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Avis ••••••••• De l’Ecole à l’emploi en Alsace Avis du 11 avril 2006 Vu la Loi n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des Communes, des Départements et des Régions, Vu les articles L. 4111-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, relatifs à l’organisation de la Région, Vu les articles L. 4241-1 et L. 4241-2 du code général des collectivités territoriales, relatifs aux compétences du Conseil économique et social régional, Vu le projet d’avis transmis par la commission formation du CÉSA le 5 avril 2006, Vu la décision du bureau du CÉSA en date du 11 avril 2006, Alain RENCK, rapporteur, entendu en séance plénière, Le Conseil économique et social d’Alsace a voté le présent avis par : 49 pour 19 contre 0 abstention Conseil économique et social d’Alsace ………………………………………………………………………………………………………………………………………… Avis N° 01-06 – Avril 2006 – De l’Ecole à l’emploi 4 Sommaire Introduction ..................................................................................................................... 7 1. Elever les niveaux de qualification et développer le savoir-être…. ....................... 11 1.1. Œuvrer pour la maîtrise des savoirs de base………………………………… .......................12 1.2. Amener davantage de jeunes à obtenir le diplôme pour lequel ils étudient ........................12 1.3. Expérimenter des formations alternées au profit des élèves en décrochage scolaire ........14 1.4. Attribuer des bourses régionales d’excellence ....................................................................15 2. Améliorer l’information et l’orientation des jeunes ................................................. 17 2.1. Mieux orienter pour éviter les phénomènes de décrochage scolaire ..................................19 2.2. Conforter la participation des enseignants par le développement de leur connaissance de l’emploi et du monde du travail.......................................................................................19 2.3. Améliorer l’offre de conseils en orientation à l’Université ....................................................20 2.4. Développer la prospective des métiers dans les branches professionnelles et diffuser largement ses résultats ......................................................................................21 2.5. Attirer les jeunes vers les métiers qui recrutent...................................................................21 2.6. Promouvoir l’esprit d’entreprise ...........................................................................................23 2.7. Démultiplier les moyens des acteurs de l’orientation par le travail en réseau.....................23 2.8. Faciliter les réorientations après une première expérience professionnelle........................25 3. Amener les jeunes à mieux connaître le monde du travail pendant leur formation initiale ........................................................................................................ 27 3.1. « Insérer pour former » les jeunes très éloignés de la qualification ....................................28 3.2. Sensibiliser les entreprises aux atouts des contrats en alternance.....................................29 3.3. Développer encore plus largement l’apprentissage au niveau régional ..............................29 3.4. Nommer un correspondant entreprise dans chaque établissement de formation ..............31 3.5. Systématiser les modules de formation aux techniques de recherche d’emploi et de préparation à l’entretien d’embauche dans toute formation de fin de cycle ..............31 3.6. Optimiser l’organisation des stages en entreprise...............................................................32 3.7. Développer la pédagogie de projet tout au long de la scolarité...........................................33 3.8. Rapprocher l’Ecole et l’Entreprise en développant la démarche compétence ....................34 4. Soutenir les jeunes dans leur découverte personnelle de la vie sociale et du monde du travail ............................................................................................... 35 4.1. Accompagner la recherche d’activités rémunérées compatibles avec les études ..............36 4.2. Encourager l’engagement associatif des jeunes .................................................................37 4.3. Proposer un service volontaire civique en région ................................................................37 4.4. Faciliter l’obtention de prêts jeunes .....................................................................................38 Conclusion....................................................................................................................... 39 5 6 Introduction De l’Ecole à l’emploi… ? Le CESA s’est saisi de cette problématique en réaction au constat alarmant que trop de jeunes ne réussissent pas à trouver un emploi stable et le mieux adapté à leurs études et à leur qualification. Par ses propositions, l’assemblée socioprofessionnelle régionale souhaite apporter sa contribution au grand débat qui s’est ouvert en France, et notamment en Alsace, dans l’objectif de renverser durablement cette tendance. En raison du développement du système éducatif et de la hausse des niveaux de qualification, 67 % des actifs sortis de l’Ecole depuis moins de cinq ans détiennent aujourd’hui au moins le baccalauréat, 45 % détenant un diplôme d’études supérieures alors qu’ils n’étaient respectivement que 44 % et 28 % en 1990. Mais en dépit de ce progrès en matière de qualification, les jeunes possèdent-ils les moyens de valoriser leur diplôme sur un marché du travail sous tension ? Comment tolérer que plus de 150 000 jeunes sortent encore chaque année du système éducatif sans diplôme 1 (dont 1 500 à 2 000 en Alsace), diplôme dont l’absence condamne irrémédiablement la moitié d’entre eux au chômage ? Les 16-25 ans sont souvent décrits comme appartenant à une « génération sacrifiée ». En fait, l’accès des jeunes à l’emploi est réel, mais les emplois auxquels ils ont accès sont plus précaires que par le passé 2 : quatre jeunes sur dix commencent leur vie active en occupant un emploi non qualifié bien qu’ils aient obtenu un diplôme (au moins égal au CAP) 3 , seul un sur quatre est embauché en CDI 4 et un contrat de travail temporaire sur deux concerne un moins de 26 ans. En bref, les jeunes sont trois fois plus souvent en contrat précaire que les salariés plus âgés. Ces différents éléments montrent que leurs premières années de vie active sont pour eux plus incertaines qu’elles ne l’étaient pour leurs aînés. En effet, pour être considéré comme réussi, le processus d’insertion des jeunes débutant sur le marché du travail peut prendre cinq voire dix ans, le temps qu’ils se stabilisent dans l’emploi. Ils connaissent, en fait, de plus nombreuses périodes de chômage que les 26-59 ans mais en sortent aussi plus rapidement : ils sont à la fois plus « employables » et plus « vulnérables ». En effet, quand la conjoncture se dégrade, le manque d’expérience professionnelle constitue plus souvent un frein à l’embauche de débutants. Avec un taux de chômage dépassant les 20 %, tous niveaux de qualification confondus, les jeunes actifs sont constamment 2 à 2,5 fois plus exposés aux risques du chômage que les actifs plus âgés 5 . Ce taux varie, en réalité, de 59 % pour les jeunes sans qualification 6 à moins de 10 % pour les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur. Il se différencie fortement selon le niveau de diplôme : les plus diplômés apparaissant relativement protégés contre les risques du chômage à l’inverse des faiblement ou non diplômés qui y sont surexposés 7 . À l’« effet diplôme » s’ajoutent les déterminants sociaux (milieu social, lieu d’habitation, origine étrangère…) qui renforcent les inégalités dans l’accès à l’emploi 8 . 1 « Sorties sans qualification : analyses des causes, des évolutions et des solutions pour y remédier », rapport de l’Inspection générale de l’Education nationale (2005). 2 « Portait statistique des jeunes demandeurs d’emploi », ANPE (2003). 3 Cette situation concerne plus de 50% des titulaires d’un CAP, 40% des bacheliers et 15% des diplômés de l’enseignement supérieur. In « L’emploi non qualifié dans les trajectoires de jeunes débutants », DARES (2004) 4 Contre 1 sur 3 pour leurs aînés. Chiffres de fin 2001 in « Contrats courts : sources d’instabilité mais aussi tremplin vers l’emploi permanent », DARES (2003). 5 En revanche, si l’on considère les jeunes dans leur ensemble (ceux sur le marché du travail et ceux encore dans le système de formation), leur taux de chômage est à peine supérieur à celui de l’ensemble de la population active. 6 C’est-à-dire les niveaux VI et V bis. 7 « Au delà du processus d’insertion : les jeunes au cœur des ajustements conjoncturels et des transformations des normes d’emploi », IRES (2003). 8 « Emploi et chômage dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville : repères statistiques » - Délégation à la Ville (2002). 7 Cette situation de fort taux de chômage des jeunes est commune à bien d’autres pays : il est de 16,2 % dans l’Europe des 15 9 , soit un peu moins du double de celui de l’ensemble de la population active européenne (8,5 %). Ces chiffres révèlent que les jeunes Français souffrent autant du chômage que la moyenne des jeunes Européens 10 . La dernière enquête du CEREQ, « Génération 2001 » 11 montre qu’en France, le chômage des jeunes a fortement réagi à la dernière dégradation conjoncturelle 12 . Elle révèle également que ce phénomène a été encore amplifié pour les jeunes formés en Alsace : plus favorisés par le passé grâce aux dynamismes du secteur industriel et des marchés du travail allemand et suisse, ils ont subi la crise de plein fouet du fait d’une détérioration subite de ces atouts à partir de 2001. La région a connu une progression du chômage inégalée depuis les années 1980 et si les jeunes sans qualification exerçant des emplois précaires et non qualifiés dans l’industrie en sont les premières victimes, les jeunes qualifiés n’ont pas pour autant été épargnés. Fin 2005, les premiers signes d’amélioration se font enfin jour au niveau national mais le climat régional reste encore incertain : sur un an 13 , le nombre de jeunes demandeurs d’emploi a baissé de 2 % en France mais a augmenté de 0,9 % en Alsace avec une différence considérable entre les deux départements : - 0,5 % dans le Bas-Rhin et + 2,6 % dans le HautRhin. L’emploi des jeunes a connu une dégradation plus prononcée dans certains bassins d’emploi 14 ; d’autres résistant mieux, à l’image du Nord de l’Alsace et des deux centres urbains de Strasbourg et Mulhouse qui constituent pourtant des poches traditionnelles de chômage : dans certains de leurs quartiers, le chômage dépasse les 30 %. Au dernier trimestre 2005, 22,5 % des actifs de moins de 26 ans (contre 20,2 % au niveau national), soit 15 000 jeunes, sont à la recherche d’un emploi à temps plein sur le territoire alsacien. Avec 1,4 demande d’emploi pour 1 offre 15 , tous les jeunes ne pourront sans doute pas trouver un emploi directement à la sortie de l’Ecole. En outre, la dernière étude prospective de la DEP 16 montre que les besoins en recrutement seront inférieurs au nombre de jeunes sortant du système éducatif malgré l'importance des sorties définitives d'emploi des « baby-boomers ». C’est pourquoi, le rôle de la conjoncture économique et des créations d’emplois reste prégnant. La durée du processus d’insertion professionnelle des jeunes peut néanmoins varier en fonction du contexte local, de leurs niveaux et domaine de formation, de leurs caractéristiques individuelles… : tous ces éléments nous confèrent une certaine marge de manœuvre et constituent des leviers pour l’action locale. Ainsi, sans ambitionner d’enrayer le chômage dans un contexte de raréfaction globale de l’emploi, toutes les actions entreprises en Alsace devront converger dans le but de limiter la durée des périodes de chômage vécues par trop de jeunes afin de réduire les risques de rupture dans leur parcours. En effet, une longue inactivité est lourde de conséquences pour leur avenir, professionnel comme social. Ce problème de chômage des jeunes persiste depuis maintenant trop longtemps, sans que les alternances politiques et tous les « plans jeunes » mis en œuvre au niveau national n’aient réussi à le contre-carrer. 9 18,5% dans l’U.E. des 25. Chiffres de 2004 / Sources : Eurostat. « Au delà du processus d’insertion… », IRES (2003). 11 Enquête réalisée par le Centre d’études et de recherches sur l’emploi et les qualifications (Céreq), tous les 3 ans, sur un échantillon de sortants de formation initiale et qui étudie les conditions de leur insertion professionnelle après 1, 2 et 3 ans. 12 Le taux de chômage tous niveaux confondus s’élève à 16% pour la Génération 2001 contre 10% pour la Génération 1998. 13 Entre septembre 2004 et 2005. Sources : DRTEFP Alsace, novembre 2005. 14 Les plus fortes hausses du chômage des jeunes sur un an ont été constatées à Sélestat/Sainte-Marie (+21%), Colmar et Saint-Louis/Altkirch (+17%), Molsheim/Schirmeck et Guebwiller (+14%). 15 er Chiffres du 1 semestre 2005 de l’ANPE Alsace. Sachant que toutes les offres d’emplois ne sont pas répertoriées à l’ANPE. L’APEC estime effectivement que 60% des offres sont sur le « marché caché » de l’emploi (accessible par les rencontres, le réseau, la promotion interne…), lequel est de fait plus accessible aux personnes ayant déjà d’une expérience du marché du travail. 16 DEP : Direction de l’évaluation et de la prospective du ministère de l’Education nationale. « Prospective emploiformation à l’horizon 2015 », scénario qui introduit un taux de croissance de 2% et une sortie définitive de l’emploi à 59 ans). 10 8 Les constats réalisés au niveau national sont valables en Alsace, à la différence près que le moindre niveau global de formation initiale de sa population et la destruction accélérée de nombreux emplois – principalement de faible qualification – compliquent encore la donne. Au regard de cette situation, le CESA préconise de : - élever les niveaux de qualification et développer le savoir-être ; - améliorer l’information et l’orientation des jeunes ; - amener les jeunes à mieux connaître le monde du travail pendant leur formation initiale ; - soutenir les jeunes dans leur découverte personnelle de la vie sociale et du monde du travail. 9 10 1 Elever les niveaux de qualification et développer le savoir-être Le système éducatif alsacien est particulièrement sélectif, en particulier l’enseignement secondaire : l’Alsace affiche un taux d’accès à la seconde générale et de poursuite des études après le CAP - BEP parmi les plus bas de France d’où un taux global de qualification fortement ancré autour du niveau V. Or les jeunes formés au niveau V connaissent depuis quelques années des difficultés d’insertion accrues (1 jeune demandeur d’emploi sur 2 a un niveau V). Néanmoins ce système a pour conséquence d’avoir, en Alsace, une proportion de non diplômés inférieure de 2% à celle constatée dans le reste de la France (31% de non-diplômés parmi les actifs de 16-25 ans en Alsace contre 33% au plan national). Diplômes (niveau) Diplôme supérieur (II - I) BAC + 2 (III) BAC (IV) CAP-BEP (V) Non diplômé (VI - V bis) Population active totale Actifs de 16-25 ans 17 Alsace France Alsace France 8% 9% 4% 3,5% 9% 9% 12% 10,5% 12% 12% 20% 22% 32% 25% 33% 31% 40% 45% 31% 33% Sources : INSEE (Recensement 1999) Niveaux de formation Nombre des chômeurs <25 ans Non précisé Niveaux 3 et + Niveau IV Niveau V Niveau infra V 631 2 905 4 024 9 360 2 297 Taux 3% 15% 21% 49% 12% Sources : ANPE Alsace (2005) Face à ces constats, le CESA avait, dans ses précédents avis 18 , établi la nécessité d’élever le niveau de formation de l’ensemble de la population. En formation initiale, cette élévation implique, d’abord, la suppression des sorties sans diplôme du système éducatif et, par ailleurs, d’amener chacun à son meilleur niveau. Elle se poursuit par le biais des actions de formation continue dont la compétence revient à la collectivité régionale, aux côtés des entreprises 19 , des partenaires sociaux (OPCA 20 , FONGECIF 21 , Assedic…) et du service public de l’éducation et de la formation. Pour ce faire, des changements profonds de mentalité sont nécessaires au niveau des jeunes, des familles, des enseignants et autres membres de la communauté éducative… afin de les sensibiliser à l’importance des études initiales et du bagage scolaire, passeport indispensable pour avoir accès à la formation tout au long de la vie. Lutter contre le chômage des jeunes implique une prévention active des sorties de l’Ecole sans qualification, une meilleure offre de formations professionnelles et l’attribution de bourses aidant au maintien des jeunes en formation. 17 Le niveau de formation des jeunes doit être interprété avec prudence : les apprentis et les jeunes en contrat de qualification sont comptés comme ayant terminé leur scolarité. Ils sont classés parmi les sans diplôme s'ils sortent de e nde 3 ou 2 alors que la plupart d'entre eux atteindra au moins le niveau V. Leur niveau est donc sous estimé. 18 Avis sur la place de l’industrie en Alsace (2003) et sur le Schéma régional de l’éducation et de la formation » (2004). 19 Plan de formation de l’entreprise, droit individuel à la formation… 20 OPCA : Organismes paritaires collecteurs agrées des fonds de la formation professionnelle. 21 OPCA gérant le Congé individuel de Formation (CIF). 11 1.1. Œuvrer pour la maîtrise des savoirs de base Les évaluations de français réalisées en classe de 6e montrent que 17,5 % des élèves rencontrent des difficultés sérieuses avec l’écrit 22 . 71 % des sortants de l’enseignement secondaire sans qualification souffrent de « déficits marqués en matière d’acquisition cognitive en français et en mathématiques » 23 : il existe un lien direct entre échec scolaire et illettrisme. Enfin, selon les résultats de la Journée d’appel et de préparation à la défense, 11,8 % des jeunes de 17 ans en Alsace – contre 10,8 % en France entière – ne maîtriseraient pas les fondamentaux. ► Le CESA souhaite rappeler avec force, comme évoqué dans son avis et rapport sur la lutte contre l’illettrisme en Alsace (2003), le caractère indispensable de la maîtrise des savoirs de base par tous les jeunes sortants du système scolaire. Ces compétences sont effectivement nécessaires à toute insertion dans l’entreprise comme à toute entrée en formation continue. Le Rectorat et la Région sont les deux principaux organisateurs de la prévention et de la lutte contre l’illettrisme : dans le cadre de l’Ecole pour le premier, du programme régional de formation des jeunes pour la seconde. ► Un plan régional de prévention et de lutte contre l’illettrisme a été élaboré en mai 2005, le CESA souhaiterait disposer d’une évaluation des progrès accomplis grâce à ce nouvel outil. 1.2. Amener davantage de jeunes à obtenir le diplôme pour lequel ils étudient Chaque année, 6,6 % des élèves de l’Académie de Strasbourg 24 quittent l’Ecole sans avoir obtenu de diplôme. Pourtant, toutes les études et enquêtes réalisées sur le thème de l’insertion des jeunes mettent en évidence l’importance du diplôme comme protection contre le chômage 25 . Les disparités d’insertion sont effectivement majeures entre ceux qui, au même niveau, ont obtenu le diplôme et ceux qui y ont échoué. Deux exemples : au niveau national, les bac+1/+2 non diplômés s’insèrent moins bien que des titulaires d’un CAP/BEP 26 ; en Alsace, 45 % des apprentis sans diplôme sont au chômage contre 18 % de ceux qui ont obtenu un titre de niveau V 27 . Quant à ceux qui ont arrêté leurs études avant la 3ème – sans aucun diplôme –, ils sont plus d’un sur deux à rechercher un emploi en Alsace. Dans la conjoncture actuelle, la faiblesse du nombre d’emplois offert conduit les jeunes sans qualification professionnelle à être les premières victimes du chômage. ► Les études dirigées et l’ensemble des dispositifs locaux de soutien scolaire sont nécessaires pour accompagner les élèves en difficulté scolaire, notamment ceux qui ne peuvent bénéficier de l’aide de leur famille. Le CESA rappelle néanmoins que le premier soutien à ces élèves se réalise en classe, par les professeurs. Les élèves des IUFM 28 et tous les étudiants qui se destinent à l’enseignement 29 pourraient également être 22 e Evaluation en français de 6 (2002) / Ministère de l’Education nationale. « Note d’Info du Ministère de l’Education nationale » n°99-30 (1999). 24 Contre 7 % au niveau national. Sources : Ministère de l’Education nationale. 25 Même si elle tend à se relativiser puisque même aux plus hauts niveaux de formation, les jeunes restent plus fortement touchés par le chômage que leurs aînés (taux respectifs de 9% et 5% chez les diplômés à Bac+3 ou plus). 26 Chiffres d’insertion à 3 ans après l’obtention du diplôme. Sources : « Enquête Génération 2001 », Céreq (2004). 27 Chiffres d’insertion à 8 mois après l’obtention du diplôme. Sources : « Enquêtes IVA et IPA », OREF - Alsace (2004). 28 IUFM : Institut universitaire de formation des maîtres. 29 Après un CAPES par exemple. 23 12 mobilisés aux côtés de ces élèves : en contre-partie de ce service rendu à la collectivité, un mode de reconnaissance serait à imaginer (une validation de modules permettant d’obtenir des crédits ECTS 30 , par exemple). Cet engagement pourrait s’inscrire dans le cadre du service civique proposé dans la quatrième partie (cf.4.3.) 31 . Avec des taux de chômage qui ont presque doublé, les « sans qualification » et les « Bac+1/+2 non diplômés » 32 ont subi le plus violemment la dégradation conjoncturelle de 2001 à 2004. La prévention des échecs en 2nd cycle scolaire et en 1er cycle universitaire prend ici toute son importance. Dans l’enseignement secondaire, les taux de rupture de formation les plus élevés sont observés dans les lycées professionnels (1ères années de CAP et de BEP) et les Centres de formation des apprentis. ► Une offre régionale de formations professionnelles de niveaux V et IV plus complète (filières de formation allant du niveau V à III, par exemple) et plus attractive (développement qualitatif) permettrait de limiter les ruptures, beaucoup plus fréquentes en lycée professionnel qu’en lycée général et technologique. ► De nombreuses demandes de poursuites d’études d’élèves de BEP en bac professionnel ou en 1ère d’adaptation ne peuvent être satisfaites : le CESA demande au Rectorat de favoriser ces demandes. ► Afin de renforcer le niveau – notamment en culture générale – des élèves issus de bacs professionnels et technologiques qui désirent poursuivre leurs études en BTS ou à l’Université, il serait pertinent de développer dans les lycées, et en lien avec les universités, des modules de préparation aux études post-bac. A l’Université, les étudiants des deux premières années de licence (DEUG) sont les plus concernés par l’échec répété aux examens et les abandons en cours de formation. ► La prévention de l’échec des étudiants de 1er cycle universitaire implique la mise en place de modules de soutien et le développement des possibilités de réorientation, grâce à des entretiens-bilans et la capitalisation effective des acquis universitaires, dans le cadre du système Licence – Master - Doctorat (LMD). Il est important que les quatre universités alsaciennes se saisissent au plus tôt de ces chantiers. La Mission générale d’insertion de l’Education nationale prend en charge les jeunes « décrocheurs » pendant l’année qui suit la rupture de formation dans l’objectif de les amener à une qualification. ► La baisse des crédits alloués à la Mission générale d’insertion (MGI) en Alsace mérite une explication, eu égard à l’importance des missions qui lui sont dévolues : l’Education nationale doit poursuivre et développer son engagement en faveur de la qualification des élèves qui éprouvent d’importantes difficultés scolaires. Tout doit être tenté en amont pour éviter que ces jeunes ne sortent sans qualification de l’Ecole. Un récent rapport de l’Inspection générale de l’Education nationale 33 souligne l’existence de carences, dans la majorité des académies, dans le domaine du repérage des sorties sans qualification. Il cite néanmoins l’exemple d’un Observatoire académique des sorties sans 30 ECTS : European Credit Transfer System (système européen de reconnaissance des crédits de l’enseignement supérieur). 31 Cela pourrait aussi s’inspirer des engagements de service qui étaient réalisés par les stagiaires de l’Ecole normale et garantissaient l’accès à la formation en échange d’un engagement de servir pendant une durée limitée (6 à 8 ans). 32 Cette catégorie rassemble des jeunes qui ont commencé l’enseignement supérieur mais qui n’y ont pas décroché de diplôme. 33 Rapport de l’Inspection générale de l’Education nationale sur les « sorties sans qualification » (2005). 13 qualification 34 qui suit les jeunes sans affectation tout en collectant des données statistiques sur leur nombre et leur devenir. ► Le CESA estime que l’Académie de Strasbourg devrait se munir d’un système performant de comptage et de suivi qui servira de diagnostic partagé et de base de travail à l’ensemble des acteurs. La connaissance précise des jeunes « sans solution » permettra l’élaboration de solutions individualisées et plus efficaces pour les amener à la qualification et/ou à l’insertion. 1.3. Expérimenter des formations alternées au profit des élèves en décrochage scolaire Pour des raisons sociales, culturelles ou de trop faible niveau scolaire, un certain nombre de jeunes ne suit plus en classe, tout en désirant toucher au monde du travail : ils souhaiteraient approcher des métiers plutôt que des savoirs théoriques, sans pour autant quitter définitivement l’Ecole. Ces jeunes, en raison de leurs problèmes de « savoir-être », ne sont pas toujours acceptés par les entreprises en contrat d’apprentissage ou en contrat aidé. Enfin, des lacunes en savoirs de base (lire, écrire, compter) empêchent le maintien de ces jeunes dans leur classe d’origine. D’où l’importance de mettre en place des formations qui permettraient de leur donner une seconde chance, de les revaloriser et surtout d’éviter qu’ils n’entrent dans la vie active sans aucun bagage à faire valoir et qu’ils finissent, pour la majorité d’entre eux, au chômage. Quant à ceux qui ont tout de même réussi à trouver un emploi : il est souvent non qualifié, temporaire, à temps partiel, mal rémunéré… et le premier à être supprimé en cas de difficultés pour l’entreprise 35 ! ► Le CESA est convaincu de l’utilité de structures comme les Ecoles de la 2ème chance pour ces publics en grande difficulté. C’est pourquoi, il encourage l’élaboration de nouveaux projets de ce type en fonction des besoins identifiés sur les bassins emploi-formation. Pourtant, si ce genre de dispositif est intéressant et novateur, le CESA estime qu’il intervient assez tardivement (après 16 ans) : la mise en place d’autres dispositifs s’avère nécessaire, plus en amont, avant la « rupture » avec le système scolaire classique. ► Des formations « en amont », basées sur l’alternance école - stages en entreprise, pourraient être organisées dans le cadre des établissements scolaires (collèges, lycées professionnels, CFA…) : fortement individualisées, elles seront quasi « taillées sur mesure » pour des jeunes qui ne rentrent plus dans le moule de l’Education nationale et risquent, si rien n’est fait, de s’enfermer dans l’échec. Le Rectorat et la Région pourraient expérimenter ces « classes alternées » sur des secteurs particulièrement concernés par le problème des sorties sans qualification. ► Les entreprises d’insertion et les entreprises volontaires du territoire, outillées par un encadrement pédagogique et technique approprié, seront sollicitées pour permettre à ces jeunes de découvrir les métiers et d’apprendre à évoluer en collectivité. Cette collaboration fera l’objet d’une convention entre l’établissement scolaire et les entreprises intéressées afin d’assurer des conditions d’accueil optimales aux jeunes. Chaque jeune devrait bénéficier du suivi d’un tuteur doté d’une qualification reconnue (principe du « un stagiaire, un tuteur »). ► Parallèlement, le CESA souhaite que les pouvoirs publics - le Rectorat en premier chef fassent le nécessaire pour assurer la continuité et le développement de toutes les initiatives existantes, dans les collèges notamment, au profit des élèves en grande difficulté scolaire. 34 Il regroupe l’ensemble des responsables de ces questions : Rectorat (CSAIO, DAET, IIO, IEN, MGI, CIO, chefs d’établissements), Conseil régional, OREF, CRCI, chambre de métiers, ANPE, DRTEFP. 35 « Enquêtes IVA/IPA 2003 et 2004 ». 14 NB : Les différents dispositifs exposés ici ne sauraient être assimilés au pré-apprentissage proposé par le contrat d’objectifs et de moyens pour l’apprentissage en Alsace (COMAA) 36 ou à l’apprentissage junior prévu par la loi sur l’égalité des chances 37 . Les élèves passant par ces « classes alternées » n’ont pas forcément vocation à entrer en apprentissage, le premier objectif étant de les remettre sur les rails, de les remotiver et de leur donner des perspectives plus claires quant à leur orientation et leur avenir, afin d’éviter au maximum les ruptures dans leur parcours de formation et d’insertion. Face à la complexité des histoires et parcours individuels, la coexistence de divers systèmes de prise en charge - à la fois dans et hors du cadre scolaire - correspond à une saine gestion de la différence, au plus près des besoins et attentes de certains jeunes, aujourd’hui en marge du système éducatif classique. 1.4. Attribuer des bourses régionales d’excellence Au commencement de leurs études, la grande majorité des boursiers d’Etat ne travaillent pas car ils disposent de ressources suffisantes. Le nombre d’allocataires de bourses diminuant fortement au fur et à mesure du cursus de formation parallèlement à une augmentation de l’âge de fin d’études, la grande majorité des jeunes est obligée de travailler à partir de 24 ans 38 . Cette situation a des conséquences non négligeables sur la réussite de leurs études (30 % de chances de réussite en moins, selon l’Observatoire de la vie étudiante), l’échec représentant à la fois une frustration pour l’individu et un coût pour la collectivité. ► Considérant que seul un jeune sur trois est boursier d’Etat à son entrée à l’Université et que ce nombre décroît considérablement avec les années d’études, l’attribution de bourses régionales d’excellence permettrait à de plus nombreux étudiants de se concentrer sur leurs études et de réaliser pleinement leur potentiel. Ces bourses régionales d’excellence permettront de maintenir dans la scolarité des jeunes capables d’élever encore leur niveau de formation mais qui sont obligés, pour subvenir à leurs besoins, d’entrer plus précocement sur le marché du travail. Sous l’égide de la Région, elles seraient financées par les collectivités publiques volontaires, des entreprises, des fondations … et feront l’objet d’un contrat avec le jeune qui pourrait prévoir une forme de « contre-partie », d’engagement… Ces bourses pourraient éventuellement être complétées par un « prêt jeune »(cf. 4.4). Les grandes Ecoles restent les formations assurant les meilleurs débouchés professionnels. Or, leur accès est fortement corrélé au milieu social d’origine (et notamment aux revenus des parents) : 2 élèves sur 3 sont enfants de cadres supérieurs ou de professions libérales contre 1 sur 3 à l’Université. Si la majorité des écoles d’ingénieur sont publiques et gratuites, les frais de scolarité de la plupart des écoles de management et de gestion, souvent très élevés, éliminent de facto des candidats potentiels. ► Le CESA propose à la Région d’étudier la pertinence de mettre en place un système de bourses qui serait destiné aux jeunes des milieux défavorisés ayant obtenu des résultats scolaires autorisant une admission en classe préparatoire (CPGE) : la Région s’engagerait à délivrer une bourse à ceux qui, à l’issue des deux ans de CPGE, seront admis dans une grande école. En effet, pour ces jeunes, l’auto-censure joue souvent à plein : s’ils ont les capacités scolaires de réussir dans ces formations de haut niveau, ils ne s’y engagent pas car ils savent que leur emploi du temps les empêchera presque systématiquement d’exercer 36 Le COMAA a été élaboré en 2005 pour mettre en œuvre en Région le plan de cohésion sociale. La sélection opérée par les entreprises à l’entrée en apprentissage fait que ces systèmes ne pourront intégrer tous les jeunes. 38 Sources : Observatoire de la Vie étudiante. 37 15 une activité « alimentaire » 39 en parallèle de leurs études. Les frais de scolarité - très élevés dans certains établissements - constituent également un frein important, en particulier pour les jeunes qui ne sont pas éligibles au prêt bancaire étudiant. 39 4% des élèves ingénieurs travaillent contre 15-20% de l’ensemble de la population étudiante (Génération 2001, Céreq). 16 2 Améliorer l’information et l’orientation des jeunes La loi d’orientation sur l’école de 1989 stipule que « l’élève élabore son projet d’orientation scolaire et professionnelle en fonction de (ses) aspirations et de ses capacités ». Pourtant, l’orientation scolaire est encore, pour de nombreux élèves et pour leurs parents, synonyme de choix forcé ou par défaut. Même si on ne peut la rendre seule responsable des difficultés d’insertion des jeunes, l’orientation scolaire souffre de nombreux dysfonctionnements 40 : les élèves et leurs familles se plaignent de ne pas être suffisamment informés, les conseillers d’orientation sont peu nombreux – environ 1 pour 1 400 élèves – et ont trop peu d’influence, la décision d’orientation est essentiellement fondée sur les résultats scolaires des élèves... De plus, l’orientation reste trop fortement influencée par des caractéristiques individuelles (âge, sexe, parcours scolaire, milieu socioculturel, profession des parents…). L’interrogation de jeunes en CAP/BEP sur leur satisfaction par rapport à leur orientation montre toute la difficulté de réussir son orientation tôt dans la scolarité, vers 14-15 ans. Les réponses des lycéens de niveau V montrent qu’en moyenne un lycéen sur deux seulement est satisfait. Les réponses restent néanmoins très diversifiées selon le domaine de formation 41 : de 34 % de satisfaction en gestion à 79 % en santé/action sociale. La même enquête réalisée auprès d’apprentis de niveau V montre que, avec des taux proches des 70 % dans tous les domaines de formation, ils sont systématiquement plus satisfaits de leur orientation que leurs homologues lycéens 42 . Autre élément notable, la satisfaction de l’ensemble des jeunes, lycéens comme apprentis, augmente avec le niveau de diplôme : plus les jeunes progressent en niveau et en maturité, plus ils apparaissent aptes à choisir leur orientation et en sont satisfaits. Mais ce n’est qu’aux niveaux les plus hauts que la satisfaction des jeunes formés sous statut scolaire atteint celle des apprentis. L'orientation que vous avez suivie correspond-elle à ce Taux de réponses positives à la question : que vous vouliez faire ? (IVA 2004) « L’orientation que vous avez suivie Santé, action sociale 79% correspond-t-elle à ce que vous vouliez faire ?» Niveaux Scolaires Apprentis (enquête IVA 2004) (IPA 2004) I - II 94 % 96 % III 76 % 82,6 % IV 62 % 81,5 % V 51 % 72 % V bis 36,5 % 49,2 % Services aux particuliers 71% 71% 70% 58% 54% 54% 53% 51% 48% 34% Transports et logistique Hôtellerie, restauration Commerce Industries légères BTP Industries de process Mécanique, métallerie Electricité, électronique Gestion, administration 0% Proportion de oui 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% Contrairement aux idées reçues sur l’apprentissage, ces résultats montrent que sont apprentis, les jeunes qui ont choisi et assument leur orientation, tout en ayant réussi à trouver une entreprise d’accueil 43 . L’alternance école - entreprise leur permet de se confronter à la réalité des métiers et de mieux préciser leur projet professionnel et personnel. 40 « Rapport du Haut Conseil de l’Evaluation de l’Ecole » (HCEE). « Enquête d’insertion dans le vie active (IVA) » (2004), OREF-Alsace. 42 Le taux de réponses positives est toujours supérieur à 70%, même s’il varie également en fonction du domaine de formation. Voir « Enquête d’insertion dans la vie professionnelle des apprentis (IPA) » (2004), OREF-Alsace. 43 L’apprentissage reste effectivement une voie sélective de formation (comme tout recrutement par une entreprise). On retrouve donc plus de jeunes d’origine immigrée dans les lycées professionnels du fait de leur difficulté à trouver une entreprise d’accueil. 41 17 A l’inverse, ceux qui n’ont pas réussi à trouver une entreprise d’accueil sont généralement orientés « par défaut » vers les lycées professionnels (LP), d’où la moindre satisfaction de leurs élèves. Cette situation augmente d’ailleurs fortement les risques d’abandon en cours de formation. Les diplômés de LP connaissent, en outre, de plus grandes difficultés d’insertion à la sortie 44 : 41 % des titulaires d’un CAP-BEP sont au chômage à la sortie d’un LP contre 27 % pour les apprentis de même qualification. Processus complexe, l’orientation scolaire est d’autant plus importante qu’elle conditionne souvent l’ensemble du parcours de formation initiale - où les réorientations restent difficiles -, voire l’ensemble de la vie professionnelle. Acteur et sujet de l’orientation, l’élève peut s’appuyer sur les ressources éducatives mises à sa disposition par l’Ecole (conseillers d’orientation, enseignants, manuels, logiciels…) mais aussi sur celles de son environnement direct (parents, fratrie, réseau relationnel familial, associations locales…). Générant parfois des conflits avec les équipes éducatives, le rôle des parents dans l’éducation au choix reste cependant primordial : les jeunes issus de familles socialement et culturellement favorisées réussissent mieux leur scolarité mais aussi leur orientation. Avec l’officialisation de la « formation tout au long de la vie », les pratiques de l’orientation devraient progressivement connaître des évolutions ambitionnant de décloisonner les temps scolaires et professionnels. Ainsi, les choix d’orientation réalisés tôt dans la scolarité ne seraient plus définitifs et chacun pourrait bénéficier d’une autre chance de se réaliser professionnellement. En effet, la définition européenne de ce qu’on appelle désormais « l’orientation tout au long de la vie » vise à établir un « processus continu d’appui aux personnes tout au long de leur vie pour qu’elles élaborent et mettent en œuvre leur projet personnel et professionnel en clarifiant leurs aspirations et leurs compétences par l’information et le conseil sur les réalités du monde du travail, l’évolution des métiers, du marché de l’emploi, des réalités économiques et de l’offre de formations ». Cette définition extensive soulève toutefois des interrogations dans la mesure où peu d’élèves bénéficient réellement d’une information et d’un conseil aussi approfondis. Quant aux jeunes sortis précocement du système scolaire, ils sont moins de 6 % aux niveaux VI et V bis et seulement 12 % au niveau V à avoir accès à la formation continue en cours de vie active 45 ! Le généreux concept de « formation tout au long de la vie » profite surtout aux personnes les mieux dotées en formation initiale. Si les jeunes doivent être acteurs à part entière de leur orientation, le CESA estime que leur responsabilisation ne peut se faire que parallèlement à des améliorations dans l’éducation à l’orientation et une connaissance plus approfondie de l’environnement économique, des métiers et du monde du travail. 44 Leur formation est moins « cotée » chez les professionnels du fait de leur moindre présence en entreprise en cours de formation. 45 « Les jeunes sans qualification », BREF n°202, Céreq (2003). 18 2.1. Mieux orienter pour éviter les phénomènes de décrochage scolaire L’orientation à l’issue de la classe de 3e constitue un des premiers facteurs de décrochage scolaire. En effet, les phénomènes de décrochage et de sorties sans qualification trouvent en partie leur origine dans l’absence d’une réelle éducation des élèves à l’orientation mais aussi du manque d’informations sur les métiers et les formations propres à les aider dans leurs choix 46 . Les taux de rupture de formation les plus élevés sont observés dans les collèges (classes de 3e) mais surtout dans les lycées professionnels (1ères années de CAP et de BEP) voire les CFA 47 : soit que certains élèves soient orientés contre leur gré vers l’enseignement professionnel ; soit que, par le jeu des vœux, ils soient affectés par manque de places dans des filières moins attractives. En Alsace, l’orientation vers les filières professionnelles est encore plus fréquente du fait d’une sélectivité accrue du système éducatif à l’entrée en 2nde générale. ► Des changements de mentalités et de pratiques s’imposent au sein des équipes éducatives et des instances intervenant dans l’affectation des élèves (conseils de classe notamment) afin de mieux orienter les jeunes selon leurs capacités globales et leurs aspirations, et non plus seulement en fonction de leurs résultats scolaires, de leur origine sociale, de leur sexe… 2.2. Conforter la participation des enseignants par le développement de leur connaissance de l’emploi et du monde du travail Les enseignants doivent prendre conscience de l’impérieuse nécessité de préparer les jeunes à leur avenir professionnel car l’emploi constitue une des finalités essentielles de toute formation, quels que soient le niveau, le domaine et la filière (générale, professionnelle…). Pour ce faire, il est essentiel que les enseignants 48 connaissent mieux le fonctionnement de l’entreprise et du monde du travail afin d’en dispenser à leurs élèves une vision plus précise et plus objective. ► Il est important que le professeur principal en charge de l’orientation puisse être sensibilisé à la fois aux réalités du monde du travail et à la diversité de l’offre de formations. Cette connaissance prend toute sa place dans une formation continue qui devrait être obligatoire pour exercer cette fonction au collège (3e) comme au lycée. Des formations régulières permettront de réactualiser au fur et à mesure leurs connaissances, grâce à des stages et visites en entreprise. ► L’éducation à l’orientation s’inscrit pleinement dans la démarche éducative : si possible dans chaque enseignement, des occasions seront aménagées pour apporter aux élèves cette connaissance des métiers et des formations. En dépit des efforts accomplis, la volonté de certains professionnels de présenter aux jeunes leur métier peut encore se heurter à certaines réticences de la part des établissements scolaires. ► Chaque projet d’établissement devrait intégrer un nombre minimum de rencontres annuelles avec des professionnels (en classe ou sur site) issus des différents secteurs d’activité du territoire. 46 47 48 « Les sorties sans qualification », Rapport de l’Inspection Générale de l’Education nationale (2005). Dans ce cas, il s’agit en général d’une rupture de contrat d’apprentissage causée par l’entreprise ou par l’apprenti. Une prime à la mobilité avait été créé pour permettre aux universitaires d’aller en entreprise mais elle a été peu utilisée. 19 ► Pour faciliter ces contacts, le GIP 49 Univers Métiers constituerait une liste de professionnels du territoire prêts à rencontrer et à échanger avec les jeunes sur leur métier. 2.3. Améliorer l’offre de conseils en orientation à l’Université 1 étudiant sur 5 qui échoue aux examens, 1 sur 8 qui quitte sa formation universitaire en cours d’année pour des raisons diverses mais mal identifiées (soit au total, 4 étudiants sur 10 qui ne valident pas leur année dans les universités alsaciennes 50 ), une insertion professionnelle difficile des Bac+1/+2 non diplômés… Dans un contexte de massification de l’accès à l’enseignement supérieur assortie de moyens relativement faibles par étudiant, ces constats montrent l’urgence de mieux encadrer les étudiants pour augmenter leurs chances de quitter l’Université avec un diplôme. Aujourd’hui, les élèves sont trop focalisés sur l’obtention du bac. Par conséquent, l’ « après bac » est souvent très flou et beaucoup d’étudiants perdent pied au cours de leurs premières années à l’Université. Les changements de rythme, de méthodes de travail, la méconnaissance du système et de l’offre de formations peuvent effectivement s’avérer très déstabilisantes. Le constat que les élèves des filières, dont l’organisation se rapproche de l’enseignement secondaire (Ecoles, BTS, IUT), s’en sortent mieux 51 corrobore cette appréciation. En outre, l’obtention de la licence – premier palier de sortie depuis la réforme LMD – est souvent vécue comme une période d’hésitations : continuer ses études, passer des concours ou entrer dans la vie active ? Face au constat que certains jeunes possèdent un niveau de connaissances et une autonomie insuffisants pour réussir aisément dans l’enseignement supérieur, deux types de réponses seraient possibles : - l’un, relevant actuellement du niveau national, reviendrait à faire passer des tests d’entrée à l’Université. Mais, dans la mesure où les déterminants socioculturels sont déjà particulièrement discriminants dans les chances d’accès à l’enseignement supérieur, instaurer un nouvel examen est susceptible de renforcer les inégalités au profit des jeunes les plus favorisés et à mettre encore davantage à mal « l’ascenseur social » ; - l’autre, relevant de chaque établissement de formation, consisterait en un repérage et un suivi des étudiants en difficulté par des actions appropriées, déclinées en fonction des spécificités locales. C’est aujourd’hui l’option prise par le Ministère dans son plan pour l’égalité des chances à l’Université 52 . En réaction à ces différents questionnements, le CESA propose, d’une part, d’améliorer l’offre de conseils en orientation à l’Université pour permettre aux jeunes de rebondir plus aisément ; d’autre part, de généraliser les tutorats académiques et autres dispositifs de soutien pour les élèves en difficulté qui risquent d’échouer à l’examen final, après diagnostic de leur nombre et de leurs besoins. 49 GIP : Groupement d’intérêt public Tous niveaux confondus, plus de 4 étudiants sur 10 n’obtiennent pas le diplôme pour lequel ils étudiaient. En effet, presque 1 étudiant sur 5 échoue à l’examen et 1 étudiant sur 4 ne se présente pas aux épreuves : parmi ces derniers, 45% quittent définitivement l’enseignement supérieur. Sources : Observatoire régional de l’insertion professionnelle des étudiants (ORESIPE). 51 Parce qu’ils ont de meilleures performances scolaires grâce auxquelles ils y ont été acceptés mais aussi parce qu’ils ne connaissent pas ses bouleversements organisationnels. 52 Un appel d’offres des Ministères de l’Enseignement supérieur et de la recherche et de l’Egalité des chances a été lancé début 2006. 50 20 Le CESA suggère, de plus, de : ► désigner pour chaque étudiant un enseignant référent, dont il pourra solliciter l’appui et les conseils en cas de difficultés « scolaires » ou d’orientation ; ► généraliser, dans l’ensemble des cursus, les formations à l’élaboration du projet personnel et professionnel de l'étudiant en les intégrant aux parcours de formation. L’évaluation systématique de ces formations permettra de mieux connaître les besoins des étudiants. A travers les contrats quadriennaux, les universités inciteront plus d'enseignants à se former à l'animation de ces modules ; ► mieux informer les étudiants de 1er cycle universitaire sur les débouchés accessibles après la licence (métiers, concours…), mais aussi sur l’offre de formations régionale, nationale et européenne : ils pourront ainsi réaliser un choix éclairé entre poursuite d’études et entrée sur le marché du travail. Des partenariats entre les enseignantsréférents, les personnels du SUIO 53 et de l’ONISEP 54 , l’APEC 55 , l’AFIJ 56 , des cabinets de recrutement, des professionnels et d’anciens étudiants pourraient être mis en œuvre ; ► communiquer sur la réforme LMD auprès des entreprises susceptibles de recruter les étudiants à la sortie de l’Université : cette réforme est restée intra-universitaire et pas assez visible pour les entreprises. Une plus grande lisibilité des diplômes – contenus et débouchés – est effectivement primordiale, pour les jeunes et l’ensemble des acteurs. 2.4. Développer la prospective des métiers dans les branches professionnelles et diffuser largement ses résultats La loi de 2004 sur la formation professionnelle demande à toutes les branches professionnelles de mettre en place des observatoires prospectifs des métiers et des qualifications. Constatant les retards pris dans une mise en place que les partenaires sociaux avaient voulu effective pour la fin 2005, le CESA demande au Conseil régional de : ► faire progresser le nombre de Contrats d’objectifs territoriaux pour augmenter son pouvoir d’incitation ; ► mailler les résultats des observatoires de branches avec ceux de l’OREF - Alsace afin de centraliser toutes les données au niveau régional et de les diffuser ensuite aux acteurs régionaux de l’information – orientation, dont les CIO, les Missions locales… 2.5. Attirer les jeunes vers les métiers qui recrutent En dépit des limites inhérentes à l’exercice de prospective 57 , les données communiquées par les branches professionnelles et centralisées par l’OREF permettront d’avoir une meilleure visibilité sur le marché de l’emploi régional et sur ses évolutions à court et moyen termes. ► L’ensemble des données recueillies par l’OREF - Alsace servira à mettre en place des plans régionaux de communication sur les métiers qui recruteront dans les cinq ans à venir. La mise en œuvre de ces plans sera confiée au GIP Univers Métiers. 53 SUIO : service universitaire d’information et d’orientation. ONISEP : office national d’information sur les enseignements et les professions. APEC : Association pour l’emploi des cadres (à partir de bac+3). 56 AFIJ : Association pour faciliter l’insertion des jeunes diplômés (bac+1 et au delà). 57 Une fois les données collectées et consolidées, le marché du travail a changé. 54 55 21 ► Dans ce cadre, des efforts spécifiques seront entrepris pour attirer les jeunes vers les métiers en tension. Des changements profonds de mentalité seront nécessaires chez les jeunes et leurs familles pour lutter contre les stéréotypes et valoriser l’image des métiers. De plus, si la concomitance du chômage et d’offres d’emplois non satisfaites n’est pas un phénomène nouveau, il est urgent de mieux le connaître, de l’analyser et d’y trouver des solutions. ► Les métiers de l’artisanat, dont les entreprises recherchent du personnel qualifié devront être mieux valorisés auprès des élèves. L’artisanat présente l’avantage d’accepter en apprentissage des jeunes de tout niveau, y compris ceux en difficulté avec les fondamentaux. ► Une attention spéciale sera accordée aux jeunes filles dans l’objectif de diversifier leur orientation et leurs débouchés professionnels. Parallèlement, la promotion de la mixité sera assurée dans tous les métiers. ► Les jeunes très éloignés de l’emploi constitueront une cible privilégiée de cette communication par le biais des Missions locales/PAIO mais aussi des centres socioculturels et MJC 58 , des associations de quartier, des permanences sociales…que les jeunes très en difficultés sont susceptibles de fréquenter. La récente étude du Commissariat général du plan et de la DARES montre que le secteur des services à la personne sera un des gisements d’emplois de la prochaine décennie. Peu connus des jeunes et socialement peu valorisés, ces métiers risquent de connaître d’importantes difficultés de recrutement. L’OREF - Alsace s’est engagé avec l’appui du BETA – CEREQ dans une étude sur les services à domicile. En s’appuyant sur cette étude régionalisée qui permettra l’élaboration d’un plan régional de formation et de communication sur les métiers des services à la personne, le CESA propose de : ► sensibiliser les jeunes en cours de formation aux opportunités offertes dans le secteur des services à la personne (notamment les jeunes de 3ème, de lycées professionnels et technologiques) ; ► réfléchir à un cursus de formation initiale de niveau V et/ou IV qui contiendrait un socle commun de « compétences de base » et des options de spécialisation par domaine professionnel (enfants, personnes âgées, personnes handicapées, services domestiques…) : cette formation de base commune est susceptible de faciliter la mobilité à l’intérieur du secteur et de renforcer son attractivité en terme de perspectives de carrières ; ► promouvoir la mixité dans les métiers des services à la personne et particulièrement dans les secteurs quasi-exclusivement féminins : social, enfance... En effet, le problème de la reconversion dans le tertiaire de jeunes hommes au chômage et titulaires d’une formation professionnelle aujourd’hui obsolète, se pose. Dans tous ces domaines, le GIP Univers Métiers sera en charge de la coordination de l’ensemble des projets qui seront mis en place avec les professions. Le réseau des référents locaux et les partenaires du GIP Univers Métiers poursuivront leur action en faveur de la connaissance et de la promotion des métiers sur les territoires, auprès des publics de tous âges. 58 MJC : Maisons des Jeunes et de la Culture. 22 2.6. Promouvoir l’esprit d’entreprise L’Alsace compte moins d’entrepreneurs que la moyenne nationale (0,5 % contre 0,6 %) malgré un dynamisme certain de la création d’entreprises en région 59 mais le travail salarié y est effectivement plus développé. En outre, de nombreuses PME seront à reprendre dans les prochaines années, notamment dans l’artisanat. L’enquête Génération 2001 révèle que 2 % des jeunes sont travailleurs indépendants à leur sortie de formation initiale puis 4 % après trois années de vie active (contre 9-10 % pour les 2939 ans). Les opportunités offertes par la création d’entreprises sont susceptibles d’intéresser certains jeunes ayant acquis quelques années d’expérience professionnelle car c’est un moyen de créer leur propre activité dans un contexte de raréfaction de l’emploi et de compétition accrue sur le marché du travail. Limitées pour l’essentiel aux lycées professionnels, BTS, IUT voire à certaines formations supérieures, les actions de promotion de l’esprit d’entreprise en direction des jeunes restent trop peu nombreuses. ► Sur la base de ce constat émis lors d’un précédent avis sur la création d’entreprise (1999), le CESA avait proposé la multiplication des actions de sensibilisation et de formation des élèves, tout au long de leur cursus. Une telle démarche de long terme commence tôt dans la vie scolaire, probablement au niveau du collège, pour se poursuivre au lycée/CFA. Elle gagnera à s’intensifier dans l’enseignement supérieur grâce à des modules de formation, optionnels et intégrés aux cursus universitaires. Les actions entreprises contribueront à transmettre aux élèves l’esprit d’initiative, l’envie d’entreprendre et le goût de la prise de risques tout en leur faisant comprendre le sens de la responsabilité et l’exigence de qualification que la création d’entreprise implique 60 . ► De manière plus globale, il est souhaitable que de plus nombreux élèves puissent recevoir des bases d’économie. A défaut de pouvoir influer sur les programmes nationaux, la Région pourrait y contribuer au travers de projets soutenus par le FILA 61 . ► La volonté de la Région et de ses partenaires économiques et institutionnels de promouvoir auprès des jeunes la création d’entreprises pourrait être concrétisée par un concours qui récompenserait les entrepreneurs junior ; à l’image de la manifestation nationale « Talents des cités ». ► Un réseau de parrainage des jeunes créateurs gagnerait à être structuré au niveau régional : en effet, l’accompagnement des porteurs de projets par des pairs expérimentés joue souvent un rôle crucial. Parallèlement, le développement du programme régional de formation pour les créateurs d’entreprise permettra aux porteurs de projet de compléter leur formation et d’asseoir leurs compétences en gestion. 2.7. Démultiplier les moyens des acteurs de l’orientation par le travail en réseau Avec 100 équivalents temps pleins dans les centres d’information et d’orientation (CIO) de l’Académie de Strasbourg, les conseillers d’orientation psychologues (COPSY) ne peuvent consacrer que peu de temps aux élèves, notamment ceux qui éprouvent des difficultés particulières d’orientation. 59 En 2004, 7 100 entreprises ont été créées, reprises ou réactivées en Alsace, soit 9% de plus que l’an passé. Cette hausse s’est opérée dans l’industrie, le commerce et la construction, alors que le nombre de créations fléchissait légèrement dans les services. 60 Pour garantir la viabilité des projets et la protection des consommateurs. 61 Fonds d’initiative des lycéens et apprentis. 23 Bien au fait de l’offre de formations, les COPSY bénéficient d’une connaissance moins approfondie du monde de l’entreprise. Ils sont donc parfaitement complémentaires avec d’autres acteurs de l’orientation plus proches du monde professionnel tels les Missions locales/PAIO, les référents Univers Métiers, les chambres consulaires… Pourtant, dans le quotidien, tous ces partenaires s’ignorent trop souvent, en dépit de la création du GIP Univers Métiers en 2002. ► Le CESA estime que la participation de l’ensemble des acteurs de l’orientation aux actions menées avec les classes de collèges et de lycées permettra une démultiplication des moyens et des initiatives et une ouverture vers de nouvelles sources d’informations, profitable à un plus grand nombre d’élèves, et notamment à ceux qui ont le plus besoin d’être accompagnés. Pour mettre en œuvre un véritable processus d’orientation tout au long de la vie, l’éducation au choix doit devenir une mission transversale et partagée. ► Pour les jeunes fraîchement diplômés de l’enseignement supérieur, la coordination des structures comme l’ANPE, l’AFIJ, l’APEC, les cabinets de recrutement… permettra de rendre plus cohérente l’offre de services de conseils en orientation, de placement et d’accompagnement social. ► Sur les territoires, les liens entre les antennes de la Mission générale d’insertion, les CIO et le réseau des Missions locales/PAIO gagneraient à être renforcés, soutenus et évalués. L’objectif de cette coopération renforcée sera de mieux encadrer et d’accompagner les jeunes sortis de l’Ecole en situation d’échec pour leur trouver rapidement des solutions de formation et de qualification et ne pas les laisser en déshérence, sans réelle perspective d’avenir. ► Une politique régionale d’information et d’orientation professionnelle devra être mise en place en concertation avec les acteurs publics et économiques en s’appuyant sur Univers Métiers. A compter de 2006, l’Académie de Strasbourg est une des six zones pilotes d’expérimentation du Schéma national d’orientation et d’insertion professionnelle, placé sous l’égide du Recteur. ► Cette expérimentation est l’occasion de réunir l’ensemble des partenaires et de mettre en place sur les territoires des actions originales et innovantes qui pourraient ensuite être essaimées. Suite à la conclusion des contrats d’objectif Etat - Région - Missions locales/PAIO, le CESA avait demandé, dans un précédent avis 62 , au Conseil régional d’assurer la souplesse de fonctionnement du dispositif régional « orientation - formation - emploi » qui comporte une multitude d’acteurs 63 , plus ou moins bien identifiés par les demandeurs d’emploi. ► Les différents découpages administratifs 64 et le partage des compétences entre les acteurs ne doivent pas grever l’efficacité de l’action menée au bénéfice des usagers. Sur chaque territoire, la coopération entre les associations à but social, les structures d’insertion professionnelle et les organismes de formation est indispensable pour appréhender les situations individuelles les plus complexes dans leur globalité et offrir des réponses adaptées, proches des lieux de vie des jeunes à la recherche d’un emploi. ► La mise en place des Maisons de l’emploi et de la formation, en exigeant une organisation en réseau des services utiles aux demandeurs d’emploi (ANPE, Assedic, services RMI, mission locale…), facilitera les démarches des personnes. Le maillage de proximité et le travail en commun des différents acteurs de l’orientation et de l’emploi 62 Avis sur le Schéma régional de l’éducation et de la formation - CESA - (2004). ML/PAIO, ANPE, réseau agriculture, chambres consulaires, organisations professionnelles et syndicales, CIO, MGI, SCUIO, CIJA, BIJ, Univers Métiers, OPCA, centres de bilan de compétences, GRETA, CNAM, APEC, AFPA… 64 Zones emploi - formation, districts scolaires, zones des référents Univers Métiers et des Points relais conseil en VAE. 63 24 qu’induiront ces Maisons de l’emploi et de la formation bénéficieront à l’ensemble des publics, mais surtout aux plus défavorisés, pour qui le système apparaît aujourd’hui particulièrement complexe. 2.8. Faciliter les réorientations après une première expérience professionnelle Face au constat que beaucoup de jeunes passent par le travail temporaire et que les moins diplômés connaissent souvent des débuts de vie active non linéaires 65 , l’obligation de la loi de 2004 sur la formation professionnelle d’organiser un entretien annuel avec tout salarié peut sembler incantatoire. En outre, les mieux dotés en formation initiale sont ceux qui profitent le plus de la formation continue, tandis que seuls 6 % des sans qualification en bénéficient 66 . ► Dans une perspective d’orientation et de formation tout au long de la vie, un entretien individuel formel pourrait être aménagé au bout de deux-trois ans de vie active afin de permettre aux jeunes de faire le point et d’éventuellement se réorienter. Compte tenu du nombre conséquent de jeunes qui part dans la vie active en étant déclassé (40 %), désajusté (60 %) voire les deux à la fois 67 , ce contact avec un référent permettrait à ceux qui le désirent de profiter d’une deuxième chance. Ils pourraient ainsi entrer dans une formation qualifiante différée pour valider les compétences acquises pendant leur 1ère expérience du travail. ► Seront prioritaires les jeunes les moins qualifiés et ayant le moins bénéficié de la formation initiale. ► Cette mission pourrait être confiée aux futures Maisons de l’emploi et de la formation, là où elles existent ou, à défaut, au réseau des Missions locales. 65 66 67 Emploi récurrent, périodes courtes mais nombreuses de chômage… « Les jeunes sans qualification » BREF n°202, Céreq (2003). Pour les problématiques de « déclassement », « désajustement » et de leur combinaison, voir « Quelles formations pour quels emplois ? », Céreq (2000). 25 26 3 Amener les jeunes à mieux connaître le monde du travail pendant leur formation initiale De nombreux jeunes ont une approche trop « manichéenne » de l’entreprise, oscillant entre une vision idéalisée des réalités du monde du travail et, à l’inverse, l’image dépréciée d’une structure axée sur le profit au détriment de ses ressources humaines. La méfiance réciproque entre le monde éducatif et celui de l’entreprise en est partiellement responsable. Aussi l’arrivée de débutants dans une entreprise peut-elle provoquer des désillusions et des difficultés d’intégration. Le rapport constant de 1 sur 2 entre les taux de chômage des actifs jeunes et adultes ainsi que le passage de 70 % des jeunes par un contrat à durée déterminée (CDD) 68 illustrent la défiance d’un certain nombre d’entreprises vis-à-vis des jeunes générations. Cette tendance s’accentue en période de rationnement d’emplois 69 quand la sélection est d’autant plus forte. L’intégration des jeunes est plus complexe dans les petites et moyennes entreprises. Principal vivier d’emplois, elles restent trop souvent méconnues des jeunes et particulièrement de ceux qui sont issus de formations « prestigieuses » ou de haut niveau : ils préfèrent généralement travailler dans des grandes entreprises car elles offrent des avantages matériels plus importants et une valorisation sociale 70 supérieure. Comparaison du statut des jeunes actifs par rapport au reste de la population active 15-29ans 30-49 ans Population totale 2002 2004 2002 2004 2002 Non salarié 2,9 2,9 10,1 9,4 CDI 59 10,2 9,8 58 75,4 75,2 71,5 71,3 Emploi 22,7 21 temporaire Chômage 2004 7,1 7,2 9,5 9,1 15,4 18,1 7,4 8,2 8,8 9,8 1 0,9 0,8 0,7 0,6 0,5 0,4 0,3 0,2 0,1 0 Part des contrats précaires (non CDI) en fonction de l'âge Âge 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 En apprenant à mieux connaître les jeunes et en les accueillant plus systématiquement pendant leur scolarité, de plus nombreuses entreprises seraient prêtes à leur donner leur chance en dépit de leur manque d’expérience. Réciproquement, les jeunes auraient une vision plus juste de l’entreprise et s’y intégreraient plus aisément. Pour combler le fossé qui sépare trop souvent les attentes des jeunes de celles des entreprises, l’expérience « in situ » – grâce à la formation en alternance et, dans une moindre mesure, aux stages intra-cursus – reste le meilleur moyen pour les jeunes de comprendre le monde du travail et de s’y intégrer, si tant est que tous les acteurs jouent leur rôle… 68 Le CDD sert plus souvent de période d’essai en France que les contrats de même type dans d’autres pays européens selon la DARES. « Inexpérience professionnelle et accès des jeunes à l’emploi », Notes du LIRHE n°313 (2000). 70 Il suffit de voir le palmarès des entreprises préférées des jeunes diplômés des grandes écoles (édité par le Figaro notamment). 69 27 3.1. « Insérer pour former » les jeunes très éloignés de la qualification Un nombre conséquent de jeunes sort sans aucune qualification du système scolaire : environ 20 % d’une classe d’âge au niveau national, ils seraient quelques 1 500 par an dans l’Académie de Strasbourg 71 . Si une part d’entre eux se retrouve ensuite dans les stages de formation financés par la Région, à l’AFPA, en contrat aidé ou en apprentissage ; d’autres, ne trouvent malheureusement ni emploi, ni formation et vivent souvent dans des conditions de vie précaire, parfois tentés d’adopter des solutions déviantes. Plus cette première période de chômage perdure, plus il leur sera difficile de trouver un emploi. De nombreux jeunes éloignés de la qualification trouvent néanmoins un contrat d’apprentissage - lequel est un véritable contrat de travail - dans le secteur artisanal. ► Pour les jeunes très éloignés de la qualification et de l’emploi, le partenariat des Missions locales et d‘entreprises volontaristes qui désirent s’engager dans l’insertion des jeunes en difficulté permettra de les insérer afin de les former en situation de travail 72 . Les entreprises volontaires seront amenées à recruter des jeunes selon le seul critère de la motivation (leur envie de s’en sortir, d’apprendre et de travailler) qu’elles auront ensuite la tâche d’entretenir et de faire évoluer. Dans cette optique, les entreprises doivent aller vers leurs partenaires (Conseil régional, partenaires emploi, organismes de formation) avec une vraie volonté de co-construire et de conjuguer les compétences de chacun. ► La loi de cohésion sociale modifie le code des marchés publics et permet d’inclure aux appels d’offres une clause de « promotion de l’insertion et de l’emploi » 73 : les donneurs d’ordre (collectivités territoriales, en particulier) pourront ainsi demander aux entreprises candidates de recruter un certain nombre de jeunes demandeurs d’emploi. ► Une fois dans l’entreprise, l’action coordonnée d’un tuteur professionnel du métier et d’un « accompagnateur social » (mission locale, par exemple) est fortement recommandée pour réussir l’intégration du jeune dans l’entreprise, tout en l’aidant à régler ses problèmes plus personnels. Pour ce faire, il est nécessaire d’alléger la charge de travail du tuteur et d’organiser des réflexions pédagogiques sur l’environnement de travail du jeune afin de lui donner toute sa dimension formatrice. Si ces dispositions sont plus évidentes à mettre en place dans les grandes entreprises que dans les PME/TPE, l’individualisation des apprentissages, la responsabilisation du jeune et l’évaluation de ses progrès grâce à un carnet de suivi de ses compétences restent partout les ingrédients qui permettront une insertion réussie du jeune dans un collectif de travail. ► Une validation des acquis sera proposée à la fois au tuteur professionnel et au jeune en phase d’insertion. En effet, par cette expérience, les tuteurs développent de nouvelles compétences qu’il est intéressant pour eux de valoriser dans leur projet de carrière professionnelle. Quant aux jeunes, habitués à l’échec, cette validation formelle des acquis signifiera la reconnaissance de leur savoir-faire et de leur valeur par un employeur, ainsi que la possibilité ultérieure de transférer leurs compétences dans d’autres emplois. Une fois intégré dans l’entreprise, il est important que le jeune puisse progresser et obtenir un certificat de compétences professionnelles puis, plus tard, son premier diplôme (niveau V). 71 Environ 7% d’une génération in « Vaincre l’illettrisme en Alsace, un défi à relever », CESA, (2003). Par un contrat de travail au choix de l’entreprise : CDI, CDD, contrat de professionalisation, contrat jeune en entreprise… Voir « Actes du débat public du CESA : De l’Ecole à l’emploi » (2005). Intervention de MM GIFFARD (Sogea construction) et DURIER (Entreprise et progrès). 73 Articles 14 et 30 du nouveau code des marchés publics. 72 28 ► Le CESA rappelle que l’ASSEDIC Alsace détient la capacité de financer des formations et recherche des entreprises qui peinent à trouver du personnel qualifié pour leurs métiers. A ce titre, la communication vers les entreprises gagnerait certainement à être renforcée afin de les informer des possibilités de financement de la formation qui s’offrent à elles. ► Afin de distinguer les entreprises qui s’engagent avec volontarisme dans cette voie, la Région Alsace pourrait avec d’autres partenaires économiques et sociaux mettre en place un prix régional de l’insertion des jeunes. 3.2. Sensibiliser les entreprises aux atouts des contrats en alternance Apprentissage, contrat de professionnalisation, contrat jeune en entreprise…De nombreuses aides existent pour les entreprises qui veulent embaucher des jeunes, notamment les peu ou pas qualifiés. Mais en dépit d’une simplification des contrats en alternance par la loi de réforme de la formation professionnelle (2004), beaucoup d’entreprises ne s’y retrouvent toujours pas dans le dédale des nombreux contrats qui leur permettraient d’embaucher un jeune. Si le contrat de qualification a bien fonctionné, particulièrement en Alsace, le démarrage du contrat de professionnalisation, qui le remplace, semble plus hésitant. ► Dans un contexte de recentrage de l’action de l’UNEDIC sur la formation professionnelle des demandeurs d’emploi et de crédits insuffisamment mobilisés en Alsace, les entreprises devraient se positionner pour développer les contrats en alternance et la formation des demandeurs d’emploi qu’elles recrutent. ► La Région pourrait, avec les services de l’Etat (DR-DDTEFP 74 , ANPE…), les branches professionnelles, les chambres consulaires et le réseau d’accueil des jeunes, monter une campagne régionale de communication sur le contrat de professionnalisation, dont la cible principale serait les PME (plaquettes, visites d’entreprises...) 75 . Ces partenaires devront également inciter et accompagner les structures de formation publiques (universités, lycées professionnels, AFPA, GRETA…) comme privées (organismes de formation, associations…) dans le développement de l’offre de formations dédiée au contrat de professionnalisation. ► Ce contrat a été conçu par les partenaires sociaux au bénéfice des jeunes sans qualification afin de leur accorder une formation suivie d’une insertion dans l’entreprise : il est important que les branches professionnelles, qui gèrent ce contrat selon les termes de l’Accord national interprofessionnel de 2004, lui donnent toute sa place dans une région où le taux moyen de qualification est inférieur à la moyenne nationale. 3.3. Développer encore plus largement l’apprentissage au niveau régional Sans être la « panacée », car il ne constitue pas la solution idéale pour tous les jeunes, à tous les niveaux et dans tous les domaines de formation, l’apprentissage représente : une véritable filière de formation allant du niveau V au niveau I (ingénieur) ; une voie d’excellence pour les métiers manuels ; un parcours d’insertion professionnelle privilégié pour de nombreux jeunes, y compris les étudiants des formations post-bac. 74 75 Directions régionale et départementales du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle. En outre, le coût pour la collectivité du contrat de professionnalisation est nettement moindre que celui du contrat d’apprentissage (selon les chiffres de la loi de finances pour 2006). 29 ► Le développement de l’apprentissage est souhaitable dans la mesure où il permet un rapprochement efficace des attentes des jeunes et des entreprises. La création de véritables filières de formation allant du CAP-BEP à la licence voire au master professionnel contribuera à la revalorisation de cette voie de formation ainsi qu’à l’élévation souhaitée des niveaux de qualification de la population alsacienne. Mais un des principaux freins à son développement dans l’enseignement supérieur réside dans l’insuffisance de l’offre de formations ouvertes à l’apprentissage : une étude pourrait être commandée par la Région afin de faire le point sur l’existant et d’explorer des perspectives raisonnées de développement de cette offre dans les prochaines années. ► Le repli du secteur industriel ayant eu des conséquences fortes sur l’insertion d’un certain nombre d’apprentis, l’ouverture de l’apprentissage vers de nouveaux métiers du tertiaire constitue une priorité pour assurer la transition de l’économie alsacienne 76 . Ces métiers émergents du tertiaire, notamment les services à la personne, demandent à la fois une formation technique et des compétences relationnelles ; le contact humain y joue un rôle important. Parallèlement, de nombreux métiers de l’artisanat cherchent à recruter des apprentis pour transmettre leurs savoir-faire. Les entreprises artisanales accueillent aujourd’hui des jeunes de tout niveau scolaire mais pour faciliter leur intégration, il conviendrait que les CFA puissent adapter les parcours de formation en les individualisant et en conférant la priorité à l’apprentissage des gestes professionnels de base. Conformément au plan de cohésion sociale, la Région Alsace s’est fixée l’objectif de 5 000 apprentis supplémentaires d’ici 2009 (ils sont aujourd’hui 13 200 contre 12 000 en 2004). ► Si le développement de l’apprentissage est souhaitable, le CESA s’interroge sur la capacité de la Région à atteindre cet objectif ambitieux. ► Le pouvoir d’inciter les entreprises à développer l’apprentissage est évidemment limité mais la Région peut agir auprès des PME qui bénéficient de ses aides au titre de la formation, de l’économie… De plus, les entreprises et branches signataires des Contrats d’objectifs territoriaux (ou d’accords-cadres) pourront être plus systématiquement poussées à s’engager davantage dans l’alternance, notamment aux niveaux IV et supra. ► Le développement quantitatif et qualitatif de l’apprentissage dans l’ensemble des secteurs d’activités, et à tous les niveaux de formation, suppose la redéfinition des modalités de financement des CFA pour tenir davantage compte des impératifs liés à la personnalisation de certains parcours et au coût réel des formations professionnelles dispensées. ► Compte tenu de leur plus grande facilité à accueillir des jeunes pour des raisons organisationnelles, les grandes entreprises basées en Alsace ont un rôle important à jouer dans le domaine de l’alternance. Comme elles n’embaucheront pas tous les apprentis formés, elles pourraient les aider à trouver un emploi au sein d’entreprises partenaires 77 (sous-traitantes, par exemple). ► Le secteur public (entreprises publiques, collectivités territoriales…) a un rôle exemplaire à jouer pour développer l’accueil d’apprentis 78 . Même si les apprentis ne peuvent directement être intégrés à la fonction publique, il est nécessaire que le secteur public contribue à la formation des jeunes de tous niveaux. Ces jeunes formés en apprentissage seront ensuite recrutés dans le secteur privé ou passeront les concours permettant de devenir fonctionnaire. 76 Le tertiaire occupe les 2/3 des actifs alsaciens, une proportion encore inférieure à la moyenne nationale du fait du poids de l’industrie. Surtout, avec 65% de la valeur ajoutée régionale produite en 2001 dans ce secteur, l’Alsace arrive au 14ème rang des 22 régions. L’Alsace est néanmoins la région où la valeur ajoutée du tertiaire a le plus augmenté au cours de la décennie. 77 C’est déjà la pratique de l’entreprise Peugeot PSA et de la Communauté urbaine de Strasbourg (CUS). 78 Le rapport Proglio sur l’insertion des diplômés du supérieur (2006) propose d’aménager une voie d’accès particulière aux concours de la fonction publique pour les jeunes formés en son sein par le biais de l’apprentissage. 30 Pour ce faire, de plus nombreuses formations de niveaux I et II 79 devront certainement être ouvertes à l’apprentissage. Ces formations gagneraient à réunir des profils divers et interdisciplinaires pour permettre aux collectivités de diversifier leurs recrutements par de nouveaux profils et compétences : d’abord sous contrat d’apprentissage, ils pourraient ensuite être accompagnés pour passer les concours, nécessaires à la titularisation dans la fonction publique. Outre ses vertus précitées, le développement de l’apprentissage peut poser certaines difficultés. La nécessaire sélection - due au surplus de demandes par rapport à l’offre d’apprentissage dans certains secteurs d’activité - exclut un certain nombre de jeunes de cette voie de formation : il apparaît que les jeunes issus de l’immigration 80 ou des quartiers sensibles y ont moins accès, hormis dans certains secteurs comme le BTP. Ces jeunes sont alors scolarisés « par défaut » dans les lycées professionnels et connaissent des taux d’insertion nettement moins favorables par la suite car la qualité des formations professionnelles sous statut scolaire est moins reconnue par les entreprises. Par conséquent, il est important de mener de front développement de l’apprentissage et revalorisation de la voie professionnelle sous statut scolaire. Cette revalorisation passe par le développement, quantitatif (dans certains cas) mais surtout qualitatif, de l’offre de formations en lycée professionnel. Il s’agira par là d’ouvrir davantage de perspectives aux jeunes qui n’ont pas été acceptés en apprentissage et à ceux dont les premiers – voire deuxièmes – vœux d’orientation sont déboutés en raison du manque de places dans certains lycées. Il est important que la Région garde ces éléments à l’esprit dans le cadre de sa réflexion sur la poursuite du développement de l’apprentissage. 3.4. Nommer un correspondant entreprise dans chaque établissement de formation Les entreprises estiment ne pas avoir suffisamment de lisibilité sur les diplômes et ignorent souvent à qui s’adresser pour se renseigner auprès des établissements scolaires. Quant aux Universités, si elles travaillent de plus en plus en lien avec les entreprises, de nombreux efforts restent à mettre en œuvre, notamment à l’occasion de la mise en place des licences et masters professionnels. ► Il serait pertinent d’identifier un interlocuteur unique, un « correspondant », placé auprès du directeur de l’établissement (lycée, CFA) ou de son président (Université) et qui serait en charge des relations avec les entreprises. Ce correspondant pourrait animer un réseau d’entreprises, notamment celles présentes sur le territoire de l’établissement de formation. 3.5. Systématiser les modules de formation aux techniques de recherche d’emploi et de préparation à l’entretien d’embauche dans toute formation de fin de cycle Si des formations à la préparation de CV, lettres de motivation ou entretiens d’embauche sont répandues dans certaines formations professionnelles ou « professionnalisantes », elles sont largement moins proposées dans le cadre des cursus plus généralistes de formation de 79 80 A l’image du Master professionnel « management public » de l’ESSEC, dont des apprentis sont accueillis à la CUS. Le rapport de Nora Barsali (2005) commandé par l’ACFCI sur l’égalité des chances dans l’apprentissage montre les problèmes d’accès des jeunes de couleur et/ou issus de l’immigration, à accéder à cette voie de formation. 31 l’enseignement secondaire et supérieur. En définitive, peu de jeunes sont réellement prêts à la recherche efficace d’un emploi, à affronter leurs premiers entretiens d’embauche, à ne pas se décourager en cas d’échecs répétés lors des premiers contacts… Ces compétences sont pourtant indispensables aux jeunes de tout niveau : d’une part, pour les aider à trouver des stages plus rapidement et au contenu plus intéressant au regard de leur formation ; d’autre part, pour mieux préparer les sortants à bien se positionner sur le marché du travail. ► Le CESA propose d’inclure dans les parcours de formation des modules de techniques de recherche d'emploi (et de stages) et de les généraliser à toutes les formations marquant la fin d’un cycle. Des anciens élèves pourront être associés à ces formations dans le but d’illustrer par des cas concrets les différents débouchés possibles. Des simulations d’entretiens d’embauche pourront être réalisées grâce à la participation de professionnels du recrutement (entreprises, structures spécialisées…). Ces actions seront à calibrer en fonction du type de formation suivie par les jeunes et de leur profil. Pour les étudiants de l’Université, des structures spécialisées telles l’APEC, l’AFIJ… pourront être plus systématiquement sollicitées. Enfin, internet est aujourd’hui un outil quasi-incontournable de recherche d’informations sur les métiers et l’emploi ainsi qu’un moyen de recrutement en développement. 3. 6. Optimiser l’organisation des stages en entreprise Dans l’enseignement supérieur, 32,4 % des étudiants interrogés déclarent avoir effectué un ou plusieurs stages : cette proportion est la plus élevée dans les STS, les IUT et le secteur de la santé. Pour 78 % des stagiaires interrogés, les stages réalisés étaient obligatoires et 56 % d’entre eux n’avaient perçu aucune rémunération 81 . Les stages en cours d’études permettent aux élèves et étudiants d’affiner et de valider leur projet professionnel. Ils sont également déterminants dans les décisions d’orientation que le jeune est amené à prendre plusieurs fois au cours de sa scolarité. Mais des dérives ont été constatées : que ce soient les jeunes qui se réinscrivent à l’Université uniquement pour faire un stage ou les entreprises qui prennent des stagiaires, là où elles pourraient embaucher. Pour continuer le développement maîtrisé de ce mode d’acquisition d’expériences et de savoirs, le CESA propose de mieux encadrer le déroulement des stages… - … sur le plan de l’accompagnement à la recherche de stage : ► intensifier la préparation du stage, en particulier pour les élèves les plus jeunes et dans les établissements scolaires les plus difficiles, en les sensibilisant aux réalités du monde de l’entreprise et aux codes sociaux y ayant cours ; ► de manière plus générale, nommer dans les établissements de formation des correspondants pour accompagner les jeunes dans la définition de leur projet professionnel, les aider à trouver leur stage et les suivre pendant cette période. - … sur le plan de l’accompagnement à l’intégration dans l’entreprise : ► améliorer l’accueil et le suivi des jeunes en entreprise en donnant à leur environnement direct de travail toute sa dimension formatrice. Le système le plus performant consiste en la mise en place d’un « double-tutorat » : un « accompagnateur en entreprise (ou tuteur) » et un « accompagnateur du parcours » 81 « Conditions de vie des étudiants » (2003) - Observatoire de la vie étudiante (OVE). 32 qui restent en relation étroite à la fois avec le stagiaire et entre eux (contacts et visites) pendant la période de stage. Ils évaluent ensemble le jeune à la fin ; ► imaginer un système de participation des seniors 82 : ces derniers dégageraient du temps, au moment de la prise de retraite ou en amont, pour encadrer et suivre les jeunes nouvellement arrivés dans l’entreprise. Le projet du gouvernement concernant l’emploi des seniors, notamment dans sa dimension de cumul emploi-retraite (bonification de l’allocation retraite en cas de poursuite d’activité), facilitera ce genre d’initiatives ; ► préparer l’accueil des jeunes dans l’entreprise par le financement – par la Région et d’autres partenaires comme les OPCA – de formations destinées aux chefs d’entreprises et/ou aux salariés : en effet, nombre d’entreprises, et particulièrement les PME, manquent de ressources dans ce domaine. Des structures comme les chambres de métiers organisent déjà ce type de formations mais sont demandeuses d’en approfondir le contenu, notamment dans son volet pédagogique ; ► mieux informer les entreprises d’accueil sur les objectifs des stages et les programmes pédagogiques associés. C’est le rôle de l’établissement de formation. Les propositions énoncées ci-dessus pourraient prendre la forme de conventions-types établies sous l’égide du Rectorat et du Conseil régional. D’autres partenaires comme les chambres consulaires, les organisations professionnelles et syndicales pourront y être associés. Ceci permettra notamment aux différents partenaires de clarifier la notion de « stage », utilisée pour qualifier des dispositifs parfois fort divers. 3.7. Développer la pédagogie de projet tout au long de la scolarité La « pédagogie de projet » est particulièrement adaptée au développement, par les jeunes et à tous les niveaux scolaires, de compétences qui seront transférables dans leur vie sociale et professionnelle : aptitude à la recherche personnelle, travail en équipe, responsabilisation, prise de décision, esprit d’initiative... Par ce biais, les jeunes sont mieux préparés à s’intégrer dans un collectif de travail, que ce soit dans le cadre des stages, des formations en alternance ou de leur premier emploi. ► L’enseignement de cette pédagogie de projet gagnerait à être accessible à l’ensemble des jeunes au cours de leur formation initiale, qu’elle que soit leur filière. En effet, ses nombreux apports aideront tout jeune dans sa vie personnelle et professionnelle. ► Le CESA s’interroge sur la pertinence de la suppression des Travaux personnels encadrés (TPE) en classe de terminale et estime qu’il conviendrait de mieux préparer les jeunes à l’ « après-bac ». ► L’introduction de modules de « projet » dans toutes les formations universitaires apparaît particulièrement pertinente dans la mesure où elle fonctionne avec succès dans les grandes écoles. C’est la pratique de certaines universités, telles l’université de technologie de Compiègne ou celle de Montbéliard, qui sponsorisent des associations étudiantes pour que leurs étudiants participent à des actions associatives. Elles récompensent ensuite les meilleurs projets ; l’objectif final étant de préparer les étudiants à s’engager dans l’agir professionnel. 82 Il pourrait être réalisé sur le modèle du parrainage, lequel recouvre l’intervention de réseaux de personnes bénévoles, en activité ou retraitées, connaissant bien le monde de l’entreprise et se mettant à disposition de « filleuls » qui recherchent un emploi. Le parrain offre au « filleul » sa disponibilité, ses connaissances et son réseau. Par son expérience il peut l’informer des usages du secteur, donner un avis sur le projet, l’éclairer sur le contexte économique, contribuer au développement de son tissu relationnel… 33 3.8. Rapprocher l’Ecole et l’Entreprise en développant de part et d’autre la démarche compétence Le diplôme demeure le facteur déterminant de recrutement dans la grande majorité des entreprises. En réalité, l’ensemble de notre société raisonne encore trop par diplôme et niveau de qualification et pas assez en termes de compétences alors que de plus en plus d’emplois sont transversaux et ne sont plus uniquement « calqués » sur les diplômes. Progressivement, des outils novateurs de recrutement par compétences sont néanmoins élaborés 83 . Ils gagneraient à être mieux connus des employeurs. La sélection par les compétences permet effectivement d’élargir les possibilités de recrutement en découvrant de nouveaux profils, souvent atypiques. De plus, elle permet une forme de « sécurisation » des choix du recruteur en ce qu’elle atteste que le candidat maîtrise un certain nombre de savoirs et savoir-faire requis par le poste de travail. Dans un contexte de « flexibilisation » de l’emploi et de mobilité professionnelle accrues – phénomènes qui touchent plus fortement les jeunes –, la démarche compétence permet une évaluation plus fine de l’ « employabilité » des jeunes, notamment les peu ou pas qualifiés. Les jeunes peuvent ensuite valoriser les compétences qu’ils ont acquises pour exercer différents métiers. ► Il est primordial que les employeurs et les recruteurs systématisent l’emploi des fiches de postes basées sur les compétences requises pour un poste puis acquises en situation de travail. ► Dans le monde de l’éducation et de la formation également, la généralisation de la déclinaison des contenus de formation par compétences, y compris dans les formations généralistes, permettrait de renforcer la lisibilité des liens entre formation et poste de travail. A ce titre, le portofolio européen des langues est une initiative particulièrement intéressante : progressivement mise en œuvre dans les écoles françaises, elle s’inspire justement de cette démarche en mettant en exergue ce que la personne sait faire plutôt que ce qui lui fait défaut. ► En outre, l’approche par compétences dans le recrutement permettrait d’enrayer progressivement les phénomènes de discriminations à l’embauche qui créent une perte de ressources économiques précieuses. La diversité des ressources humaines représente effectivement un creuset de nouvelles compétences dont les entreprises auront besoin pour rester compétitives. ► Le CESA avait demandé dans un précédent avis 84 qu’un projet pilote soit mené au profit des jeunes confrontés à des discriminations dans le domaine de l’emploi et de la formation en raison de leur origine 85 . Le Conseil régional d’Alsace a un rôle à jouer dans la prise de conscience de ce problème par ses partenaires et dans les actions à mener pour le combattre. Certaines Régions ont, par exemple, mis en place des chartes régionales de la diversité. 83 L’ANPE utilise la méthode des habiletés dans le cadre de ses plates-formes de vocation, souvent sur des campagnes de recrutement assez importantes. Les entreprises de travail temporaire, comme ADIA ou ADECCO, ont également élaboré des outils comme le Pass compétences. Cf. actes du débat public du CESA « De l’Ecole à l’emploi » (2005) / Table-ronde n°2, intervention d’ADIA sur la « discrimination par les compétences ». 84 Avis sur le Schéma régional de l’éducation et de la formation (SREF) - CESA – (2004). 85 Leur lieu de résidence (quartiers dits « sensibles ») comme leurs origines ethniques (jeunes issus de l’immigration ou de couleur). 34 4 Soutenir les jeunes dans leur découverte personnelle de la vie sociale et du monde du travail De nombreux jeunes, même « armés » de diplômes, peinent à décrocher leur premier emploi du fait de leur manque d’expérience professionnelle, mis en avant par les recruteurs. De plus, les formations initiales sont souvent jugées trop théoriques par rapport aux réalités du métier. Pour les débutants, l’expérience constitue un facteur de sélection supplémentaire 86 , au delà du diplôme et des fluctuations de la conjoncture. Pourtant, selon les chercheurs du LIRHE 87 , « imputer au seul manque d’expérience les difficultés d’insertion des jeunes relève à la fois d’un faux et d’un vrai problème 88 » : - faux car le chômage des jeunes – et plus largement leurs difficultés d’insertion – provient avant tout d’une raréfaction globale de l’emploi dans un contexte de faible croissance ; - vrai car en période de crise comme aujourd’hui, l’accès à l’emploi s’analyse dans un contexte de concurrences généralisées et accrues, qui globalement joue contre ceux qui manquent d’expérience professionnelle. L’alternance - au sens large - répond en partie à cette problématique de l’acquisition d’expérience, mais ce dispositif ne peut concerner tous les jeunes. Pour la majorité d’entre eux, les stages restent le principal moyen d’acquérir une première expérience du monde de l’entreprise pendant leur formation. Mais, dans le contexte actuel de compétition pour l’emploi, cela s’avère souvent insuffisant pour convaincre un recruteur. En réalité, tout jeune peut trouver, hors de l’Ecole, des occasions de se préparer à entrer dans la vie active. Il possède effectivement des marges d’engagement et de perfectionnement qu’il peut ou non investir. Mais tous les jeunes ne sont pas à égalité 89 face à ces opportunités : en matière d’accès à l’emploi et aux stages, l’étendue du réseau relationnel familial reste discriminante. En effet, les conditions matérielles et socioculturelles sont déterminantes dans la réussite scolaire mais également dans les possibilités d’insertion professionnelle. L’engagement associatif junior – éventuellement structuré sous la forme d’un service civique – et l’accompagnement des jeunes dans la recherche d’une activité rémunérée compatible avec leurs études sont des pistes à explorer pour répondre à ces enjeux. Un système de garantie de prêt pourra également être envisagé pour accompagner les jeunes dans la recherche de leur premier emploi, emploi qui souvent conditionnera les suites de leur carrière professionnelle. 86 La décroissance systématique du taux de chômage en fonction de l’ancienneté sur le marché du travail illustre l’importance de l’expérience pour les recruteurs. 87 Laboratoire Interdisciplinaire de recherche sur les Ressources Humaines / Université de Toulouse 1 (LIRHE). 88 « Inexpérience professionnelle et accès des jeunes à l’emploi », Note 313 du LIRHE (2000). 89 L’étude des choix d’orientation et des résultats scolaires en fonction du revenu et du niveau de formation des parents montre effectivement l’importance de l‘environnement familial et social d’origine. 35 4.1. Accompagner la recherche d’activités rémunérées compatibles avec les études Trois jeunes sur quatre travaillent plus de 8 heures hebdomadaires tout au long de l’année scolaire, 15 à 30 % 90 exerçant un véritable emploi, peu souvent en rapport avec le cursus de formation suivi 91 . Or, l’exercice d’une activité à mi-temps et plus, au moins six mois par an, ferait chuter de 30% les chances de réussite 92 . A cela s’ajoute le fait que le processus de dégradation des chances serait cumulatif : les enfants des milieux modestes exerceraient davantage d’activités concurrentes des études, alors qu’ils seraient déjà ceux qui – globalement – réussissent moins bien. En revanche, l’exercice d’une activité occasionnelle apparaît sans risque. Elle est susceptible d’aider le jeune à se connaître, à se responsabiliser et à prendre des décisions plus éclairées sur son avenir professionnel. En lui permettant de compléter sa formation par des savoirs plus « informels » 93 , cet exercice représente un bon « signal d’employabilité 94 » pour les futurs employeurs. L’étude de cohortes de débutants entrant sur le marché du travail 95 montre les effets positifs des jobs étudiants sur l’accès à l’emploi et sur le salaire : l’exercice d’une activité permettrait aux jeunes d’éviter les écueils de la « phase de transition », souvent caractérisée par l’instabilité (changements d’emplois, chômage…), et de mieux faire valoir leurs compétences. Néanmoins, ces effets positifs (accès plus rapide, meilleur salaire…) ne seraient significatifs que lorsque le jeune obtient un CDI – généralement à temps partiel – en cours d’études 96 . ► Pour faciliter la recherche d’activités rémunérées dont les modalités d’exercice ne nuisent pas à la réussite scolaire, il serait intéressant que les établissements de formation – et notamment les universités – centralisent des offres d’emplois qui permettraient au mieux aux jeunes de conjuguer leurs études avec une activité professionnelle réduite. Par ses contacts avec les professionnels, le « correspondant entreprise » proposé précédemment pourra développer cette offre de jobs en incitant les entreprises avec lesquelles il est en contact à offrir des CDI à temps partiel aux élèves de son établissement de formation. Il les sensibilisera à cette occasion à l’importance d’une bonne conciliation entre études et emploi. L’entreprise trouvera également son intérêt dans ce dispositif car elle pourra compter sur un étudiant pour accomplir certaines missions au cours de l’année universitaire et pourra l’embaucher, une fois diplômé, si elle en est satisfaite. C’est également un moyen pour l’établissement de valoriser ses formations et ses étudiants auprès des entreprises. 90 er En 1 cycle universitaire, 15 à 20 % des étudiants exercent un véritable emploi. Ils sont 30 % à bac+3/+4. Ils sont plus nombreux dans les filières de sciences humaines et de gestion. Les élèves ingénieurs ne sont que 4 % dans ce cas. 91 « Enquête Génération 2001 », Céreq (2004). Pour la génération précédente (1998), 77 % des jeunes travaillaient. 20% dans des métiers en lien direct avec leurs études. 92 Sources : Observatoire de la vie étudiante, « OVE info » n°2 (avril 2002). 93 C’est déjà ce que disait Piaget en 1964 « L’expérience réconcilie la pensée formelle avec la réalité des choses » 94 Selon la théorie du « capital humain ». Le capital humain peut être défini comme les capacités, la connaissance et les compétences incorporées dans les personnes et acquises par l'éducation, la formation et l'expérience. 95 Etude réalisée par le Laboratoire interdisciplinaire de recherche sur les ressources humaines et résumée dans la Note du LIRHE n°304 « Expérience professionnelle avant la fin des études : quelles influences sur l’insertion ? » (2000). 96 Ce point est confirmé par les enquêtes de l’observatoire de la vie étudiante (cf. OVE info n°2) qui montrent qu’il n’y a pas de différence significative entre les étudiants ayant travaillé en CDD et ceux n’ayant pas travaillé. 36 4.2. Encourager l’engagement associatif des jeunes Beaucoup d’associations, de coopératives et de mutuelles offrent aux jeunes des possibilités d’engagement bénévole qui représentent un bon complément de formation, en développant, notamment l’autonomie, le jugement critique, l’expérience du travail en collectivité, le sens des responsabilités et la confiance en soi. Cet engagement correspond, en retour, à un réel besoin des associations, notamment en termes de renouvellement du tissu associatif et d’apport de nouvelles compétences. Les marges de progrès sont importantes dans ce domaine, en particulier en Alsace : en effet, selon une enquête réalisée par France bénévolat, l’Alsace serait une des régions comptant le moins de bénévoles (3,9 pour 1 000 habitants) 97 . ► Si les jeunes peuvent mettre en avant une expérience associative, ils valorisent une expérience quasi-professionnelle, c’est pourquoi il est important que les établissements de formation comme les entreprises reconnaissent la valeur des compétences qui y sont développées. L’Université March Bloch a créé un « module d’ouverture » dans cet esprit. La réforme LMD reconnaît le caractère formateur de ces expériences mais il restera aux universités et à leurs composantes à faire vivre ce principe localement, dans la vie et le fonctionnement des établissements. Parallèlement, il est nécessaire que les jeunes ayant acquis ce type d’expérience soient informés et accompagnés pour accéder à une VAE. ► Dans le cadre des dispositifs existants, comme le soutien à l’emploi associatif ou encore le Fonds d’initiative des lycéens et apprentis (FILA), la Région devrait porter une attention particulière à l’encouragement de l’engagement associatif des jeunes en formation (lycéens, apprentis comme étudiants). 4.3. Proposer un service volontaire civique en région Le concept de service volontaire – ou volontariat – est moins développé en France qu’il ne l’est dans d’autres pays. Plusieurs dispositions réglementaires existent néanmoins ou sont en cours d’élaboration pour donner un cadre légal à différentes formes de service civil et/ou de volontariat 98 . ► Aujourd’hui, un service volontaire civique local permettrait aux jeunes, diplômés ou non, d’avoir une expérience plus concrète de la vie sociale à travers un service rendu à la collectivité. Une initiative intéressante mériterait à ce titre d’être développée sur le territoire alsacien : l’association Unis-Cité Alsace accueille des jeunes de 18-25 ans dans le cadre d’un « service volontaire pour la solidarité » de 9 mois pour lequel aucune condition d’expérience ou de diplôme n’est requise. Pendant leur service, les équipes de volontaires viennent en renfort de structures agissant localement (social, développement durable, culture…). Un tiers de leur temps est consacré à des ateliers de sensibilisation à la citoyenneté et à la préparation de leurs projets d’avenir. Tous les volontaires bénéficient d’une bourse de volontariat mensuelle de 615 euros. ► Unis-Cité Alsace ne peut aujourd’hui répondre positivement qu’à une candidature sur dix. Cette situation démontre la forte volonté des jeunes, de tous niveaux 99 , de se rendre 97 La Bretagne et la Champagne-Ardenne sont les régions les plus bénévoles (8,1 bénévoles pour 1000 habitants de 18-70 ans), alors que l'Alsace (3,9 bénévoles pour 1000 habitants) et la Corse (3,8) ferment la marche, selon France Bénévolat qui a établi un « indice de bénévolat » à partir d'un échantillon de 230 000 bénévoles, principalement dans les domaines social et caritatif (mars 2006). 98 Volontariats civils du code du service national, dont le volontariat civil de cohésion sociale et de solidarité (mis en place début 2004), les contrats de volontariat de solidarité internationale et enfin le volontariat associatif. 99 25% n’ont aucun diplôme, 50% ont un CAP-BEP, 25% ont le niveau bac à bac +2. 37 utiles à la société et leur quête de (re)valorisation. À moyens constants, le territoire du Haut-Rhin ne peut être couvert. Etant donné les problèmes de chômage et d’exclusion particulièrement lourds, notamment à Mulhouse, l’extension de cette initiative apparaît particulièrement pertinente. Les pouvoirs publics 100 pourraient être moteur de ce développement dans l’objectif d’accueillir davantage de jeunes motivés par cette démarche porteuse d’expériences, de savoirs et de solidarités. ► À terme et sur la base des initiatives existantes (Unis-cité et autres associations), la Région pourrait créer un dispositif original de volontariat régional dans le cadre de ses compétences en matière de formation et d’insertion professionnelles des jeunes, en lien avec les Départements, compétents en matière de politiques sociales et de jeunesse, et les autres collectivités locales volontaires. D’autres partenaires publics et privés pourront être associés. 4.4. Faciliter l’obtention de prêts jeunes De plus en plus de jeunes adultes connaissent des difficultés matérielles freinant leur autonomie : ils ne peuvent prétendre aux minima sociaux avant 26 ans, ils connaissent des problèmes fréquents de logement 101 dus à la décohabitation et à l’allongement des études… D’après l’Observatoire de la pauvreté et de l’exclusion, l'une des causes de la pauvreté des 1825 ans réside dans le fait que la majorité des demandeurs d'emplois (6 sur 10) de cette classe d'âge ne perçoit pas d'indemnisation de l’assurance chômage, n'ayant pas exercé une activité professionnelle suffisante pendant ses études pour y avoir droit. Pour faire face à ces difficultés, un nombre croissant de jeunes est alors obligé d’accepter des emplois précaires et déclassés. Si cette pratique peut leur permettre d’acquérir un peu de l’expérience qui leur fait justement défaut, le risque est grand que ces jeunes ne réussissent plus à sortir de ces emplois 102 car ils ont été placés sur des segments où leur formation et leurs compétences sont sous-utilisées et risquent de se détériorer. ► Pour éviter la perte des ressources investies par la collectivité dans l’éducation ainsi que la frustration engendrée par le déclassement, le CESA propose la mise en place par la Région d’un fonds de garantie pour cautionner davantage de « prêts jeunes » auprès des établissements financiers. Ce fonds de garantie serait activé en fonction du dossier académique et social du jeune. Les prêts seront ainsi accessibles à un plus grand nombre de jeunes, ceux qui n’ont pas de garanties suffisantes pour accéder aujourd’hui au prêt bancaire. ► Ce système pourrait être couplé avec celui des bourses publiques, régionales 103 ou d’Etat. 100 La Région contribue en 2005 à 8% du budget d’Unis-Cité Alsace sur la ligne « aide régional à l’emploi associatif ». A cela s’ajoute la subvention du Conseil général (15 %) , la CUS (2%) et la Préfecture (6 %). Le reste des fonds provient du secteur privé. 101 Voir le rapport de la Fondation Abbé Pierre sur le « mal logement en France » (janvier 2006). 102 L’étude du Céreq « Quelles formations pour quels emplois ? » (2000) montre effectivement que dix ans après la sortie de formation initiale, toutes les situations de déclassement observées en début de vie active ne se sont pas résorbées. Le passage par une (des) période(s) de chômage et les dégradations de la conjoncture sont des éléments qui obèrent le reclassement. 103 Cf. point 1.4 précédent. 38 Conclusion Sur fond de conjoncture économique morose, l’année 2006 s’est ouverte sur une mobilisation nationale pour l’emploi des jeunes et pour l’égalité des chances. Les travaux du CESA, initiés en 2005, revêtent une importance renouvelée au regard des débats actuels et des enjeux sociétaux de premier ordre qu’ils sous-tendent. Dans le présent avis, l’assemblée socioprofessionnelle régionale formule des propositions que l’ensemble des acteurs de la région – le Conseil régional, interlocuteur privilégié du CESA, mais aussi les autres pouvoirs publics, les entreprises, les partenaires sociaux, les associations, chaque citoyen… – pourront s’approprier, dans l’objectif commun de faciliter le passage des jeunes de l’Ecole au monde du travail et d’éviter les ruptures dans leurs parcours. Aujourd’hui, le chantier prioritaire pour notre société est certainement la poursuite et l’approfondissement du dialogue entre les générations. De nombreuses idées reçues commencent à tomber sur les seniors : il est urgent qu’il en soit de même pour les jeunes. Les jeunes générations ne sont pas si éloignées de leurs aînés et les différences de mentalité constituent les signes avant-coureurs d’évolutions à l’œuvre, qui sont appelées à modifier la société ainsi que le monde du travail que nous connaissons. Si le passage de l’Ecole à l’emploi est ardu pour la majorité des jeunes, certains restent moins bien « armés » que d’autres : ceux n’ayant que peu ou pas de qualification, ceux issus de quartiers sensibles ou de minorités ethniques, ceux happés par la spirale de l’exclusion… Pour eux comme pour tous les autres - même les plus diplômés -, il existe des marges de progrès, dans bien des domaines, que nous pouvons investir pour mieux les préparer à cette transition, en la rendant plus aisée et plus « naturelle ». Dans cette optique, le CESA a dégagé quatre axes d’action : Elever les niveaux de qualification des jeunes, en mettant en place : - des dispositifs plus efficaces de prévention et de lutte contre l’illettrisme ; un système régional de repérage et de prise en charge des sorties sans qualification ; des formations professionnelles plus attractives pour les jeunes tout en restant adaptées aux attentes du marché du travail ; des classes alternées Ecole – Entreprise pour remobiliser les élèves « décrocheurs » ; des bourses régionales d’excellence pour maintenir plus de jeunes en formation initiale. Mieux informer et orienter les jeunes, entre autres, par : - - le développement de la prospective des métiers au niveau régional ; la communication aux jeunes en formation des métiers qui recruteront à 5 ans, à 10 ans ; l’incitation des enseignants à s’investir davantage dans l’orientation en collaboration avec l’ensemble des acteurs de l’orientation scolaire et professionnelle ; l’ouverture de l’Ecole sur son environnement économique et social notamment grâce à la diffusion d’une liste de professionnels prêts à intervenir en classe et à faire visiter leur entreprise ; une complémentarité renforcée des nombreux acteurs de l’orientation sur les territoires ; la possibilité pour les jeunes sortis précocement de l’Ecole de bénéficier d’un entretien-bilan pour se réorienter après 2 à 3 ans de vie active. 39 Renforcer la connaissance du monde du travail pendant la formation, notamment grâce à : l’engagement d’entreprises de tout secteur d’activité de participer à l’action d’« insérer pour former » des jeunes sans qualification et la création d’un prix pour récompenser les meilleures pratiques ; le développement de l’apprentissage vers les plus hauts niveaux de formation et une progression du nombre de contrats dans les PME mais aussi les grandes entreprises et la sphère publique ; une meilleure formation des agents de l’entreprise à l’accueil des jeunes ; la nomination d’un « correspondant-entreprise » dans les lycées et les universités ; la promotion du contrat de professionnalisation auprès des PME régionales. - - - Soutenir les initiatives personnelles des jeunes visant ces mêmes objectifs, en les aidant à : trouver des activités rémunérées compatibles avec les rythmes et exigences de leurs études ; s’engager dans des associations pour y développer une forme d’expérience professionnelle ; réaliser un service volontaire civique qui les revalorise et les aide à trouver leur voie ; sécuriser matériellement leur entrée dans la vie active par un système plus généreux de « prêts jeunes ». - Mais, parallèlement aux ajustements des dispositifs d’orientation, de formation et d’insertion qui sont proposés dans cet avis, toutes les initiatives nationales, régionales et locales qui faciliteront le maintien et la création d’activités et d’emplois sur le territoire sont plus qu’indispensables : elles seront décisives pour gagner la « bataille pour l’emploi » 104 . En raison de leur positionnement de proximité, les collectivités territoriales seront appelées à jouer un rôle majeur dans l’accompagnement à la création d’emplois, la prise en charge des publics difficiles, la promotion de la diversité et de l’égalité des chances… A ce titre, la Région détient en sus une compétence déterminante : la formation des ressources humaines dont les entreprises auront besoin pour se développer ou simplement se maintenir. Concernés au premier chef, les partenaires sociaux régionaux auront la tâche, par le dialogue social et la négociation, d’améliorer les politiques de recrutement, en prenant en compte les évolutions de la société. L’évaluation régulière des actions menées, à tous les niveaux, permettra d’être plus efficace et de mieux répondre aux besoins. Ambition et innovation constitueront les maîtres mots pour relever ce formidable défi qui met en jeu l’avenir de la région et de ses habitants. 104 Les créations d’activités et d’emplois permettront d’autant plus d’insérer les jeunes qu’ils sont plus « employables » que leurs aînés. 40 Remerciements Le Conseil économique et social d'Alsace tient à remercier pour leur disponibilité, leur contribution et leur partage d'expériences l'ensemble des personnes qui ont participé à ses travaux. Par ordre alphabétique : Christine AFRIAT Chargée de mission au Commissariat Général du Plan Jean ARROUS Professeur de sciences économiques et directeur du SUIO de l’Université Robert Schuman Frédéric BIERY Président de l’Union régionale des Missions locales et PAIO d’Alsace, maire de Schirmeck Violette BUSER Directrice de la Mission locale d’Alsace du Nord Lucie CAUBEL Responsable développement de l’Association nationale des directeurs et cadres de la fonction personnel (ANDCP) Gérald CHAIX Recteur de l’Académie de Strasbourg Thérèse CHARTIER Chef du service Formation initiale du Conseil régional d’Alsace Annie CHEMINAT Directrice de l’Observatoire régional du suivi de l’insertion professionnelle des étudiants (ORESIPE) Philippe CORNEC Directeur des ressources humaines de la Communauté urbaine de Strasbourg (CUS) François DE WISPELAERE Secrétaire général de l’Observatoire régional emploi-formation Alsace (OREF) Robert DJELLAL Secrétaire général de l’Université Paris 8, rapporteur de la commission Proglio sur l’insertion des diplômés de l’enseignement supérieur Elisabeth DUGUE Ingénieur de recherche au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM, Paris) Jacques - Emmanuel DURAND Directeur opérationnel Nord d’ADIA intérim Michel DURIER Directeur des études de l’association Entreprises et progrès Dan FERRAND-BECHMANN Professeur de sociologie et chargée de mission pour le développement de la vie associative à l’Université Paris 8 Michèle FORTE Maître de conférence (URS) et ingénieur d’études au BETACEREQ, Strasbourg Jacques GIFFARD Directeur emploi-formation de SOGEA Construction Alain GOEPFERT Directeur de l’Ecole de la 2ème Chance de Mulhouse Mayette GREMILLET Ingénieur d’études à l’INSEE Alsace Etienne GUIDAT Chargé d’études à l’ORESIPE Jean - Alain HERAUD Directeur du BETA - CEREQ de Strasbourg, professeur (ULP) Catherine HUMBERT Déléguée régionale de l’Union régionale des missions locales et PAIO d’Alsace Michel KUPEK Directeur emploi-mobilité de Peugeot SA Mulhouse Pierre LAMBLIN Directeur des études de l’Association pour l’emploi des cadres (APEC, Paris) Cathy LAURENT Directrice du GIP Univers Métiers Alsace 41 Michel LEON Directeur du Centre d’Information et d’Orientation (CIO) de Mulhouse - Bollwerk Jacqueline LEROY Chef du service Insertion par l’emploi, Communauté urbaine de Strasbourg (CUS) Alberto LOPEZ Chef du département des entrées dans la vie active du Centre d’études et de recherche sur l’emploi et les qualifications (CEREQ) Jacques LOSSON Directeur de l’association Sémaphore de Mulhouse Anne-Marie MARIN Conseillère d’orientation - psychologue au CIO de Saverne Paul QUIN Président de l’association Sémaphore, adjoint au maire de Mulhouse Marie-Claude REBEUH Ingénieur d’études CNRS au BETA - CEREQ de Strasbourg Marc ROHMER Principal du collège de Bourtzwiller Michel SCHELCHER-MEYER Proviseur du lycée Camille Sée, Colmar Philippe SIMONIN Directeur opérationnel Est d’ADIA intérim Françoise STOEFFLER-KERN Ingénieur d’études au BETA - CEREQ et membre du Haut Comité Education- Economie Philippe TORZINI Professeur principal et de sciences physiques au lycée Edmond Rostand de Strasbourg Jacques TRAUTMANN Ingénieur d’études au BETA - CEREQ de Strasbourg (ULP) 42 Contact Conseil économique et social d’Alsace – Tél.: 03 88 15 68 00 – [email protected] Vous pouvez également télécharger le texte intégral de cet avis sur le site internet du CÉSA : http://www.cesa-alsace.fr 43 44