Le casse-tête de ma vie

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Le casse-tête de ma vie
Le casse-tête de ma vie
Je m’appelle Lucie Potvin et je suis championne de patinage artistique. Je
suis aussi dyslexique, c’est-à-dire que j’ai de la difficulté à lire. Si j’ai décidé
de raconter l’histoire de ma vie, c’est pour aider d’autres jeunes comme
moi.
Depuis que je suis née, je demeure à Orléans en Ontario, avec mes parents,
mon frère et ma sœur. J’avais deux ans lorsque papa et maman m’ont
emmenée patiner sur le canal Rideau; ils me tenaient tous les deux par la
main et j’avais l’impression de voler sur un nuage. À compter de ce jour, je
ne voulais plus quitter mes patins et je les mettais même l’été. Mes parents
ont alors décidé de m’inscrire à des cours de patinage artistique. J’étais très
douée mais un peu paresseuse, car j’aurais voulu être bonne sans faire trop
d’efforts.
J’avais bien hâte d’aller en classe comme mon frère plus âgé et de lire
comme lui. Mais lorsque j’ai mis les deux pieds à l’école, j’ai vite perdu ce
goût; c’était comme si les lettres s’étaient donné le mot pour me jouer des
tours et se mêler dans ma tête, même celles de mon nom. Je disais baba
pour papa et on pour ou. En première année, je faisais semblant d’être
capable de lire, mais mon enseignante n’était pas dupe. Je trouvais toujours
que les livres avaient trop de pages, des lettres trop petites ou pas assez
d’images. Ça m’enrageait lorsque ma sœur cadette, qui a un an de moins
que moi, lisait le mot à ma place. Puis, une dame est venue me faire passer
des tests. Elle annonça à mes parents que j’étais dyslexique. Elle m’expliqua
que, pour apprendre à lire, je devrais travailler très fort, beaucoup plus que
la plupart de mes camarades. Le soir, pendant que je faisais mes devoirs, je
regardais souvent les autres jouer dehors pendant que je répétais et
répétais la même leçon.
[Texte]
Recueil de lecture, 4e année
Un jour, toute la classe est allée patiner, et j’ai
bien vu que, sur la glace, c’était moi la meilleure.
Toutes mes amies et tous mes amis voulaient que
je leur montre à patiner à reculons, à faire des huit et à tourner
sur un pied. Ce jour-là, j’ai décidé que je serais championne en
patinage et je me suis aussitôt mise à la tâche. Tous les samedis,
je passais plusieurs heures à m’entraîner; depuis ce temps, j’ai
gagné plusieurs médailles. Il y a un mois, maman m’a dit quelque
chose qui m’a fait réfléchir en regardant avec moi une vidéo d’une
de mes chorégraphies sur glace :
 Lucie, sais-tu que la lecture et le patinage sont comme deux
amis qui s’entraident?
Sur le coup, je n’y ai rien compris; après tout, la lecture et le
patinage, c’est très différent. Elle a continué :
 Pour apprendre à lire, il a fallu que tu sois patiente et
tenace; ce sont ces mêmes qualités qui t’ont aidée à réussir
sur la glace. En gagnant des compétitions, tu prenais
confiance en toi dans tout ce que tu faisais, même dans la
lecture. Personne ne peut être bon en tout. Mais si tu
acceptes tes talents et tes faiblesses, tu te rends compte
qu’ils forment comme le casse-tête de ta vie, et que tous les
morceaux sont importants pour que l’image soit belle et
complète.
Depuis, je m’aime telle que je suis. Lorsque je lis et que c’est
difficile, je regarde mes médailles et je sais que, si j’essaie de tout
mon cœur, je réussirai. Je ne serai peut-être jamais la première en
lecture, mais, après tout, personne ne me le demande.
[Texte]
Recueil de lecture, 4e année