Traversée de Paris - Théâtre de Saint-Malo

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Traversée de Paris - Théâtre de Saint-Malo
TRAVERSEE DE PARIS : REVUE DE PRESSE
Seul en scène aux Bouffes Parisiens, le comédien fait revivre avec
fougue les personnages de « Traversée de Paris » de Marcel Aymé
dont il prend la défense.
Il attend le public au pied du plateau. Cheveux courts, coiffure stricte
d’autrefois, entre années 1930 et années 21940, veste de smoking à
parements larges sur polo et pantalon noirs. Il accueille parce qu’il est
trop heureux de retrouver ces spectateurs curieux qui n’attendent ni
bouche-à-oreille ni critiques pour avoir envie de le retrouver. Il attend, il
accueille, il parle. Il a tant de choses à dire, Francis Huster. On ne l’a
jamais vu entreprendre sans passion, sans urgence. Depuis quarante
ans, c’est ainsi. Il y va. Ça urge !
Cette fois, c’est Marcel Aymé, son beau souci. Il propose Traversée de
Paris… à ne pas confondre avec le film célébrissime et épatant de
Claude Antant-Lara, La Traversée de Paris. Pourtant, on rencontre les
mêmes personnages dans Traversée de Paris, l’une des nouvelles du
délicieux et très instructif recueil de nouvelles Le Vin de Paris. La vie
quotidienne pendant la guerre, l’Occupation, le marché noir, ce sont
des thèmes « historiques », saisis par une plume allègre et jamais
méchante.
Francis Huster a des choses à dire, et notamment que, contrairement à
ce que colportèrent quelques têtes obtuses, Marcel Aymé n’a jamais
été ambigu à l’égard des Allemands et encore moins collaborateur. Au
contraire, il s’est engagé pour dire son indignation au moment des lois
raciales. Francis Huster cite un texte d’Henri Jeanson (1922-2009) :
« L’apparition de l’étoile jaune souleva la colère des Parisiens qui
surent la manifester à leurs risques et périls. Je me souviens très bien
que Marcel Aymé le silencieux, dont l’impassibilité n’était qu’apparente,
écrivit alors sous le coup d’une émotion qu’il ne pût ni ne voulût
maîtriser, un article d’une violence inouïe contre les responsables de
ces mesures ignobles et humiliantes qui nous atteignaient tous. »
Le spectacle rappelle celui de La Peste, grand texte de Camus qui date
de ces années-là. Grand texte dont Francis Huster s’était emparé en
étant tous les personnages, toutes les voix. Mais en demeurant unique
narrateur, comédien traversé par un style, une langue, une histoire, des
êtres humains, une vérité. Acteur, il est époustouflant et sobre. Une
heure quinze tonique, hantée, puissante. Et un dénouement qui vous
étonnera…
Armelle Héliot
Traversée de Paris : presse
La Traversée de Paris n’est pas ce que vous croyez. Pour
réussi et subtil qu’il soit, le film de Claude Autant-Lara, avec
Jean Gabin et Bourvil, n’est qu’une version édulcorée du
texte écrit en 1942 par Marcel Aymé. La haine au quotidien,
la survie au prix de toutes les lâchetés, la guerre d’une
France contre une autre, la trouille dans tous les ventres, la
rage dans quelques cœurs. Et cela finit mal entre les deux
porteurs de valises bourrées de cochon, sombres héros qui
ont bien d’autres cadavres en bagage. Francis Huster est
dense, intense, incandescent. Les années noires sont un
charbon dont il fait un incendie. A ne pas manquer : ses
prolégomènes, un quart d’heure avant le spectacle,
indispensable exégèse.
"Traversée de Paris", que propose Francis Huster, est un
mixte d'une nouvelle parue dans le recueil "Le Vin de Paris"
et du roman "Le Chemin des écoliers". On se souvient du
film où l'on voyait Gabin et Bourvil traverser Paris avec une
valise remplie de cochon à vendre au marché noir. Une
comédie légère et drôle où l'Occupation n'était pas si
inhumaine. Ce que fait entendre Huster est beaucoup plus
sombre. L'écriture du grand écrivain qu'est Marcel Aymé fait
vivre dans des dialogues très percutants toute une petite
société des années 40 qu'il "croque" à chaud (1942) avec
courage. Il y est question de délations, d'étoile jaune,
d'extermination et de communistes. Francis Huster joue tous
les rôles : Martin, Grandgil, mais aussi un pétainiste collabo,
un cafetier pas très regardant, un petit patron qui profite. A lui
tout seul, sans décor, comme sur un fil rouge devant le
rideau de scène, il fait revivre une France pas toujours
reluisante.
Sylviane Bernard-Gresh
Traversée de Paris : presse
Quel culot ! Quel talent ! Jamais à court d’une idée qui
s’apparenterait à un défi, Francis Huster a adapté et mis en
scène une des huit nouvelles composant Le Vin de Paris, de
Marcel Aymé : la plus célèbre, Traversée de Paris. Difficile
de faire oublier sa version cinématographique signée AutantLara avec Gabin, Bourvil et de Funès. Et pourtant. Seul en
scène pendant une heure et quart, devant le rideau resté
baissé, Huster interprète magistralement les différents
personnages du texte – auquel il a ajouté quelques extraits
du Chemin des écoliers – en rendant à celui-ci sa couleur
originelle : celle d’un drame. Le résultat est stupéfiant.
Plongé dans le Paris de l’Occupation, évoqué avec ce qu’il
faut d’implication emphatique et de distance historique, le
spectateur devient le témoin privilégié d’un tableau vivant où
s’ébattent deux compagnons d’infortune en route vers
Montmartre et leur terrible destin. Martin et Grandgil
semblent réunir à eux deux ce que l’homme porte de plus
laid en lui : appât du gain, arrangement avec la morale,
violence, machisme, esprit de compromission, égoïsme.
Mais aussi, derrière le miroir, des blessures intimes et une
certaine grandeur d’âme. Martin, Grandgil, nos semblables,
nos frères ? C’est ce qu’Huster tente de transmettre. Il y
parvient superbement.
Jean-Christophe Buisson
Traversée de Paris : presse
Je fais mon mea culpa. J'ai traîné des pieds pour aller voir
Francis Huster dans son seul en scène. Parce qu'un seul en
scène sur un texte littéraire, c'est peut-être un de trop ; que,
même si Marcel Aymé a enchanté ma jeunesse avec ces «
Contes du Chat perché », c'est plus par le cinéma que je
connais ses œuvres. Avec sincérité, générosité et talent,
Francis Huster a balayé tous ces a priori, rendant à Marcel
Aymé sa place au panthéon des grands auteurs. Il m'a
totalement surprise et, j'ose le dire, reconquise. Son
spectacle est judicieusement présenté. Soyez là dès 18 h 45.
Ce moment est aussi important que ce qui suit à 19 heures.
Pendant un quart d'heure, il donne une belle explication
littéraire et historique de l'œuvre et de l'homme, évoquant le
contexte de l'Occupation allemande. Il analyse pourquoi,
après la guerre, le cinéma s'est servi de ses œuvres, les
déformant pour raconter autre chose. Il raconte aussi
qu'après avoir joué « La peste » de Camus, Jean-Louis
Barrault lui a donné l'ordre de jouer la nouvelle de Marcel
Aymé, « Traversée de Paris », car elle en était le meilleur
pendant. Il précise, que, à la différence de Fabrice Luchini,
dont il dit toute son admiration, il ne «sculpte pas les mots
mais fait une pantomime de mots, basée sur les sentiments».
A nous dans la salle de laisser agir notre imaginaire. Il passe
au texte. Si les grandes lignes sont celles du film, le fond en
est assez éloigné et plus passionnant. Même s'il nous arrive
de nous perdre dans les personnages, Francis Huster, dans
un plaisir gourmand du texte, fait remarquablement vivre ces
gens ordinaires pris dans la tourmente de l'Histoire. Avec un
humour cinglant et une vision du monde sans compromis, la
langue de Marcel Aymé est des plus réjouissantes.
Marie-Céline Nivière
Traversée de Paris : presse
Comme il l’avait fait pour La Peste, Francis Huster campe à lui
seul tous les personnages de la nouvelle de Marcel Aymé,
Traversée de Paris. Un solo de haut vol. Francis Huster aime les
mots, Francis Huster aime les auteurs. Il aime parfois les servir dans
l’exercice le plus sobre qui soit. Et c’est dans cette épure qu’on le
préfère. Après La Peste , il a de nouveau choisi le solo pour Traversée
de Paris , adapté de la nouvelle éponyme de Marcel Aymé. Huster est
donc seul en scène, devant un rideau de velours rouge tiré. Il se balade
de l’avant du plateau à la salle. Costume noir, sans décor, juste
quelques éclairages, poursuites pour l’accompagner lors de
sa tourbillonnante traversée de Paris.
Le petit gars Martin trimballe des colis au marché noir pour arrondir ses
fins de mois pendant l’Occupation. Il s’associe avec Grandgil, rencontré
dans un café. Les voilà à l’assaut de la capitale, flanqués d’un cochon
découpé en morceaux dans quatre valises. Les caractères des deux
compagnons de fortune émergent pendant cette épopée nocturne :
l’un, tranquille et simple, face à l’autre, extravagant et cynique, en fait
un artiste bourgeois venu se distraire. 1 h 15 durant, on est suspendus
aux lèvres du comédien. Martin et Grandgil bien sûr, et les autres, que
la nuit place sur leur route : commerçants, patrons de bar, policiers.
Salauds et héros. Huster est tous ceux-là à la fois. Sans se
grimer, sans en faire des tonnes, juste par une inflexion de voix, une
posture, une grimace infime dans le visage. Quel souffle ! Quelle
présence ! Ne manquez pas d’arriver un peu en avance. L’acteur
s’adresse à son public sous forme de conversation informelle avant
même le début du spectacle, pour en confier la genèse. Il replace
Marcel Aymé dans le contexte de la guerre, ses amitiés, son oeuvre.
"Ce n’était pas de la littérature. C’était une oeuvre qui sonnait vrai,
clame-t-il. C’est pourquoi on l’a souvent adaptée - et trahie - au
cinéma." Il y a vingt ans, pendant La Peste , il s’était promis, il avait
promis de monter, un jour, Traversée de Paris , "pour rendre justice à
Marcel Aymé et prouver que c’est l’un des justes du XXe siècle". Voilà
qui est fait.
Nedjma Van Egmond
Traversée de Paris : presse
HUSTER démultiplié
Reprenant à lui seul tous les rôles de la « Traversée de Paris », l’acteur
nous propose le plus peuplé des seuls en scène. Une performance
aussi physique qu’artistique où le public tient le premier rôle.
Paris Match. Reprendre, à vous seul, les rôles mythiques tenus par
Gabin et Bourvil, c’est de la mégalomanie ?
Francis Huster. Au contraire ! Quand j’ai joué « La peste » de Cmus
en 1989, Jean-Louis Barrault m’a demandé d’enchaîner avec la
« Traversée de Paris », mais à partir de la nouvelle de Marcel Aymé et
non du film qui trahissait l’œuvre. Il voulait réhabiliter Aymé, qu’il
considérait comme un juste de littérature injustement calomnié. Mais
j’ai mis vingt ans à sortir de « La peste » voilà pourquoi je ne joue ça
qu’aujourd’hui…
Ce spectacle vous demande un effort physique considérable
sportif même. Est-ce votre côté footballeur ?
C’est vrai que je me sens au-dessus d’un précipice avec rien pour
m’accrocher. Ni partenaires, ni décors, ni costumes …
Physiquement, c’est pire qu’un match de boxe, ça s’apparente plus à
du full combat !
Pourquoi vous infligez-vous une telle épreuve
J’ai une douzaine de personnages à jouer et je pense que c’est en
ressentant ma souffrance physique que le public s’approche vraiment
des personnages. C’est exactement le contraire de ce que fait un
Lucchini avec Céline. Lui fait l’ascension du texte en plantant son
piolet, en phrasant. Il ne peut pas tomber dans le vide, parce que le
texte l’amène au sommet de l’œuvre. Alors que moi, je suis en
complète chute libre, sans parachute. Avec ce spectacle, je crois que
c’est la chair qui triomphe sur l’intellect.
Entretien avec Alain Spira

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