L`effet bélier, une technique naturelle pour faire apparaître et
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L`effet bélier, une technique naturelle pour faire apparaître et
Filière Ovine et Caprine n°5, juillet 2003 L’effet bélier, une technique naturelle pour faire apparaître et regrouper les chaleurs des brebis. Un article de Ph. Vandiest – F.I.O.W. La période de reproduction des ovins est dépendante de la longueur du jour. Lorsque celle-ci est croissante, ils entrent en repos sexuel pour n’en sortir que progressivement lorsque les jours raccourcissent. Parmi nos races coutumières, certaines sont peu sensibles à la lumière, comme le Texel et le Bleu du Maine. D’autres le sont plus, comme le Suffolk, le Hampshire, le Vendéen et l’Ile de France. Si cette sensibilité dépend de la race, elle dépend aussi de la souche détenue : certains éleveurs ont des Ile de France actifs jusqu’en avril alors que chez d’autres ils ne le sont que jusque fin janvier ou des Texel déjà actifs fin juillet alors que la majorité ne le sont qu’à partir de mi-septembre. Cette dépendance de la période de reproduction vis-à-vis de la longueur du jour est particulièrement forte dans les pays éloignés de l’équateur, comme le nôtre, où la longueur du jour diffère fortement d’une saison à l’autre et peut varier du simple au double entre l’hiver et l’été. Elle est responsable de la très forte saisonnalité de notre production et de là, de l’approvisionnement inconstant du marché et notamment des filières qui proposent des produits régionaux. Diverses techniques faisant appel à des traitements hormonaux permettent de désaisonnaliser la reproduction des ovins, avec, pour certaines, un effet de synchronisation des chaleurs ou d’augmentation du taux d’ovulation. La pose d’implant vaginal imbibé de progestérone et la pose d’implant sous cutané de mélatonine sont les plus connues de ces techniques. Elles ont de multiples atouts, dont ceux d’une maîtrise parfaite de l’apparition des chaleurs et d’une possibilité de désaisonnement total pour celle faisant appel à la pose d’implant de progestérone. Ces techniques sont malheureusement coûteuses et n’apportent pas toujours les résultats escomptés. Les échecs engendrent des repasses et l’étalement de la production. L’effet bélier est une technique de regroupement naturel des chaleurs qui permet en outre d’avancer quelque peu la période de reproduction des animaux, sans pour cela prétendre pouvoir la désaisonnaliser. Il est en cela le seul recours des éleveurs travaillant pour des filières excluant l’utilisation de traitements hormonaux, comme la filière « bio ». Bien que simple à mettre en œuvre, il nécessite cependant la connaissance de ses animaux pour savoir quand il doit être appliqué. L’effet bélier consiste à introduire un bélier dans un troupeau de femelles en anoestrus mais proches du réveil sexuel, et ce après une séparation d’un mois minimum. Cette séparation est à la fois physique, visuelle et olfactive. Environ 90 % des femelles ovulent alors dans les 2 à 4 jours suivants. Cette ovulation n’est pas accompagnée de chaleur ; elle est dite silencieuse. Dans la moitié des cas, le corps jaune qui se développe sur l’ovaire après l’ovulation régresse après quelques jours et une seconde ovulation silencieuse se produit environ 6 jours plus tard. Dans les deux cas, un cycle ovulatoire normal d’une durée d’environ 17 jours succède alors à l’ovulation silencieuse et aboutit une ovulation fécondable accompagnée de chaleur. 1 Filière Ovine et Caprine n°5, juillet 2003 Dans un troupeau de femelles en anoestrus soumis à l’effet bélier, on observe donc deux pics de chaleurs : un premier environ 19 jours après l’introduction du bélier (2 jours + 17 jours) et un second environ 25 jours après l’introduction du bélier (2 jours + 6 jours + 17 jours). Environ 10 % des brebis ne subissent pas l’effet bélier, certaines sont encore en anoestrus profond (l’effet bélier n’est efficace que dans le mois qui précède la reprise spontanée des cycles) tandis que d’autres, plus précoces, sont déjà en cycle. La réussite de l’effet bélier dépend de l’intensité de l’anoestrus. S’il est fait trop tôt en saison, lorsque l’anoestrus est encore trop intense, une minorité de brebis ovulent suite à l’introduction des béliers et parmi elles le nombre de brebis ayant deux ovulations silencieuses est important. Fait à l’approche du réveil sexuel, la réponse des brebis est importante et le nombre de brebis entrant en cycle ovulatoire normal après une seule ovulation silencieuse est important. De nombreux éleveurs pratiquent l’effet bélier trop tard, lorsque les brebis sont déjà sorties de leur anoestrus saisonnier et sont déjà en cycle ovulatoire. Le regroupement des chaleurs tient alors du hasard, l’effet bélier n’étant responsable que d’une éventuelle légère diminution de la longueur du cycle. L’effet bélier est maximal lorsqu’il y a contact physique entre le bélier et les brebis. Cependant, il peut aussi être réalisé avec satisfaction en exploitant durant les deux premières semaines uniquement les autres sens des animaux, l’ouïe, l’odorat et la vue, de façon à éviter la saillie précoce des quelques femelles déjà sorties d’anoestrus. Il se fait alors en mettant durant cette période le bélier dans une prairie proche de celle des femelles. La réussite de l’effet bélier dépend des facteurs suivants : - le moment de son application : il doit être fait durant le mois qui précède le retour en cycle des brebis. Avant, l’anoestrus étant trop profond, peu de brebis répondent à la technique et beaucoup de celles-ci ont deux ovulations silencieuses à 6 jours d’intervalle avant d’entrer dans un cycle normal menant à une ovulation associée à une chaleur. Après, les brebis étant déjà en cycle, l’introduction du bélier n’a plus aucun effet de synchronisation des cycles. Le moment où il doit être fait dépend de la race et de la souche détenue. Prendre pour référence de sortie d’anoestrus la date des premières mises bas des années antérieures est le meilleure principe. - l’âge des femelles : les agnelles et les antenaises ont un anoestrus plus intense que les brebis et répondent moins bien à l’effet bélier : davantage de deuxième ovulation silencieuse ou échec de l’effet bélier. - la date du tarissement des femelles : l’anoestrus des femelles est d’autant plus intense qu’elles ont été taries tardivement par rapport à la pratique de l’effet bélier. Respecter une période de 2 mois de repos est à conseiller. - le passé alimentaire des brebis : toute période de sous alimentation des brebis, même de faible durée, durant les deux mois qui précèdent la pratique de l’effet bélier est préjudiciable à sa réussite car elle intensifie l’état d’anoestrus. Un flushing effectué après un période de sous alimentation ne permet de récupérer la situation et d’atteindre le taux de réussite obtenu avec des animaux alimentés correctement de façon constante. 2