Les bonnes recettes de Romain Burnand pour gagner en Bourse

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Les bonnes recettes de Romain Burnand pour gagner en Bourse
Les bonnes recettes de Romain Burnand
pour gagner en Bourse
Mis à jour le 12/05/2014 à 07:51 Publié le 11/05/2014 à 05:53
par romain dion
Gérant vedette des fonds Moneta Micro entreprises et
Moneta Multicaps, Romain Burnand est cofondateur de
la société de gestion Moneta Asset Management. Il a
bien voulu détailler pour Le Revenu sa méthode de
gestion et ses choix de valeurs.
Créé en 2003, le fonds Moneta Micro Entreprises a progressé de 580% en onze ans, soit une performance
annuelle de 19%. Mieux que Warren Buffett ! Le fonds obtient cette année le Trophée décerné par Le Revenu
du meilleur fonds investi en actions européennes pour ses performances sur dix ans.
Le fonds Moneta Micro Entreprises est fermé aux souscriptions depuis 2009, mais les épargnants peuvent
souscrire à Moneta Multicaps, qui investit à la fois sur les petites et les grandes valeurs.
« Depuis début 2012, nous avons augmenté le poids des valeurs domestiques dans nos portefeuilles, en
investissant sur des titres délaissés comme Eiffage ou Vinci et plus récemment sur GDF Suez, pénalisés en
Bourse par des anticipations d’analystes trop prudentes. Il devenait difficile à nos yeux d’avoir des bonnes
surprises au sein des sociétés les plus exposées à l’international, comme Danone ou L’Oréal, dont la valorisation
était devenue très exigeante et dont les perspectives de croissance paraissaient surestimées par les investisseurs.
Nous avons accentué le mouvement d’arbitrage à partir de l’été 2013, quand les marchés et les devises
émergents ont commencé à souffrir, victimes d’un début de surchauffe et du changement de politique monétaire
aux Etats-Unis. La zone euro est désormais revenue sur le devant de la scène.
Mais le mouvement ne semble pas terminé : depuis le rebond de 2009, les valeurs internationales ont doublé
quand les valeurs domestiques n’ont gagné « que » 30%. Le PER des actions européennes est désormais
comparable à celui des Bourses américaines, mais le potentiel de hausse des profits est bien plus élevé en
Europe, dans les banques, les services publics, les télécoms, etc.
Nous sommes des gérants actifs et nous investissons dans des valeurs décotées. Nous avons une approche
contrariante, en privilégiant des sociétés moins suivies, moins à la mode, qui peuvent avoir rencontré une
difficulté conjoncturelle. Ainsi, nous avons investi à des prix très bas sur des titres comme Altamir, Bolloré, NRJ
Group, L’Oreal, Osiatis, Wendel, etc.
Nous aimons acheter pas cher des sociétés de qualité moyenne ou bonne, au bilan solide et pas surendettées.
Et nous envisageons ce qui peut se passer, avec des options de développement à plusieurs détentes. Nous
sommes fidèles et portons les actions parfois très longtemps. Nous nous renforçons et allégeons en fonction des
événements et de la valorisation. Nous fixons aussi des objectifs. Si les nouvelles sont favorables, nous les
relevons, si elles sont mauvaises nous les réduisons.
Nous identifions des sociétés parfois plus dangereuses, mais prenons des risques calculés sur les valeurs. Nous
acceptons des risques importants, mais à des prix bas. Surtout, nous appliquons une grande discipline de
valorisation. Ainsi, en 2006 et 2007, toutes les valeurs cycliques avaient le vent en poupe et nous étions investis
sur des sociétés comme le distributeur d’acier IMS ou le spécialiste des métaux Recylex.
En actualisant des flux futurs de trésorerie (discounted cash-flow), il fallait vendre, mais nous n’en avions pas
trop envie car tous les signaux étaient au vert, nous avons quand même allégé progressivement les positions. A
l’inverse, nous avons aussi la force d’acheter des valeurs qui paraissent à première vue peu séduisantes.
En 2012, la croissance des pays émergents semblait surestimée. L’Oréal, par exemple, réalise 30% de son
chiffre d’affaires dans ces pays en développement et a profité d’une inflation annuelle à 5% qui s’est traduite par
une hausse de son chiffre d’affaires de 1,5% par an, ajoutée à des devises émergentes qui se sont apprécié : la
société profitait de la hausse des prix et de la hausse du change. L’inflation se poursuit, mais les monnaies se
sont brutalement dépréciées de 20%, soit l’équivalent de quatre années d’inflation à 5%.
Nous avons acheté L’Oreal en 2011 à 70 euros pour profiter de l’exposition du groupe à l’international,
quand la valeur était contestée, en raison d’une croissance jugée un peu molle. Le titre est passé de 0% à 3% du
fonds. Il est maintenant redescendu à 0,6% et nous parait bien valorisé, sans excès.
Autre exemple : celui de Danone dont 50% de l’activité est issue des pays émergents. L’impact de la baisse des
devises est de 9% sur le chiffre d’affaires du premier trimestre, ce n’est pas rien.
Nous apprécions des sociétés peu suivies par les analystes. Ainsi, nous avons commencé à acheter du Bolloré
en 2006. A l’époque, le titre a connu un long passage à vide et la taille de l’Afrique dans l’activité du groupe
n’était pas aussi bien identifiée. Son dirigeant ne fait pas de road show, il fait deux réunions par an à son siège
social à Puteaux, souvent le vendredi soir. C’est un mauvais client pour les brokers qui ne sont que trois à le
suivre malgré une valorisation boursière de 12 milliards d'euros !
Nous avons commencé à acheter du Vinci depuis un an à 40 euros, quand le « cash-flow yield » (cash-flow
rapporté à la capitalisation boursière) était à 10%. Il est encore de 7%. Les risques de baisse du trafic autoroutier
ne se sont pas matérialisés. Après trois ans d’environnement difficile, les résultats se redressent. L’action Vinci
offre une option gratuite sur une reprise de l’inflation. Le titre figure toujours parmi nos valeurs favorites.
Les estimations des analystes en somme des parties nous paraissent trop prudentes et la génération de cash-flow
est élevée. Le cours cote encore sous son niveau de 2007 alors que la société a poursuivi ses investissements
depuis.
Les banques présentent encore des valorisations attrayantes. Nous n’attendons pas de surprise majeure sur
les banques françaises, à l’occasion des stress tests européens. Les provisions ont été passées. Les résultats
publiés depuis deux ans étaient suffisamment importants pour provisionner davantage, si le besoin existait.
Nous ne prenons pas de position sur des paris macroéconomiques, je ne me lève jamais le matin en me disant
« tient je vais acheter des actions exposées aux Etats-Unis ». Mais nous avons une bonne connaissance des
sociétés. Il faut être imaginatif et ne pas rêver. Si l’idée est bonne nous ne serons pas les seuls à l’avoir.
Le thème des OPA peut nous encourager à être plus exigeant sur le prix de sortie. Nous achetons aussi les
sorties d’indice. Par exemple, nous avons acheté l’action Wendel quand elle est sortie du MSCI. Quand un titre
est discrédité et qu’il sort d’un indice, des vendeurs forcés créent des opportunités.
Nous donnons beaucoup d’importance au flux de trésorerie après investissements (free cash-flow). Si la
société n’a pas de réemploi de cette trésorerie, je préfère qu’elle la distribue à ses actionnaires sous forme de
dividende ou de rachat d’actions. Le dividende peut créer un plancher sur le cours.
En revanche, je considère le dividende en actions comme une hérésie. L’opération est dilutive pour les
actionnaires et a lieu quand la société n’a pas les moyens de payer en cash. La décote pratiquée dans ce cas est
alors un cadeau que les actionnaires se font à eux-mêmes.
J’aime bien regarder les graphes, ils montrent d’où le titre vient, même s'ils ne disent pas forcément où il va.
Mais un graphe qui monte depuis quinze ans est intéressant, un graphe qui baisse depuis longtemps et qui
commence à remonter, l’est tout autant.
Les petites valeurs ne sont jamais sages. Soit elles montent trop vite, soit elles baissent trop vites. Il ne faut
donc pas attendre d’elles un comportement régulier. S’y ajoute un effet début d’année, plus un retour des
souscriptions grâce au PEA PME et un intérêt plus marqué pour des sociétés davantage exposées au marché
domestique. Mais au-delà de certains excès constatés, notamment sur les biotechs, le segment des petites et
moyennes valeurs reste sain.
Dans les petites valeurs, il existe plein de cas particuliers. Nous aimons faire des hypothèses. Les petites sociétés
se développent, entrent dans des indices, sont davantage suivies et les cours montent.
Nous avons investi dans Stallergènes en 2003, après un changement de direction et une amélioration des
résultats anticipés qui faisaient suite à une période plus difficile. Le chiffre d’affaires et la marge se sont
améliorés. L’action est montée jusqu’à 4% du fonds, mais le titre représente maintenant moins de 1%.
Aujourd’hui, nous apprécions Korian, devenu après son rapprochement avec Medica le plus gros groupe privé
européen de maison de retraites, devant Orpea.
Nous restons investis dans Altamir, dont l’action présente encore une décote de 30% sur la valeur des actifs
malgré la hausse du cours. L’actif net réévalué (ANR) a augmenté de 13% en 2013, une progression inférieure à
la performance des valeurs moyennes. Il y a donc encore de la marge pour une hausse de l’ANR et une baisse de
la décote.
Dans le secteur des biotechs, nous portons Transgène, en attendant un nouveau partenaire commercial, après
l'abandon de Novartis, pour le produit du laboratoire arrivé en phase III contre le cancer du poumon. Nous avons
aussi investi dans DBV Technologies, mais nous avons vendu depuis ».

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