Défi diagnostic - STA HealthCare Communications

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Défi diagnostic - STA HealthCare Communications
Défi diagnostic
Petite blessure, rien de grave?
Pensez-y à deux fois!
François Melançon, M.D.
Le virus herpès zoster
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Le cas de Jérôme
’herpès zoster est l’agent qui cause la varicelle, une condition commune
qui affecte surtout les enfants (95 % des adultes en Amérique du Nord ont
des anticorps contre le zoster, témoin d’une infection antérieure). Cet agent
affecte également les hommes et les femmes, mais présente une prédilection
pour les caucasiens.
Une fois la varicelle résolue, le virus herpès zoster passe par une période de dormance dans les racines dorsales des ganglions spinaux, jusqu’à sa réactivation en
zona. Ce syndrome se caractérise par un rash vésiculaire le long d’un dermatome
sensitif ne touchant en général qu’un seul d’entre eux. Ce rash est associé à une
inflammation grave des ganglions des racines dorsales et à une nécrose hémorrat
gique des cellules nerveuses.
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Vous rencontrez Jérôme à la salle
d’urgence. Il travaille à l’usine de coques
de bateaux en fibre de verre voisine de
l’hôpital. Il se plaint d’une douleur à
l’extrémité de son index, dans la pulpe
du doigt, et se demande s’il n’a pas un
fragment de fibre de verre incrusté
dans la pulpe de son index. L’examen
montre un peu d’érythème et une très
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discrète induration de cette pulpe. Il n’y noNévralgie
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névralgie post-herpétique, une douleur sous forme de brûlure qui persiste dans
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Vous demandez à Jérôme
trempettes à l’eau de Dakin et de
revenir vous voir, à la clinique externe,
dans 48 heures s’il y a détérioration.
Quarante-huit heures après, il revient.
La pulpe de son doigt est maintenant
rouge et il y a un ganglion douloureux
au coude. Il n’y a pas de lymphangite.
Vous traitez Jérôme avec de la
cloxacilline et vous lui demandez de
revenir le lendemain.
Le lendemain, la pulpe du doigt est
toujours rouge et il y a maintenant une
vésicule à l’index. Il y a aussi plusieurs
vésicules remontant vers le coude, sur
une ligne. Les ganglions axillaires sont
douloureux.
Quel est maintenant votre
diagnostic? Comment traiterezvous Jérôme?
le territoire affecté pendant plus d’un mois après la résolution du rash vésiculaire. La douleur peut suivre immédiatement la douleur aiguë d’un zona ou
apparaître après une période apparente de résolution des symptômes. Elle
augmente progressivement avec l’âge au point où, de façon grossière, on peut
dire que le risque d’incidence de névralgie post-herpétique correspond plus ou
moins à l’âge du patient. Cette douleur disparaît après six mois chez la plupart
des patients, mais 1 % des patients souffriront pendant une période prolongée
de plus d’un an.
Infections bactériennes
À l’occasion, le rash de zona se complique d’une infection bactérienne staphylococcique ou streptococcique.
L’atteinte ophtalmique peut se compliquer de conjonctivite, de kératite, d’ulcères
cornéens, d’iridocyclite, de glaucome et de cécité.
le clinicien mars 2010
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Défi diagnostic
95
% des
adultes
en Amérique
du Nord ont
des anticorps
contre le
zoster, témoin
d’une infection
antérieure.
Syndrome de Ramsay-Hunt
Lorsque le zona touche les nerfs
crâniens V, IX et X, on parle de syndrome de Ramsay-Hunt, qui peut se
compliquer de faiblesse des nerfs
faciaux périphériques et de surdité.
Méningo-encéphalite et complications
du système nerveux central
Les immunosupprimés peuvent souffrir de méningo-encéphalite et d’autres
complications du système nerveux
central (SNC) comme la myélite, les
paralysies des nerfs crâniens et l’angéite granulomateuse qui peut dégénérer en accident vasculaire cérébral
(AVC).
Ils peuvent aussi souffrir de zona
disséminé (par voie hématogène) avec
des atteintes de multiples dermatomes
et organes. Le risque de décès est alors
beaucoup plus élevé.
Syndrome de Guillain-Barré
Rarement, comme toute infection
virale, l’herpès zoster pourrait se compliquer d’un Guillain-Barré même
chez les gens à l’immunité normale.
L’histoire clinique
Dr Melançon est
omnipraticien et compte
25 années d’expérience
dont 18 en salle
d’urgence. Il a pratiqué
en cabinet privé et en
CLSC. Il est récemment
revenu à ses premières
amours, soit la médecine d’urgence, la
traumatologie et la psychiatrie.
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le clinicien mars 2010
Le rash est précédé trois fois sur quatre par une douleur sans autre symptôme. La zone affectée est souvent
inconfortable à la palpation et peut
donner une impression d’induration.
Le rash apparaît ensuite, mais la
douleur perdure. Cette dernière est
décrite comme une brûlure, une pulsation ou une sensation d’aiguille. Le
rash est d’abord vésiculaire, puis
devient graduellement pustulaire et
forme des croûtes en 7 à 10 jours. Une
fois les croûtes apparues, la condition
n’est plus infectieuse. L’inflammation
est souvent grave, laissant des cicatrices, de l’hypopigmentation ou de
l’hyperpigmentation pour des périodes
prolongées.
En raison de sa gravité, la douleur
initiale peut être confondue avec
d’autres étiologies (colique rénale ou
biliaire, infarctus, etc.). Les dermatomes thoraciques sont les plus
souvent affectés, suivis par les dermatomes lombaires. Moins de 20 % des
patients (en général les plus immunocompromis) souffrent de symptômes
systémiques. Un rash très discret associé à une paralysie facilale pourrait
être confondu avec une paralysie de
Bell, quoique cette dernière n’est pas
associée à un syndrome douloureux.
L’examen physique
Lors de l’examen physique, on retrouve le plus souvent un rash avec des
lésions en grappes dans le territoire
d’un dermatome donné. Ce rash est
d’abord érythémateux, mais devient
rapidement vésiculaire, puis pustuleux
et crouteux. Les lésions zostériennes
sont toutes d’âge identique.
La présence d’une vésicule au bout
du nez implique une atteinte du nerf
nasociliaire, ce qui nécessite un examen de la cornée avec de la fluorescéine et une lampe à fente à la
recherche des lésions dendritiques
typiques de la kératite herpétique.
Selon le territoire affecté, les symptômes varieront : ganglions régionaux,
paralysie des nerfs crâniens ou
périphériques, allant du délirium au
coma chez les patients souffrant de
méningo-encéphalite.
Défi diagnostic
Le diagnostic
Le diagnostic du zona est essentiellement clinique et se base sur l’histoire et le rash typique. À l’occasion,
surtout chez les immunocompromis,
la présentation peut être atypique et
on peut parfois avoir besoin d’un
laboratoire de confirmation (études
de recherche d’anticorps par immunofluorescence du liquide des vésicules).
Quoique la culture soit possible,
elle est de peu d’intérêt en salle d’urgence en raison des délais pour cultiver le zoster. On peut cependant
détecter l’ADN viral par une réaction
en chaîne par polymérase.
Le frottis de Tzanck ne fait pas la
distinction entre les différents types
d’herpès, mais la détection de cellules
géantes aux noyaux multiples dans le
liquide vésiculaire au moyen de la
coloration de Wright suggère une
infection herpétique. Le test est aussi
faussement négatif dans 20 % des cas.
On ne doit donc pas retarder un traitement empirique devant une présentation clinique suggestive, même si le
frottis est négatif.
Le traitement
Les analgésiques
Le zona est douloureux et les antiviraux ne soulagent pas vraiment les
patients. Des analgésiques puissants
sont fréquemment nécessaires et on
doit souvent combiner AINS (antiinflammatoires non stéroïdiens) et
narcotiques.
L’utilisation des nouveaux analgésiques, telle la gabapentine, ne
donne pas plus d’effet que le placebo.
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le clinicien mars 2010
Les lotions
Une trempette locale à l’eau claire
ou avec une solution à 5 % d’acétate
d’aluminium (Burrow’s solution)
ainsi que l’application de lotions,
telle la calamine, sur la peau affectée, jusqu’à six fois par jour, pour
30 à 60 minutes, peut aider à
soulager un peu le prurit.
Les thérapies antivirales
Herpès zoster non compliqué
Les antiviraux acyclovir, valacyclovir
et famcyclovir sont efficaces pour
diminuer la durée du rash, de la
douleur aiguë et celle post-herpétique,
même lorsqu’ils sont donnés jusqu’à
72 heures après le début du rash.
L’acyclovir est un peu moins efficace
que les deux autres antiviraux et doit
être donné plus souvent. On recommande 7 à 10 jours de traitement pour
l’acyclovir et 7 jours pour les deux
autres chez les patients dont l’immunité est normale. Les patient immunocompromis nécessitent des traitements
plus longs.
Herpès zoster compliqué
Pour les patients à risque d’herpès
zoster disséminé secondaire, on
recommande de débuter la thérapie
antivirale même si le délai de
72 heures a été dépassé. On suggère
de privilégier les nouveaux antiviraux qui sont plus efficaces. Un
traitement intraveineux devrait être
envisagé chez les patients souffrant
d’une condition disséminée, de VIH
avancé ou après une transplantation.
Dans ces cas, une consultation en
médecine interne ou en infectiologie
est indiquée.
Retour sur le cas
de Jérôme
Vous reconnaissez un zona et vous
décidez de traiter Jérôme avec un des
nouveaux antiviraux. Comme l’inconfort
est peu grave, vous le traiter avec un
AINS et de l’acétaminophène.
En quelques jours, le rash de Jérôme a
formé des croûtes qui sont par la suite
tombées. La douleur s’est résolue sans
récurrence.
Herpès zoster ophtalmique
En plus de recevoir d’emblée des
antiviraux, ces patients devraient être
orientés vers un ophtalmologue.
Les corticostéroïdes
L’ajout de corticostéroïdes (prednisone, 40 à 60 mg/jour) de façon concommitante à l’acyclovir semble
accélérer le processus de guérison,
mais de façon très discrète. Il n’y a
aucun effet sur la réduction de névralgie post-herpétique. On n’a pas étudié
la combinaison de corticostéroïdes
avec les autres antiviraux. En raison du
risque théorique d’augmenter l’incidence de surinfection cutanée et à
cause de l’efficacité très limitée,
l’utilisation de corticostéroïdes devrait
être réservée aux patients souffrant de
conditions très graves et douloureuses.
Les stéroïdes ne devraient jamais être
utilisés seuls en raison du risque d’augmentation de la réplication virale.
La prophylaxie post-exposition
Elle consiste en l’utilisation de globuline immune de varicelle zoster. On
devrait la réserver aux immunocompromis, aux nouveaux-nés et aux
femmes enceintes. C

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