L`impact du cannabis à l`adolescence sur la transition psychotique

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L`impact du cannabis à l`adolescence sur la transition psychotique
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Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 61 (2013) 224–230
Mise au point
L’impact du cannabis à l’adolescence sur la transition psychotique de l’adulte
The impact of cannabis use in adolescence on psychotic transition in adult patients
M.-O. Krebs a,b,∗ , A. Gut b , M. Plaze a,b , A. Dervaux a,c
a
b
Inserm, laboratoire de physiopathologie des maladies psychiatriques, centre de psychiatrie et neurosciences, CPN U894, 2, ter rue d’Alésia, 75014 Paris, France
Service hospitalo-universitaire, centre d’évaluation du jeune adulte et adolescent (C’JAAD), centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France
c Service d’addictologie, centre hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, 75014 Paris, France
Résumé
Il est maintenant admis que le cannabis joue un rôle précipitant dans l’émergence d’une psychose. Les études épidémiologiques ont montré un
effet déjà significatif pour des consommations récréationnelles (au moins dix consommations à l’âge de 18 ans), mais l’effet est plus marqué en
cas de consommation importante (effet dose-dépendant) et en cas de consommation avant l’âge de 15 ans. Il dépend également du taux delta-9tétrahydrocannabinol (THC), et de cannabidiol. Le THC a en effet des effets psychotomimétiques marqués, alors le cannabidiol a des effets limitant
ceux induits par le THC. Certaines variétés de cannabis à faible taux de cannabidiol, produites par manipulations génétiques, induisent plus d’effets
psychotomimétiques. L’adolescence semble une période particulièrement sensible aux effets délétères du cannabis. Le cannabis interfère en effet
avec les systèmes endocannabinoïdes, impliqués dans la maturation cérébrale lors de l’adolescence. Certaines études, chez l’homme et l’animal,
ont notamment démontré que la consommation de cannabis à l’adolescence entraînait des troubles cognitifs durables persistant à l’âge adulte, bien
au-delà de la période de consommation. Ces connaissances, maintenant suffisamment solides, peuvent être diffusées dans un but de prévention,
sous forme de messages clairs, compréhensibles, sans excès et sans complaisance. La consommation de cannabis à l’adolescence, même modérée,
ne peut pas être banalisée car elle est susceptible d’induire des troubles cognitifs durables et parfois des troubles psychotiques à l’âge adulte. Il reste
à identifier les facteurs de risque de ces troubles et les indices qui doivent alerter l’entourage de l’adolescent ou du jeune adulte, en cas d’exposition
au cannabis.
© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Cannabinoïdes ; Maturation cérébrale ; Psychose ; Schizophrénie ; Delta-9-tétrahydrocannabinol ; Cannabis
Abstract
It is now well known that cannabis can precipitate the onset of psychosis. The epidemiological studies have shown that the increased risk
is significant from ‘recreational’ consumptions (ten times exposure at the age of 18), but the effect is more important with higher doses (dosedependent effect) and more marked in adolescent (with a two-fold increase of exposure at the age of 15 compared to 18). The effect is also
dependent on the composition in cannabinoids: delta-9-tetrahydrocannabinol have psychotomimetic effects while cannabidiol has anxiolytic and
possibly antipsychotic. This question is timely since some production of cannabis includes genetic modifications that tend to decrease the level of
cannabidiol. Cannabis interferes with endogeneous cannabinoides systems, involved in the maturation processes at adolescence, and adolescence
seems a critical period of sensitivity to the deleterious effects of cannabis. The recent literature in human and animal have demonstrated that
exposure to cannabis at adolescence can result in chronic deleterious effect on cognition in adulthood. While the reliable data are compelling,
we now need to disseminate these informations in an appropriate way, without militant excess but without complaisance. It is also needed to
identify the markers that shall alert the environment of the adolescent or young adults and identify subjects at risk of complications when exposed
to cannabis. It is already established that exposure at adolescence should not be minimized since adolescence per se appears as a risk factor for
chronic cognitive deleterious effect and sometimes psychotic complications, even after relatively minor exposure.
© 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Cannabinoids; Cerebral maturation; Psychosis; Schizophrenia; Delta-9-tetrahydrocannabinol; Cannabis
∗
Auteur correspondant.
Adresses e-mail : [email protected] (M.-O. Krebs), [email protected] (A. Dervaux).
0222-9617/$ – see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
http://dx.doi.org/10.1016/j.neurenf.2013.03.001
M.-O. Krebs et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 61 (2013) 224–230
1. Introduction
La question des risques induits par la consommation de
cannabis est une question très médiatisée, ce qui ne doit pas
masquer les données des travaux de recherche chez l’animal
et les recherches épidémiologiques, neurobiologiques et cliniques chez l’homme. La première publication d’Andreasson
et al. en 1987, sur 50 000 conscrits suggérant que l’émergence
de symptômes psychotiques était favorisée par la consommation
de cannabis, était restée controversée [1]. Cependant, l’extension
de l’étude sur 27 ans de suivi longitudinal et en prenant en
compte les biais possibles (niveau d’étude préalable, sexe, autres
consommations de substances. . .) a confirmé que la consommation « au moins dix fois » de cannabis avant l’âge de 18 ans
était significativement associée à un risque accru de présenter des symptômes psychotiques, non seulement dans les cinq
ans suivant l’inclusion dans le suivi, mais également après
cinq ans, excluant de ce fait le biais d’éventuels troubles psychotiques prodromiques passés inaperçus [2]. Plusieurs autres
études prospectives (cohorte de naissance, cohorte populationnelle d’adolescents) [3–6] et méta-analyses [4,7] ont confirmé
que la consommation de cannabis durant l’adolescence augmentait le risque de survenue de troubles psychotiques ultérieurs.
D’autres études chez l’homme [8–10] et chez l’animal [10–14]
ont montré que la consommation lors de l’adolescence pouvait
induire des troubles cognitifs durables.
Plusieurs questions restent en suspend : le cannabis induit-il
un risque de psychose (épisode psychotique) ou de schizophrénie ? Le risque est-il similaire chez tous les sujets exposés
et sinon quels sont les facteurs de risque ? Quelles sont les
bases neurobiologiques de l’augmentation du risque de troubles
psychotiques par la consommation de cannabis ? Comment
transmettre ces informations dans un but de prévention chez
les adolescents, jeunes adultes et leur entourage.
Avant de compléter la revue de littérature sur les données
permettant de répondre partiellement à ces questions, nous présenterons trois situations cliniques illustrant la réalité du sujet.
2. Trois observations cliniques
2.1. Cas no 1
Reynald, âgé de 28 ans, est adressé par son médecin traitant
pour prise en charge psychiatrique de difficultés évoluant depuis
huit ans environ. Reynald est un jeune adulte, grand, très mince,
le visage pâle et fermé, aux cheveux châtains mi-longs qu’il
attache avec un élastique. Il est amimique, peu loquace mais de
bon contact. Il explique que son médecin ne sait plus quoi lui
prescrire pour qu’il aille bien.
Reynald est fils unique. Ses parents, anciens enseignants,
vivent en concubinage et il a une demi-sœur, âgée de 45 ans,
du côté maternel. Il décrit une bonne entente familiale.
D’après le patient, les troubles ont débuté à l’âge de 16 ans
par des symptômes dépressifs à type d’apathie, de ralentissement psychomoteur et d’apragmatisme. Ces symptômes
ont disparu spontanément après trois semaines. Il rapporte,
à l’âge de 18 ans, durant les vacances d’été, des épisodes
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d’insomnie et d’excitation avec une légère accélération de
la pensée et quelques idées de persécution, récidivant un an
après, dans un contexte de fortes consommations de cannabis (dix joints par jour). Les symptômes s’estompent après
la période estivale et la diminution de consommation de
cannabis.
Après son baccalauréat, Reynald a des difficultés à mener à
bien ses études. Il ne se rend plus aux cours, ne sort plus, ressent des angoisses et consomme cinq à dix joints de cannabis
par jour. Il est parfois triste mais surtout indifférent. Il se replie
sur lui-même et s’isole de plus en plus. Son médecin généraliste l’adresse alors à un psychothérapeute qu’il rencontre tous
les 15 jours. Il y décrit ses moments d’apathie, sa difficulté à
entreprendre, mais continue à fumer dix joints par jour. Reynald travaille comme technicien mais se sent persécuté par son
collègue de travail.
À l’entretien clinique, Reynald exprime ses difficultés et
déclare travailler sa « spontanéité ». Il exprime son souhait
d’aller plus souvent vers les autres. Il repère mal les symptômes dont il souffre. « Je crois que je suis bipolaire », « mais
je ne sens pas venir les hauts ou les bas, d’ailleurs j’ai plutôt
des bas et je procrastine ». Il banalise sa consommation de cannabis : « ce n’est pas grand-chose, cela me détend, je ne suis
vraiment pas prêt à arrêter, cela fait du bien après une journée de
travail. . . et puis, je suis musicien : qui n’en consomme pas dans
le monde de la musique ? ». Lors des entretiens, le discours est
circonlocutoire, il existe un rationnalisme morbide, une désorganisation de la pensée est perceptible, mais il ne décrit pas de
symptomatologie hallucinatoire.
Lors des premières consultations, les plaintes fonctionnelles
étaient le manque de socialisation, les angoisses, le retrait affectif
et social, des symptômes persécutifs sur son lieu de travail, un
vide affectif et la consommation de cannabis. Il explique que la
première consommation avait pour but de soulager une anxiété
chronique sévère, évoluant depuis l’adolescence. En outre, la
consommation festive lui a facilité transitoirement les contacts
avec les autres « je n’avais plus peur ».
Après six mois de travail sur le repérage des consommations
et leurs conséquences, Reynald a diminué sa consommation de
cannabis jusqu’à l’arrêt complet. « J’ai l’esprit plus clair et ma
pensée est plus ordonnée mais je suis tendu et très angoissé le
soir ».
Un traitement par olanzapine (10 mg/j), initié rapidement
du fait des symptômes persécutifs et de l’angoisse, a permis
une sédation de l’angoisse et le maintien de l’abstinence aux
toxiques. Le patient est moins interprétatif et le contact est plus
spontané. Il organise des activités sociales, continue de jouer de
la musique avec ses amis, a repris le sport, sort avec ses amis, a
déménagé pour un appartement plus spacieux et s’entend mieux
avec son collègue. Il envisage de voyager de nouveau et exprime
le souhait de retrouver une relation affective.
Le diagnostic retenu pour Reynald est un trouble schizophrénique d’évolution déficitaire, dont la symptomatologie
négative déficitaire s’est améliorée sous olanzapine. Le diagnostic de trouble psychotique induit par le cannabis, selon les
critères DSM-IV, ou de syndrome amotivationnel, peut être aussi
évoqué.
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Quel peut être le rôle du cannabis dans le déclenchement des troubles ? Il existait des symptômes prodromiques
ayant conduit Reynald à consommer des toxiques dans un but
d’automédication. Cependant, à long terme, la consommation
de cannabis n’a fait que renforcer les symptômes préexistants.
L’hypothèse de l’association d’une symptomatologie a minima
et d’une consommation importante de cannabis précipitant le
patient dans une pathologie schizophrénique est tout à fait
possible, mais ne peut être affirmée avec certitude rétrospectivement. Les approches cognitivo-comportementales initiées en
parallèle au traitement ont favorisé l’alliance thérapeutique, le
repérage des symptômes et la gestion du stress et à consolider
l’amélioration clinique de Reynald dans les différents secteurs
de sa vie.
2.2. Cas no 2
Le jeune Corentin, âgé de 20 ans, est adressé par le psychothérapeute de son frère pour avis diagnostique. Il se plaint
de céphalées et de cervicalgies, évoluant depuis quatre mois,
accompagnées d’anesthésie affective et de sensations d’être
« déconnecté du monde ». Les symptômes ont débuté après une
rupture affective, alors qu’il intègre sa première année d’école
de commerce.
Corentin a toujours été bon élève. Après l’obtention de son
baccalauréat, il a fait deux années de classes préparatoires et
passé les concours des grandes écoles. Durant ces années, il a
des relations affectives plus ou moins satisfaisantes.
À la rentrée dans son école, Corentin se plaint de troubles
de la mémoire et de la concentration. Il ressent des douleurs
occipitales « comme si son cerveau se déplaçait dans sa boite
crânienne et en augmentait la pression » ; il ressent de temps en
temps cette pression à l’origine de phénomènes anxieux, il a peur
de devenir fou, se sent parfois en dehors de son corps, se sent
perdu et quasi confus. Son médecin traitant lui prescrit un bilan
biologique et paraclinique (scanner cérébral, IRM cérébrale et
EEG) qui s’avère normal.
Le père du patient est un commercial débordé, sa mère,
d’origine russe, est au foyer et a élevé Corentin. Il a un demifrère, de neuf ans son aîné, que son père a eu d’un premier
mariage, et qu’il décrit comme ayant fait deux dépressions
sévères. Il décrit une bonne entente familiale, mais avec peu
de communication et d’émotions exprimées. Le patient rapporte
que son père a souffert de dépression et qu’un cousin paternel
aurait mis fin à ses jours à l’âge de 22 ans. Il ne rapporte aucun
antécédent médicochirurgical, hormis un traitement pour une
acné sévère.
À l’entretien clinique, Corentin se plaint d’émoussement
affectif « je ne ressens plus rien, je n’ai plus d’émotions » ; il
a du mal à aller vers les autres « je dois me forcer pour sortir et
en soirée, je ne suis pas dedans, c’est comme si je m’observais,
je suis spectateur de ce qui se passe, je ne suis pas là. . . » ; « tout
cela a débuté après avoir consommé un joint, enfin je crois, car
il y avait de l’alcool aussi. C’était à une soirée d’étudiant et
là je me suis senti très mal, oppressé. Je n’en ai jamais repris
depuis. . . ». Corentin n’a jamais eu d’hallucinations auditives ni
de symptomatologie délirante. En cours, il se plaint de ne plus
mémoriser, de ne plus pouvoir se concentrer : « je suis focalisé
sur ma douleur dans mon cerveau et je sens qu’elle se déplace,
c’est bizarre ça m’angoisse, je ne peux pas déplacer mon attention en dehors de ça. . . du coup je n’écoute plus en cours ». Il
n’y a pas de troubles du sommeil, ni de l’appétit, ni de la libido.
« J’ai pas mal de petites amies » déclare t-il « ça va ça vient,
mais je n’ai pas vraiment de plaisir à être avec elles. . . Je suis
préoccupé par ce qui m’arrive et je m’observe tout le temps pour
voir quand je vais ressentir de nouveau quelque chose ».
Sur le plan thérapeutique, Corentin a reçu de nombreux traitements antidépresseurs dans le but d’améliorer les troubles
anxieux et dépressifs, sans réelle amélioration. Un suivi psychothérapique a été débuté.
Lors des entretiens, le discours est toujours le même, dans
l’attente fantasmatique que quelque chose de magique se passe.
« Aux sports d’hiver me dit-il en haut d’une piste j’ai ressenti du
plaisir, j’ai cru que cela revenait mais cela n’a pas duré. . . ». « Il
y a des petits changements mais cela ne dure pas j’ai peur de ne
jamais revenir comme avant ; je ne pourrais pas le supporter. . . »
Lors d’une journée d’évaluation neuropsychologique,
l’entretien semi-standardisé Comprehensive Assessment of AtRisk Mental States (CAARMS) a retrouvé que les symptômes
présentés n’atteignaient pas le critère d’état mental à risque de
psychose et le bilan neuropsychologique était sans particularité,
avec des épreuves bien réussies.
Corentin poursuit son école de commerce brillamment,
mène une vie étudiante intense, suit ses amis, a des relations
amoureuses, obtient des stages en entreprise, voyage, mais
reste inquiet, sans ressenti émotionnel. Plusieurs traitements
médicamenteux ont été essayés sans efficacité : faibles doses
d’antipsychotiques, à visée désinhibitrices, faibles doses de tricycliques, inhibiteur de la recapture de la sérotonine et inhibiteur
de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline. Le
diagnostic retenu est celui d’un trouble de dépersonnalisation.
Tous les traitements médicamenteux ont été interrompus. La
symptomatologie ne s’est pas modifiée depuis deux ans, sans
apparition de symptôme psychotique. Il fonctionne de façon
adaptée dans le quotidien, ne boit plus, ne fume plus mais reste
plus que jamais à l’écoute de lui-même. Un nouvel avis a été
demandé dans la perspective de réaliser un traitement par TMS
pour ce type de symptômes que l’on peut retrouver dans les
troubles anxieux sévères ou dans les pathologies schizophréniques.
Corentin a consommé de façon ponctuelle un joint avec de
l’alcool. Il a ressenti des effets négatifs, mais il est difficile de
préciser le rôle du cannabis et de l’alcool dans la genèse des
troubles. Les symptômes de dépersonnalisation ont persisté malgré l’arrêt complet de la consommation de drogues et d’alcool.
Il n’y a pas assez d’arguments pour évoquer le rôle du cannabis
dans la genèse des troubles présentés par Corentin. Aujourd’hui
l’hypothèse diagnostique retenue est celle d’un trouble anxieux
sévère et non un trouble schizophrénique, mais les quelques
éléments d’atypicité ne permettent pas de préjuger avec certitude de la suite. Bien sûr, il est recommandé à ce jeune homme,
anxieux et ayant des manifestations cénesthésiques quasi délirantes, de se tenir à l’écart du cannabis, d’ailleurs très mal
toléré.
M.-O. Krebs et al. / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 61 (2013) 224–230
2.3. Cas no 3
Emmanuel, âgé de 19 ans, consulte en raison de difficultés
scolaires évoluant depuis un an environ. Il n’arrive pas à mener
à bien ses études, redouble sa deuxième année d’Université en
sciences économiques et se plaint de phénomènes étranges. Il
avait pourtant obtenu brillamment son baccalauréat trois ans
plus tôt et sa première année d’écogestion tant bien que mal.
Ses parents, médecins, ont divorcé lorsqu’il était âgé de 11 ans.
Son père souffre d’une pathologie bipolaire sévère. Il a une sœur
âgée de 12 ans et deux demi-sœurs âgées de trois et cinq ans du
côté paternel.
Les symptômes dont se plaint Emmanuel sont une désorganisation de la pensée et une angoisse persistante, qui l’ont conduit
à un isolement progressif. Il consomme occasionnellement du
cannabis depuis la seconde, et quotidiennement depuis deux ans.
Il déclare « gérer très bien ses consommations et qu’elles ne sont
pas gênantes ». Il a déjà consommé des champignons hallucinogènes, de l’ecstasy, des amphétamines, pour « rechercher »
dit-il « un peu de stimulation ». Ces consommations lui procurent en effet des états d’excitation, mais aussi des symptômes
de dépersonnalisation et de déréalisation.
À l’entretien, le discours est pauvre. Angoissé, Emmanuel n’arrive pas à exprimer son mal-être. Il se sent déprimé,
apragmatique, n’arrive plus à penser, ce qui justifie une hospitalisation. Durant celle-ci, un sevrage cannabique est effectué
et un traitement thymorégulateur est mis en place associé à
un antipsychotique atypique (olanzapine, 30 mg/j). Emmanuel
ressort quelques semaines plus tard bien amélioré et décide
de reprendre ses études. Deux mois après la sortie, le patient
consulte en urgence, en raison de la survenue d’hallucinations
acoustico-verbales et visuelles (« des formes passent devant moi
et me gênent »). Il existe un délire à mécanisme hallucinatoire
et interprétatif à thème persécutif, un phénomène de vol de la
pensée et un automatisme mental avec sentiments qu’on parle
de lui, qu’on le juge, qu’on le menace. Il mentionne qu’il a
repris la consommation de cannabis de façon importante et
qu’il a arrêté son traitement un mois après sa sortie car « il
se sentait bien ». Une nouvelle hospitalisation est proposée. La
symptomatologie prédominante est floride avec une forte prédominance de symptômes hallucinatoires et de désorganisation.
Un nouveau sevrage cannabique est réalisé et un traitement
par clozapine à la posologie de 400 mg/j permet d’amender les
symptômes.
Emmanuel se sent mieux, des entretiens motivationnels sont
mis en place afin de travailler sur les consommations de substances et sur l’alliance thérapeutique. Il existe une certaine
réticence, qui disparaîtra au cours du temps car Emmanuel
appréhende maintenant les rechutes. Le travail sur l’estime de
soi, le repérage des symptômes et des situations à risque, lui permet de mieux anticiper les stratégies à mettre en place dans ces
moments critiques. Aujourd’hui, Emmanuel va mieux même
si il reste très fragile, il persiste quelques effractions psychotiques mais les consommations de toxiques semblent être mises
à distance depuis trois mois maintenant. . .
Dans le cas d’Emmanuel, les consommations de multiples
drogues et surtout de cannabis à doses importantes ont aggravé
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ou sont à l’origine des troubles du cours de la pensée, de
l’extrême désorganisation de la pensée et des phénomènes hallucinatoires. Chaque rechute était contemporaine d’une prise
de cannabis et chaque amélioration clinique a eu lieu durant la
mise à distance de prise de toxiques et grâce à la mise en place
d’un traitement par antipsychotique atypique. Seule l’évolution
à long terme permettra de faire la part des choses entre une
psychose cannabique ou l’évolution vers un trouble schizophrénique.
2.4. Les trois cas
Les trois cas cliniques illustrent trois situations très différentes. Le mal-être ou simplement l’âge et le contexte social
peuvent initier une exposition ponctuelle ou occasionnelle.
Lorsque apparaissent des symptômes psychotiques, il n’est
pas facile d’établir, rétrospectivement, si les troubles psychotiques sont secondaires à la consommation de cannabis,
ou si les troubles psychotiques sont primaires et la symptomatologie psychotique, aggravée par la consommation de
cannabis. L’évolution est très variable, certains sujets évoluant
vers des troubles psychotiques francs, alors que d’autres ne
développent pas de troubles psychiatriques graves, justifiant un
suivi psychiatrique rapproché. Dans tous les cas, l’arrêt de la
consommation est justifiée et est facilité par une prise en charge
associant une chimiothérapie adaptée et approches cognitivocomportementales.
3. Cannabis et premier épisode psychotique
3.1. Psychose ou schizophrénie ?
L’émergence de troubles psychotiques n’est pas synonyme
d’émergence de troubles schizophréniques. L’étude sur les
conscrits suédois [1,2] repose sur des diagnostics cliniques,
sans outils précis, en particulier d’entretiens structurés. Les
autres études épidémiologiques ont évalué la survenue ultérieure de symptômes psychotiques et non la survenue de
schizophrénie au sens des critères diagnostiques des classifications internationales, notamment dans les études Nemesis
(Pays-bas) [5], Early Developmental Stages of Psychopathology Study (Allemagne) [4,6] et Zuid Holland Study (Pays-Bas)
[15].
Cependant, l’hypothèse d’un effet précipitant du cannabis
dans la schizophrénie est corroborée par le fait que la consommation de cannabis est associée à un début plus précoce des troubles
schizophréniques, environ deux ans et demi [16,17]. En outre, les
patients schizophrènes sensibles aux effets psychotomimétiques
du cannabis (début des troubles dans un contexte de consommation de cannabis ou réaction psychotomimétique marquée
lors des consommations) ont un âge de début des troubles psychotiques plus précoce, un âge de consommation plus précoce
et des antécédents familiaux de schizophrénie plus fréquents,
renforçant l’hypothèse que le cannabis influe sur des circuits
impliqués dans la schizophrénie [18].
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3.2. Quels sont les facteurs qui modulent le risque de
psychose en cas d’exposition ?
Dans les études, le risque de troubles psychotiques chez
les consommateurs de cannabis est multiplié par deux environ,
mais ce qui correspond à une moyenne, peu représentative de
l’hétérogénéité des situations.
Dans une lecture gène–environnement, certains variants
génétiques du gène codant la catéchol-O-méthyltransférase
(COMT) modulant directement ou indirectement les systèmes
dopaminergiques pourraient conférer un risque supérieur de
symptômes psychotiques lors de l’exposition au cannabis [19].
Dans l’étude prospective néo-zélandaise Dunedin, les sujets porteurs de l’allèlle val-val de la COMT qui avaient consommé
du cannabis avaient un risque dix fois plus élevé de présenter
des troubles psychotiques que les porteurs de l’allèle met-met
[20]. Ce résultat n’a pas toujours été répliqué et d’autres facteurs
génétiques ont été suggérés [21].
La présence de traits de personnalité schizotypique [22]
et surtout la présence de symptômes psychotiques subcliniques préalables, évalués avec des instruments spécifiques,
augmentent le risque. Les études épidémiologiques longitudinales Nemesis [5], Dunedin Multidisciplinary Health and
Development Study [3] et Early Developmental Stages of
Psychopathology Study [4,6] ont montré que les patients vulnérables aux troubles psychotiques étaient plus à risque de
transition vers des troubles schizophréniques avec la consommation de cannabis. Le risque est également plus élevé chez les
sujets qui ont des antécédents familiaux de troubles psychotiques
[23].
Une étude réalisée chez des étudiants a montré
l’hétérogénéité des réponses, certains sujets indiquant la
présence de symptômes psychotiques (idées de référence,
hallucinations, idées de persécution) lors des premières
consommations, révélant peut-être une vulnérabilité spécifique
individuelle vis-à-vis du cannabis [24].
La précocité de la consommation à l’adolescence, période de
maturation cérébrale, pourrait être le principal facteur de vulnérabilité vis-à-vis du cannabis [25–27]. Les premières études
épidémiologiques avaient déjà montré un risque de troubles schizophréniques deux fois plus important chez les sujets ayant
commencé à consommer du cannabis avant l’âge de 15 ans par
rapport aux sujets ayant commencé à consommer plus tardivement [3]. Des données expérimentales chez l’animal vont dans
ce sens. L’exposition de rats pendant la période péripubertaire à
des cannabinoïdes entraîne des conséquences cognitives à long
terme, même si les animaux ne sont plus exposés [11,28,29] :
altérations des capacités mnésiques, perturbation du filtrage sensoriel, altérations de la plasticité synaptique au sein du système
limbique, régions clés de la modulation des émotions, de la
mémoire etc. Si ces anomalies se rapprochent des perturbations
observées dans des modèles pour la schizophrénie, celles observées après une exposition similaire à l’âge adulte sont assez
différentes (et avec des effets persistants moins après arrêt).
Il existe clairement un effet-dose. Par exemple, dans l’étude
de Andreasson et al., le risque de survenue de schizophrénie
après consommation « au moins 50 fois » (correspondant à une
consommation récréationnelle une fois par semaine pendant un
an) est double par rapport à une consommation de dix à 50 fois
[1,2]. Cependant, l’effet précipitant du cannabis n’est pas lié
qu’à des consommations importantes, puisque le risque est déjà
significatif pour une consommation de dix fois. En outre, dans
la schizophrénie, une exposition chronique prolongée est associée à des troubles attentionnels plus marqués, un déclin cognitif
global [30,31] et une diminution de volume cérébral dans certaines régions riches en récepteurs CB1, notamment les cortex
préfrontaux dorsolatéraux et cingulaires [31,32].
Le risque dépend également des taux de cannabinoïdes psychoactifs, delta-9- tétrahydrocannabinol (THC) et cannabidiol,
contenus dans les échantillons de cannabis consommés [33–35].
Le THC a des effets psychotomimétiques marqués, alors le cannabidiol a des effets anxiolytiques et des effets limitant ceux
induits par le THC [9,34]. Une étude tend à montrer un effet antipsychotique du cannabidiol [36] et son intérêt dans les troubles
de l’humeur est discuté [37]. Néanmoins, ces perspectives restent à confirmer. Chez l’animal, le cannabidiol montre assez
clairement un profil anxiolytique [38]. Certaines variétés de cannabis à faible taux de cannabidiol, produites par manipulations
génétiques, induisent ainsi plus d’effets psychotomimétiques,
pouvant surprendre un consommateur non averti.
Le risque augmente aussi lorsqu’il existe simultanément une
consommation de cannabis et des antécédents d’abus sexuels,
d’après notamment la National Comorbidity Survey, menée
en population générale, par rapport à la survenue isolée soit
d’abus sexuels dans l’enfance, soit de consommation de cannabis [39–41]. D’autres facteurs pourraient également augmenter
le risque simultanément comme l’isolement social et des parents
issus de l’immigration [42].
4. Conclusion
La consommation de cannabis comme facteur précipitant de
troubles psychotiques est aujourd’hui démontré mais il n’est pas
démontré qu’il puisse à lui seul induire une schizophrénie. Le
risque apparaît variable, en fonction de certaines caractéristiques
individuelles, en fonction de la dose, des taux de THC, principal
composé psychotomimétique, de la durée de la consommation
et surtout, de l’âge d’exposition.
L’adolescence est une période de vulnérabilité aux effets
délétères durables induits par l’exposition au cannabis, les
cannabinoides exogènes interférant avec les processus maturationnels cérébraux. Les mécanismes neurobiologiques sous
jacents restent à déterminer, car cela pourrait permettre
d’entrevoir de nouveaux traitements médicamenteux utilisant
les systèmes cannabinoïdes pour soigner (voire prévenir ?) les
troubles psychotiques. Mais cela reste encore du domaine de la
recherche.
Pour le clinicien, le message à retenir est celui des risques
encourus par les jeunes consommateurs, pour des consommations modérées voire minimes, justifiant dans tous les cas,
d’aborder la question de la réduction et l’arrêt de la consommation. Notre propos était centré sur les liens entre cannabis et
psychose mais les interactions entre psychopathologie et prise
de cannabis ne se limitent pas au risque de déclenchement de
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troubles psychotiques : la consommation de cannabis peut aussi
entraîner ou favoriser des troubles anxieux, la dépendance ou,
plus fréquemment, un décrochage scolaire, un manque de motivation et des difficultés d’insertion. Quel que soit le rôle du
cannabis dans l’histoire de la maladie chez les patients présentant
un trouble psychotique, la poursuite de la consommation est un
facteur clair de moindre adhésion au traitement, de non compliance et d’instabilité au projet thérapeutique. Une double prise
en charge, psychiatrique et addictologique, est nécessaire. Les
techniques cognitivo-comportementales, notamment les thérapies motivationnelles et la psychoéducation, facilitent l’arrêt de
la consommation et renforcent l’alliance thérapeutique.
Déclaration d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en
relation avec cet article.
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