Handicap de Guillemot Marie 4 Collège Pierre Auguste Renoir

Transcription

Handicap de Guillemot Marie 4 Collège Pierre Auguste Renoir
Handicap
de
Guillemot
Marie
ème D
4
Collège Pierre
Auguste Renoir
Handicap
L’adolescent poussa la porte à demi vitrée et vint se poster devant une jeune fille.
« - Bonjour », dit-il ; Puis il fouilla dans ses poches pour en sortir une jolie petite boîte à
musique. La jeune fille écarquilla de grands yeux d’émerveillement : Jamais quelqu’un ne lui
avait offert de cadeau, à part ses parents. Il la lui tendit et elle l’attrapa avec assurance,
l’ouvrit et ferma les yeux. La mélodie était magnifique, telle de petites clochettes qui tintent.
Puis elle ouvrit les yeux ; le garçon la contemplait en souriant. Elle eut tout à coup une idée,
puis attrapa les roues de son fauteuil roulant pour avancer jusqu’à une table où se trouvaient
plein de feutres, crayons et feuilles. Elle en prit une et commença à dessiner seulement au
crayon de papier. Le garçon, dont la curiosité l’avait emporté, s’approcha et se pencha pardessus l’épaule de l’adolescente. Celle-ci prononça ses premiers mots depuis qu’il était
arrivé :
« Quel est ton nom ? demanda-t-elle.
- Gabriel. Et toi ?
- Morgane. »
Elle signa son dessin, le « dédicaça » et le donna à Gabriel. Il resta muet puis lâcha un :
« - Ouah! C’est magnifique ! »
Elle avait reproduit à la perfection la boîte à musique avec la ballerine tout habillée de blanc.
« - Tu ne voudrais pas faire un concours ?demanda-t-il.
- Pour quoi faire ? Je suis en fauteuil, je te rappelle, je ne pourrais jamais gagner, même si je
le voulais…
- N’importe quoi ! Ça ne change absolument rien. Que tu sois en fauteuil roulant ou pas, tu as
le droit de participer, voire de gagner. Nous sommes en France, rappelle-toi : Liberté, Egalité,
dit-il en insistant sur ce dernier mot.
- Et Fraternité, oui, je sais, mais je ne peux pas encore sortir de l’hôpital…
- Alors, le concours viendra ici et je serai ton premier supporter ! »
Elle lui sourit. Ce garçon était très gentil avec elle, pas comme tous les autres… Pourtant, ils
venaient à peine de se rencontrer.
Quelques mois plus tard, pendant lesquels ils s’étaient retrouvés toutes les semaines et étaient
devenus meilleurs amis, Morgane et Gabriel se promenaient aux alentours de l’hôpital.
Soudain, Gabriel s’arrêta, ce qui surprit Morgane. Il se tourna vers le panneau d’affichage qui
se trouvait là et la jeune adolescente commença à lire la seule affiche présente :
« La semaine prochaine, Samedi 12 juin, un concours de dessin est organisé à l’hôpital. Tous
les artistes sont les bienvenus ! »
Elle le relut au moins cinq ou six fois pour vérifier que ce n’est pas une illusion et finit par
serrer la taille de Gabriel. Elle recula.
« - C’est génial ! lança-t-il, tu vois que tu peux y participer… »
Il avait le sourire en coin, comme un gamin fier de sa bêtise.
« - Non… Ne me dit pas que…
- Et si ! Mais ne me remercie surtout pas !
- Ce n’est pas ça, mais… En fait… Je t’adore !!!
Il se baissa et elle se jeta à son cou ; il hésita puis la serra dans ses bras, jusqu’à ce qu’elle se
détache de lui et baisse la tête, gênée.
« - Ah ! Vivement samedi prochain ! Mais au fait comment tu as fait ?
- Tu te rappelles notre première rencontre ? Et bien le lendemain même, je suis allé voir
l’accueil et leur ai proposé cette idée de concours de dessin et ils m’ont dit qu’avec
l’organisation et tout, ça se ferait sûrement en juin. Alors qu’est-ce qu’on dit ?
- Merci ! Je t’adore Gabriel ! ».
Quelques jours plus tard, le samedi 12 juin donc, l’hôpital est en effervescence, les
infirmières s’activent et amènent les patients dans le réfectoire, où Gabriel et Morgane
attendent dans un coin. Le directeur arrive, le micro à la main :
« Bonjour à tous et bienvenue au concours de dessin qui n’aurait probablement pas eu lieu
sans l’intervention d’un jeune homme du nom de Gabriel. Je ne sais pas s’il est là…Gabriel ?
(Il scruta la foule et lorsque Gabriel leva la main, il lui fit signe de le rejoindre) Venez ! »
Les applaudissements succédèrent et Gabriel salua :
« Merci. Si vous êtes là aujourd’hui, c’est aussi grâce à Morgane, là-bas. Elle pensait ne
jamais pouvoir gagner, à cause du fait qu’elle soit en fauteuil roulant. En faisant cette
démarche, j’espère pouvoir lui prouver le contraire. »
Il revint auprès de Morgane sous les applaudissements et posa sa main sur le bras de la jeune
fille.
Le concours commença : ils devaient réaliser un monde fantastique à partir d’un endroit réel.
Morgane se lança. Les artistes disposaient de beaucoup de matériel, étalé sur presque deux
grandes tables. Elle n’aurait pas pu rêver mieux. Elle prit comme élément de départ le
réfectoire dans lequel elle se trouvait et le reproduit en appuyant doucement sur le crayon de
papier. Elle modifia les chaises pour les faire ressembler à des petits champignons, les tables,
de plus gros, les tapis des feuilles géantes. Un des murs devint une magnifique cascade et les
autres, un décor forestier. Gabriel la regardait faire ; Elle était si rapide et pourtant ses coups
de crayon étaient parfaits : la gomme restait en coin de table depuis le début. Les gens
présents dans la salle se transformèrent en lutins, gnomes et plein d’autres créatures bizarres.
Puis elle attrapa un stylo fin noir et repassa son paysage fantastique. Il ne manquait plus que
la couleur : du marron pour les arbres, du rouge pour les champignons et le nez des lutins, du
bleu pour leurs yeux chafouins, …
Et voilà ! Elle leva son dessin pour mieux l’observer et demanda l’avis de Gabriel :
« - Qu’est-ce que tu en penses ? »
Comme il restait muet, elle se tourna vers lui, il la dévisagea. Elle était vraiment talentueuse,
créative mais pour lui elle était bien plus que ça, seulement, elle ne s’en apercevait pas.
« - Oui c’est magnifique, je ne sais pas quoi dire ! »
Elle posa son dessin et attendit la fin du concours car elle était en avance. Enfin, le directeur
et quelques infirmières ramassèrent les dessins afin de les soumettre au jugement. Moins d’un
quart d’heure plus tard, le verdict tomba :
« Pour ce premier concours de dessin, nous avons l’honneur de décerner le premier prix qui
est constitué d’une gigantesque boîte de matériel de dessin, à… Hélène ! Félicitations ! »
Morgane n’entendait plus rien, elle était dans le néant, le vide. Elle pensait pouvoir gagner,
mais voilà que le prix qu’elle convoitait était donné à quelqu’un d’autre. Une main
affectueuse se posa sur sa joue. Elle ouvrit les yeux et aperçut Gabriel.
« Viens, on va faire un tour.
- Oui. »
Il empoigna son fauteuil et sortit. Une fois assez loin du réfectoire, il se pencha à la hauteur de
Morgane et lui dit :
« Qu’est-ce qui ne va pas, ça ne t’as pas plu ?
- Bien sûr que si, mais je croyais pouvoir gagner… Répondit-elle.
- Alors écoute-moi, le principal, c’est que tu te sois amusée. Gagner n’est qu’un simple
cadeau. Le plaisir, ça ne s’achète pas ! »
Sur ce, elle se pencha et l’embrassa. Il ne bougea pas, savourant cet instant qu’il croyait
impossible. Le monde se mit à tourner autour d’eux et lorsqu’il s’arrêta, Morgane se détacha
et leurs regards se verrouillèrent pendant un cours instant. Ils éclatèrent de rire.