de la santé qui est
atteinte. À ce stade, bien qu’il ressente de
nombreux malaises à divers degrés, l’individu
n’est pas vraiment malade. Mais il a perdu son
état de bien-être. Il est quelque peu éteint;
sa motivation est rarement grande; il semble
presque toujours préoccupé; il ressent souvent
de la frustration; il bougonne; sa joie de vivre
est le plus souvent en veilleuse. Il aura avantage
à changer certaines attitudes et à trouver des
moyens de mieux donner sa pleine mesure ce
qui, on le sait, n’est pas toujours facile dans le
monde du travail actuel.
La déshumanisation que le monde du travail affiche depuis une vingtaine d’années a en
effet engendré un contexte qui rend la réussite
et la reconnaissance difficiles à atteindre. La
véritable satisfaction au travail n’est souvent
accessible qu’au prix d’une performance continue et hors du commun. Ceci amène certains à se dépasser jour après jour et à vivre un
stress énorme, alors que d’autres se désinvestissent, ce qui tue leur motivation et leur joie de
vivre. Il est grand temps que les organisations
renversent la vapeur!
Nous avons vu la façon d’établir un
diagnostic individuel du stress et comment il
serait utile de réagir à court terme advenant un
score élevé. Dans un prochain numéro, nous
présenterons quelques moyens individuels et
organisationnels qui permettent d’agir sur les
causes premières du stress au travail.
DÉCEMBRE 2006
VOL.22 No 4
35
1. Lafleur, Jacques, « Le diagnostic du stress : première étape
du traitement », Travail et santé, 22(3), juin 2006, p. 1112.
2. Lafleur, Jacques et Robert Béliveau, Les quatre clés
de l’équilibre personnel (Quand il faut soigner sa vie),
LOGIQUES, Outremont, 1994, 273 pages.
Références bibliographiques
PUB 1/6
4.875 X 2.375
PUB 1/3 CARRE
4.875 X 4.875

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