Put- Isabelle Lefort Depuis bientôt trais ans, Les marques - UP-tex

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Put- Isabelle Lefort Depuis bientôt trais ans, Les marques - UP-tex
05/06/07 MARS 10
Quotidien Paris
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N° de page : 33
26 RUE D'ORADOUR SUR GLANE
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les marques doivent redéfinir leur
stratégie de séduction. Que désirons-nous vraiment ? Des griffes
ancrées dans l'histoire qui n'ont
pas perdu leur âme. Au premier
rang ? Hermès toujours est plébiscitée. Mais également Goyard,
Chanel, bien sûr, dont la créativité
sans cesse boostée renouvelle en
permanence l'héritage de Mademoiselle Chanel.
L'ère de la consommation de masse de produits standards ne sied
plus à l'époque du choix multiple
et des géographies variables individuelles qu'offre Internet. En
mode comme en tourisme, nous
sommes tous à l'affût de bonnes
affaires. Grâce aux sites marchands, il est désormais très aisé
de comparer et payer le prix juste.
La révolution numérique en marche accélérée oblige les marques
de luxe à se dépasser. Les grands
noms de la high-tech démocratisent à la vitesse de la lumière leurs
dernières trouvailles superbement
design, à des prix très compétitifs.
Leur hyperfonctionnalité incite les
labels à forte valeur ajoutée à
redonner du sens à leur pro-
Put- Isabelle Lefort
Depuis bientôt trais ans,
au pays du Soleil-Levant, il n'est
plus de bon ton de se pavaner avec
des marques à logo. Exit le blingbling. Les Japonais plébiscitent le
savoir-faire, l'attention portée au
moindre détail, la pérennité, les
produits qui ont du sens. Pour illustrer le mouvement, Louis Vuitton, qui n'a pas dévoyé sa marque,
met en scène avec l'artiste Murakami une love story entre l'une de
ses adeptes et l'un de ses ouvriers
malletiers (i). Ce qu'elle aime ? Le
travail bien eut. Pas le show off.
En Asie, seul le Japon semble,
pour l'heure, gagné par cette vague de « no logo » et de quête absolue de qualité. « En Chine, c'est
norma] », explique Arlette-Elsa
Emch, la présidente de la marque Swatch. « Après des années
de privation, les Chinois accèdent
au plaisir de consommer, ils sont
très avides de s'offrir des objets
qui marquent leur statut social. »
Et David Wolf, le président du cabinet de conseil Wolf Group Asia,
de préciser : « Dans un monde
de plus en plus préoccupé par la
consommation durable, la Chine
est le dernier bastion du blingbling : pas seulement du luxe, mais
du luxe clinquant. » Les marques
doivent jongler avec, d'un côté, les
attentes de ce déjà futur géant et,
UPTEX
2965813200505/GFD/MJP/1
de l'autre, les désirs des consommateurs des pays matures.
En Europe, comme aux ÉtatsUnis, la mse a amplifié la demande pour des produits à réelle
valeur ajoutée. On le répète désormais à qui mieux mieux, mais
après des années où, au nom du
rêve, on a vendu un peu n'importe quoi, à des prix prohibitifs,
les clients ne sont plus dupes. À la
dernière conférence sur les perspectives économiques de l'Institut français de la mode (IFM), le
verdict est tombé. Les consommateurs boudent majoritairement ce
qui leur est proposé en magasins,
déclarant que les objets de mode
ne répondent pas à leurs désirs.
Les prix leur semblent dénués de
sens.
Dans le rapport « Stratégie Textile
Habillement » qu'elle a remis au
ministère de l'Industrie, Clarisse
Perotti-Reille analyse le décrochage : « Sur la période 2000-2006,
les prix des vêtements, en France,
ont augmenté de 0,8 %, alors que
les prix à la production baissaient
de 67 %• » Toujours dans son rapport, elle répète : « Des indices
d'insatisfaction apparaissent. Une
étude menée par l'IFM pour Uptex montre que 70 % des consommateurs estiment que la mode est
la même partout. Pas étonnant,
dans ces conditions, que 40 % des
collections soient vendues en soldes. »
II y a urgence. Pour nous tenter,
Les marques doivent
jongler avec les attentes
de la Chine et les désirs
des consommateurs des
pays matures.
duit. Le marketing de l'émotion
fait florès. Alain Ducasse ne cesse
d'oeuvrer en ce sens. « Que restet-il d'un repas dans un restaurant ?
Un souvenir. C'est à nous d'offrir
aux consommateurs le maximum
pour que l'instant qu'il dépense
avec nous soit inoubliable. » Yves
Michaud, auteur de « l'Art à l'état
gazeux. Essai sur le triomphe de
l'esthétique » (2), compare volontiers l'univers du luxe au marché
de l'art. « Le luxe lui-même devient "gazeux" : il consistera de
plus en plus à acheter des expériences plutôt que des objets. Les
Orientaux continuent à acheter
des sacs à main ou des chaussures, mais lorsque vous achetez un
voyage dans l'espace, le nouveau
projet de Virgin, il s'agit d'une
expérience. » Hyperexigeants, et
surinformés, nous demandons
finalement aux marques de nous
dépasser, nous émouvoir, nous
satisfaire, et ce pour le meilleur
prix. C'est pourtant simple, non ?
Comme un mouton à cinq pattes.
(DA découvrir sur Youtube.
(2) « LXrt à l'état gazeux
Essai sur le triomphe de l'esthétique »,
Yves Michaud. Editions Stock,
204 pages, ]6,1O euros.
Eléments de recherche : UPTEX ou UP TEX : pôle de compétitivité de la filière textile en Nord-Pas-de-Calais/Picardie, toutes citations