Délit de fuite : pas réservé aux causes majeures
Transcription
Délit de fuite : pas réservé aux causes majeures
AVEC Délit de fuite : pas réservé aux causes majeures La majorité des automobilistes estiment que leur civisme les met à l’abri de se voir reprocher un délit de fuite. Ce n’est pas forcément le cas. U ne peine d’emprisonnement allant jusqu’à trois ans, une amende pouvant atteindre 75 000 € (ces plafonds sont doublés en cas de dommage corporel), une suspension de permis pouvant aller jusqu’à cinq ans (sans possibilité de permis blanc) et un retrait de 6 points, telles sont les sanctions encourues par l’auteur d’un délit de fuite. Une infraction majeure, que l’on peut se voir reprocher après avoir endommagé le rétroviseur d’un véhicule croisé, ou celui d’un véhicule sur sa gauche après avoir fait un écart pour éviter... un chien ou un chat. Le délit de fuite n’est pas réservé aux délinquants routiers impliqués dans un accident grave et prenant la poudre d’escampette. Selon l’article L.231-1 du Code de la route (qui renvoie à l’article 434-10 du Code pénal) “Le fait, pour tout conducteur d’un véhicule ou engin terrestre [...] sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, de ne pas s’arrêter et de tenter ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut avoir encourue” revient à un délit de fuite. Ainsi, le conducteur de tout véhicule impliqué dans un accident est concerné : ce dernier peut être commis en voiture, comme à vélo. Par ailleurs, il ne doit pas nécessairement y avoir eu choc puisqu’il suffit de “causer” un accident, même sans contact direct avec, par exemple, un autre véhicule. Enfin, il est question de la responsabilité “que le conducteur peut avoir encourue”. La notion est donc très tendue et inclut aussi l’hypothèse où le conducteur n’est finalement pas tenu responsable de l’accident. Il suffit qu’au moment du sinistre il en ait eu conscience et qu’il ait craint que sa responsabilité puisse être engagée. L’idée est que le conducteur ne doit pas se faire juge, et apprécier si sa responsabilité peut être engagée ou non. Attention, l’arrêt du conducteur LE REFUS D’OBTEMPÉRER Si les deux délits se ressemblent en ce qu’ils sont constitués par un comportement fuyant, l’objet de la fuite diffère. Refuser d’obtempérer, c’est ne pas s’arrêter immédiatement et volontairement après avoir reçu un ordre d’arrêt émanant d’un agent des forces de l’ordre muni des signes extérieurs et apparents de sa qualité. Nul accident ici. ARTICLE PARU DANS AUTO MOTO N° 207, JANVIER-FÉVRIER 2013 doit être immédiat et à portée de vue des personnes accidentées. Etre conscient de l’accident Le conducteur doit avoir eu conscience d’être impliqué dans un accident. Son comportement doit ensuite traduire sa volonté d’échapper à sa responsabilité. Ainsi, si le conducteur reste suffisamment longtemps sur les lieux pour permettre son identification, ou communique son identité avant de quitter l’endroit de l’accident, le délit n’est pas constitué. Un automobiliste refusant de remplir un constat amiable et partant après avoir transmis sa carte de visite ne commet donc pas un délit de fuite, même si le juge a, bien sûr, toujours le pouvoir d’apprécier souverainement si le délit est constitué. Enfin, en principe, seul le comportement du conducteur peut être incriminé. Le passager peut cependant être poursuivi pénalement, en tant que complice, s’il a ordonné au conducteur de s’enfuir, voire l’y a incité ou encouragé (selon la circulaire du 24 juin 1994). l PAR M. LESAGE (Avocat, membre de la commission juridique de 40 Millions d’automobilistes.)