Le voyage au cœur des ténèbres proposé par

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Le voyage au cœur des ténèbres proposé par
28 JUIL/17 AOUT 09
Hebdomadaire Paris
OJD : 35955
24 RUE SAINT SABIN
75011 PARIS - 01 42 44 16 16
Surface approx. (cm²) : 321
N° de page : 34
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Guerres et rêve
U
ne ombre se détache sur fond de thème de la quête des origines. A la question
néons. Cette ombre est une voix vé- rimbaldienne "Qu'est-ce que je fais là ?", Wajdi
hémente, un trop-plein de mots sac- Mouawad répond en des fantasmagories
cadés, scandés, heurtés. Elle livre un débridées, parfois naïves mais efficaces sur le
récit haché, bousculé, hanté par la plan théâtral où temps et espace - son Liban
peur, la mort, le chaos, la perte
natal, le Canada et l'Europe Le voyage
d'identité. Avec Les Inepties vosont habilement mêlés. On y
lantes, Dieudonné Niangouna
retrouve étrangement à chaau cœur des
invente une langue malade pour ténèbres proposé
que fois la notion de la faute
affronter l'impossibilité de dire
liée à la naissance. Comme si
par
Dieudonné
la folie des trois guerres civiles
la quête des origines était inqui embrasèrent le Congo, de Niangouna fut
timement mêlée à cette no1993 à 1994, puis en 1997, et en- l'un des temps
tion de faute.
fin de 1998 à 2000. Il est soutenu forts du Festival.
Très différent, Photo-Ropar l'accordéon de Pascal Contet
mance, des Libanais Lina
dont le bourdon s'enfle parfois en un foison- Saneh et Rabin Mroué, déconstruit le scénanement intense de grandes orgues, assauts rio du film d'Ettore Scola, Une journée partitelluriques ou, au contraire, densité subtile culière. Situant l'histoire dans le contexte soourdissant une tension.
cial et politique du Liban d'aujourd'hui, ils se
Droit, digne, Dieudonné Niangouna lance mettent eux-mêmes en scène en train de préses mots meurtris, détruits de l'intérieur. Sa senter leur projet de spectacle devant la cendiction crépite parfois comme une mitrail- sure. Le résultat est savoureux, notamment
lette. Le vocabulaire se dévoie ; des expres- quand le censeur, interprété par Rabih
sions inquiétantes surnagent tel ce "devoir Mroué, se prend tellement au jeu qu'il veut
de violence" soudainement évoqué. Tout va intervenir dans le projet. Mais Lina Saneh
trop vite quand les tempes bourdonnent ; s'empresse de le remettre à sa place. Le réque les yeux inondés de sueur ne savent plus cit original déconstruit - ils interprètent
ce qu'ils voient ; et que la pensée est saturée aussi les héros du film - s'offre à d'amusanpar la peur. La tension excède le verbe. Il se tes mises en abyme, évoquant au passage
jette à plusieurs reprises sur un panneau de Jorge Luis Borges. Ce spectacle sensible en
tôle. Relance le rythme, improvisant un seat forme de puzzle donne aussi un aperçu sans
de grillons. Ce voyage au cœur des ténèbres concession des contradictions de la société
- Joseph Conrad est mentionné au passage libanaise contemporaine. Hugues Le Tanneur
comme un frère possible - fut l'un des temps
forts du Festival.
les Inepties volantes
Le voyage proposé dans la cour d'Honneur de Dieudonne Niangouna et Pascal Contet
par Wajdi Mouawad, artiste associé de cette Littoral, Incendies et Forets
63e édition, avec les trois spectacles Litto- de Wajdi Mouawad
ral, Incendies et Forêts, relève d'un tout au- Photo-Romance de Lina Saneh et Rabin Mroué
tre ordre. Ce sont trois variations sur le /// wwwfestival-avignon com
CONTET
7496080200509/GBJ/MBM/2
Eléments de recherche :
PASCAL CONTET : accordéoniste, toutes citations