A Charleroi, le Programme Politique des Grandes Villes a

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A Charleroi, le Programme Politique des Grandes Villes a
Charleroi - Eric Massin, Echevin responsable de la Politique des Grandes Villes: "Arrêter du
jour au lendemain, c'est criminel"
Mars 2008 A Charleroi, le Programme Politique des Grandes Villes a permis de mener des
interventions multiples sur sa zone ouest. Cette concentration nécessite un travail de
longue haleine car on retrouve, dans cette zone, le plus grand nombre de bénéficiaires du
revenu d'intégration, de chômeurs, de réfugiés, de primo-arrivants, de commerces
déclinants ou fermés, de pollutions liées à l’industrie lourde et de dépôts clandestins. Un
endroit où l’espérance de vie est la plus réduite par rapport à la moyenne nationale.
Deux logiques d’intervention se sont mises en place. La première concerne la
redynamisation sociale. Il s'agit, notamment, d'un espace citoyen, de services de
proximité, d'animateurs et médiateurs de quartiers, d'agents de convivialité, de
management commercial et d'une maison pour associations. La deuxième concerne la
rénovation urbaine. Des coopérations actives se sont développées avec différents
départements régionaux et européens qui ont permis de donner une ampleur plus
importante à ces opérations.
Pour la Ville de Charleroi, les actions financées par le programme fédéral doivent se
poursuivre car elle ne dispose pas de la capacité financière pour mener ce type
d'intervention. Actuellement, le programme 2005-2007 représente un budget de
13.945.600 millions d'euros pour le contrat de ville et de 6.469.573 millions d'euros pour
le plan logement. Il permet d’employer 94 agents pour un meilleur service à la
population défavorisée.
--- M.C.: Le budget Programme Politique des Grandes Villes a surtout permis à
Charleroi de travailler sur la zone ouest de la ville, je pense…
Eric Massin: En effet. Il s'agit d'une zone où l'on trouve encore aujourd'hui certaines
entreprises industrielles. L'habitat y a énormément souffert de la proximité sidérurgique.
La Ville a donc décidé d'y concentrer les moyens de la Politique des Grandes Villes pour
La Ville a donc décidé d'y concentrer les moyens de la Politique des Grandes Villes pour
y recréer du tissu social et intervenir, notamment, en matière de logement. Dans une
première phase, on a créé une maison pour associations, un lieu dans lequel il est
possible de recréer des liaisons entre groupes sociaux qui ne se parlaient plus beaucoup.
Outre la présence d'éco-cantonniers et de personnes susceptibles de dynamiser le
commerce dans cette zone, un espace citoyen a également été créé à l'initiative du CPAS
pour permettre aux familles précarisées de se reloger.
Il y a déjà eu une deuxième phase de travail?
Oui. Tout en pérennisant les projets, la phase deux a permis d'intensifier le travail de la
maison pour associations. On a ainsi créé un hall culturel et sportif polyvalent sur une
ancienne friche industrielle. Cela nous a également permis des investissements
financiers: le rachat et la rénovation de bâtiments, mais également la création de
logements de transit dans une ancienne fonderie et la création d'une auberge de jeunesse.
Un seul élément manquait encore: c'était la politique d'aménagement du territoire. On a
donc décidé de dessiner un masterplan en adéquation avec les perspectives sociales,
économiques et culturelles de la zone. On s'est projeté dans l'avenir et on a mis sur pied
un plan de reconversion de toute la zone.
C'est donc, pour Charleroi, un subside essentiel…
Plus qu'essentiel, il est vital. Le plus important, ici, pour Charleroi, outre les employés,
c'est tout le travail qui a été entrepris. Comment faire aujourd'hui? Envisager d'être
self-supporting ou aller chercher d'autres budgets? Difficile en aussi peu de temps. Il
nous faut donc malheureusement envisager d'arrêter tout projet du jour au lendemain.
Mais arrêter, cela voudrait dire que l'on confrontera de manière brutale la population à
une cessation de support et d'investissement. On cessera toute prise en charge de frais de
fonctionnement et d'accompagnement, alors qu'on n'a pas eu l'opportunité d'envisager
d'autres sources de financement. Faire cela, c'est criminel…
Ce serait une vraie catastrophe pour les citoyens de la zone qui voyaient là, enfin,
une lueur d'espoir?
Les citoyens se sont enfin dit: "On s'intéresse à moi, on me propose un avenir". On
devrait donc aujourd'hui leur annoncer qu'on arrête tout? C'est comme si nous
promettions un dessert à un enfant et que nous lui annoncions, alors qu'il commence son
steak, qu'il n'y a plus de glace. A leur place, je baisserai à nouveau les bras. Il faut bien se
rendre compte qu'il s'agit de gens qui sont confrontés quotidiennement aux difficultés de
reclassement, qui vivent dans une zone très hostile du point de vue environnemental et
sur le plan de la qualité de vie. Il y a une forte paupérisation, avec très peu de
perspectives futures. Aujourd'hui, l'espoir est entretenu, mais, si je coupe toute
perspective, les gens risquent fort de déchanter.
Comment faites-vous pour communiquer ce problème aux personnes qui se sont
investies dans les projets?
Nous essayons de ne pas être alarmistes, mais nous avons toujours été clairs en ce qui
concerne la fin des subsides. Grâce au Ministre Dupont, les subsides ont été prolongés
d'un an, et c'est tant mieux. Une certaine confiance s'est depuis installée dans le
personnel, mais il s'agit d'une confiance prudente. Car on craint tous la décision qui sera
prise au Fédéral. Mais derrière tout cela, il y a les citoyens… C'est d'abord à eux qu'il
faut penser. Permettez-moi cette métaphore médicale: quand on entame une opération
chirurgicale, il faut parfois prendre des décisions drastiques pour que le corps reprenne
vie. Si l'opération s'arrête en bon chemin, cela signifie la mort pure et simple. Le
sentiment d'abandon est grand aujourd'hui à l'ouest de Charleroi. Et, c'est la commune
qui est en première ligne.
Il est parfois évoqué que le programme sera régionalisé. Qu'en pensez-vous?
En effet. On essaie de nous faire croire que cette revendication est flamande. Je suis assez
étonné car les grandes villes flamandes n'ont pas hésité à manifester leur intérêt pour le
Mémorandum dont Charleroi a été à l'initiative. Et cela, au-delà de tout clivage politique.
Et pourtant, nous y annonçons que nous sommes contre la régionalisation. On est contre
parce que la Politique des Grandes Villes est une politique de solidarité interpersonnelle,
au même titre que le système de solidarité sociale. Le programme transcende les
équilibres, et le seul pouvoir à même d'incarner cela, c'est le Fédéral. De plus, l'impact
d'une dégradation du niveau de vie dans une grande ville ne s'arrête pas à la limite du
territoire communal. C'est pour cela, je pense, que la Politique des Grandes villes
s'attaquait principalement aux quartiers défavorisés.
Que fera Charleroi si jamais la régionalisation devait avoir lieu?
Pour l'instant, je n'ose pas imaginer qu'on aille vers une régionalisation. Si demain il est
impossible de faire autrement, la moindre des choses, c'est qu'on obtienne un
phasing-out. Mais pas pour trois ans, pour au minimum deux échéances. Mais pourquoi
ne pourrait-on pas envisager que le Fédéral continue à donner des moyens? Vous savez,
partout en Europe, les subsides sont nationaux, une fois qu'il s'agit de redynamiser des
grandes villes à l'agonie. Pensez à Liverpool, à Bilbao… Mais, comme d'habitude, avec
le pouvoir fédéral, il s'agit d'un transfert de compétences vers les communes sans
transfert de moyens. On a déjà vécu la réforme des polices et la réforme fiscale, je crois
qu'on a déjà pas mal donné…
Vous êtes, malgré tout, confiant en l'avenir?
Je fais, en tout cas, confiance au Ministre car je sais qu'il va se battre. Je suis nettement
moins confiant en ce qui concerne les négociations qui vont avoir lieu. J'ai lu et entendu
certaines déclarations qui ne me font pas plaisir. J'ai donc certaines craintes que
j'aimerais voir dissipées.
Ce document, imprimé le 23-02-2017, provient du site de l'Union des Villes et Communes de Wallonie (www.uvcw.be).
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