"Le Canard Sauvage", dramatique liberté

Transcription

"Le Canard Sauvage", dramatique liberté
«
Le
Canard
Sauvage
dramatique liberté
»,
Copyright : Elisabeth Carecchio
Ce n’est pas le premier Ibsen que monte Stéphane Braunschweig,
c’est même plutôt une récurrence dans son travail. À chaque
fois, il fait ressortir de ce théâtre toute la modernité qu’il
possède 150 ans après son écriture. La traduction certes, mais
aussi le décor et les costumes y sont pour beaucoup.
C’est l’histoire d’une retrouvaille entre deux hommes :
Gregers et Hjalamar. Le premier apprend que son père paye
toute sa vie au second. Il se met en quête de lui montrer que
tout cela est un gigantesque mensonge dont il est la victime.
Une sorte de Truman Show avant l’heure, qui confronte les
idéaux humains avec la réalité la plus sordide, mais sans être
dénuée d’une certaine ironie.
Le drame se déroule dans deux espaces, tous deux intérieurs à
leur manière. Le premier est un immense écran descendu sur
l’avant-scène où Gregers discute avec un père de 8 mètres de
haut (on décrypte aisément la symbolique !) ; le second est un
intérieur qu’on imagine être celui d’une famille modeste du
nord-ouest de l’Europe qui offre une belle profondeur sur le
grenier du logement. Un grenier transformé en forêt. La
scénographie est très réussie, douce et mobile. Elle est un
espace de jeu qui soutient les acteurs à merveille et les
place, au besoin, dans un déséquilibre autant mental que
physique. En même temps, le décor joue avec la perception du
spectateur, en se penchant vers lui, on en étant très proche
de l’avant-scène. C’est selon…
Dans cet univers, les comédiens campent des personnages très
marqués par leur caractère. Tous sont justes, instables : on
perçoit l’indicible dualité des êtres en chacun d’eux,
l’étrangeté plane sur leurs êtres, ils sont une sorte de
Famille Adams Norvégienne et lumineuse. Parfois, ils peuvent
être très drôles. C’est le cas pour Claude Duparfait dans le
rôle de Gregers, fils mystique et psychopathe, prêt à ruiner
la vie de son ancien ami dans une croisade pour sa vérité.
Parfois bouleversants, comme le sont les deux rôles féminins
principaux joués par Suzanne Aubert et Chloé Réjon.
Ce spectacle est un vrai drame théâtral moderne, prenant,
esthétique et vivant qui fait se rencontrer le pathétique et
le sublime. Il remet au cœur du spectateur cette question
récurrente de l’humain : ne faut-il pas vivre dans le mensonge
pour, à défaut d’être heureux, mener une vie paisible ? Chacun
doit pouvoir faire son choix.
Pratique :
Jusqu’au 15 février 2014 au théâtre de la Colline,
15 rue Malte-Brun (75020 Paris)
Le mardi à 19h30. Du mercredi au samedi à 20h30. Le dimanche
à 15h30.
Durée du spectacle : 2 h 30
Tarifs : de 14 à 30 euros.
Réservations au 01 44 62 52 52 ou sur www.colline.fr