L`ACCORD DE PRETORIA : VOIE DE SORTIE Par Christophe

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L`ACCORD DE PRETORIA : VOIE DE SORTIE Par Christophe
Séninaire international sur la gestion de la transition en République démocratique du Congo
L’ACCORD DE PRETORIA : VOIE DE SORTIE
Par Christophe Lutundula Apala Pen’Apala
Juriste et Député à l’Assemblée nationale de la republique democratique du congo
e 17 décembre 2002, le Gouvernement de la République Démocratique du Congo, le Mouvement
de Libération du Congo, M.L.C, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie, R.C.D,
l’Opposition politique, la Société civile/Forces Vives, le R.C.D/National, le RCD/Mouvement de
Libération et les Mai-Mai ont signé, à Pretoria en Afrique du Sud, l’Accord global et inclusif sur la
transition en République Démocratique du Congo, dans le but de mettre fin à la guerre et de jeter les
bases d’un nouvel ordre politique dans ce pays.
L
Un an après la mise en oeuvre de cet Accord, quel bilan est-il permis de dresser ? L’Accord de
Pretoria a-t-il été véritablement la voie de sortie de la crise congolaise? Quelles perspectives ouvre t-il
encore aux Congolais pour l’avenir ? La réponse à cette triple interrogation transite par un double
exercice consistant, d’abord, à dégager la substance même du compromis trouvé par les parties au
Dialogue inter congolais et, ensuite, à s’interroger sur la pertinence de ce compromis en rapport non
seulement avec les objectifs spécifiques de la transition, mais aussi avec les réalités actuelles sur le
terrain et le comportement des principaux acteurs institutionnels depuis le démarrage de celle-ci.
I.
LE COMPROMIS DE L’ACCORD DE PRETORIA
De prime abord, il importe de relever que l’Accord global et inclusif sur la transition en République
Démocratique du Congo n’est pas un chef-d’œuvre littéraire et, encore moins, une œuvre d’art dont
la finition serait un archétype de perfection. Certainement qu’un esprit cartésien, soucieux de rationalité
et empruntant aux modèles institutionnels classiques leurs rigueur et harmonie, s’y perdrait et en serait
ahuri à plus d’un égard.
L’Accord de Pretoria est fondamentalement un compromis politique qui ne s’accommode ni de
l’orthodoxie juridique ni de l’idéalisme philosophique et dont le but ultime est de mettre immédiatement
fin à la guerre et, à terme, à une crise politique profonde qui plonge ses racines dans:
1.
2.
3.
Le double et quasi-chronique déficit de légitimité du pouvoir et de bonne gouvernance en R.D.C;
La chasse effrénée au trésor par les acteurs institutionnels et non institutionnels, publics et
privés, nationaux et étrangers dans un espace économique transformé en libre-service;
La conflictualité cyclique qui déchire la sous-région des Grands Lacs africains depuis plus d’une
décennie et ses incidences délétères sur la sécurité, la vie économique, la stabilité politique et
la paix en R.D.C.
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Il est donc indispensable, pour mieux comprendre l’esprit et la lettre de l’Accord global et inclusif,
d’intégrer les contours de cette crise et ses conséquences dont les plus dramatiques auront été:
1.
L’effondrement de l’Etat congolais devenu, selon l’expression du Professeur belge Filip
Reyntjens, de l’Université d’Anvers, un grand trou noir dans la carte de l’Afrique;
2.
Une hémorragie humaine qui aura coûté à la République Démocratique du Congo environ
3.500.000 âmes, selon les statiques de l’IRC, soit 7 fois le nombre de victimes du génocide au
Rwanda, deux, voire trois fois la population de certains pays d’Afrique Centrale qui auraient été
rayés de la carte du monde s’ils étaient la RDC;
3.
La propagation à grande échelle de la pandémie du SIDA et les violations massives des droits
de l’Homme;
4.
L’énorme pillage des ressources naturelles de la RDC par les prédateurs de tous bords estimé
à 5 milliards de dollars américains par le panel de Nations Unies sur l’exploitation illégale des
ressources naturelles de la RDC;
5.
La paupérisation accrue de ses populations qui ont reculé jusqu’à reproduire à maints égards
les clichés de l’époque précoloniale.
Dans ce contexte assez complexe, le laborieux processus de restauration de la paix et de l’espoir en
République Démocratique du Congo passait nécessairement par trois engagements forts des
signataires de l’Accord global et inclusif, à savoir :
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1.
De la part des belligérants (Composante Gouvernement, MLC, RCD/Goma, RCD/ML, RCD/N
et Mai-Mai), l’engagement de cesser définitivement et effectivement les hostilités sur l’ensemble
du territoire national et de concourir à la formation d’une armée nationale restructurée et
intégrée;
2.
L’engagement de toutes les parties à l’Accord, belligérants, Opposition politique et Société
civile, d’une part, de conjuguer leurs efforts dans la mise en application des Résolutions du
Conseil de Sécurité des Nations Unies notamment celles pour le retrait de toutes les troupes
étrangères du territoire de la RDC et le désarmement des groupes armés ainsi que des milices
et, d’autre part, de sauvegarder la souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC;
3.
L’engagement de promouvoir la réconciliation nationale notamment par la mise en place des
institutions de transition, consensuelles et inclusives des principales forces politiques et sociales
du pays et devant permettre d’organiser des élections libres et démocratiques au terme d’une
période de transition de 24 mois.
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Ces institutions sont de deux natures :
A.
Institutions politiques ou de souveraineté :
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B.
Le Président de la République;
Le Gouvernement;
L’Assemblée Nationale;
Le Sénat;
Les Cours et tribunaux.
Institutions d’appui à la démocratie
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La Commission électorale indépendante;
L’observatoire national des droits de l’Homme;
La Haute autorité des médias;
La Commission vérité et réconciliation;
La Commission de l’éthique et de la lutte contre la corruption.
Toutes ces institutions restent dominées dans leurs composition, organisation et fonctionnement par
deux principes sacro-saints : l’inclusivité et la consensualité.
L’ordonnancement constitutionnel des institutions de souveraineté a produit un régime politique
atypique qui l’emprunte beaucoup au régime présidentiel et constitué ce qui peut être qualifié, à bon
droit, d’exception congolaise. Celle-ci est caractérisée par :
1.
L’existence d’un espace présidentiel à 5 comprenant un Président de la République et quatre
Vice-Présidents de la République en charge, chacun, d’une Commission gouvernementale.
L’opinion ironise appelant cet espace le G5 par extrapolation du groupe de 8 pays les plus riches
qui dirigent le monde au gré de leurs intérêts économiques;
2.
Le partage du leadership national en vertu de l’article 80 alinéa 2 de la constitution de la
transition. Ce partage suggère, pour les uns, un Exécutif collégial tandis que pour les autres, il
se résume en un exercice de concertation nécessaire entre le Chef de l’Etat et les VicePrésidents de la République en vue d’une transition non conflictuelle et tenant compte des
intérêts des différentes forces politiques en présence. Dans cette perspective, la Présidence de
la République dont il est question au paragraphe 2, section 1, chapitre 1 du titre IV de la
constitution, est le cadre de cette concertation plutôt qu’un organe de décision ou, moins
encore une institution de la République;
3.
Un bicamérisme technique et inégalitaire avec un Sénat jouant un rôle de réflexion (rédaction de
l’avant-projet de constitution) et de médiation entre les institutions, d’une part, et à la
compétence législative limitée à 5 matières : la nationalité, la décentralisation, les finances
publiques, le processus électoral et les institutions d’appui à la démocratie, d’autre part ;
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5.
Le consensus quasi unanimitaire comme mode de fonctionnement des institutions politiques, en
général, et du Gouvernement, en particulier (Accord de Pretoria, point III.5);
L’absence totale de responsabilité politique sanctionnée des membres du Gouvernement. En effet, ni
l’Assemblée Nationale, ni le Président de la République ne peuvent déchoir ou révoquer un membre
du Gouvernement qui ne dépend que de la Composante ou Entité qui l’a désigné ;
Ces institutions politiques ont pour tâche principale de matérialiser, pendant la transition, le triple
engagement des parties signataires rappelés ci-haut, la pacification, la réunification administrative et la
reconstruction du pays, la restauration de son intégrité territoriale, le rétablissement de l’autorité de
l’Etat sur l’ensemble du territoire national, la formation d’une armée nationale, restructurée et intégrée,
et l’organisation d’élections libres et transparentes à tous les niveaux permettant l’instauration d’un
régime constitutionnel démocratique ainsi que la mise en place des structures devant aboutir à un
nouvel ordre politique.
Les institutions d’appui à la démocratie, quant à elles, ont pour missions :
1.
2.
3.
4.
5.
de garantir la neutralité et l’impartialité dans l’organisation d’élections démocratiques, c’est à
dire libres, pluralistes et transparentes ;
d’assurer la neutralité des médias (publics en particulier) ;
de consolider l’unité nationale grâce à une véritable réconciliation entre les Congolais ;
de promouvoir et de protéger les droits de l’Homme ;
de favoriser la pratique des valeurs morales.
A l’effet de remplir leurs missions, le constituant a reconnu à ces institutions l’indépendance d’action
entre elles, d’une part, et par rapport aux autres institutions de la République, d’autre part.
Cependant, conscients du fait qu’il est illusoire d’assurer cette indépendance et surtout la réussite de
la transition en général si la construction politique et institutionnelle n’est pas protégée par une
charpente militaire et sécuritaire solide, les négociateurs de Pretoria ont convenu de mettre en place
un mécanisme pour la formation d’une Armée nationale, restructurée et intégrée incluant les Forces
Armées du gouvernement de la R.D.C, les Forces Armées du RCD et celles du MLC. Ce mécanisme
devait inclure le RCD-ML, le RCD-N et les Maï-Maï. Le Mémorandum portant sur le mécanisme pour
la formation d’une armée nationale congolaise restructurée et intégrée ainsi que sur la Sécurité pendant
la transition signé le 06 mars 2003, avait institué en son article 1er point 2, la réunion des Etats-Majors
des différentes Forces belligérantes pour faire office de mécanisme et édicté les principes
fondamentaux relatifs à la formation de la nouvelle armée, à la réunion des Etats-Majors, à la protection
rapprochée des dirigeants de la transition et à la mise en place de la force de police intégrée.
Œuvre de tous les protagonistes de la crise congolaise et ébauche des solutions aux principaux
problèmes posés par cette crise,le tout sous la haute surveillance de la communauté internationale
organisée sur le terrain en Comité d’Accompagnement de la Transition, CIAT, l’Accord de Pretoria
pouvait ainsi bien justifier son caractère inclusif et global et constituer une porte de sortie en même
temps qu’un espoir de paix et de renaissance de la R.D.C aussi bien pour sa population que pour les
partenaires extérieurs du Congo.
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Cependant, une chose est de conclure un accord, une autre est de respecter la parole donnée et de
réussir la mise en œuvre de cet accord. Entre le verbe et l’acte le fossé est le plus souvent si grand
que les meilleurs textes juridiques se vident dans la pratique de toute leur substance et la pertinence
d’un compromis s’effrite à l’épreuve du quotidien.
II.
L’Accord de Pretoria à l’épreuve du quotidien
Démarrée en trompe et sans accroc majeur en avril 2003, la transition congolaise accuse depuis un
temps des signes d’essoufflement et renvoie globalement l’image d’un véhicule grippé qui tourne en
rond, dans la meilleure hypothèse ou dégringole, dans la pire.
En effet, après avoir réalisé la prouesse de réunir au sein d’un même Gouvernement, d’une même
Assemblée Nationale, d’un même Sénat et à Kinshasa ceux qui se tiraient dessus hier; après avoir
provoqué un élan de solidarité à l’échelle mondiale en faveur du Peuple congolais et une reprise de la
confiance assez prometteuse du monde des affaires aux institutions nationales; après avoir franchi le
pas décisif du déverrouillage des flux commerciaux entre les différentes provinces et de la libre
circulation des personnes à travers le pays ou, à tout le moins, entre ses principales villes, l’ordre
institutionnel de la transition inquiète par ses lourdeurs, ses hésitations, ses ratés et ses retards au
regard de l’agenda convenu par les signataires de l’Accord de Pretoria.
Les fondamentaux sécuritaires, administratifs et politiques des élections, à savoir, la formation d’une
armée congolaise nationale et républicaine, la restructuration et l’intégration de la Police Nationale, la
restructuration des services de sécurité, la mise en place d’une territoriale réunifiée et neutre ainsi que
la réconciliation nationale notamment par l’amnistie et la solution de l’épineux problème de la
nationalité, sont loin d’être réalisés. Le désarmement de la population civile commence de préoccuper
le Gouvernement par suite de la découverte des caches d’armes à Bukavu et à Kinshasa. En dépit de
la présence renforcée des troupes de la MONUC, le Kivu et l’Ituri poursuivent dans certaines localités
le cycle infernal de la violence.
Hanté par le double syndrome angolais de 1975 et rwandais de 1994, chacun des principaux
belligérants campe dans son camp et garde encore quasi intacte sa puissance de feu (hommes des
troupes, armes et munitions), c à d sa capacité de nuisance et de faire dérailler la transition. Dès lors,
en dépit de la mise en place de l’Etat Major général et de la nomination des responsables militaires
jusqu’au niveau des régions, la réunification des armées est plus superficielle que réelle. L’opération
DDRRR a, certes, fait des progrès remarquables grâce à la MONUC. Cependant, ces progrès restent
insuffisants pour garantir convenablement la sécurité des populations congolaises, du territoire national
et de certains pays voisins.
Si le Gouvernement a réussi à maintenir le cap de la stabilisation macro-économique, il reste, toutefois,
englué dans la « négociomanie » et souffre de la « négociatite » qui le paralyse. L’autorité de l’Etat,
diluée dans la marre des négociations à tout crin et interminables a de la peine à se consolider et à se
rétablir sur l’ensemble du territoire national. L’affaire du colonel Kasongo et le retard considérable pris
par la nomination de nouveaux gestionnaires de la territoriale et des entreprises d’Etat, en violation
flagrante de l’article 198 de la constitution de la transition, illustrent parfaitement les incohérences et
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imperfections du régime politique issu de l’Accord de Pretoria et sont révélateurs des
disfonctionnements graves au niveau du Gouvernement. Ces disfonctionnements prennent un relief
particulier du fait du comportement l’électoraliste des animateurs des institutions de la transition qui
ne posent des actes qu’en fonction du gain à obtenir avant et pendant les élections.
Par ailleurs, la présence massive des troupes rwandaises le long des frontières communes avec la
R.D.C et leurs incursions répétées dans le territoire de cette dernière mettent en évidence l’échec de
la communauté internationale à imposer aux dirigeants rwandais la coexistence pacifique avec la
R.D.C et jettent le doute sur la possibilité de construire au Congo, dans le cadre de l’Accord de
Pretoria, une autorité politique, administrative et militaire forte, capable de devenir un interlocuteur
redoutable pour les pays voisins.
Dans ces conditions, il est permis de s’interroger sur les chances de démarrage effectif, de
fonctionnement et de réussite des institutions d’appui à la jeune démocratie congolaise tant que le
cadre institutionnel et sécuritaire national n’est pas assaini, ni stabilisé.
A ce sujet, le retard de la mise en place de ces institutions témoigne des difficultés réelles non
seulement dans leur conception, mais aussi dans leur fonctionnement futur. Si la nécessité et l’urgence
de la Commission Electorale Indépendante, de la Haute Autorité des Médias sont évidentes dans la
perspective des prochaines élections, il reste que l’Observatoire National des Droits de l’Homme sera
soumise sur le terrain à une rude gymnastique de démarcation avec le Ministère des Droits humains
tandis que la Commission d’Ethique et de lutte contre la corruption devra d’abord convaincre de sa
crédibilité et établir des synergies positives claires notamment avec les Ministères de la Justice, des
Finances et de l’Economie. Quant à la Commission Vérité et Réconciliation, le défi majeur auquel elle
est confrontée est d’éventrer le boa sans effusion de sang et de réussir un atterrissage doux qui
consolide la réconciliation nationale et sauvegarde l’unité du Peuple congolais. Dans cette optique, estil opportun de démarrer cette Commission à la veille des joutes électorales ?
CONCLUSION
En définitive, le compromis politique de l’Accord de Pretoria a eu le mérite d’ouvrir la porte qui mène
à la paix et à la reconstruction de la RDC. Il a permis les retrouvailles entre des compatriotes, hier
ennemis, aujourd’hui partenaires politiques dans les institutions de la transition en vue de la
renaissance de leur pays.
Cependant, le fonctionnement grandeur nature du système politique issu de l’Accord global et inclusif
sur la transition en RDC à mis au grand jour les limites objectives du compromis de Pretoria dans la
gestion d’un Etat en lambeaux et sous bombonne au plan économique et financier.
La première limite objective inhérente à tout accord du genre est la volonté politique et la bonne foi des
parties signataires. Ces deux déterminants sont des paramètres difficilement maîtrisables et dépendent
des équations personnelles des dirigeants. Il n’est pas évident que dans le cas d’espèce la volonté
politique et la bonne foi aient été toujours au rendez-vous.
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La deuxième es spécifique à la RDC et tient à l’implication active de la Communauté internationale à
laquelle les signataires de l’Accord de Pretoria eux-mêmes ont conféré formellement le statut de garant
de la bonne fin du processus de la transition. De ce point de vue, il n’est exagéré d’affirmer que plus
la communauté internationale s’engagera au Congo, plus les chances de réussite du processus en
cours seront accrues. L’ONU et ses membres sont donc interpellés.
Compte tenu des blocages actuels, un évaluation à mi-parcours de la mise en œuvre de l’Accord de
Pretoria s’impose afin de procéder aux ajustements nécessaires pour relancer la transition, requinquer
ses animateurs et insuffler un dynamisme nouveau à ses institutions.
A ce sujet, d’aucuns suggèrent la révision de la constitution afin de créer le poste de Coordonnateur
du Gouvernement, pour ne pas dire de Premier Ministre, qui serait confié à une personnalité nationale
politiquement asexuée et non compétitrice aux prochaines élections et de mettre fin à l’impunité
généralisée des dirigeants de la transition dont l’Accord de Pretoria et la constitution qui en est ici ont
planté le décor.
A notre avis, une telle proposition ne manquerait certainement pas de pertinence en temps normal.
Cependant, dans le contexte actuel, la voltige politique qu’elle postule ne pourra que retarder les
échéances électorales et donner au Peuple congolais et à la communauté internationale l’impression
de recourir aux dilatoires pour échapper à la sanction populaire. Le mieux que je conseille aux
Congolais est de tirer toutes les leçons de l’expérience institutionnelle actuelle dans le cadre de la
rédaction de la constitution à soumettre au prochain référendum populaire de manière à doter la RDC
d’une organisation politique et administrative qui soit la plus adéquate possible à son vécu historique
et culturel.
Dans tous les cas, l’évaluation à mi-parcours est nécessaire pour éviter l’enlisement à l’ivoirienne. A
défaut d’ajustements à l’étape actuelle, de la voie de sortie qu’il était à sa conclusion, l’Accord de
Pretoria se transformera en voie d’entrée dans une autre zone de turbulences dont la sortie peut
devenir plus périlleuse que jamais.
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