Dossier 8 - ECN Blanches

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Dossier n° 8
DOSSIER N° 8
Drs Makoto Miyara et Jean-Benoît Arlet
Rédaction - novembre 2013
Une femme de 29 ans sans antécédent particulier, mariée, un enfant, sous pilule estroprogestative, consulte aux urgences
pour des céphalées d’intensité inhabituelle depuis hier et un flou visuel bilatéral depuis le matin. Elle fume 10 cigarettes
par jour depuis dix ans. Son père et son frère aîné sont en bonne santé. Sa mère a eu un cancer de la thyroïde opéré il y
a vingt ans et qui est en rémission complète.
Elle se plaint de fatigue depuis huit mois, présente dès le matin au réveil et qui persiste dans la journée. La patiente
a un poids stable (50 kg pour 1,65 m). Elle dit présenter de temps en temps (une fois par mois en moyenne) des malaises
qui se manifestent par des céphalées sans troubles visuels, des sueurs et par une fatigue encore plus marquée
que d’habitude avec la sensation que « le cœur s’emballe ».
L’examen retrouve une température à 37,2 °C, une fréquence cardiaque à 98 batt/min, une pression artérielle
à 210/120 mmHg. La fréquence respiratoire est à 14/min.
La patiente présente une céphalée en casque sans douleur à la palpation sinusienne. Il n’y a pas de déficit sensitivo-moteur.
Le reflexe cutané plantaire est en flexion, et les réflexes myotatiques sont tous présents et symétriques. L’auscultation
cardiaque et pulmonaire est normale, la patiente n’est pas dyspnéique. La diurèse est normale.
L’ECG s’inscrit en rythme sinusal et ne montre pas de trouble de la repolarisation.
QUESTION 1
Un fond d’œil est réalisé. Décrivez cet examen.
QUESTION 2
Dans ce contexte, quel est le seul diagnostic à évoquer en urgence ?
Le bilan biologique montre :
Na+ : 138 mmol/L, K+ : 4,4 mmol/L, glycémie : 5,6 mmol/L, protides : 95 g/L, urée : 18 mmol/L, créatinine : 110 µmol/L,
Na+ urinaire : 10 mmol/L, K+ urinaire : 35 mmol/L, bandelette urinaire normale. Hb : 18 g/dL, hématocrite à 61 %, globules
rouges : 5 500 000/mm3, globules blancs : 12 000/mm3, plaquettes : 400 000/mm3, absence de schizocytes au frottis
d’après le biologiste de garde, TP : 90 %, TCA : 33 s. pour un témoin à 32 s. Troponine et CRP négatives.
QUESTION 3
Quelle est votre interprétation du bilan biologique ?
QUESTION 4
Quel est le diagnostic étiologique le plus probable ? Quel geste clinique est, en conséquence, contre-indiqué ?
« Ces documents ont été rédigés par un Comité Pédagogique Indépendant et validés par le Comité Scientifique de La Revue du Praticien,
publication éditée par Global Média Santé ».
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QUESTION 5
Quelle est votre prise en charge thérapeutique en urgence ?
QUESTION 6
Quel examen biologique vous semble le plus pertinent pour confirmer votre diagnostic ?
QUESTION 7
Quel bilan radiologique demandez-vous pour étayer votre diagnostic étiologique ? Justifiez.
QUESTION 8
Quelle est la conséquence pour votre bilan étiologique de la notion d’antécédents familiaux de cancers
de la thyroïde ? La patiente confirme qu’elle est suivie en ville pour un nodule thyroïdien dont le diagnostic
étiologique n’a pas été établi. Quels examens biologiques faites-vous réaliser pour parvenir au diagnostic
complet ?
« Ces documents ont été rédigés par un Comité Pédagogique Indépendant et validés par le Comité Scientifique de La Revue du Praticien,
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GRILLE DE CORRECTION DU DOSSIER N° 8
Drs Makoto Miyara et Jean-Benoît Arlet
Rédaction - novembre 2013
Une femme de 29 ans sans antécédent particulier, mariée, un enfant, sous pilule estroprogestative, consulte aux urgences
pour des céphalées d’intensité inhabituelle depuis hier et un flou visuel bilatéral depuis le matin. Elle fume 10 cigarettes
par jour depuis dix ans. Son père et son frère aîné sont en bonne santé. Sa mère a eu un cancer de la thyroïde opéré il y
a vingt ans et qui est en rémission complète.
Elle se plaint de fatigue depuis huit mois, présente dès le matin au réveil et qui persiste dans la journée. La patiente
a un poids stable (50 kg pour 1,65 m). Elle dit présenter de temps en temps (une fois par mois en moyenne) des malaises
qui se manifestent par des céphalées sans troubles visuels, des sueurs et par une fatigue encore plus marquée
que d’habitude avec la sensation que « le cœur s’emballe ».
L’examen retrouve une température à 37,2 °C, une fréquence cardiaque à 98 batt/min, une pression artérielle
à 210/120 mmHg. La fréquence respiratoire est à 14/min.
La patiente présente une céphalée en casque sans douleur à la palpation sinusienne. Il n’y a pas de déficit sensitivo-moteur.
Le reflexe cutané plantaire est en flexion, et les réflexes myotatiques sont tous présents et symétriques. L’auscultation
cardiaque et pulmonaire est normale, la patiente n’est pas dyspnéique. La diurèse est normale.
L’ECG s’inscrit en rythme sinusal et ne montre pas de trouble de la repolarisation.
QUESTION 1
Un fond d’œil est réalisé. Décrivez cet examen.
Il s’agit du fond d’œil de l’œil droit. Pour déterminer le côté du fond d’œil, il suffit de savoir que la papille est du côté de l’œil donc
il s’agit de l’œil droit.
Le fond d’œil montre des nodules cotonneux péripapillaires, un croisement artérioloveineux sans œdème papillaire (rétinopathie
hypertensive stade 3). Les nodules cotonneux signent en dehors de la présence d’œdème papillaire l’urgence hypertensive (HTA
grade 3).
QUESTION 2
Dans ce contexte, quel est le seul diagnostic à évoquer en urgence ?
Il s’agit d’une HTA maligne devant l’association d’une HTA sévère définie par une pression artérielle > 180/110 mmHg (HTA grade
3) avec une rétinopathie hypertensive avec nodules cotonneux (stade 3). Il n’y a pas de souffrance viscérale autre détectable à
l’examen clinique.
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Le bilan biologique montre :
Na+ : 138 mmol/L, K+ : 4,4 mmol/L, glycémie : 5,6 mmol/L, protides : 95 g/L, urée : 18 mmol/L, créatinine : 110 µmol/L,
Na+ urinaire : 10 mmol/L, K+ urinaire : 35 mmol/L, bandelette urinaire normale. Hb : 18 g/dL, hématocrite à 61 %, globules
rouges : 5 500 000/mm3, globules blancs : 12 000/mm3, plaquettes : 400 000/mm3, absence de schizocytes au frottis
d’après le biologiste de garde, TP : 90 %, TCA : 33 s. pour un témoin à 32 s. Troponine et CRP négatives.
QUESTION 3
Quelle est votre interprétation du bilan biologique ?
La patiente a une augmentation de l’urée plus importante que la créatinine et un rapport Na/K urinaire < 1, en faveur
d’une probable insuffisance rénale aiguë fonctionnelle et une augmentation de la protidémie, de l’hémoglobine et de
l’hématocrite en faveur d’une hémoconcentration.
L’ensemble est donc en faveur d’une déshydratation extracellulaire.
QUESTION 4
Quel est le diagnostic étiologique le plus probable ? Quel geste clinique est, en conséquence, contre-indiqué ?
Le tableau clinique est très fortement évocateur de phéochromocytome devant la présence de l’association céphaléespalpitations-sueurs (triade de Ménard) sous forme de crises et l’hypertension artérielle.
Les autres causes d’HTA malignes secondaires sont beaucoup moins probables (microangiopathies thrombotiques, sténose
des artères rénales, autres endocrinopathies, médicaments, drogues, prééclampsies).
La palpation abdominale est formellement contre-indiquée jusqu’à l’exérèse du phéochromocytome devant le risque de nouvelle
poussée hypertensive pouvant, au maximum, entraîner l’arrêt cardiocirculatoire.
QUESTION 5
Quelle est votre prise en charge thérapeutique en urgence ?
La prise en charge comprend l’hospitalisation de la patiente en unité de soins continus, la pose de voie veineuse périphérique
(idéalement deux), le monitorage cardiotensionnel et l’oxymétrie de pouls.
Le traitement médicamenteux comprend un traitement antihypertenseur par au minimum un inhibiteur calcique, nicardipine
(2 à 4 mg/h à la seringue électrique), avec possiblement une association avec d’autres antihypertenseurs (association alphaet bêtabloquant (labétalol) et devant le tableau de déshydratation extracellulaire (hémoconcentration et insuffisance rénale aiguë
fonctionnelle) un remplissage prudent par sérum salé isotonique (par exemple 1 à 2 L sur 24 heures).
Une HBPM pourra être introduite dès correction de la fonction rénale. Les traitements en première intention par nitroprussiate
ou par urapidil peuvent être discutés.
L’objectif tensionnel est une baisse d’environ 25 % sans normalisation (soit une PAD entre 100 et 110 mmHg en 24 heures)
afin d’éviter un AVC ischémique secondaire à une baisse trop rapide de la pression de perfusion cérébrale. Dans ce contexte,
les diurétiques sont contre-indiqués, la seule indication en cas de crise aiguë hypertensive-HTA maligne étant l’OAP hypertensif.
Les bêtabloquants sont fortement déconseillés dans le contexte du fait du risque de majorer les effets alpha et donc majorer
la vasoconstriction.
Parmi les mesures associées, il faut arrêter le tabac et arrêter la pilule du fait du risque thrombotique. Elle pourra être reprise
après l’exérèse du phéochromocytome.
QUESTION 6
Quel examen biologique vous semble le plus pertinent pour confirmer votre diagnostic ?
Le dosage sanguin des dérivés méthoxylés des catécholamines : métanéphrines et normétanéphrines ont la meilleure valeur
diagnostique lorsqu’ils sont réalisés au cours des poussées.
Le dosage urinaire sur 24 heures est utile en dehors des poussées, sachant que l’examen est plus rentable en période de
poussées. Le recueil des urines nécessite un régime particulier, avec l’exclusion de chocolat, bananes, agrumes et il doit être
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idéalement réalisé trois jours de suite. Les dosages urinaires doivent obligatoirement comprendre une créatininurie
des 24 heures pour s’assurer que le recueil est bien réalisé sur 24 heures. La sensibilité du dosage sanguin est supérieure au
dosage urinaire.
QUESTION 7
Quel bilan radiologique demandez-vous pour étayer votre diagnostic étiologique ? Justifiez.
Il faut réaliser un scanner ou une IRM au moins centrée sur les surrénales pour détecter un phéochromocytome unilatéral
ou parfois bilatéral, l’idéal étant d’avoir une imagerie thoraco-abdomino-pelvienne. À l’IRM, les phéochromocytomes sont en
hypersignal T2. Il existe des lésions extrasurrénaliennes appelées paragangliomes dont la localisation peut être tout le long
des chaînes parasympathiques et sympathiques. Des lésions secondaires hépatiques doivent être recherchées même si les
phéochromocytomes sont le plus souvent bénins. Cette recherche est sensibilisée par la réalisation d’une scintigraphie au MIBG
(méta-iodo-benzyl-guanidine) qui confirmera la fixation de la lésion et éliminera les formes multiples de phéochromocytome
ou métastatiques. Il est important de saturer la thyroïde avec du lugol pour éviter que le MIBG soit absorbé par la thyroïde.
QUESTION 8
Quelle est la conséquence pour votre bilan étiologique de la notion d’antécédents familiaux de cancers
de la thyroïde ? La patiente confirme qu’elle est suivie en ville pour un nodule thyroïdien dont le diagnostic
étiologique n’a pas été établi. Quels examens biologiques faites-vous réaliser pour parvenir au diagnostic
complet ?
Il pourrait s’agir de cancer médullaire de la thyroïde familial dans le cadre d’une néoplasie endocrinienne multiple de type II
(NEM II) devant la survenue d’un phéochromocytome chez la patiente et l’histoire familiale. La localisation des nodules est le plus
souvent médiane, et les nodules sont souvent douloureux. Il faut préciser la notion de flushs et de diarrhées motrices
(que la patiente n’a pas décrit dans l’énoncé).
Pour le diagnostic biologique de carcinome médullaire de la thyroïde, il faut demander un dosage de la thyrocalcitonine.
Dans le contexte de NEM II, il faut rechercher une hyperparathyroïdie avec un bilan phosphocalcique et un dosage de la PTH 1-84.
Enfin, il faut rechercher une mutation du gène RET.
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GRILLE DE NOTATION DU DOSSIER N° 8
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QUESTION
Q1
RÉPONSES ATTENDUES
COTATION
Fond d’œil de ........................................................................................................................................................................
l’œil droit ....................................................................................................................................................................................
Nodules cotonneux ........................................................................................................................................................
Rétinopathie hypertensive de stade 3......................................................................................................
COPIE
NC
3
5
2
Si œdème papillaire : zéro à la question
Sous-total
Q2
HTA maligne ..........................................................................................................................................................................
HTA sévère avec PA > 180/110 mmHg ........................................................................................................
et
nodules cotonneux (« atteinte ophtalmologique typique »
ou « rétinopathie stade 3 » acceptée)......................................................................................................
Sous-total
Q3
Q4
Q5
....................................................................................................................................................................
....................................................................................................................................................................
10
6
2
2
10
Insuffisance rénale aiguë fonctionnelle
(pas de point en l’absence du mot aiguë) ............................................................................................
Hémoconcentration........................................................................................................................................................
Déshydratation extracellulaire ..........................................................................................................................
3
3
4
Sous-total....................................................................................................................................................................
10
Phéochromocytome ....................................................................................................................................................
Association céphalées-palpitations-sueurs ......................................................................................
Épisode par crises paroxystiques ................................................................................................................
Palpation abdominale contre-indiquée ..................................................................................................
8
2
2
3
Sous-total....................................................................................................................................................................
15
Hospitalisation ....................................................................................................................................................................
Monitorage cardiotensionnel ............................................................................................................................
Antihypertenseur parentéral ............................................................................................................................
Inhibiteur calcique : nicardipine ou nitroprussiate ou urapidil ..................................
Hydratation au sérum physiologique ......................................................................................................
Objectif tensionnel : 25 % de baisse dans les premières heures ............................
Accepté : jusqu’à 40 % de baisse, baisse modérée de la PA,
baisse progressive de la PA
1
3
5
5
3
3
Arrêt du tabac ....................................................................................................................................................................
Arrêt temporaire de la contraception orale ....................................................................................
Zéro si :
- nifédipine sublingual
- diurétiques
- normalisation rapide de la pression artérielle
NC
NC
Sous-total....................................................................................................................................................................
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QUESTION
Q6
RÉPONSES ATTENDUES
Dosage de métanéphrine et normétanéphrine ............................................................................
Sanguine/sérique/plasmatique .........................................................................................................................
Au moment de la crise hypertensive .........................................................................................................
Sous-total
Q7
.....................................................................................................................................................................
TDM ou IRM surrénalienne ou TDM thoraco-abdomino-pelvienne .........................
Scintigraphie à la MIBG ..............................................................................................................................................
Après saturation de la thyroïde avec du lugol ..............................................................................
Recherche de lésion(s) surrénalienne(s) ...............................................................................................
Uni- ou bilatérales ............................................................................................................................................................
Métastases hépatiques...............................................................................................................................................
Paragangliomes/lésions ectopiques .........................................................................................................
Sous-total
Q8
COTATION
.....................................................................................................................................................................
Carcinome médullaire de la thyroïde.........................................................................................................
Néoplasie endocrinienne multiple de type II.....................................................................................
Thyrocalcitonine ................................................................................................................................................................
Bilan phosphocalcique ................................................................................................................................................
PTH 1-84 ......................................................................................................................................................................................
Mutation du gène RET ...............................................................................................................................................
Sous-total
.....................................................................................................................................................................
NOTE MAXIMALE AU DOSSIER………………………………………............................………
COPIE
5
3
2
10
3
4
1
1
1
1
1
12
2
2
3
2
2
2
13
100
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FICHE N° 1 DU DOSSIER N° 8
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PRISE EN CHARGE DES URGENCES HYPERTENSIVES
I. DÉFINITION
L’urgence hypertensive nécessitant une hospitalisation est définie par une augmentation de la pression artérielle (PA)
(> 180/110 mmHg) ET une souffrance viscérale.
La souffrance viscérale peut être :
- tous signes neurologiques focaux ;
- OAP ;
- dissection artérielle (aortique ++) ;
- insuffisance rénale aigüe ;
- l’hypertension maligne (ou accélérée) définie par HTA, syndrome polyuro-polydipsique, céphalées, et fond d’œil de stade 3
(exsudats et/ou nodules cotonneux et/ou hémorragies) ou 4 (œdème papillaire) et si évoluée signes neurologiques (cécité
corticale, troubles de conscience, épilepsie).
On parle d’HTA sévère si la pression artérielle est ≥ 180 mmHg de systolique et/ou 110 mmHg de diastolique (HTA grade 3)
sans souffrance viscérale : le traitement peut alors être ambulatoire : repos et traitement antihypertenseur oral et progressif,
règles hygiéno-diététiques (limitation des apports sodés).
II. ÉTIOLOGIES DES HTA MALIGNES
- +++ les atteintes rénales: glomérulonéphrites, sténoses artères rénales ;
- des causes endocriniennes (plus rare) : phéochromocytome, hyperaldostéronisme primaire, syndrome de Cushing, acromégalie ;
- pendant la grossesse : éclampsie ;
- et beaucoup d’HTA essentielle
III. BILAN CLINIQUE ET PARACLINIQUE
Examen clinique.
Interrogatoire, examen neurologique (signes focaux ?), pression artérielle aux deux bras (assis et couché), fond d’œil, auscultation
cardiaque et pulmonaire (crépitants).
Bilan systématique.
ECG, radio thoracique (si possible).
Ionogramme sanguin et urinaire, urée, créatininémie et créatinurie, glycémie, hémogramme, bandelette urinaire.
Si HTA secondaire suspectée : réaliser au moment de la poussée un prélèvement pour rénine, aldostérone et catécholamines.
Autres examens en fonction de la clinique (scanner cérébral, échodoppler cardiaque…).
IV. PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE :
Particularité suivant les atteintes.
• HTA sévère et AVC : ne pas traiter l’HTA avant d’avoir une imagerie. Transfert si possible dans un stroke center.
Après le résultat du scanner ou de l’IRM :
- si ischémique : ne pas traiter l’HTA (peut aggraver l’AVC ischémique) sauf si HTA > 180/110 et thrombolyse envisagée
ou dissection carotidienne ou IDM associé ;
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- si hémorragique : réduction prudente de la PA (mais pas parfaitement démontrée).
Traiter les symptômes (vomissements, épilepsie…).
• OAP : traitement par diurétiques et dérivés nitrés.
• Dissection aortique : traitement de l’HTA par bêtabloquant.
• Éclampsie : MgSo4 (sulfate de magnésie).
• HTA malignes :
Inhibiteur calcique nicardipine (2 à 4 mg/h), alternative ou association : nitroprusside.
But : baisse rapide de la PA mais progressive (surtout pas sa normalisation, baisse d’environ 25 % dans les premières heures).
Adapter le traitement à distance (IEC, sartan, inhibiteurs calciques, bêtabloquants, diurétiques…), en fonction des antécédents
essentiellement (diabète, AVC ischémique…).
• Phéochromocytome : alpha- et bêtabloquant (labétalol).
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FICHE N° 2 DU DOSSIER N° 8
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PHÉOCHROMOCYTOME ET PARAGANGLIOMES
DÉFINITIONS :
• Phéochromocytome : tumeur surrénalienne dérivant de la médullosurrénale sécrétant des catécholamines.
• Paragangliomes : tumeurs dérivées des ganglions sympathiques et parasympathiques extrasurrénaliennes. Ils siègent par
ordre de fréquence dans l’organe de Zuckerkandl, la vessie, les hiles rénaux, le médiastin postérieur, le péricarde et le cou.
Ils ont un risque plus élevé d’évolution maligne.
• Ces tumeurs sont le plus souvent bénignes. Les récidives surviennent dans 20 % des cas après exérèse dans les dix ans.
Elles peuvent parfois métastaser dans le foie (10 % des cas).
• La symptomatologie est liée à l’activation des récepteurs alpha des catécholamines et l’activation du système rénineangiotensine qui entraînent une vasoconstriction systémique avec élévation de la pression artérielle et une accélération du
rythme cardiaque par l’effet bêta-adrénergique.
PRÉSENTATION CLINIQUE
Crises paroxystiques
• Survenue spontanée ou déclenchée par la compression ou l’ébranlement de la tumeur (traumatisme, accouchement, chirurgie).
• Poussées hypertensives, crise d’HTA maligne, parfois mort subite.
• Triade de Ménard, céphalées-palpitations-sueurs : très spécifique.
• Symptômes liés à la vasoconstriction : pâleur, refroidissement des extrémités.
• Anxiété, tremblements, nausées, vomissements, flou visuel, douleurs abdominales ou thoraciques (rechercher une dissection
aortique).
• Malaises à la miction : il faut rechercher un paragangliome vésical.
Symptômes chroniques
• HTA réfractaire aux traitements habituels.
• Associée à une hypotension orthostatique.
• Signes d’hypermétabolisme :
– amaigrissement, thermophobie (pseudothyroroxicose) ;
– intolérance au glucose, voire diabète.
• Diminution de la masse sanguine par vasoconstriction chronique.
• Fièvre en cas de nécrose de la tumeur.
Examen clinique
• Palpation abdominale interdite : risque de déclenchement de crises hypertensives.
Particularité : formes asymptomatiques
• Du fait de la dangerosité de tout phéochromocytome, avec le risque de mort subite, toute tumeur surrénalienne de découverte
fortuite (incidentalomes ou fortuitome surrénaliens) doit faire éliminer un phéochromocytome.
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DIAGNOSTIC
Dosages statiques
• Dosage des dérivés méthoxylés des catécholamines : métanéphrine, norméthanéphrine :
– plasmatique lors des crises hypertensives, le plus rentable ;
– urinaires sur 24 heures avec dosage de la créatininurie.
Imagerie
• Après obtention d’un dosage statique positif.
• TDM thoraco-abdomino-pelvien ou IRM (à l’IRM, les phéochromocytomes sont hyperintenses en T2).
• Scintigraphie à la MIBG (méta-iodo-benzyl-guanidine) : permet la recherche de localisations multiples, ectopiques, de
métastases. Elle est plus sensible que le scanner ou l’IRM.
TRAITEMENT
• Seule l’exérèse chirurgicale est curative.
• La chirurgie doit être accompagnée d’une anesthésie rigoureusement encadrée par des anesthésistes expérimentés avec un
traitement antihypertenseur optimisé (labétalol).
• Nécessité de surveillance au long cours devant le risque de récidive.
FORMES FAMILIALES/GÉNÉTIQUES
• Les phéochromocytomes doivent faire rechercher une maladie familiale associée :
- maladie de von Hippel-Lindau (gène VHL) ;
- maladie de von Recklinghausen (gène NF1) ;
- néoplasie endocrinienne multiple de type 2 (gène RET) ;
- phéochromocytomes familiaux (SDHB, SDHD, TMEM17).
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Items abordés dans ce dossier
130.
Hypertension artérielle de l’adulte.
140.
Diagnostic des cancers : signes d’appel et investigations paracliniques ; stadification ; pronostic.
186.
Asthénie et fatigabilité.
187.
Anomalie de la vision d’apparition brutale.
188.
Céphalée aiguë et chronique.
219.
Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques.
241.
Goitre et nodule thyroïdien.
252.
Insuffisance rénale aiguë – Anurie.
310.
Élévation de la créatininémie.
316.
Hémogramme : indications et interprétation.
Références
HAS 2002
http://www.soc-nephrologie.org/PDF/enephro/recommandations/Afssaps/2002/HTA_adulte.pdf
Société européenne d’HTA, page 55 et 85
http://www.eshonline.org/asset.axd?id=4c2aebe6-2fc7-4762-b08d-a1dbe9977c33&t=634586521814470000
« Ces documents ont été rédigés par un Comité Pédagogique Indépendant et validés par le Comité Scientifique de La Revue du Praticien,
publication éditée par Global Média Santé ».
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