Regards sur le positionnement et la surveillance du Réseau Internet
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Regards sur le positionnement et la surveillance du Réseau Internet
Regards sur le positionnement et la surveillance du Réseau Internet en Afrique : Contraintes inhérentes aux politiques d’innovation en Afrique : Le cas « Echelon » Damien MARTINEZ Mots-clé : Afrique, Internet, Intelligence Economique, Intelligence territoriale, Etats-Unis, Influence, Innovation, Développement, Information Stratégique. Keywords : Africa, Internet, Business Intelligence, United States, Influence, Innovation, Development, Strategic information. Résumé : Abstract : Parmi les solutions proposées pour un Développement durable en Afrique, le vaste domaine des Technologies de l’Information et de la Communication est avancé de façon providentielle. Sans mésestimer les difficultés politicoéconomiques du continent africain, il convient de considérer à sa juste valeur le « Take-off » de certains pays grâce au modèle récent de la « Netéconomie ». Among the proposed solutions for lasting development in Africa, that of the vast Information Technology and Communications domain has advanced in a spectacular manner. Le Sénégal, le Nigéria pour l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique du Sud, l’Egypte ou le Maroc pour le reste du Continent, développent sur le long terme des solutions alternatives aux contraintes classiques du Développement. Ces efforts d’intégration technologique se heurtent à la récente médiatisation de l’insécurité des transferts d’information. Les révélations sur l’existence de certains réseaux militaires d’interception vient hypothéquer ou à tout le moins fragiliser les politiques d’innovation mises sur pied en Afrique. En effet, les enjeux stratégiques et géopolitiques qui viennent se greffer sur une thématique de commerce électronique représentent un écueil pour les objectifs de Développement. Face à ce risque, des réponses pratiques peuvent être envisagées au regard de l’Intelligence Economique. It is certain that several countries are benefiting from an economic “take-off” thanks to the recent “Net Economy” model. Senegal and Nigeria for West Africa, South Africa, Egypt and Morocco for the rest of the continent, are developing practical long term solutions to development constraints. These efforts at technological integration are crashing into the recent media hype for of lack of security of information transfer. The revelations of the existence of certain military interception networks have served to seriously shake up the innovation underway in Africa. In fact, the strategic and geopolitical stakes that have just become attached to an electronic commerce theme, represent a difficulty for the development objectives. Faced with this risk, practical responses are to be thought of with regard to business intelligence. Propos introductifs Lors d’une conférence sur la mondialisation tenue à Angers l’an passé, Mr Jean Touscoz, juriste de Droit International et Directeur du Centre d’Etudes et de Recherche sur la Coopération Internationale, gratifiait sa démonstration d’une judicieuse illustration. Pour accompagner l’idée qu’il n’existe pas de « Village Planétaire », il citait la statistique selon laquelle deux individus sur trois n’aurait jamais eu recours au téléphone. Sur six milliards d’habitants, le pourcentage de ceux qui ont accès à l’information est mince. D’allure fantaisiste, ce chiffre éclaire pourtant la problématique qui nous réunit aujourd’hui : soit l’on est disposé à rester en dehors de toute nouvelle technologie et l’on ne peut être écouté soit on rattrape la locomotive et on sait tout de vous. Tels sont les termes du destin ubuesque que présente à ce jour le réseau Echelon aux Pays en Développement. Les nouveaux modèles économiques, en particulier la « Net-économie » sont présentés comme un facteur miracle du Développement, puis ce modèle est immédiatement relayé par une interception de l’Information. Le libéralisme se mort la queue du fait de l’immixtion des Etats dans son mode de régulation naturel. Face à ce postulat bien paradoxal, la réactivité ne doit pas attendre. Elle peut s’organiser autour d’une vision active ( certains diront offensives ) de l’Intelligence Economique. Cet état d’esprit inhérent à la matière, revendiqué par les professionnels et les théoriciens, ne doit pas tarder à se mettre en mouvement. Mieux même, il doit accompagné la tendance actuelle des Pays africains à intégrer les NTIC. 1. L’Internet comme facteur de Développement. 1.1. l’Internet et l’Afrique L’Internet n’a pour l’instant qu’une portée réduite sur le continent Africain, tant du point de vue du nombre d’utilisateurs que de celui des fournisseurs d’accès (voir les cartes présentées par le site : http://www.cybergeography.com ). Néanmoins une prise de conscience récente se déploie autour des pays les plus influents, on peut citer en particulier l’Afrique du Sud ou le Sénégal. La motivation que peuvent avoir certains pays d’Afrique de l’Ouest et du Maghreb se fondent sur des solutions de développement à moyen et long terme. A ce titre des initiatives précises ont été menées sur le fondement des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC), on peut évoquer l’Observatoire sur les Systèmes d’Information, les Réseaux et les Inforoutes (Autoroutes de l’Information) au Sénégal (OSIRIS). Signalons également l’efficacité du réseau Anaïs dont la structure est assise sur un axe SénégalSuisse. Nombre de sites portails sont en cours de réalisation concernant les enjeux du Continent, de régions ou de pays en particulier. On peut aussi ajouter des élans politiques comme la rencontre « Bamako 2000 » qui a fait le bilan sur le bon usage économique des TIC. La Conférence Mondiale du Savoir qui s’est tenue du 7 au 10 mars 2000 permit d’éclairer les pays en Développement des possibilités offertes par l’Internet (cf.: http://www.anais.org/Fr/ activites/index.htm ). Une série de thèmes de travail ont été abordés : télé santé, commerce électronique, modernisation de l’Etat, opportunités pour les femmes et développement durable. La bonne volonté est donc de mise pour développer un réseau performant autour des NTIC. Le Secrétaire Général d’ISOC-GN, Mr Saliou Diallo place même les nouveaux supports de la communication et la communication elle-même comme le facteur majeur du Développement, lors d’un entretien avec Africultures (http://www.africultures.com/articles/articl es_fr.htm). La tendance actuelle de l’Afrique a vouloir intégrer l’Internet est une donnée supplémentaire au système. Il s’agit d’être présent et visible sur un réseau d’une double nature. La première, bien sûr, est mercantile. L’Internet se constitue aujourd’hui d’une superposition de marchés de services. Il convient d’y avoir une participation active. La seconde dimension de l’Internet est toute autre et s’attache à une « cyber-citoyenneté » d’apparence plus sociale, sur laquelle également il y a un espace de parole à conquérir au travers des groupes de discussion. Ces différents aspects font du Continent Africain un partenaire grandissant en matière de NTIC. Ce préambule sur les efforts de développement de l’Internet ne doit pas masquer les réalités de l’Intelligence Economique et de la Guerre Economique qui nous mobilisent aujourd’hui. La gestion de l’information stratégique passe bien évidemment par le réseau Internet même s’ il ne s’agit pas de la seule source exploitable. Nous nous pencherons sur cette seule manifestation au cours de cet exposé. 1.2. la réduction des « frontières technologiques » En terme de priorité, l’utilisation du réseau Internet n’est souvent que marginale face aux nécessités de premier ordre. D’ailleurs une cohésion technique manque au développement des télécommunications en Afrique. Parmi les carences du système on peut noter une pénurie en ligne téléphonique même dans les zones urbaines, une faible part des budgets publics consacrés à l’informatisation, l’existence de barrières tarifaires à l’utilisation des bases de données. Autant de contraintes qui viennent se greffer sur une intégration délicate des nouvelles technologies. Toutefois, l’ensemble de ces considérations n’est pas rédhibitoire. Nombreux sont les acteurs (institutions internationales, centres de recherche scientifiques et universitaires, grandes entreprises de production) qui regardent d’un œil favorable les possibilités offertes par la « Toile ». Avec quatre cents millions de consommateurs potentiels, et une population totale qui s’élèvera au milliard dans trente ans, le Continent africain attire les convoitises des grandes entreprises de télécommunications. Les sociétés multinationales deviennent vecteur de Développement par les opérations de câblage qu’ils réalisent. Il ne s’agit pas d’œuvre philanthropique mais de projets commerciaux d’une ampleur considérable. Les « producteurs de Technologie » s’engagent dans une lutte économique pour conquérir les faveurs des Etats africains. Fort de cette position le « continent noir » devrait pouvoir trouver des avantages à entrer dans le processus de Mondialisation (Guemriche, les chocs de la mondialisation in le courrier de l’UNESCO, juin 1997) (http://www.africultures.com/articles/articl es_francais/internet/enjeux.htm , http://www.bamako2000.org ) La réduction des écarts technologiques est présente à la seule vue des portails consacrées aux questions africaines. De surcroît on peut ajouter que les questions politiques, économiques et culturelles coexistent et sont exposées sans contrainte. De très nombreuses coopérations voient le jour et les Nations-Unies consacrent 18 millions de dollars à l’amélioration de la connectivité en Afrique, auquel ,viennent s’ajouter 15 millions de dollars de la société Leland. L’Afrique devient une terre d’enjeux incontestable en matière de Nouvelles Technologies, reste à envisager la part d’indépendance qu’elle y gagnera. Confier le réseau national de télécommunication à un opérateur étranger revient à lui ouvrir la porte à un renseignement facilité. C’est là la série de questions que soulève l’existence du réseau d’interception Echelon. En effet, les termes du débat que pose le développement de l’Internet en Afrique vont au delà d’une simple préoccupation économique, l’impératif devient la sécurité des systèmes d’information et la sûreté des transferts électroniques. Les politiques d’innovation conduites jusqu’alors en Afrique amènent à la considération des réseaux de surveillance militaire. 1.3. La maîtrise des nouveaux médias. d’outre-atlantique ne sont pas les seuls à prévaloir, le français Alcatel, le japonais Nec Corporation ou encore le canadien Bell se livrent une bataille d’influence pour profiter des opportunités commerciales. 2. La Domination du Réseau par les Réseaux d’interception. Cette sous-partie est l’occasion d’envisager deux formes nuisibles d’interception des communications. Dans un premier temps, Echelon sera présenté, viendra ensuite le dispositif français. Pour les deux systèmes, la même logique est mise en œuvre : s’assurer des zones d’écoute sur les miettes territoriales des anciennes colonies. 2.1. le cas Echelon Nombreux sont les africains qui craignent une nouvelle ère coloniale par le biais de l’Internet. La quasi-totalité des données du réseau transitent par des « nœuds » situés sur le territoire américain même lorsqu’il s’agit de connexions européennes ou africaines. Ce dernier point représente le maillon faible du média tel qu’il est habituellement présenté. Les répercutions peuvent être lourdes concernant l’autonomie politicoéconomique des Etats. Selon Le Monde Diplomatique, Amnesty International aurait été écouté par le système de veille d’Echelon pour des mots-clé ayant trait au trafic d’armes. Cet exemple montre à quel point la domination hégémonique est aujourd’hui technologique. D’une autre manière le système de tri sémantique référence des thèmes comme l’ « aide au tiers-monde », ce qui marque une certaine convoitise des pays occidentaux pour les NTIC en Afrique. A la décharge des acteurs de cette influence technologique, il n’existe aucun texte de Droit International réglementant les écoutes. Le lobby en faveur d’une politique africaine des EtatsUnis se satisfait de l’implantation des firmes de Télécommunications sur le continent africain, mais les intérêts 2.1.1 Présentation Les rumeurs quant à l’existence d’Echelon se sont transformées en certitudes à l’issue des débats organisés les 22 et 23 février à Bruxelles par le Parlement Européen. Le Réseau existe depuis 1948, il filtre les communications du monde entier; nul territoire, nulle information n’en est épargné. On savait l’Afrique en proie aux manipulations du passé, la voici entre les mains d’une manigance du futur. Cette dernière pourrait réduire à néant les préoccupations du moment en matière de Nouvelles Technologies En l’espace de cinquante ans, le monde (des Affaires et de la Politique) est passé d’une structure tentaculaire à une configuration réticulaire. Le modèle de la pieuvre a laissé sa place à celui de la toile d’araignée. L’analogie peut apparaître hors cadre mais elle insiste bien sur la circulation éclatée de l’Information. Cet axiome, les dirigeants américains l’ont très bien entendu dès 1952 avec la création de la NSA, par directive secrète du Président Harry Truman. D’abord chargé de contre-espionnage et de la protection gouvernementale, la National Security Agency réoriente la structure vers un système d’écoute massif. Pour réaliser ce tour de force elle ne peut compter qu’avec l’appui de postes avancés, en l’occurrence il s’agit du Royaume-Uni, du Canada, de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (le Danemark est soupçonné d’être une plate-forme d’Echelon en Europe selon l’enquêteur Dunkan Campbell, journaliste et militant écossais à l’origine du premier scoop en 1988 et du dernier rapport en 1999 http://www.intelligenceonline.fr/dossiers/ iof/dos_iof_ecoutes.asp, on peut également adjoindre la norvège ). Le Pacte initial entre ces pays se nomme « Ukusa » (« Ukusa Agreement ») et date de 1947, il met en place les dispositions nécessaires à l’accomplissement du réseau de Renseignement Opérationnel, ce dernier sera mis sur pied dans les années 70 et 80. La couverture des interceptions acquiert une dimension mondiale et fonctionne grâce à différents relais dans les pays indiqués plus haut. Le réseau, comme tout réseau d’ailleurs, tire sa force d’une interaction des moyens mis en œuvre par les protagonistes. La puissance d’écoute n’en est qu’accrue et elle touche à tous les supports connus jusqu’ici : fax, telex, téléphone par satellite, et courrier électronique. L’ exemple de l’imbrication des réseaux de surveillance entre eux, montre à quel point l’extension de la couverture géographique ou du cyberespace est un impératif http://www.cybergeography.com/atlas/atla s.html (voir aussi le site suivant : http://www.geoeconomie.org/Default.htm ) . L’élargissement des territoires sous écoute qu’ils soient réels ou virtuels, est doublé d’un accroissement des moyens mis en œuvre. Ainsi, différentes outils sont mis à la disposition d’Echelon, cryptologie, interception des signaux électromagnétiques (inclusion de l’AntiCompromission Electro-Magnétique), sécurité des réseaux informatiques, satellites d’information, réseaux informatiques… sécurité des Le système bien qu’en progression constante, démontre une force dans les moyens technologiques employés (jusqu’à deux millions d’informations traitées par seconde). Au delà de la seule démonstration de puissance, qui confère à celui qui l’emploie un ascendant psychologique, Echelon est craint. Cette appréhension est celle des Etats bien sûr mais surtout celle des entreprises multinationales. Pour ce qui concerne les opérateurs privés, le problème revêt un enjeu particulier : celui de la Guerre Economique. On sait déjà à quel point les services de renseignement des Etats sont impliqués dans la sauvegarde et la prospection des intérêts économiques. Ce phénomène, dans le cadre d’un renseignement ou contre-espionnage classique permet un relatif équilibre des forces en présence. Qu’en est-il avec l’usage d’un pareil réseau de surveillance ? Il est probable que les implications d’un espionnage économique direct soient largement supérieures aux méthodes classiques de l’Intelligence Economique. Dit autrement, la dérive qui tend à favoriser les entreprises nationales grâce aux moyens d’écoute et d’interception, peut avoir des conséquences importantes sur l’équilibre régional ou international. (http://www.lemonde.fr/article/0,2320,dos3156-43877-0-1--,00.html). 2.1.2. Le Réseau n’a pas de centre. Le réseau n’a pas de centre donc pas de responsable politique. Tel peut être le raccourci logique qui fait la force du système. En effet, la première position des Etats-Unis a été celle de la dénégation, avant de se ranger à la raison devant les preuves et les évidences. Différents acteurs ont contribué à la mise à jour du réseau. Le premier est virtuel puisqu’il s’agit d’une liste de diffusion dénommée « Hacktivism ». Sur ce site, sont apparus des documents déclassés faisant état d’un centre d’écoute des communications téléphoniques internationales à Sugar Grove, géré par l’US Air Force. L’information diffusée par Jeffrey Richelson fait alors boule de neige et alimente une paranoïa an niveau des Etats et des individus. Duncan Campbell reprend tous les éléments du dossier et les développe dans son rapport d’avril 1999. Cette étude approfondie ne sera reconnue que tardivement par la classe politique européenne, puisque les débats officiels ne se tiendront que les 22 et 23 février. Tels sont les éléments bruts qui transparaissent de l’étude commandée par STOA (Scientific and Technological Options Assessment), Echelon existe et cela ne fait que confirmer les nombreuses alertes des experts indépendants. Des éléments de fait sont même visibles, comme par exemple les « grandes oreilles » de Menwith Hill dans le Yorkshire (Royaume-Uni), poste avancé des Interceptions en Europe. Il s’agit là d’un centre spécialisé dans l’espionnage économique, celui-là même que les EtatsUnis et la Grande-Bretagne se défendent d’exercer. Cela pose un double questionnement, d’une part celui d’une coopération Europe-Afrique harmonieuse mais dont les bases sont viciées, d’autre part celui de l’insécurité économique qui menace les entreprises européennes d’un désavantage compétitif à l’égard des entreprises américaines et britanniques. Force détails ont été révélés successivement jusqu’à ce que l’on sache aujourd’hui qualitativement ce qui constitue Echelon. Il regroupe 38000 personnes à travers 5 pays principaux, il met en batterie 50 ordinateurs de type Super Cray puissamment armés d’un logiciel dénommé Oratory et dispose de 120 satellites. Le système d’Intelligence artificielle utilisé est proche de la recherche de mots-clé utilisée par « Mémex ». Les sites de ce système ont aussi été révélés, il s’agit de Yakima aux Etats-Unis, de Waihopai en NouvelleZélande, de Geraldton en Australie, de Hong Kong et de Morwenstow au Royaume-Uni. Les cinq nations signataires d’Usuka se partagent les résultats des recherches. Fonctionnant entre autres sur le modèle de l’indexation sémantique bien connu des veilleurs et fondé sur le tri sélectif. (Le « langage-pivot » est utilisé également en France par des agents intelligents propriété des Cabinets de veille technologique et d’Intelligence Economique, sur ce dernier point un projet de loi est en cours. IL viserait à limiter la reconversion des militaires dans ce secteur pour une période de cinq ans). Oratory, cheville ouvrière du système comporte une collection de motsclé que le Professeur Simpson a mis à jour. Les chaînes de mails ont ensuite transmis d’eux-mêmes ces mots clés dans la perspective du Jam Echelon Day ( http://www.echelon.wiretapped.net/ ). 2.2.La position française sur le sujet. On peut s’interroger sur l’étonnement des Médias Français, quant à la découverte d’Echelon ( http://www.freenix.fr/netizen/ 6xx/602.html ). En effet Le Monde du Renseignement apporte des éléments contradictoires au débat en révélant que la DGSE et le SDECE avant lui, ont eu à connaître des objectifs et des moyens mis en œuvre par la NSA. Une collaboration des services franco-américains aurait même été entretenue sur le sujet. Pour préserver une indépendance en matière de Sécurité des Systèmes d’Information, la France a développé sa propre force de frappe COMINT et SIGINT autour de différentes bases militaires. L’information est révélée par le correspondant « Défense » du Monde, Jacques Isnard. Le programme sera appelé « Frenchelon » par Ken Cukier de Communications Week (http://www.cfp99 .org/program/papers/cukier.htm, http://www.assemblee-nat.fr/2/dossiers/ plf99/a1114-08.htm ) Les antennes concernées relèvent de la DGSE et se nomment : l’Organe de Surveillance et d’Interception, le Groupement des Contrôles RadioElectriques (GRC). Les centres d’écoute sont déployés en Métropole : à Agde, Feucherolles, Domme, Mutzig et Solenzara. Il est à noter d’autres bases dans les DOM TOM, à Saint-Barthélémy, à la Réunion, à Djibouti et à Mayotte. Ces moyens d’action bénéficient de l’appui du programme français Helios. L’Allemagne participe à un projet complémentaire rebaptisé « Cerise » pour l’occasion. Il s’agit du placement sur le satellite Hélios 1-A d’un boîtier d’écoutes électroniques. La coopération entre la DGSE et le BND (Bundesnachrichtendienst) a également permis d’implanter des stations d’écoutes sur la base spatiale de Kourou capables d’intercepter les satellites évoluant outreatlantique. Une nuance tout de même : le degré d’intégration pour la coordination franco-allemande en matière d’interception semble moins fort que le lien existant entre la Grande-Bretagne et les Etats-Unis depuis un demi-siècle. Contrairement à la longue dénégation des Etats-Unis concernant Echelon, François Roussely , Directeur de Cabinet au Ministère de la Défense confirme lors d’une enquête du Point l’existence de ce réseau national d’interception. En rappelant les objectifs de Sécurité Nationale, il ajoute que : « c’est le jeu de la guerre secrète », ( http://www.freenix.fr/netizen/6xx/602 .html ). Les interceptions apparaissent donc comme un domaine de surenchère technique, où chaque Etat démontre sa capacité et sa force de frappe technologique. Sur ce fondement, la France n’est pas disposée à porter plainte, sous peine de devoir justifier son propre système de surveillance ( http://www.zdnet.fr/actu/tech/a0012954 .html ). Par ailleurs, les écoutes sur les GSM des entrepreneurs anglais est assez fréquente à en croire le Times. (Voir également la participation Française au programme ENFOPOL : http://www .monde-diplomatique.fr/1999/03/ RIVIERE/11768.html, http://www. heise.de/tp/deutsch/special/enfo/default .html ) 3. Les possibilités offertes par une Intelligence Economique offensive 3.1.-Agents intelligents, combattre l’ennemi sur son terrain A la vue des moyens dont disposent les premiers signataires du Pacte Usuka, la riposte ne peut être envisagée de façon directe. Toutefois, certains outils de veille technologique peuvent permettre une réduction des effets d’écoute sur les pays ACP. Une première solution pourrait consister à développer dans l’entreprise une culture d’« Intelligence Economique » fondée sur deux éléments prééminents. En premier lieu, il faut compter sur un réseau humain capable de réagir en fonction de la conjoncture des NTIC. En second lieu, et c’est là que les enjeux sont majeurs, il convient de développer des instruments informatiques spécifiques. Les agents intelligents déjà largement disponibles au sein des sociétés européennes. Issus de la recherche appliquée (nombre de doctorants étrangers, en particulier africains, participent à cette recherche dans les Universités françaises) , ces logiciels permettent un traitement rationnel de l’information en circulation sur l’Internet. Ils agissent comme un filtre et permettent à une échelle raisonnable un contrôle actif de l’Information. Cette double orientation apparaît envisageable si l’on s’attache à réunir les informations techniques à la mise en place de ces outils. D’ailleurs, certains vendeurs d’informations utilisant des robots se lancent dans cette branche, notamment au Sénégal ( http://www. bamako2000.org/documents/syfia/index.ht ml ) (liste des agents : http://shiva.istia.univangers.fr/~iec/ , http://ms161u06.u-3mrs.fr/ bookbea.html , http://ms161u06.u-3mrs.fr/ hom.html , http://www.abeille.org/ ). 3.2.- Généralisation de la cryptologie comme mesure de sûreté. L’ usage fréquent de cette technique est une deuxième possibilité pour se prémunir des interceptions électroniques. La volonté politique de la France répond à cette préoccupation ; Mr Lionel Jospin formule le 19 janvier 1999 son intention d’ « offrir une liberté complète dans l’utilisation de la cryptographie ». En l’état actuel de la technologie, la dissimulation des transmissions reste le seul moyen pour les entreprises et les citoyens d’échapper aux « Grandes Oreilles ». Cette position « à contre-courant » des orientations précédentes devrait se répandre dans nombre de pays. La libéralisation de la cryptographie dans les deux domaines que sont les échanges informatiques et les échanges vocaux apparaissent comme une solution peu coûteuse et génératrice d’indépendance. Bert-Jaap Koops de l’Université de Tilburg (Pays-Bas), auteur d’un récent ouvrage sur les politiques gouvernementales concernant la cryptographie voit dans cet outil un gage de sûreté dans la conduite des Affaires. La sécurité des clés de cryptage est encore à améliorer, ainsi l’actualité la plus récente nuance la capacité des logiciels réputés les plus sûrs. -3.3. l’ « Intelligence Territoriale »: La troisième stratégie que l’on pourrait suggérer consiste à développer un réseau d’Intelligence Economique avec une dimension territoriale forte. Des solutions de ce type ont permis une intégration régionale efficace notamment au Bénin, ce pays de l’Afrique de l’Ouest a été pionnier dans l’usage de l’Internet puisqu’il fut connecté en 1995. Depuis lors l’intégration territoriale a fonctionné et a lancé une synergie avec le Togo qui fonctionne aujourd’hui encore. Le programme InterAfrique reprend également cette dynamique d’Intelligence Territoriale auprès des entreprises et universités en créant des centaines de « nœuds » gérés par des structures locales. Ainsi les universités virtuelles ou les activités touristiques peuvent être des secteurs prompts à cette logique collective d’intégration technologique. A ce titre, l’article de Gabriel Colletis dans le numéro 3 de la Revue d’Intelligence Economique éclaire intitulé « Intelligence Economique et Développement Territorial » donne de multiples illustrations et ébauches de réponses. -3.4. Une vision réactive de la Francophonie 71% des sites Internet sont anglophones. La maîtrise des nouveaux instruments de télécommunication revient aux Etats-Unis. Face à cette emprise, l’impact des langues transnationales est faible, voir quasiinexistant sur l’Internet africain. Dans ce contexte, la francophonie peut constituer une arme culturelle importante pour les pays concernés. L’Office Français de la Francophonie ou encore l’Institut Français des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (http://intif.francophonie.org/ )développent des initiatives entrant dans ce champ d’action. Parmi elles, on trouve des coopérations techniques fondées sur une identité francophone commune. La langue reste le vecteur inhérent à tout média. Une intégration linguistique poussée permettrait une relative autonomie par rapport à la domination technologique et culturelle des Etats-Unis. Que l’Afrique francophone s’unisse à la France dans le domaine des télécommunications, peut permettre une autonomie partagée vis à vis de cet ami qui nous veut du bien. Bibliographie complémentaire : Guemriche, les chocs de la mondialisation in le courrier de l’UNESCO, juin 1997 -http://www.u-aris2.fr/mcc/pages_uniques/ trav_articles.html mémoire de Dominique Fonvielle : « crimes et coups tordus dans la Guerre Economique » - Nicolas Lejosne : « Dimension culturelle de l’entrepreneuriat, la création d’entreprise et l’innovation en Afrique » -Hugon P, L’économie de l’Afrique, éditions la Découverte, ISBN 2707129208,1999. -Voir également l’ouvrage d’Henri Samier et de Victor Sandoval, « La recherche intelligente sur l’Internet », publié chez Hermès.