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Vendredi 24 janvier 2014 // No 176 Deuxième pilier Perte et tracas P. 4 CHF 3.– // Abonnement annuel CHF 140.– // www.vigousse.ch Vins valaisans Origines incontrôlées P. 5 Procès Viol au vent P. 6 Syrie L’accord de paix P. 17 JAA – 1300 Eclépens PP/Journal – Poste CH SA 2 C ’ E S T P A S P OUR D IRE ! Q UELLE S EMAINE ( s u r l e c o u r t ) ! 3 Ç A , C ' E S T F AI T ! * Fausse couche Stop soda Alinda Dufey En Allemagne, la chaîne Lidl ne vendra plus de Coca-Cola, ni de Fanta, ni de Sprite. Par souci de protéger la santé des consommateurs contre les excès de sucre ? Non, pour des raisons comptables. Les rayons resteront garnis de poisons sucrés de marque Pepsi et d’autres, moins chères. A noter qu’en Suisse, Denner importe son Coca-Cola de Tchéquie. Et se sucre au passage. L e 9 février, le peuple se prononcera sur l’initiative « Financer l’avortement est une affaire privée ». Au-delà du vaste débat sur le respect de la vie, cet appel à privatiser les coûts des IVG prétend récuser un système, voté et approuvé à 72,2 % des voix en 2002, qui fonctionne. Et dans la foulée, il remet en cause un droit fondamental de la femme. Les partisans de ce sinistre retour en arrière déguisent hypocritement leurs motivations idéologiques et religieuses en arguments financiers : ne plus rembourser l’IVG, c’est alléger l’assurance maladie, clament-ils. Foutaises ! Les frais liés aux interruptions représentent 8 millions de francs par an, soit 0,03 % des coûts de la santé. Un « allègement » très léger, donc. Au demeurant, le nombre d’avortements est en baisse constante en Helvétie. Et en imposer le financement aux femmes, c’est forcément pénaliser les plus pauvres et favoriser le retour aux interventions illégales, aux sordides faiseuses d’anges, aux infectes aiguilles à tricoter, aux matelas souillés. Avec les traumatismes physiques et psychologiques découlant de ces actes barbares. Par ailleurs, les initiants démolissent eux-mêmes leur prétexte pécuniaire en y mêlant les convictions : ils ne veulent pas, disent-ils, que leurs cotisations d’assurance maladie servent à financer des « meurtres ». Ce qui revient à torpiller le principe de solidarité. A cette aune-là, je pourrais refuser que mes primes puissent contribuer aux soins des mollassons bedonnants qui se gavent de mauvaises graisses, éclusent des litrons d’alcool et se goudronnent les poumons... Sauf que, tolérance et respect obligent, le bien-être de tous prime les opinions individuelles. Enfin, concrètement, cette initiative s’en prend – encore !- aux femmes. Elle entend les priver d’un acquis social et sanitaire primordial, attaque leur droit à l’autodétermination physique, les soumet à la loi de l’argent. Et ajoute une fausse couche de morale culpabilisatrice à leurs émotions. C’est dire s’il est justifié que ce projet rétrograde n’arrive jamais à terme. 13 millions de francs Partenaire attitrée de la fameuse NSA états-unienne, la société israélienne Verint vient d’obtenir un mandat de la Confédération pour un système de surveillance et d’écoute des télécommunications à 13 millions. Avec de si grandes oreilles, plus rien de ce qui se dit chez nous ne devrait échapper à la police ou à la justice suisses. Ni à la NSA ni au Mossad, d’ailleurs. Farces armées Un lave-linge, une statue, de l’argenterie, du Viagra, un camion... Les stocks militaires britanniques ont été victimes de larcins à répétition depuis 2007. Dans la longue liste des objets dérobés, dont la valeur totale avoisine les 10 millions de francs suisses, on trouve aussi des instruments pour sous-marins nucléaires, des baïonnettes et des munitions. Désarmant ! Dons de soi Pente glissante * nom connu de la rédaction Vigousse vendredi 24 janvier 2014 LE CHIFFRE Pour sa campagne à l’appui de l’initiative anti-immigration, l’UDC a dû se passer de ses habituels donateurs des milieux économiques, notoirement opposés au texte : Thomas Matter le banquier, Walter Frey le vendeur de bagnoles ou Werner Spuhler le constructeur de trains. C’est donc Christoph Blocher qui a dû faire l’appoint, de sa poche, en casquant pas moins de 3 millions. A trop vouloir gagner, il risque d’y perdre. Un ex-employé d’UBS est passé aux aveux en France (Le Parisien, 21.01.14) : il raconte en détail comment lui et ses collègues racolaient les candidats à l’évasion fiscale, les rendez-vous discrets, les papiers sans logo, les prudences d’agents secrets. Il narre aussi que les dévoués banquiers passaient eux-mêmes en Suisse le cash ou les lingots, parfois à skis sur les pistes frontalières. La direction d’UBS dément, bien sûr. Mais on sait déjà qu’avec la vérité, elle est championne de slalom. Vigousse vendredi 24 janvier 2014 4 F AI T S D I V ER S E T V ARI É S F AI T S D I V ER S E T V ARI É S Fonds suisses en déshérence Ronds dans l’eau Six milliards de francs : c’est la modique somme que les travailleurs de Suisse ont égarée dans la nature. Les affiliés au deuxième pilier sont les premiers pillés. « C’est comme si je m’adressais au bureau des objets trouvés », témoigne Valérie. Elle a réalisé récemment que son 2e pilier est vacillant : en changeant de travail il y a une dizaine d’années, elle n’a pas été informée du fait que le transfert des avoirs, d’une caisse de pension à l’autre, n’est pas automatique. Où donc sont restées ses premières billes ? Pour le savoir, elle a contacté son ancienne caisse. Mais là, personne ne trouve la moindre trace de son pécule. Normal, les dossiers de plus de dix ans ne sont pas archivés. Pour tenter de récupérer son vieux bas de laine, Valérie doit formuler une demande à Berne, auprès de la centrale du 2e pilier, ou Fonds de garantie LPP de son petit nom. Elle est d’ailleurs loin d’être la seule à errer en quête de ses sous : ladite centrale a traité 23 769 demandes en 2012 ! « Il y a dix ans, l’information n’était pas systématique », lui a-t-on confirmé là-bas. De là à dire que le manque d’information était systématique, il n’y a qu’une nuance que le nombre des égarés incite à gommer. Comment la centrale opère-t-elle pour retrouver les sommes restées en rade ? Elle confronte le numéro AVS et la date de naissance de la personne au registre des fonds oubliés. Cas échéant, elle communique par voie postale le nom de l’institution de prévoyance ou de la fondation de libre passage ayant annoncé un avoir au nom de la personne concernée. La quête de Valérie n’est donc pas achevée. Pour elle, l’expression « libre passage » est du reste fort mal choisie : « Il s’agit de tout sauf ça. Je dois retourner vers l’ancienne caisse, celle qui n’a plus trace de mon dossier. » Reste l’auberge de la dernière chance : la Fondation institution supplétive LPP. Toute « prestation de sortie » non transférée dans une nouvelle caisse est en effet versée d’office à cette fondation, et ce dans les deux ans qui suivent l’arrêt des relations de travail. Même des années plus tard, celles et ceux qui ont égaré des ronds, ou qui ne savent plus du tout s’ils en ont égaré ou non, peuvent toujours tenter leur chance. les réclament peut-être un jour, ce gigantesque pactole dort paisiblement, produisant au fil du temps de substantiels intérêts. En Suisse, la loi poursuit le noble but d’assurer un niveau de vie décent après la retraite, et ce grâce à une prévoyance reposant sur deux piliers au minimum. Encore fautil tenir compte des règlements des caisses, plus ou moins généreuses, et surtout d’un manque patent d’information aux assurés. Si ces derniers ont oublié six milliards alors que l’affiliation est obligatoire depuis 1985, n’est-ce pas le signe qu’il y a peut-être comme un léger souci ? Les férus de contrepèteries le savent : dans toute histoire de fonds et de caisses, la probabilité est grande de finir baisé. Jean-Luc Wenger A) Formuler une demande à la centrale du 2e pilier : www.sfbvg.ch B) Si l’avoir n’est plus auprès de l’ancienne institution de prévoyance, s’adresser à la Fondation institution supplétive LPP : www.chaeis.net Pour un sage passage En cas de changement d’employeur, faire transférer sa prestation de libre passage à la caisse de prévoyance du nouvel employeur. Pour ce faire, il suffit de communiquer à l’ancienne caisse les coorVigousse vendredi 24 janvier 2014 données de la nouvelle. A défaut, l’avoir sera automatiquement transféré à la Fondation institution supplétive LPP. En cas de changement de statut d’employé à indépendant, trois options. A) conclure une police de libre passage auprès d’une compagnie d’assurances ou d’une institution d’assurances de droit public. B) ouvrir un compte de libre passage auprès d’une banque. C) transférer l’avoir à la Fondation institution supplétive afin de poursuivre son épargne en versant seul ses cotisations. In vino magouillas Dans certains vins valaisans vendus en grande surface, une grappe ne retrouverait pas son cep. Et si les appellations sont contrôlées, les dérapages aussi. Le journaliste de Canal 9 Paul Vetter a dû marner sec pour trouver ce que cache réellement cette étiquette. Le raisin ne provient pas seulement de Veyras et des parchets voisins de Venthône, d’où quelques litiges d’appellation devant le Tribunal cantonal, mais aussi de ceps entre Loc et Salquenen. La mise en bouteilles se fait du côté de Martigny, chez Cevins, une société apparte- Vain de messe Les piliers de la sagesse Pour rechercher ses billes Etiquettes sans éthique « Les raisins du Château de Muzot poussent autour du village viticole pittoresque de Veyras, dont les excellents vins rouges sont réputés bien au-delà du Valais », chante la réclame Denner en précisant que c’est dans ce fameux château que « le grand poète Rainer Maria Rilke a passé les dernières années de sa vie et a écrit deux œuvres notoires, Les élégies de Duino ainsi que tous les Sonnets à Orphée ». De fait, le « Château de Muzot » de chez Denner (130 000 bouteilles) n’est pas exempt de licence poétique. En début d’année, ladite fondation a annoncé que le total des avoirs en déshérence dépasse désormais les six milliards de francs. Une somme astronomique, qui appartient à un million de salariés mal renseignés ayant jadis omis de faire transférer leurs avoirs. En attendant qu’ils Pour faucher son blé En quittant un employeur, l’ex-salarié peut encaisser en espèces son avoir de libre passage, mais seulement dans trois cas de figure. A) s’il quitte définitivement la Suisse. Et s’il part pour un pays de l’Union européenne ou de l’AELE où il sera assujetti à un régime d’assurance obligatoire, le retrait en espèces n’est possible que pour la part sur obligatoire de son avoir de vieillesse. B) S’il s’établit à son propre compte et n’est donc plus soumis à la prévoyance professionnelle obligatoire. C) Si le montant de la prestation de sortie est insignifiant, c’est-à-dire inférieur au montant annuel des cotisations. Par ailleurs, les personnes mariées ne peuvent retirer leur avoir qu’avec le consentement écrit du conjoint. Cette obligation est aussi valable pour les partenaires pacsés. Pour tout savoir Les trois piliers, guide de la prévoyance active, par Joy Demeulemeester. Troisième édition réactualisée, à paraître ce printemps aux éditions Tout compte fait. 5 nant aux frères Rouvinez de Sierre. Entre deux, la vinification s’opère chez Provins (Sion) et chez Albert Mathier (Salquenen). La société anonyme derrière le « Château de Muzot » a pour actionnaire principal un autre Mathier, Pierre-Alain. Tout ça évoque plus Kafka que Rilke... Le susnommé Pierre-Alain Mathier est basé à Zurich. C’est de là qu’il gère les stocks valaisans en prospectant auprès des grands discounters pour remplir le carnet de commandes. Après quoi il se rend en Valais pour voir comment les honorer. Il va souvent puiser dans la production familiale… mais avec quelques détours. Dans le milieu, on pointe aussi la Cave d’Uvrier, près de Sion, dont les cuves et les pressoirs gisent abandonnés à l’extérieur : c’est dire sa grande activité. Et pourtant elle fournit à Lidl du pinot noir dit « de Salquenen » à 5,95 francs la bouteille alors que le raisin de Salquenen atteint déjà les 4 francs le kilo… Furieux, des petits encaveurs du coin dénoncent : la Cave d’Uvrier dissimulerait selon eux Yvo Mathier de la Cave Fin Bec. Ces médisants relèvent aussi que Pierre-Alain Mathier possède une cave pas très loin, le domaine des Virets, à Saint-Léonard. Bref, le cours du pinard suivrait bien des méandres... En novembre 2012, Mise au point (RTS) avait révélé, pièces à l’appui, qu’un autre Mathier, Diego, commercialisait via Coop du johannisberg prétendu « de Chamoson » alors qu’il était récolté sur Venthône. Une entorse caractérisée à l’AOC. Devant les caméras, Philippe Hunziker, directeur du Contrôle suisse du commerce des vins, avait mollement promis de traiter ce dossier, qu’il avait déjà égaré une fois. Depuis, il est resté fidèle à sa force d’inertie. Quand nous lui avons demandé où en est son enquête, il nous a envoyés balader : il ne fournit pas cette info « à des tiers », voyez-vous. Il faut dire que siège, parmi les membres de son conseil de fondation, un certain Albert Mathier. Celui chez qui s’opère la vinification du « Château de Muzot ». Mais ça n’a sûrement rien à voir. Tout ça est un peu embrouillé et mélangé ? Normal : les picrates en question le sont aussi. Pour y voir clair, buvez une bonne bouteille d’un excellent et authentique petit propriétaire-encaveur valaisan, puis relisez : là, les connexions apparaîtront et tout sera limpide. Joël Cerutti/Agence PJ Investigations Le strip de Bénédicte Quelle surprise de voir le père Nicolas Buttet, qui brigue le poste d’évêque de Sion, voler au secours du conseiller d’Etat Maurice Tornay (grand ami et fervent catholique proche d’Ecône), empêtré en ce moment dans l’affaire Giroud (fervent catholique proche d’Ecône également). Chronique dans Le Nouvelliste, passage à Mise au point et intervention de 10 minutes à Forum, l’homme de Dieu se répand pour épauler l’homme de pouvoir. Pour le père Buttet, l’affaire Giroud-Tornay se réduit à un de ces « 0,002 pour cent de cas litigieux qui sont montés en épingle ». Une bagatelle à 13 millions, donc… Au fait, est-ce que le fisc valaisan a déjà daigné jeter un œil sur la fondation Ecophilos, la Fraternité Eucharistein et l’institut Philantropos, tous liés à l’humble curé ? S. D. Vigousse vendredi 24 janvier 2014 6 c o n s o & c o n s o r ts F AI T S D I V ER S E T V ARI É S Serre-vis des urgences Les dents de l’amer Hôpital, silence Le magazine Contact, organe d’Hôpital du Valais, traite des urgences. Mais pour livrer une information complète, il n’y a manifestement pas urgence. Début 2014, Hôpital du Valais a distribué le numéro 4 de Contact. Le thème choisi, « Au centre des urgences », a été repris sur une double page par Le Nouvelliste. Opération de communication réussie, donc : l’institution présente une belle image positive, tout va bien, c’est la joie, les lendemains chantent et on oublie toutes ces nouvelles fâcheuses autour du professeur Vincent Bettschart et de son scalpel fou. En dernier lieu, l’intervention qu’il a pratiquée en Valais malgré un engagement, cosigné par lui, qui imposait une concertation avec le CHUV. Pas un mot là-dessus dans Contact, on s’en doute. Rien que du joli contenu, bien emballé dans une maquette sobre rehaussée de photos où PLUS VRAI QUE VECU le personnel, dynamique et heureux, s’implique avec motivation. Mais Contact est aussi une publication d’utilité publique : en page 14, une carte du Valais indique les lieux et les horaires des services des urgences. Celui de Sierre est ouvert « 24 h/24 », y annonce-t-on fièrement. Sauf que les dirigeants d’Hôpital du Valais veulent réduire le service des urgences générales en soirée. Selon nos sources, le projet est dans l’air depuis une année au moins, mais en catimini : il ne fallait pas, avant les échéances électorales du printemps dernier, nuire à des politiciens proches du conseil d’administration et à leur parti. a consulté les différents partenaires. Il est désormais prévu que le Conseil d’Etat discute de ce dossier durant le premier trimestre 2014. » A voir : vu le nombre de casseroles que traîne le gouvernement valaisan depuis peu, il risque d’avoir à traiter des affaires plus urgentes. Joël Cerutti/Agence PJ Investigations Audience en correctionnelle dans un tribunal d’arrondissement. Noms fictifs mais personnages réels et dialogues authentiques. «Ne me touche pas dans le corridor, mais vas-y sur le matelas !» Monsieur Balan est accusé d’actes d’ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance, d’entrée et de séjour illégaux, et d’exercice illégal d’une activité lucrative. – De 2010 à 2013, vous avez résidé et travaillé en Suisse sans permis de séjour ; juste ? demande le juge. – Oui, murmure l’accusé. – Janvier 2013, à la sortie d’une disco, vous avez rencontré madame Sanchez sans veste ni sac, seule et ivre. Vous l’avez emmenée chez vous et là, les versions diffèrent : rapport consenti selon vous, viol selon elle. Donnez-nous votre version, et la bonne, car vous n’avez pas cessé d’en changer. – Mon client était effrayé, intervient l’avocat de l’accusé. Il est en situation irrégulière, il voit débarquer la police et on l’accuse d’avoir drogué, puis violé une femme. Le juge opine et invite l’accusé à poursuivre. – Je suis sorti de la disco à 4 h 30. J’étais ivre. Je l’ai vue dehors et je lui ai proposé ma veste. J’ai voulu lui appeler un taxi, mais elle a refusé et elle est venue chez moi. Dans mon corridor, je l’ai embrassée. Elle m’a dit d’arrêter. On est allés dans ma chambre, on a discuté, je l’ai encore embrassée. Elle était d’accord. On a continué, on s’est caressés et déshabillés, mais quand j’ai voulu la pénétrer, elle a dit non. Alors j’ai arrêté et on s’est endormis. – Etait-elle amorphe ou participative ? Vigousse vendredi 24 janvier 2014 Depuis, le nombre de lits en gériatrie a augmenté à Sierre, tandis que celui des lits en médecine a diminué : ça n’annonce rien de bon pour certains soins... Il faut dire que quelques prestations sierroises, dont les urgences, sont plutôt maltraitées par les modules d’organisation. Pas moins de trois responsables ont d’ailleurs rendu leur blouse blanche, deux autres menacent de le faire, l’un d’eux étant victime d’un sévère burn-out. Réduire le service des urgences à Sierre ? Le projet est à l’étude, nous confirme la conseillère d’Etat en charge de la santé, Esther Waeber Kalbermatten : « Mon département – Je n’ai pas remarqué qu’elle était amorphe. – Vous étiez si occupé à satisfaire votre propre plaisir que vous n’avez pas remarqué si elle participait aux ébats ? s’étrangle le juge. – Elle me touchait, mais on ne parlait pas. Et j’étais saoul aussi. – Vous a-t-elle dit qu’elle était vierge ? – Oui, dans le corridor. – Vous pensiez qu’elle disait « ne me touche pas dans le corridor, mais vas-y sur le matelas » ? – Dans la chambre, j’avais oublié. – Ecoutons madame Sanchez, qui ne veut pas être confrontée à son agresseur. L’accusé sort, la plaignante entre. – Racontez-nous les faits, fait le magistrat. – Je buvais un verre avec une copine. Deux types nous ont offert un cocktail, puis je sais qu’on est allées en boîte. Mais à part quelques flashes, c’est le trou noir jusqu’au matin. – Quels flashes ? – Je suis dehors, en T-shirt… il ouvre la porte de chez lui, je dis merci… quelqu’un me déshabille… il essaie de me pénétrer, j’ai mal, je dis « arrête »… je sens quelque chose rentrer en bas, je me tourne… quelqu’un entre mes jambes qui n’arrête pas de me réveiller, ça m’énerve. – Vos déclarations durant l’enquête sont plus précises. – Des épisodes me sont revenus dans mes rêves. – Je veux du concret, pas des rêves. Vous aviez 2,2 pour mille d’alcool dans le sang. Dans un tel état, on se demande ce qui est normal ou pas ! – J’ai bu des verres, comme ça m’est déjà arrivé. Mais cette fois on a mis du GHB dans mon verre, ce n’est pas possible autrement, affirme la plaignante. – Et le matin ? – Je me suis réveillée nue dans un appart sordide. Monsieur Balan est parti bosser. J’étais mal, il a demandé à son colocataire de rester avec moi. J’ai appelé la police, ils m’ont dit que je devais déposer plainte pour mon sac et faire attention à ce que je bois. Puis j’ai appelé une copine, ma mère et mon frère, qui est venu me chercher. – Des questions ? demande le juge à la cantonade. – Oui, réagit l’avocat de la défense. Durant la soirée, vos amis vous ont vue embrasser et flirter avec un homme, et en draguer un autre. – Je ne m’en souviens pas… – N’est-il pas possible que vous soyez allée chez monsieur Balan, fait des choses, avant de tout regretter le lendemain ? – Je suis presque sûre que non. Je ne vois pas pourquoi j’aurais fait ça… Je suis certaine qu’il a profité de mon état ! Reconnu coupable, monsieur Balan est condamné, avec un sursis de 3 ans, à 18 mois de peine privative de liberté moins 353 jours d’incarcération avant jugement. Lily Comment arborer un sourire hollywoodien ? En Suisse, nombre de cabinets dentaires proposent, avec l’aval de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), des séances de blanchiment. Du peroxyde d’hydrogène (eau oxygénée), un coup de laser bleu ou de lampes LED et hop, en vingt minutes c’est fait ! L’ennui, c’est que ces méthodes procurent un sourire ravageur, mais aussi un peu ravagé. Elles usent de peroxyde d’hydrogène à près de 6 % (norme fixée par l’OFSP) : une dose qui provoque douleurs de la gencive, altération de l’émail, irritation et hypersensibilité des quenottes. Le traitement est au demeurant déconseillé aux femmes enceintes et aux ados. De plus, le Comité scientifique des produits de consommation de la Commission européenne souligne que les effets nocifs n’ont pas encore été assez étudiés. Faut-il claquer 300 à 500 balles pour des crocs blancs au risque d’ensuite broyer du noir ? A l’inverse, les « bars à sourire », les salons d’esthétique et les instituts comme Smile’Up ou Extrasmile proposent, pour une petite centaine de francs, un blanchiment plutôt inefficace, où la dose de peroxyde est de 0,1 %. Le résultat est si superficiel qu’il faut remettre la compresse tous les six mois… Quant aux ridicules stylos à blanchir et autres lampes UV, gadgets à gogos disponibles sur le web pour moins de 50 francs, ils n’ont qu’un seul effet : faire chou blanc. Mais alors, comment faire pour être enfin une femme ou un homme de crocs mignons ? Simple : ne pas fumer ni boire trop de vin ou de café, et se laver les dents. Ou alors assumer et rire jaune. Noémie Matos 7 F AI T S D I V ER S E T V ARI É S La science au Kärcher Liquidation Devinette : toutes les idées scientifiques sont sur un bateau ; si chaque penseur jette à l’eau une idée qu’il n’aime pas, que reste-t-il ? Le site edge.org se présente comme un « collège invisible », sorte de « salon » virtuel où de grands esprits tiennent une « conversation » sur la science et ses rapports avec la société. On y trouve des chercheurs, des philosophes, des artistes, bref, des penseurs. Attention, pas n’importe qui ! Le fondateur du site, John Brockman, est un agent littéraire renommé qui se spécialise dans l’édition d’ouvrages scientifiques à l’intention du grand public : il connaît donc tout le gratin. Et il n’est pas là pour s’amuser ; son ambition est n'en jetez plus ! de « débusquer les esprits les plus complexes et sophistiqués » et les faire dialoguer afin « d’atteindre la frontière des connaissances mondiales ». Rien de moins. Dans ce noble but, Brockman pose chaque année une question à son auguste cheptel de matière grise, dont les réponses sont ensuite publiées sur son site, avant de faire l’objet d’un livre. Pour 2014, la question était « Quelle idée scientifique devrait prendre sa retraite ? », et comme les 174 réponses viennent de tomber, il n’est pas inintéressant d’examiner rapidement ces concepts dont on ferait désormais mieux de se pas- ser. Après tout, la science procède par changements : il faut écarter les idées qui n’ont pas fait leurs preuves afin qu’elle puisse avancer. Le grand public, lui, peut s’estimer heureux d’être mis au courant. Ainsi quelques penseurs jugent- ils, sans surprise, qu’il est temps d’abandonner les concepts d’« intelligence » et de « race », vieilleries effectivement assez encombrantes. D’autres demandent à repenser l’usage des « statistiques », trop souvent ritualisées aveuglément. Les concepts « agent rationnel », « conscience », « altruisme » et « moi » passeraient également à la trappe comme autant d’illusions électrochimiques distrayantes, mais fallacieuses. Les oppositions classiques, entre corps et esprit, acquis et inné, culture et nature, émotion et raison, sont elles aussi décriées par d’aucuns. Il faudrait par ailleurs songer, suggèrent certains, à renoncer à l’idée de « progrès » et surtout à cette vieille scie qu’on appelle encore « vérité ». La science, avancent quelques audacieux, est d’ailleurs l’affaire de tous ; donc, l’idée qu’il existe des « chercheurs » et des « scientifiques », ou même quelque chose qu’on nommerait « science », devrait aussi disparaître. Et on pourrait aussi bien liquider tout un tas de résidus métaphysiques, comme les concepts de « temps » et d’« espace » ou ceux de « causalité », de « moyenne », de « calcul », de « géométrie », d’« univers », d’« infini »… Chaque chercheur veut naturellement se débarrasser de sa bête noire. Ce qu’il y a de fascinant ici, c’est de les voir tous s’y mettre en même temps. Le plus remarquable, dès lors, n’est pas ce qu’il en ressort, mais ce qu’il en reste : rien. A croire que maintenant qu’elle a bâti sa maison de retraite, il ne reste plus à la science qu’à repartir de zéro. Ça tombe bien : aucun répondant n’a songé à récuser le concept de « vide ». Sebastian Dieguez PUB 24h/24h 365 jours par an ! 0848 852 856 Rue du Crissier 14,1020 Renens [email protected] / www.tuyaumax.ch Vigousse vendredi 24 janvier 2014 8 F AI T S D I V ER S E T V ARI É S Faces et attrapes Quoi, ma gueule ? L’application mobile Nametag vise à identifier, dans un rayon de quelques mètres, toute personne dont la bobine est en photo sur la Toile. Fin d’une société anonyme. « Zut, il me semble que je connais cette personne ; mais qui est-ce, déjà ? » Dans la rue, dans le bus ou au bistrot, cette situation parfaitement banale serait, selon les créateurs du logiciel pour téléphone portable Nametag, un abominable handicap social. Tel est donc l’argument de vente pour cette application qui permet d’identifier une bobine en corrélant un puissant outil de reconnaissance faciale et les infos glanées sur les réseaux sociaux. En attendant, cerise sur le gâteau promise par l’éditeur, d’élargir le trombinoscope aux sites de rencontres et même aux banques de données criminelles états-uniennes. Evidemment, ce nouveau machin ne sert pas qu’à remettre un nom sur un visage connu. Il permet aussi de tout savoir sur les inconnus. Génial, non ? A en croire les vidéos promotionnelles en ligne, ce véritable instrument d’agent secret est idéal pour « choisir sa proie et la séduire ». En réalité, tout ce baratin cache la volonté d’anéantir à tout prix les organismes étatiques de protection des données. Lesquels, pour l’instant, résistent tant bien que mal en obligeant, par exemple, Facebook à restreindre les algorithmes de reconnaissance faciale. Mais quand Q UELLE S EMAINE ( p a r t o u t a i l l e u r s ) ! a ff a i r e s e n c o u r t 9 Des avantages de Thaïs Depuis que les vieux existent, ils encombrent ; surtout quand ils souffrent de démence sénile. C’est sans doute pourquoi L’Illustré (15.01.14) vante une solution rêvée : expédier ces indésirables dans un merveilleux centre spécialisé… en Thaïlande. C’est loin, mais les salaires du personnel y sont très avantageux. Du coup, ça permet des soins adéquats et très humains. Alors qu’en Suisse les personnes âgées sont bouclées dans leur chambre, assommées de médicaments et sanglées à leur lit, là-bas, les soignantes leur dispensent de l’affection, elles sont disponibles, elles veillent sur leur sommeil et les rendorment 17 fois par nuit si besoin est. Selon Martin Woodtli, fondateur dudit centre, c’est culturel : les Thaïlandais prennent soin des aînés. Autant donc leur refiler les nôtres (surtout si les conditions économiques locales s’y prêtent). Et si on instaurait plutôt davantage d’humanité par ici ? S. D. Données brutes Chili con carnage tout le monde voudra son logiciel de type Nametag, les Etats deviendront totalement impuissants et les garde-fous tomberont. Il faudra donc vivre avec l’idée qu’on peut être identifié à tout moment. Que son CV, son degré d’éducation, ses habitudes de consommation, son état civil, voire la limite de sa carte de crédit ou son casier judiciaire, sont accessibles à tous les passants. Et pourquoi pas son adresse ? Tout ça facilitera certes le boulot des videurs de boîte de nuit, mais ça ne sera pas forcément un délice pour tout le monde. Pour éviter ça, ne restent que l’effort et le sacrifice, le sang, la sueur et les larmes : affronter sans trembler l’embarras terrifiant de ne pas identifier tout de suite un visage connu et, plus héroïque encore, tenter de séduire une personne sans connaître à l’avance son film préféré. Jonas Schneiter Dès le mois de mars, les Anglaises et les Galloises amoureuses auront accès au casier judiciaire de l’élu de leur cœur. Une plongée dans les archives de la police après le premier rendez-vous ? Bonjour le romantisme ! De fait, cette nouvelle loi permet de démasquer à temps les auteurs récidivistes de violences conjugales. Elle a pour origine le meurtre d’une femme, étranglée par son ami qu’elle avait rencontré sur internet et dont elle ignorait le passé. Pour l’instant, la loi ne prévoit pas la réciproque : les hommes n’auront pas accès aux éventuels antécédents judiciaires des dames. Comme s’il n’y avait aucun risque de rencontrer une femme dangereuse dans un pays qui a élu Maggie Thatcher ! J.-L. W. En plus de saloper l’un des plus beaux paysages vierges de la planète, le désert d’Atacama au Chili, le « Dakar » bousille ses sites archéologiques : les ruines de constructions précolombiennes y abondent, ainsi que les momies exceptionnellement bien conservées par les conditions climatiques (ledit désert est le plus sec de la planète). Aux archéologues chiliens qui ont dénoncé les dégâts infligés par les véhicules du rallye à ce riche mais fragile patrimoine, le gouvernement de Santiago a répliqué qu’il ne faudrait pas oublier l’essentiel : le « Dakar » rapporte des sous et ses images diffusées dans le monde entier montrent la beauté des paysages, ce qui attire les touristes, ce qui rapporte des sous. Et puis le rallye ne fait jamais que perpétuer une ancienne tradition : les conquistadores espagnols, eux aussi, détruisaient les temples et les tombes par soif de l’or. L. F. PUB PUB L’actu au passé recomposé ! Encore un privilège éhonté pour nos abonnés 15.– (au lieu de 20.– + port 2.–) Vigousse vendredi 24 janvier 2014 Les 73 chroniques « Le fin mot de l'Histoire » parues dans Vigousse depuis fin 2011, enfin réunies dans un volume compact et maniable en papier véritable. Commande : [email protected] Merci de préciser votre numéro d'abonné Vigousse vendredi 24 janvier 2014 10 B IEN P RO F ON D D AN S L ' AC T U B IEN P RO F ON D D AN S L ' AC T U LE COURRIER DU CHIEUR Les théories du professeur Junge Cette semaine : dans la foulée de la votation contre le remboursement de l’avortement, constatons pourquoi rien ne mérite d’être pris en charge par l’assurance. Les citoyens devront bientôt se prononcer sur l’initiative « Financer l’avortement est une affaire privée ». Les promoteurs du texte ne manquent pas d’arguments fort sensés pour que l’assurance maladie ne rembourse plus l’IVG. L’ancienne conseillère nationale Elvira Bader (PDC/SO) affirme par exemple que « la grossesse n’est pas une maladie ; donc l’avortement ne doit pas figurer dans l’assurance de base ». C’est finement observé, toutefois la conclusion est un brin partielle. Car si la grossesse n’est effectivement pas une maladie, on peut bien se demander pourquoi la naissance devrait être prise en charge par l’assurance. Nous tenons là un principe formidable pour atténuer les coûts de la santé. Car l’assurance couvre une flopée de choses qui ne sont pas des maladies. La vieillesse, par exemple, fait partie d’un processus naturel normal. Tous les désagréments liés à ce phénomène n’ont pas à être pris en charge par la collectivité. Aucune raison de payer pour l'alzheimer, les rhumatismes, les troubles cardiaques ou les problèmes de vue. (quelles qu’elles soient puisqu’il n’y a pas lieu d’avantager certaines croyances par rapport à d’autres). Personnellement, je trouve parfaitement scandaleux de mettre au monde des enfants sur une planète qui souffre de surpopulation et je refuse de donner un sou aux criminels qui agissent ainsi. Les vieux ne sont pas malades, ils sont décrépits, ce qui n’a rien à voir. En approfondissant cette réflexion, on peut établir que tous les soucis de santé sont inhérents au fait d’être vivant (puisque seuls les morts ne tombent pas malades), or vivre n’est pas une maladie, donc aucun acte médical ne doit figurer dans l’assurance de base. En fait, c’est le principe même de solidarité qui est débile. Pourquoi payer pour des maladies qu’on n’a pas soi-même ? Moi, par exemple, je n’attrape jamais froid parce que je me couvre bien avant de sortir. Et je devrais me montrer solidaire avec les centaines de milliers de crétins qui s’enrhument parce qu’ils ne pensent pas à mettre un bonnet ? Et puis quoi encore ? Et le cancer : pourquoi est-ce que je paierais pour ça alors que, selon mon expérience, ceux qui chopent le cancer l’ont bien cherché ? La solidarité est un concept inventé par les malades, jamais un type bien portant n’aurait eu une idée aussi saugrenue ! Autre argument intéressant, celui du conseiller aux Etats Peter Föhn (UDC/SZ) : « Personne ne doit être obligé de cofinancer des avortements contre ses convictions éthiques et morales. » Une idée qui coule de source, mais qui doit être généralisée. Les assurés n’ont aucune raison de cotiser pour des prestations qui heurtent leurs convictions Professeur Junge, phare de la pensée contemporaine Le 8e conseiller fédéral Euh… Y en a pas vraiment… Depuis son bunker sous le Palais fédéral, il dirige dans le plus grand secret le Gouvernement helvétique. Dites donc, Alain, ça a l’air sympa le truc à François Hollande. Comment je fais pour avoir aussi une actrice comme maîtresse ? Comment ça ? Ben oui quoi, il faut s’inscrire quelque part ? Vigousse vendredi 24 janvier 2014 Mais j’en sais rien. Avec votre boulot à la Culture, vous devez bien connaître des actrices suisses. Faites un effort, en plus je suis prêt, j’ai déjà acheté un casque. Et la Bernoise en bikini qui jouait dans un « James Bond », elle est libre ? Ursula Andress ? Il y a un entremetteur fédéral qui se charge de ce genre de choses ? Je ne suis pas un maquereau ! Vous êtes au courant que c’était dans un film de 1962 ? Oui, mais elles ont autre chose à faire que maîtresses pour chefs d’Etat. Y a qui comme actrices célèbres en Suisse ? C’est pas grave. Elle a 77 ans maintenant… On dira juste aux journaux à sensation d’utiliser d’anciennes photos d’elle quand ils révéleront notre liaison. Aux Nippons delphinovores Feints gourmets 20 minutes, 21.01.14 Déjà connus pour raffoler de chair de baleine, vous êtes aussi friands d’une autre viande de mammifère marin : le dauphin. Chaque année en cette période, des centaines de cétacés sont bloqués dans la baie de Taiji par des bateaux et des filets de pêcheurs avant d’être affamés des jours durant, puis exterminés, dépecés, découpés et enfin becquetés. Mondialement condamnée depuis la sortie du sanguinolent documentaire « The Cove, la baie de la honte » en 2010, cette infâme boucherie se répète pourtant inlassablement. Malgré les appels internationaux (et nationaux, car nombre de vos compatriotes japonais condamnent ces pratiques barbares !), vos autorités restent de marbre. Elles justifient cette horreur au nom de vos traditions, de votre culture. Usant du même argument, les Espagnols prennent plaisir à torturer longuement des taureaux dans leurs arènes, les Anglais se parent de leurs plus beaux atours pour d’inégales chasses à courre, les Chinois cuisinent les filets de chien aux piments et petits oignons… Quelques exemples parmi d’autres de traditions culturelles barbares qui se perpétuent aux dépens de pauvres bestioles. Mais passons. Car, outre sa cruauté, votre ancestrale coutume alimentaire pose un menu problème : les baleines et les dauphins nagent dans les eaux troubles des espèces en voie de disparition. Il serait bon, dès lors, que vous changiez vos recettes culinaires et que vous commenciez à vous faire un peu de sushi pour les cétacés. Alinda Dufey 110 Pitch La maladie imaginaire 11 Gosses de triche Règle de croix Aux Etats-Unis, les chrétiens adeptes de l’« Evangile de l’adoption », pour qui toute vie est sacrée, pratiquent l’élevage intensif de gamins. Quitte à les tuer. A l’heure où l’avortement fait débat ici et là, les évangéliques étatsuniens détiennent la solution miracle. Ces parangons de la doctrine pro-life considèrent qu’une grossesse consécutive à un viol, loin d’être un traumatisme pour la victime, est une épreuve envoyée par Dieu (dans sa grande miséricorde). Et si la mère échoue à ce la bébés attitude test, Dieu a un plan B : l’adoption. Ainsi des leaders évangéliques encouragent-ils les bons croyants à adopter en masse. Une pratique qui incidemment contribue à l’accomplissement de la Mission sacrée, à savoir l’évangélisation mondiale. Adopter un enfant, c’est le sauver deux fois : une fois physiquement, une fois spirituellement. La vie, c’est bien, la vie éternelle, c’est mieux. Dès lors, tous les moyens sont bons pour servir le projet de Dieu et favoriser ce qu’on pourrait aussi bien appeler un trafic de bébés. Des ministères, des lobbies politiques et autres agences d’adoption chrétiennes contournent ou détournent allègrement les lois en vigueur. Le problème, avec cet « Evangile de l’adoption », c’est que la demande ne tarde pas à excéder l’offre. Il faut dire que cette damnée contraception a causé la chute du nombre de grossesses indésirées depuis les années 70. Les orphelins se font rares sur le marché occidental. Heureusement, il reste les pays en voie de développement : connus pour leur richesse en matières premières, ils offrent un véritable réservoir d’enfants. Des bambins dont on ne se soucie pas forcément de vérifier la provenance et qu’on acquiert sans trop se soucier de morale fondamentale. Ainsi importe-t-on de prétendus « orphelins » dont les parents sont bien vivants mais misérables. Et donc faciles à dépouiller de leurs rejetons, quitte à leur mentir un peu : éblouis par le rêve américain, beaucoup croient en effet confier leur progéniture à des sortes de parrains temporaires. Et les agences se gardent bien de révéler aux parents biologiques la nature exacte du contrat qu’ils signent. Ne reculant devant rien pour satisfaire l’Eternel, certains vont jusqu’à exploiter les catastrophes naturelles pour récupérer des « orphelins ». Dans son édifiant ouvrage The Child Catchers. Rescue, Trafficking, and the New Gospel of Adoption, Kathryn Joyce narre la façon dont des groupes évangéliques ont écumé les ruines d’Haïti après le séisme de 2010. De toute façon, prêchent les révérends les plus zélés, toute cette marmaille déshéritée, d’où qu’elle vienne, était destinée dès la naissance à rejoindre la grande famille des croyants états-uniens, car tel était le projet de Dieu. Adopter ces mômes, c’est en réalité leur permettre de « rentrer à la maison ». Les plus fervents adeptes de l’« Evangile de l’adoption » grossissent ainsi des cheptels d’enfants : plus ils en ont, plus ils montrent la profondeur de leur foi et la puissance de leur amour. Sans compter qu’une famille très nombreuse présente l’avantage non négligeable de maintenir les femmes à la maison (à la grande satisfaction du Très Haut). Evidemment, tant de bons sentiments chrétiens finissent parfois par tourner au tragique. Il est plus facile d’accueillir Jésus dans son cœur que des mômes bien réels dans sa maison. Kathryn Joyce relate l’histoire d’enfants difficiles, turbulents ou, pire, rétifs au bourrage de crâne évangélique, que leurs parents adoptifs ont aussitôt considérés comme possédés. Les pauvres gosses ont alors été charitablement soumis à des « processus de délivrance » en forme de mauvais traitements variés qui, quelquefois, ont entraîné la mort. Mais peu importe : c’était là, sans nul doute, le projet de Dieu. Sacha Durant Vigousse vendredi 24 janvier 2014 12 CUL T URE CUL T URE Un festival Eux, les humains Kent, Agnès Bihl, Bruno Ruiz en têtes d’affiche, des artistes aussi bien nés que Marc Aymon, parrain du festival, Pierre Lautomne, Fabian Tharin, François Vé, Nico* (étoile), Ostap Bender, Frédéric Bobin et Zedrus pour compléter le plateau, Le Chant des Beaux Humains 2014 s’annonce à coup sûr comme l’un des événements majeurs de cet hiver sur la scène de la chanson francophone. En s’assurant la venue de Kent, le vendredi 24.01, Jacques S., le grand manitou de ce festival, a réalisé un coup de maître : c’est que l’ex-Starshooter, auteur notamment de Juste quelqu’un de bien, la chanson qui a fait connaître Enzo Enzo, se fait plutôt rare sur scène. A Lausanne, il présentera son 14e album, sorti l’an dernier, Le temps des âmes, à l’occasion d’un concert en forme de dialogue avec le piano de Marc Haussmann. Le samedi 25, la scène de la Maison de quartier sous-gare accueillera Agnès Bihl, chanteuse « engagée », si ce n’est enragée, l’une des plumes parmi les plus inventives de la chanson d’aujourd’hui. Son dernier album, 36 heures de la vie d’une femme (Parce que 24, c’est pas assez), offre un extravagant journal d’émotions en tous genres ; en prime, une galerie de portraits débordant à la fois d’énergie et de tendresse. Le dimanche 26, Le Chant des beaux humains accueillera Bruno Ruiz pour, là aussi, l’un des rares concerts donnés par cet artiste, poète-chanteur dont chacune des apparitions est à la fois un événement, mais aussi, surtout, une magnifique rencontre avec le public. On ne chômera pas non plus sur la scène de l’Amandier où, pendant ces trois jours, défilera ce qui se fait de mieux (et de plus beau) en matière de relève. Les détails du programme sur www.lechantdesbeauxhumains.ch Roger Jaunin Retrouvez ou découvrez Vigousse, votre petit journal satirique, tout au long de ce week-end dans le hall d'entrée de la Maison de quartier sous-gare, à Lausanne. auSCULTER Plus qu’un journal intime, une énumération sans gêne ni tabous des manifestations corporelles d’un homme de douze à quatre-vingt-sept ans. Des petits bobos aux grands mots. Journal d’un corps, une lecture de Daniel Pennac par Daniel Pennac, Arc en scènes – Centre neuchâtelois des arts vivants, Théâtre, La Chaux-deFonds, le 24 janvier à 20 h 15, www.arcenscenes.ch S’ENGAGER Une simple info dans un journal : un chinois ayant peinturluré un portrait de Mao sort de prison après 17 ans d’incarcération. Cela bouleverse Madeleine, une ancienne militante, qui reconsidère sa vie entre engagement et combat de vues. Je pense à Yu, de Carole Fréchette, par la Cie Marin, Théâtre du Pommier, Neuchâtel, les 29 et 30 janvier, www.ccn-pommier.ch SE CULTIVER Les musées du Palais de Rumine et le Vivarium de Lausanne proposent cette année un nouvel événement culturel : Ciné au Palais ! Durant deux jours, les 1er et 2 février, des films récents et en lien avec les musées seront proposés gratuitement. Un bon prétexte pour (re)voir les expos en cours. Toutes les infos sur www.cineaupalais.ch DéCONCERTER Atypique et Gare aux grilles par 1 2 3 4 5 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Vigousse vendredi 24 janvier 2014 6 égé 7 8 9 10 HORIZONTAL 1 J’y pense et puis j’oublie 2 Des nouvelles de la smala 3 Arrêtent par rets – Prix d’épris de vitesse 4 Distingue le dingue des études – Torrides, favorisent rides – Les prolos fêtent le boulot à son intro 5 Protège du 4 horizontal et central – On s’y magne avec cannes en Allemagne 6 Pas si vilaines en Ille-et-Vilaine 7 La hausse du brut brutalise son client – Un grec dans un mauvais steak 8 Perturbas même le baba 9 Torpille si électrique – A affaire à fer 10 Quand la tsé-tsé a passé. VERTICAL 1 Pour amateur de poudreuse en Rocheuses – A démarche féline en Argentine 2 Distractions en toute décontraction – On y mange 4 saisons 3 Dorée en marée – Là accumulation entre deux mictions 4 Prièrent en vain l’ami Calvin à la Saint-Barthélemy 5 Amour d’Aznavour 6 Où Napo flanqua une peur bleue à la Prusse – Faux anis pour Panisse 7 Mobile de gens mobiles – Altérée par Ferré 8 Sa troupe était en soucoupe – Utilises sans balise ni soin 9 Aplanira 10 En mer par vent arrière – Copié-collé. Solution pour les nuls dans le prochain numéro [email protected] Un film Des védés BROUILLON DE CULTURE fantaisiste, l’artiste suisse Not Vital manie aussi bien le bronze, l’argent et le marbre, et s’exprime également grâce au dessin, à la peinture et à l’estampe. Une recherche autour de l’espace (Not) Vital. Tanter. Cabinet d’arts graphiques du Musée d’art et d’histoire, Genève, jusqu’au 13 avril, www.ville-ge.ch/mah SUIVRE De 1943 à aujourd’hui, de l’exercice militaire au dépassement musculaire, la patrouille des glaciers dans tous ses états. Une course bien garnie. Patrouille des glaciers. Plus jamais… pour toujours !, exposition au Musée de Bagnes, Le Châble, jusqu’au 11 mai, www.museedebagnes.ch 13 Etoile de maître 2001 de Kubrick est, pour certains, le plus grand chef-d’œuvre du cinéma de science-fiction et, pour les autres, un truc un peu boursouflé et d’une incroyable longueur. Que ces derniers se rassurent ; il existe un antidote, une espèce d’ « anti-Odyssée de l’espace », et il s’agit de Dark Star, le premier film fauché de John Carpenter. Ecrit, joué et monté sous acides, cela donne une petite pochade subversive qui montre de manière très amusante ce qui peut se passer quand on pète un plomb au bout de plusieurs années d’espace intersidéral. Réalisé avec peu de moyens, bourré de défauts et d’acteurs moyennement talentueux, c’est néanmoins l’un des premiers scénarios de Dan O’Bannon, qui écrira juste après l’immortel Alien de Ridley Scott. Quand on a un grand réalisateur et un scribouillon de talent, les bémols se transforment en film culte du samedi soir, ne serait-ce que parce que l’ordinateur central de la capsule spatiale se prend pour Dieu. Enorme ! Michael Frei, Karloff, films cultes, rares et classiques, Lausanne Dark Star, de John Carpenter, 1974, Carlotta, Vf et Vost, DVD et Blu-ray, 80 min. Trèfle à quatre deuils Fondus chinois Le capitalisme ne laisse aucune chance aux sans-grade. En Chine comme partout. Dans A Touch of Sin, quatre personnages désarmés se révoltent avec leur armes. Plus on est de filous, moins il y a de riz ! Amer, Dahai, mineur de fond pas très en forme, s’en rend compte. Depuis que la mine où il travaille a été vendue à des privés, plus ses patrons s’en mettent plein les fouilles, plus les inégalités se creusent. Pour les ouvriers, peau de balle ! Alors Dahai explose. Coup de grisou dans les méninges ! Pétage et truffage de plomb ! Armé d’un fusil de chasse, l’homme se prend pour Charles Bronson, pour Michael Douglas dans Chute libre : il délivre sa justice aussi arbitraire et inique que celle d’en face. Mort en sursis, Dahai tire ses dernières cartouches. La réaction des trois autres protagonistes, Yo, hôtesse d’accueil dans un sauna du genre à couper les mains baladeuses, Hui, ouvrier motoboulot-dodo traçant sa route en flinguant des bandits de grand chemin, et San, qui a la dette de l’emploi et la mort dans l’âme, sera elle aussi violente, désespérée. Sang pour sang radicale. Dans A Touch of Sin, le réalisateur chinois Jia Zhang-Ke multiplie les plans d’animaux, comme pour souligner que le capitalisme sauvage, bête féroce, c’est la jungle, filme les accès de violence mieux que Tarantino, propose une réflexion, impressionnnante et dérangeante, sur le travail devenu survie, sur la brutalité sociale. La Chine n’est plus la patrie du yin et du yang, mais celle du yuan et de l’exsangue... Bertrand Lesarmes A Touch of Sin, de Jia Zhang-Ke, avec Jiang Wu, Wang Baoqiang, Zhao Tao. Durée : 2 h 10. En salles. Vendredi 24 janvier (20 h 30) Samedi 25 janvier (20 h 30) Dimanche 26 janvier (17 h) Hainard sauvage Emerveillé. Humble. Fondamentaliste. Sévère. Défenseur. Exotique. Sobre. Talentueux… Durant plus d’une heure et demie, amis, admirateurs et famille racontent le naturaliste Robert Hainard (1906-1999). Des témoignages sur ce touche-à-tout qui s’est essayé avec brio à la gravure, à la peinture, au dessin, à la sculpture, à l’écriture. Mais aussi des anecdotes touchantes et étonnantes (telle l’offrande aux renards du placenta de sa fille Marie), qui en dévoilent un peu plus sur ce grand amoureux et protecteur de la nature sauvage. PUB Plus qu’un documentaire biographique, ce film de la réalisatrice-journaliste Viviane Mermod-Gasser est un patchwork d’œuvres, d’instants de vie, de savoirfaire et de charmes du Genevois et de son épouse Germaine. Une leçon de vie et de respect « au-dessus de tout critère religieux et politique » ; un homme candeur nature. Alinda Bouluris & Lee Maddeford Immersion dans le monde de Randy Newman et Tom Waits Dufey Robert Hainard. L’art, la nature, la pensée, de Viviane Mermod-Gasser, Framevox Productions, DVD, 91 min. L’Esprit frappeur Villa Mégroz – 1095 Lutry (VD) www.livestream.com/espritfrappeur Vigousse vendredi 24 janvier 2014 14 zoom avant Sur l'info Martyr à la plage Il était une fois, dans le Royaume de Blefuscu, un bouffon qui s’appelait Bambou. Longtemps, Bambou se moqua de tout le monde et tout le monde le trouvait rigolo. Un jour, il voulut rire d’une communauté, les Chiloques. Là, il n’était plus trop drôle. Il disait que les Chiloques aimaient l’argent et le pouvoir, qu’ils se plaignaient sans arrêt. Ça devenait pénible et on commença à le trouver pas net. De plus, pendant ses spectacles, Bambou inventa un geste, « la carotte », pour se moquer du système, disait-il. La carotte était assez vulgaire. Trois entités de la société blefus- culienne décidèrent de le contrer : le roi (et ses ministres), les journalistes et les autres bouffons. Les journalistes et les bouffons de Blefuscu furent les plus systématiques. Ils pensèrent : « On va dire que Bambou est un salaud et qu’il ne nous fait plus rire. » A l’église cathodique, un bouffon populaire, Lucien Roquette, expliqua que la carotte était en vérité un signe cabalistique en hommage à Satan. Trottoir pour bien faire Les journalistes et les bouffons étaient complices. Chaque fois qu’un bouffon expliquait que Bambou était con, les journalistes applaudissaient : « Voilà qui est bien dit, quel courage, vous pensez comme nous. » Leurs intentions étaient nobles, ils se congratulaient : « Comme ça, personne dans le royaume ne pensera comme Bambou à propos des Chiloques. » Pour des raisons occultes, le contraire se produisit. Avec l’aide du diable, Bambou était-il trop fort ? Ou alors ses adversaires, stratégiquement, étaientils des gros nazes ? N’avaient-ils pas lu Martyr à la plage quand ils étaient petits ? Les voisins des Blefusculiens, des nains discrets, s’en moquaient gentiment : « Franchement, ils n’ont pas d’autres soucis ? » Ils étaient plus sages et nuancés. Enfin, pas tout à fait, dans La Semaine, une gazette importante, Christian Passoire écrivit que les amateurs de Bambou étaient tous des « collabos ». Même Clode-Ingrid Barbouille, dans Mâtin quel journal, se sentit obligée de parler de Bambou. Ce n’était pas très nuancé, ça resta discret. Stéphane Bovon Chaque semaine dans Vigousse, Jonas Schneiter traite des bidules virtuels, des accrocs sur la Toile et des applications discutables. Mais ce grand dadais écrit aussi dans l’hebodomadaire gratuit LausanneCités. Le 28 novembre 2013, il y évoquait en une « Les Espagnoles sur les trottoirs lausannois », ces victimes de la crise ibère, ces malheureuses qui viennent tapiner chez nous. A peine deux mois plus tard, il remet ça : « Après le divorce, le temps de la prostitution » (15.01.14), témoignage émouvant d’humbles femmes d’ici qui arrondissent leurs fins de mois en vendant leurs charmes. Dans les deux cas, l’auteur tient beaucoup à souligner que ces situations, contrairement aux apparences, ne sont pas « idylliques ». Rien à voir, précise-t-il, avec ces « sublimes escort-girls rémunérées des milliers de francs pour une nuit ». Une idée pour un prochain sujet, peut-être ? S. D. PUB Exclusivité mondiale. La première tablette numérique entièrement en vrai papier. CADEAUES L À TOUS ÉS N ABON Pour tout renouvellement ou nouvel abonnement, vous recevrez en bonus le recueil « Le mieux de Vigousse 2013». 88 pages, format 24 x 31 cm, valeur CHF 22.– 021 612 02 56 / [email protected] www.vigousse.ch En vente chez Payot et Naville Vigousse vendredi 24 janvier 2014 15 R e b u t S d e p r e ss e Hors-jeu à la RTS Presque une année : c’est le temps qu’il a fallu aux nombreuses instances dirigeantes, commissions, chefs, sous-chefs, sur-chefs et autres structures décisionnelles de la RTS pour traiter une très grave question, à savoir : « faut-il autoriser l’installation, dans les locaux lausannois de la radio suisse romande, d’un baby-foot destiné au personnel ? » La demande émanait de quelques salariés de la radio, soucieux de mettre en pratique les sains préceptes directoriaux sur la dynamique de groupe, la motivation collective, la culture d’entreprise et autres précieux concepts tels qu'« un employé heureux est un employé plus productif ». Les requérants pensaient donc qu’un baby-foot, avec en plus la perspective du Mondial cet été, pourrait s’inscrire dans une telle logique. L’affaire a parcouru et mobilisé les étages hiérarchiques, à Lausanne, puis à Genève. Elle a été traitée par la « commission de santé », qui n’a pas émis d’opposition. Les hautes sphères en ont débattu. La réponse est tombée par courriel le 20 décembre 2013 : signé par un chef basé à Genève, Hansruedi Buff, Chef Facility Management FM (en langage de Suisse romande, dont la RTS a pour mission de défendre la culture), le message « informe qu’il ne sera pas possible d’installer un baby-foot dans les locaux de la RTS à Lausanne, ni dans d’autres locaux de la RTS ». Et de préciser : « Cette décision a été prise par la direction après mure [sic] réflexion et en tenant compte d’autres demandes similaires pour lesquelles nous avons répondu négativement. En plus, il nous manque continuellement de la place et de la surface sur toutes [resic] les sites. » Ainsi s’achève la saga du baby-foot. Informés de ce verdict par voie hiérarchique, les employés lausannois à l’origine de l’initiative se déclarent très déçus et suggèrent de reconsidérer une décision qu'ils peinent à comprendre. Reste que ce sont eux qui, dans cette affaire, ont commis la première des absurdités incompréhensibles : demander l’autorisation ! Vigousse Il faut sauver Closer LE CAHIER Un blog relayé par Mediapart révèle les chiffres de l’aide à la presse en France pour 2012. Ainsi, pour son précieux apport à la démocratie, le magazine Closer a touché l’équivalent de 688 000 francs suisses... Seppi, c’est pire ! Par ailleurs, l’auteure du blog, la conseillère régionale de Rhône-Alpes Corinne Morel Darleux, s’étrangle en apprenant que les journaux voués à la seule publication des grilles de programmes télévisés empochent des subventions. De Télé 7 Jours (8,6 millions de francs) à Télé Star (6 millions) en passant par Télé Loisirs (5,6 millions), elle estime que l’aide de l’Etat n’est pas toujours distribuée en fonction de l’intérêt public... Heureusement, parmi les 200 titres qui palpent des sous, figurent aussi Le Monde (23 millions de francs), Le Figaro (presque autant), Libération (12,4 millions) ou Le Canard enchaîné (près de 700 000 francs). En Suisse, l’aide à la presse ne fâche personne, elle donne un petit peu à tout le monde. Sauf bien sûr à Vigousse. J.-L. W. Pense-bêtes 24 heures consacre sa une et une pleine page au succès des « communicateurs animaliers » (20.01.14). Grâce à la télépathie et aux « ondes alpha », l’expert traduira les états mentaux, angoisses, désirs et ambitions des compagnons à quatre pattes. Mieux encore, on apprend que ça marche aussi avec les animaux morts et les insectes, mais que « les infos seraient plus basiques avec une mouche qu’avec un chat ». Des sornettes dans un quotidien romand, c’est tristement banal. Ce qui l’est moins, c’est que le président de la Société vaudoise des vétérinaires souscrit à ces inepties ; il compte même recenser « les personnes sérieuses qui font cela ». La SPA de SaintLégier est enthousiaste elle aussi : elle a souvent recours à ces charlatans « pour connaître le passé des animaux qu’elle recueille ». Et la société vaudoise pour la protection des animaux semble se foutre complètement qu’on exploite ainsi la crédulité des amis des bêtes. Le philosophe Ludwig Wittgenstein écrivait que « si un lion pouvait parler, nous ne pourrions pas le comprendre ». Pas étonnant qu’il n’ait jamais fait la une du 24 heures… S. D. DES SPORTS Sepp Blatter est plus vert que jamais. C’est que, voyez-vous, l’inamovible patron du football mondial est amoureux. Et il dit, l’œil toujours aussi malicieux, qu’« il n’y a pas d’âge pour cela ». Le sien, d’âge, 78 ans en mars prochain, ne semble en effet pas faire problème… même si l’élue, elle, en avoue 28 de moins. Mais sait-on jamais avec femme coquette… Toujours est-il que notre empereur des alpages valaisans se sent des envies. Changement d’herbage réjouit les veaux, dit le proverbe ; on sait aussi qu’en matière de pré du voisin – celui où le gazon est toujours plus beau – le Seppi n’a jamais manqué d’aller s’y promener. Passons. Après tout, être un président influent ne favorise-t-il pas les rencontres ; et ne donne-t-il pas droit à certains privilèges ? Tais-toi, François ! Le pire, dans ce requinquage, c’est que cette poussée d’adrénaline lui a donné des idées, à Sepp Blatter. Tenez : celle de se présenter à sa propre succession lors de la prochaine élection à la tête de la FIFA, en 2015. Du coup, c’est l’affolement dans la volière. Candidat non encore déclaré, Michel Platini a promis de « ressortir quelques dossiers jusque-là enterrés ». Mieux, un certain Jerôme Champagne, ex-vice-secrétaire général de la FIFA, s’est découvert de nouvelles ambitions en indiquant, lui, qu’il jugeait « nécessaire d’en finir avec la crise de gouvernance ». Si ce n’est pas une attaque frontale, ça… Confortablement installé sur son nuage, Blatter n’a pas bronché. Mais, c’est sûr, la riposte ne saurait tarder. Le vieil homme est tout (lune de) miel, tout sucre et, question champagne, il ne pense pour l’heure qu’à le sabrer. Pour le reste, on ne saurait trop conseiller à ses futures victimes de mettre les casques. Et ce sera tout pour cette semaine. Roger Jaunin Vigousse vendredi 24 janvier 2014 16 { B é B E RT D E PLONK & REPLONK } LA S UI T E AU P ROC H AIN NUM É RO Professeur K., voyance infralucide Klaus Schwab est un type brillant. Né en Allemagne en 1938, il a décroché un doctorat à l’EPFZ en 1966, un autre en sciences économiques à Fribourg en 1967, un master en administration publique à Harvard en 1967 aussi. Et en 1971, il a fondé le World Economic Forum (WEF). Après quoi il a moissonné sur la planète entière une flopée de doctorats et de chaires de professeur honoris causa, de médailles et de rubans, de prix et autres prestigieux hochets. Des esprits perfides pourraient persifler qu’inviter chaque année le gratin mondial à la sauterie de Davos, ça aide. De fait, Klaus Schwab préfére- rait perdre un bras plutôt que de renoncer à son heure de gloire annuelle : le bla-bla d’ouverture du WEF, lequel a pour modeste devise d’être « engagé pour améliorer l’état du monde ». On n’ose imaginer l’état du monde aujourd’hui si, 44 ans de suite, les grands Vigousse vendredi 24 janvier 2014 décideurs visionnaires n’étaient pas venus dans les Grisons s’en occuper une semaine. Des décennies durant, ces guides éclairés ont prôné la croissance et le libéralisme à tout crin, n’affichant qu’indifférence ou dédain envers les écolos, les tiers-mondistes et autres nuisibles dont les manifs puériles, grâce aux barbelés, à la police et à l’armée suisse, ne pouvaient heureusement gâcher l’ambiance du Forum. En 2001, certains de ces benêts arriérés sont allés bricoler un machin alternatif à Porto Alegre. Ridicule. A Davos donc, les gens sérieux et visionnaires vantaient le capitalisme, ils traçaient l’avenir du monde, ils combattaient la misère et ils faisaient des affaires. L’année d’après, ils déploraient que la misère n’avait aucunement régressé et ils faisaient des affaires. Après la crise mondiale de 2008, qu’ils n’avaient pas prévue, ils ont prévu de « moraliser le capitalisme ». En 2014, le WEF met l’accent sur le dérèglement climatique, le fossé grandissant entre riches et pauvres, les crises alimentaires, l’accès à l’eau. Les mêmes thèmes, curieusement, qu’à Porto Alegre il y a treize ans ou dans les manifs depuis trente ans. Finalement, les visionnaires, c’était qui ? Laurent Flutsch C'EST ARRIVÉ LA SEMAINE PROCHAINE (ou du moins ça se pourrait bien) Stanmania Wawrinka : son rasoir témoigne Stanmania Wawrinka : son compte BCV raconte Stanmania Wawrinka : ses chaussettes sèchent Vigousse Sàrl, rue du Simplon 34, CP 1499, CH-1001 Lausanne > www.vigousse.ch > [email protected], tél. +41 21 612 02 50 Directeur rédacteur en chef : Barrigue Rédacteur en chef adjoint : Laurent Flutsch Chef d’édition : Roger Jaunin Journalistes : Alinda Dufey, Jean-Luc Wenger Correction : Victor Gagnaux Abonnements : [email protected] > Tél. +41 21 612 02 56 Publicité : REGIPUB SA, av. de Longemalle 9, CP 137, 1020 Renens 1, tél. 021 317 51 51, contact@ regipubsa.ch – MEDIALIVE SA, Œtlingerstrasse 10, 4057 Bâle, tél. 061 561 52 80, [email protected] Layout et production : www.unigraf.com Impression : CIR, Sion > Tirage : 13 000 ex.