Lettre ouverte à Madame Pécresse Présidente de la région Ile de
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Lettre ouverte à Madame Pécresse Présidente de la région Ile de
Lettre ouverte à Madame Pécresse Présidente de la région Ile de France Le 9 septembre 2016 Madame la Présidente, Je me permets de vous interpeller au sujet d’une subvention que la région Ile de France a votée en faveur des semences de céréales. Cette mesure part d’une louable intention puisqu’elle vient en aide aux agriculteurs dont la récolte a été endommagée par une mauvaise fécondation des blés début juin causant des problèmes de trésorerie important dans les exploitations agricoles franciliennes. En revanche, pourquoi n’avoir accordé cette subvention qu’au seul circuit des semences industrielles dites certifiées ? Elles représentent moins de la moitié (40 % environ) des volumes de semences mis en terre chaque année dans cette région. En Ile de France, 60 % des semences utilisées sont autoproduites par les agriculteurs depuis des décennies. L’agriculteur conserve alors une partie de la récolte précédente qu’il fait calibrer, nettoyer, traiter et ensacher souvent par un « trieur de semences professionnel » puis il la « ressème » comme il « sème » une semence du commerce. Préparés avec le savoir-faire adéquat, les grains de la récolte 2016 sont tout à fait en capacité de produire une semence de qualité. Les grains de la récolte sont certes plus petits mais ils conservent toute leur capacité germinative. Il suffit de bien les trier. Ce que les professionnels de la semence de ferme savent faire, comme les stations des semenciers. Vous devez savoir qu’en cette année où les semences vont manquer, les semenciers utiliseront aussi des grains de ferme issus de la récolte 2016 (ils en ont obtenu la dérogation du Ministre M. Le Foll) pour se fournir en semence certifiée (dite R2) équivalente à de la semence de ferme. L’avantage de la semence de ferme, très répandue en zone de grandes cultures, est le gain économique, puisqu’une semence de ferme coûte 30 à 40 % moins cher qu’une semence certifiée, avec un rendement équivalent à la récolte. Cette pratique est répandue parce qu’elle permet aussi de baisser de moitié le recours aux traitements phytosanitaires enrobant les semences par une juste adaptation des doses selon la particularité de chaque exploitation. En semences certifiées, l’utilisation de produits phytosanitaires est globalisée et systématisée et non traitée sur mesure au cas par cas. La semence de ferme permet aussi le mélange de variétés, favorable à la biodiversité, stabilisateur de rendements avec une mutualisation du risque par le fait de mélanger différents potentiels génétiques. Les trieurs de semences mobiles que nous sommes, intervenons en Ile de France pour préparer ces semences avec nos « camions usines mobiles » (mini stations de semences embarquées). Pourquoi cette pratique ne pourrait-elle pas être soutenue ? Pourquoi ne pourrait-elle pas aussi bénéficier de votre soutien ? Ce serait une mesure de sobriété que de soutenir la semence de ferme et beaucoup moins couteuse pour les deniers publics. Pourquoi ne favoriser que le seul modèle de l’industrie ? Dans un monde ouvert, notre modèle est collaboratif, adapté à chaque besoin, autonome et économe. La semence de ferme finance chaque année la recherche en versant 11 millions € de royalties aux semenciers pour soutenir l’innovation variétale. Notre syndicat des trieurs de semences a participé aux discussions sur la loi sur l’obtention végétale en 2011. Les professionnels de la semence de ferme participent avec le STAFF (syndicat des Trieurs à Façon de France) aux discussions de la filière semences en France et en Europe avec l’European Mobile Seed Association (EMSA). Je vous remercie d’accorder aux agriculteurs la liberté de choix de leur modèle de production et de soutenir justement et équitablement l’ensemble des modèles qui permettront à l’agriculture francilienne de passer ce cap difficile avec une juste utilisation raisonnée des deniers publics. Vous êtes cordialement invitée à visiter une de nos installations en cours de production de semences sur une ferme d’Ile de France. Les professionnels de la semence de ferme seraient très heureux de vous accueillir. Sylvain DUCROQUET Président du syndicat des trieurs de semences professionnels Trieurs de semences intervenants en Ile de France : Certaines Coopératives Coop de France, des négoces regroupés FNA, des trieurs indépendants du STAFF et des CUMA