CRI, FRV et REER immobilisés : quelques points de

Transcription

CRI, FRV et REER immobilisés : quelques points de
La Chronique
Pl. fin.
en collaboration avec
Serge Lessard
CRI, FRV et REER immobilisés :
quelques points de planification
L
es comptes de retraite immobilisés (CRI), fonds de revenu viager
(FRV) et REER immobilisés sont
des régimes individuels dans lesquels des
sommes provenant d’un régime de retraite
ont été transférées. Dans le présent texte,
nous explorons trois éléments de planification relatifs à la priorité de paiement au
conjoint au décès pour ces instruments de
transfert (IT).
Au décès du titulaire d’un IT, le
conjoint a droit aux sommes ou valeurs
que cet IT contient1. S’il s’agit d’un IT
de juridiction fédérale (REER immobilisé – REERI), RE immobilisé restreint
– REIR), FRV fédéral et FRV restreint
– FRVR), la priorité favorise le conjoint
de fait après un an de vie commune ou, à
défaut d’un conjoint remplissant ce critère,
en faveur du conjoint marié. À l’inverse, s’il
s’agit d’un outil de juridiction québécoise
(CRI et FRV provincial), le conjoint marié
a priorité ou, à défaut d’un conjoint marié,
le conjoint de fait après trois ans de vie
commune (ou un an de vie commune +
un enfant). Quand cette priorité existe, elle
contrecarre totalement une désignation
de bénéficiaire (lorsqu’une telle désignation est possible), ainsi que toute volonté
contraire dans le testament.
Cas 1 : Transférer ses CRI au
conjoint lors d’une séparation
pour contrecarrer la priorité de
paiement au décès
À l’occasion d’un divorce, par exemple
entre Monsieur et Madame X, il pourrait
1
Serge LESSARD, « Votre CRI est-il prioritaire ou
non prioritaire ? », (2011), vol. 16, no 1 Stratège
0-42. Voir aussi Serge LESSARD, « CRI, REER
immobilisés et FRV au décès », (2009), Congrès
APFF 2009
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arriver que monsieur transfère en partie
ou en totalité la propriété de ses IT en
faveur de madame. L’objectif est de se
débarrasser des IT de façon à ce que, au
décès de monsieur, ce dernier ne possède
que des REER qu’il peut léguer à qui il
veut, ce qui n’aurait pas été le cas avec des
IT. Il importe de savoir que les IT acquis
par madame ne seraient pas soumis à la
priorité de paiement au décès en faveur
de son prochain conjoint, Monsieur Y.
Il serait possible de transférer 100 %
des IT à Madame X, même si une lecture
de la loi laisse penser à première vue qu’une
limite de 50 % s’applique. Notez que
madame a son mot à dire relativement au
choix des actifs qui lui seraient transférés.
Cas 2 : Le conjoint ayant acquis
un IT à l’occasion d’une rupture
matrimoniale et qui participe au
même régime que son ex-conjoint
Le contrat de CRI (les FRV québécois et
les régimes fédéraux obéissent à d’autres
textes de loi mais ils ont un effet semblable
à celui qui suit) doit obligatoirement
contenir la mention suivante, prévue à
l’article 29 du Règlement sur les régimes
complémentaires de retraite (RRCR) :
29. (…)
3° que, dans le cas où le
constituant qui est un ancien
participant ou un participant
décède avant la conversion du solde
du compte en rente, ce solde est
versé à son conjoint ou, à défaut,
à ses ayants cause; (…)
À la lecture de cet article, on pourrait
penser que l’ex-conjoint qui acquiert un CRI
du titulaire d’origine à l’occasion d’un divorce
et qui est un participant au même régime de
Janvier 2014
retraite (c.-à-d. Monsieur X cède à Madame
X un CRI qui lui vient du RREGOP alors
que madame est aussi une participante au
RREGOP, par exemple) aurait pour effet
de maintenir la priorité de paiement sur le
CRI transféré. Bien qu’il n’existe pas de jurisprudence sur ce sujet et qu’aucune réponse
certaine ne puisse être fournie à cette question, nous croyons que l’objectif de cet article
est de protéger le conjoint (Madame X) et
non pas le conjoint du conjoint (l’hypothétique futur conjoint de Madame X). Nous
pensons humblement que dans la situation
décrite, la priorité de paiement au décès cesserait d’exister après le transfert de propriété
à Madame X.
Cas 3 : Le conjoint de fait de trois
ans pour les IT provinciaux
Lorsque Monsieur Z, titulaire d’un CRI,
décède alors qu’il est divorcé de Madame Z
et qu’il vit maritalement (conjoint de fait)
depuis trois ans avec Madame W, cette
dernière bénéficie de la priorité de paiement
au conjoint au décès de Monsieur Z. La
lecture de la loi nous porte à penser que le
point de départ du calcul des trois ans est
le moment du début de la vie maritale, que
le titulaire soit encore marié à Madame Z
ou non. Autrement dit, pour que le conjoint
de fait (Madame W) se qualifie, la période
de trois ans pourrait s’être écoulée pendant que le titulaire était encore marié à
Madame Z, pourvu qu’il ne le soit plus à
l’instant précédant son décès. Encore une
fois, la jurisprudence est muette à ce sujet
et il ne s’agit que d’une opinion.
Tous ces éléments et bien d’autres
sont à prendre en considération dans une
planification concernant les IT.
Serge Lessard, avocat, Pl. Fin., FLMI, est
vice-président adjoint (Investissements),
Fiscalité, retraite et planification
successorale régionale, Marché des
particuliers à Investissements Manuvie.
www.conseiller.ca